En France, quelque 2 500 enfants sont diagnostiqués porteurs d'un cancer, entre 1,5 million et 4 millions seraient atteints d'une maladie chronique. Près de 560 000 enfants sont en situation de handicap.
La détection d'une maladie grave ou d'un handicap chez un enfant constitue un bouleversement immense dans la vie familiale, auquel s'ajoutent des difficultés administratives et financières souvent considérables pour les parents concernés (difficultés de paiement des loyers ou des échéances de crédits, menaces d'expulsion ou de saisies…).
Des aides existent : le congé de présence parentale (CPP), l'allocation journalière de présence parentale (AJPP) et l'allocation d'éducation de l'enfant handicapé (AEEH).
Depuis 2017, plusieurs évolutions législatives ont amélioré le quotidien des familles concernées :
- la loi du 8 mars 2019 pour une plus grande prise en charge des cancers pédiatriques par la recherche et le soutien aux aidants familiaux ;
- la loi du 17 décembre 2021 sur l'accompagnement des enfants atteints de pathologie chronique ou de cancer ;
- la loi du 19 juillet 2023 qui est venue renforcer la protection des familles d'enfants atteints d'une maladie ou d'un handicap ou victimes d'un accident d'une particulière gravité.
Toutefois, de nombreuses difficultés demeurent : lois non appliquées par défaut d'organisation ou manque de moyens mais aussi failles persistantes dans le droit.
Cette proposition de loi transpartisane entend les combler. Elle a été travaillée avec l’association Eva pour la vie et la fédération Grandir Sans Cancer, qui rassemble près de 100 associations, de nombreux médecins et professionnels spécialisés sur tout le territoire. Cette collaboration a permis aux députés d'enrichir le texte afin de prendre en considération les difficultés du quotidien rencontrées par de nombreuses familles d’enfants malades et de répondre à leurs attentes.
L'essentiel de la proposition de loi
Les aides au logement et à l'hébergement
Le texte étend le droit à une aide de la collectivité, notamment des départements, pour accéder à un logement décent (prévue par la loi du 31 mai 1990 dite "Besson" sur la mise en œuvre du droit au logement) aux personnes ou familles éprouvant des difficultés particulières en raison de l’état de santé d’un enfant à charge atteint d’une maladie ou d’un handicap ou victime d’un accident.
L'accès au dispositif d'hébergement temporaire non médicalisé (HTNM, ou hôtels hospitaliers) est par ailleurs élargi aux parents ou responsable légaux d'enfants atteints d'une affection grave hospitalisés. Les frais associés seront pris en charge par l'assurance maladie. L'hébergement pourra être proposé dès lors que la situation personnelle des parents ou des responsables légaux le justifient, en particulier lorsque leur lieu de résidence est éloigné de l'établissement de santé et/ou que des contraintes matérielles limitent leurs possibilités de se déplacer pour se rendre auprès de l'enfant aussi souvent que nécessaire.
Les gestionnaires des parkings des établissements de santé publics devront garantir la gratuité du stationnement aux parents d'enfants gravement malades, handicapés ou accidentés hospitalisés, pendant la durée de l'hospitalisation.
L'interdiction de non-renouvellement du bail des locataires âgés de plus de 65 ans, prévue par la loi du 6 juillet 1989 tendant à améliorer les rapports locatifs, est étendue aux parents locataires sans conditions d'âge ni de ressources dont l'enfant à charge est gravement malade.
La prise en charge des soins
La proposition de loi prévoit que l'accompagnement psychologique des enfants gravement malades n'est plus soumis au plafonnement de douze séances intégralement prises en charge par l'assurance maladie.
Dans le cadre des prescriptions du protocole de soin d'un enfant atteint d'une affection grave, elle pose le principe d'un reste à charge zéro, notamment pour les dépenses liées au recours à un auxiliaire médical (ergothérapeutes, psychomotriciens…), qui seront donc intégralement prises en charge.
L'AJPP
La proposition de loi modifie le code de la consommation pour mentionner la possibilité pour les bénéficiaires de l'AJPP de demander au juge la suspension de leurs obligations de remboursement de crédits à la consommation ou de crédits immobiliers.
Le délai de renouvellement de l'AJPP est porté entre 3 et 14 mois (il est de 6 à 12 mois actuellement). Cela permettra aux parents qui sont dans l'obligation de s'arrêter entièrement de travailler pour s'occuper d'un enfant gravement malade et d'utiliser le quota de 310 jours sur chacun des jours ouvrés (soit 14 mois) de ne pas avoir à renouveler une demande pour 2 mois. Par ailleurs abaisser le délai minimal de 6 à 3 mois permettra à des parents de bénéficier de l'AJPP dans le cas de certaines chirurgies importantes nécessitant de la rééducation, impliquant de s'arrêter 3 ou 4 mois afin d'accompagner l'enfant, ce qui n'est pas le cas actuellement.
À partir du 1er janvier 2026, l'AJPP pourra être partagée entre les deux parents en cas de garde alternée, à la condition que les parents bénéficient déjà, le cas échéant, d'un partage des allocations familiales et qu'ils remplissent les conditions prévues pour l'attribution du complément pour libre choix du mode de garde en cas de garde alternée.
L'AEEH
À l'initiative des députés, une expérimentation d'un an dans 20 départements est prévue pour accélérer les délais de traitement des demandes d'AEEH, selon la règle de "silence vaut acceptation". Ainsi, le silence gardé pendant plus de deux mois par la commission chargée de la demande d'AEEH vaudrait décision d'acceptation de celle-ci.
De plus, une externalisation de l'ouverture des droits des maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) vers 20 centres ressources identifiées par l'ARS (centres hospitaliers notamment) serait mise en place. Ces centres, dans le cadre d'une contractualisation avec les MDPH et les caisses d'allocations familiales (CAF), pourront transmettre directement à la CAF l'ouverture automatique d'un "panier-socle" de droits à l'attention des familles, comportant une AEEH avec complément 4 et le cas échéant une carte mobilité inclusion (CMI) stationnement. Cette ouverture sera réalisée dans l'attente d'une décision de la commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées (CDAPH), au sein de la MDPH. Dans le cas d'une évaluation plus restrictive, aucun indu ne sera demandé aux familles. Dans le cas d'une évaluation moins restrictive, un rappel sera opéré.
Les mesures pour les salariés
Par amendement, les députés ont modifié le code du travail pour interdire les pratiques discriminatoires dans le cadre d'un recrutement ou de l'emploi envers les parents d'enfants gravement malades, en complément de ces mêmes discriminations lorsqu'elles sont liées au genre ou à l'état de santé.
Un autre amendement a augmenté la durée du congé pour survenue d'un handicap ou d'une pathologie chronique de l'enfant à 15 jours ouvrés, ce qui correspond à 3 semaines (contre 5 jours aujourd'hui).
Demande de rapports
Enfin, les députés ont demandé au gouvernement :
- un rapport d'évaluation du champ d'application de la loi, dans les 6 mois suivant sa promulgation, et étudiant les pistes d'élargissement à la prise en charge par l'État et la sécurité sociale de l'ensemble des frais, directs ou indirects, supportés par les parents d’enfants atteints de cancers, de maladies graves ou de handicaps ;
- un rapport sur les incidences du cumul de l'AEEH et ses compléments avec l'AJPP afin de mieux prendre en charge les frais induits par une cessation d'activité des parents.
Le Sénat doit à présent examiner la proposition de loi.
Cette page propose un résumé explicatif du texte pour le grand public. Elle ne remplace pas le texte officiel.