Le Défenseur des droits a publié, le 24 avril 2024, une étude intitulée "Dénoncer les discriminations vécues à l’université", réalisée en partenariat avec l’Institut national de la jeunesse et de l'éducation populaire (Injep).
Une sous-déclaration des situations de discriminations à l'université
Menée auprès d’étudiants et de membres du personnel, cette étude met au jour les "obstacles significatifs" qui entravent les démarches de signalement des discriminations à l'université, malgré l'essor des politiques de promotion de l'égalité "depuis quelques années".
Il en résulte une "attitude fataliste" du côté des étudiantes et des étudiants (seuls 13,2% signalent une discrimination subie, contre 46,5% des personnels), associée à une faible connaissance des dispositifs à solliciter, mais aussi à un sentiment d'illégitimité à faire prévaloir ses droits. On observe une dynamique similaire chez les membres les plus précaires du personnel (maîtres de conférences stagiaires, contractuels, docteurs en recherche de poste...). L'expérience syndicale, ou la socialisation militante et politique, favorisent cependant le signalement des situations discriminatoires.
L'institution universitaire, entre inaction et "arrangements informels"
Lors des rares signalements, l'inaction de l'institution semble courante face à certaines situations, accroissant le sentiment d'impuissance de nombre de victimes. C'est notablement le cas pour les violences sexistes et sexuelles, mais aussi racistes, qui sont nettement moins signalées. Pourtant, des dispositifs existent : droit disciplinaire (pour les agents publics et les étudiants), mesures conservatoires, sanctions allant du blâme à la révocation.
Mais les enquêtes internes sont extrêmement rares (3,8% côté étudiants, 6,5% pour le personnel).
Les signalements institutionnels donnent le plus souvent lieu à des "arrangements informels" (éloignement des victimes, sans sanction des faits et de leurs auteurs, hors de tout cadre réglementaire), voire parfois à des formes de représailles à l'encontre des personnes ayant subi des faits discriminatoires.
Le rapport souligne aussi les "effets délétères" d'une telle situation sur les victimes, et au-delà, sur l'institution universitaire. Les discriminations perdurent, avec des conséquences néfastes pour les individus et leurs trajectoires : arrêt des études, changement de poste, séquelles physiques ou encore psychiques.
Des dénonciations hors de l'institution ?
L'absence de tout signalement des traitements discriminatoires, même informel, domine. Parfois, la seule option praticable est une révélation auprès des pairs sur le mode du "blame and shame". Très peu de victimes divulguent publiquement les faits de discrimination (réseaux sociaux, blogs, presse…).
Les actions en justice représentent une solution de "dernier recours" et tendent à augmenter avec la nature violente des faits.