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France Télévisions : une situation financière "critique" relève la Cour des comptes

Temps de lecture  5 minutes

Par : La Rédaction

La Cour des comptes fait le constat d'une situation financière "critique" pour France Télévisions malgré les restructurations opérées au cours de la période observée (2017-2024). La Cour invite l'entreprise publique à adopter une trajectoire financière plus rigoureuse et à consolider son unification.

Malgré les restructurations successives et des économies réalisées sur les programmes, la Cour des comptes alerte sur la situation financière actuelle de France Télévisions, dont les déficits de résultats nets s'accumulent sur la période observée (-256 millions d'euros au niveau de l'entreprise de 2017 à 2024).

Parmi les causes identifiées, le rapport de la Cour des comptes, publié le 23 septembre 2025, pointe un cadrage budgétaire de l'État et des parlementaires "instable", mais aussi des causes structurelles comme les charges d'exploitations trop élevées et certaines "rigidités" en matière de gestion des ressources humaines.

Un risque comptable de dissolution

Le budget de France Télévisions repose sur trois sources de financements : 

  • les concours publics (dotations de l’État, environ 2,5 milliards d’euros) ;
  • les recettes propres (principalement la publicité), entre 13% et 17% du total de ses ressources ;
  • les autres recettes (ventes de prestations et de services de France Télévision distribution, dividendes de la société civile immobilière, exploitation de studios de production...).

Les restructurations opérées (création d'une entreprise unique, rassemblement de marques du groupe sous les appellations France.tv et france.info, fusion des rédactions nationales, montée en puissance des plateformes numériques...) ont permis une diminution des coûts et une meilleure maitrise des effectifs (-10%) observe le rapport. 

Cependant, la situation financière actuelle, si elle est liée en partie à des investissements parfois non compensés par les dotations publiques, fait courir un risque comptable de dissolution de l'entreprise, les capitaux propres de l'entreprise étant inférieurs de moitié au capital social de l’entreprise.

La Cour des comptes relève certains facteurs externes qui ont concouru à l'accumulation de pertes de résultats nets sur la période observée : 

  • un cadrage budgétaire, défini par l’État et les parlementaires, "instable" (baisse de la dotation du ministère de la culture, plan d’économie de 160 millions d’euros entre 2018 et 2022, relance budgétaire en 2023 et 2024) qui a pu conduire à "un manque de visibilité préjudiciable à la gestion de l’entreprise et à la définition des orientations" ;
  • des recettes de publicité difficiles à anticiper car dépendantes de la conjoncture (crise sanitaire, crise des Gilets jaunes, hausse des recettes en période de Jeux Olympiques).

La Cour pointe aussi des facteurs plus "structurels", parmi lesquels :

  • le poids des charges d’exploitation notamment pour les charges de personnel et les coûts d’achat des programmes qui constituent les deux tiers de ces charges ;
  • une rigidité en matière de gestion des ressources humaines qui tient, selon la Cour, au maintien des accords sociaux de 2013 qui limitent les marges de manœuvres de la direction.
  • une insuffisance de suivi de certains coûts (notamment au niveau de la direction de l'information). 

 

Chiffres clés 2024 

Chiffre d’affaires : 3,3 milliards d'euros (Md€), dont 2,6 Md€ de ressources publiques et 500 millions d'euros (M€) de recettes publicitaires

Nombre d’ETP : 8 932 dont 7 671 permanents parmi lesquels un tiers de journalistes et 1 261 non permanents

Masse salariale : 658,5 M€    

Dépenses de personnel : 962,2 M€ 

Budget de programmes : 1,02 Md€ de droits acquis et 821 M€ de droits audiovisuels

Coût de la grille : 2,2 Md€ 

Part d’audience : 29,8 % pour le groupe, 15,8 % pour la chaîne France 2 

Plateformes : 35 millions de visiteurs uniques par mois (France.tv), 217,3 millions de vidéos vues (franceinfo)  

Réseaux : 13 délégations régionales, 9 antennes outre-mer, 9 antennes à l’étranger

Parc immobilier : 295 000 m² 

Revoir le cadre social et poursuivre la transformation numérique

Face à cette situation, la Cour des comptes formule une série de recommandations, dont, en premier lieu, une meilleure maîtrise de la masse salariale qui passerait par une remise en question des accords sociaux (classification des métiers trop "figée", dispositions sociales trop avantageuses, avantages en nature...).    

Le rapport constate la bonne santé des audiences (France Télévision en tête des groupes médias avec 29,8% de part d’audience devant TF1) et salue les transformations structurelles opérées vers une convergence des médias et autour du numérique.

Cependant, la Cour note que certaines synergies sont encore à trouver pour gagner en productivité (par exemple entre les directions techniques ou encore entre les médias télé et radio, au plan local ou national). Pour y parvenir, elle incite la direction du groupe France Télévisions à poursuivre la mutualisation des moyens matériels et humains et à engager des "réformes du cadre de gestion des ressources humaines".

Le rapport mentionne enfin la reprise en juin 2025 de l'examen parlementaire d'une proposition de loi dont l'un des objectifs serait la création d'une holding France Médias rassemblant les entités Radio France, France Télévisions, France Médias Monde ainsi que l'Institut national de l'audiovisuel (INA).

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