Texte intégral
Monsieur le Président,
Monsieur l'Ambassadeur,
Mesdames, Messieurs
Je suis heureux de me retrouver parmi vous avec plusieurs chefs d'entreprises venus de France, dans cette ville de Shanghai dont le dynamisme et l'ambition préfigurent le rôle qu'est appelé la Chine dans l'avenir. J'ai été accueilli hier chaleureusement par le Premier-vice Maire, M. Chen Lianyu et rencontrerai tout à l'heure, M. Xu Kangdi, Maire de Shanghai dont la volonté est de faire de sa ville un centre économique, financier et maritime. Je ne suis donc pas surpris que Shanghai ait su séduire nos entreprises, comme elle me séduit.
L'effort de vos entreprises, ici même à Shanghai et dans le reste de la Chine est essentiel pour la construction de l'avenir des relations entre nos deux pays, entre l'Europe et la Chine, entre la Chine et ses grands partenaires internationaux.
Ma visite se déroule à la veille de la conférence ministérielle de Doba qui doit couronner l'accession de la Chine à l'OMC. Cette accession représente le franchissement d'une étape historique fondamentale qui marquera aussi d'une certaine façon l'effort de vos entreprises pour contribuer à la réussite de la politique d'ouverture initiée par les autorités chinoises il y a plus de 20 ans. Le lien que la Chine s'apprête à nouer formellement avec l'OMC revêt quatre dimensions, qui représentent pour nous, Français, autant d'objectifs politiques importants : la croissance de la production par l'ouverture aux échanges, le développement durable, le gouvernement du droit, la régulation de l'économie mondiale. Je souhaite y revenir rapidement.
La croissance par l'ouverture aux échanges
L'ouverture économique est au coeur de la croissance mondiale et de la croissance chinoise. Nous savons qu'avec l'ouverture initiée depuis 1945, le revenu mondial a été multiplié par 9 alors qu'il n'avait que triplé sur la première moitié du XXe siècle. Nous savons également que depuis vingt ans les échanges mondiaux progressent deux fois plus vite que le revenu. Depuis 1978, la Chine a mis en oeuvre une stratégie d'ouverture économique : le PIB chinois quintuplé, la Chine est désormais la 6e puissance économique mondiale.
La contribution de l'extérieur à la croissance chinoise s'est révélée déterminante.
- Le flux annuel d'investissements étrangers a démarré à 1Md USD en 1980, il devrait atteindre 45 Mds USD en 2001.
- Le commerce extérieur a été multiplié par 7 en 15 ans, et devrait atteindre 500 Mds USD en 2001.
- Le secteur privé, pratiquement inexistant en 1978, est maintenant à l'origine de la moitié de la croissance annuelle du revenu.
L'entrée de la Chine à l'OMC confirme la pertinence de ce choix stratégique. Vous n'avez pas bien sûr attendu l'entrée formelle de la Chine à l'OMC pour comprendre et soutenir ce choix. Vous l'avez préparé et vous allez maintenant l'accompagner.
- Depuis 10 ans en effet, la part de la Chine dans le commerce extérieur français a doublé et nos échanges s'élèvent aujourd'hui à plus de 13 milliards d'euros, chiffre désormais très proche de celui de notre commerce avec le Japon. La France conserve un déficit commercial avec la Chine, mais nos exportations progressent de manière dynamique. Ce mouvement sera accentué par la mise en uvre des engagements chinois à l'OMC, par exemple la réduction à 9 % des droits de douane moyens sur les produits industriels.
- Les investissements français en Chine se sont accélérés depuis 1996 pour atteindre 200 M par an. Sur Shanghai, les implantations françaises ont été multipliées par 10 en 10 ans : nous comptons ici 300 entreprises, soit le tiers du total des implantations françaises en Chine. La mise en oeuvre des engagements de l'OMC exercera son impact sur les décisions de vos entreprises, au moment où l'on observe un développement des stratégies d'implantation pour répondre aux besoins des nouveaux consommateurs chinois, par rapport aux stratégies de délocalisation et réexportation de la production.
- Votre effort sur ce marché a été appuyé par nos quatre Missions Économiques en Chine (Pékin, Shanghai, Canton et Hong Kong). Celles-ci continueront à améliorer la qualité de leur service. Nos missions économiques alimentent également notre dialogue bilatéral et notre coopération avec les autorités chinoises. Une des manifestations importantes de cette coopération sera la grande exposition " France-Chine 2001 " qu'inaugurera prochainement François Huwart à Pékin et à laquelle participeront 150 entreprises françaises.
Le développement durable
Les accords de l'OMC veulent servir les objectifs d'élévation du niveau de vie, le plein emploi t le développement durable. Cet objectif est central pour les autorités chinoises. N'oublions pas que le revenu moyen par habitant en Chine continentale a été multiplié par cinq entre 1978 et aujourd'hui avec environ 800 USD.
En s'ouvrant aux échanges économiques extérieurs la chine permet précisément aux entreprises françaises de contribuer au plein emploi et au développement durable. Ce sont plus de 150 000 personnes qui sont aujourd'hui employées par les filiales de nos groupes, à des salaires d'ailleurs supérieurs, en moyenne de 50 % à ceux des entreprises chinoises.
Outre l'élévation du niveau de vie, le développement durable passe par la satisfaction de besoins de base des populations tout en préservant les facultés des générations futures Les entreprises françaises sont soutenues par notre coopération financière : depuis 1998, la Chine a reçu près de 330 millions d'euros de crédits d'aide français. Je citerai quelques exemples :
- l'énergie : la technologie française a contribué avec succès à la réalisation des centrales nucléaires de Daya Bay et de Ling'Ao, que je viens de visiter. Les entreprises françaises n'ont pas hésité à mettre en uvre des modes de gestion publique innovants : elle ont pas exemple été les premières à réaliser un montage de type BOT en Chine pour la centrale électrique de Laibin B en 1997. Elles veulent être pionnières pour l'ouverture de la distribution du gaz à Shanghai.
- l'environnement : les entreprises françaises sont à la pointe de l'innovation, que ce soit dans le domaine du traitement de l'eau ou des déchets. C'est une entreprise française qui a collaboré à la construction du premier incinérateur de déchets en Chine. Une autre apporte son expertise en matière de maîtrise des inondations, aspect déterminant pour les populations rurales et l'aménagement du territoire.
- l'éducation et la formation : l'une de nos entreprises, basée à Shanghai, offre ses formations à destination des nouveaux managers et participe ainsi activement à la restructuration du secteur public chinois.
- la santé : les entreprises françaises ont équipé plusieurs hôpitaux en Chine, dont l'hôpital central de Huangpu. Maintenant, nous soutenons leurs efforts de s'implanter dans les villes du centre et de l'ouest de la Chine, souvent moins dotées en matériel médical que les villes côtières.
- les transferts de technologie, par leurs sociétés communes, entreprises françaises et chinoises favorisent le développement en Chine de techniques industrielles innovantes comme le montre notre coopération industrielle exemplaire en matière de transports urbains à Shanghai.
La primauté du droit
L'OMC est le lieu où se négocient et s'appliquent des règles pour les échanges économiques internationaux. Ces règles sont le socle sur lequel se bâtissent vos efforts pour développer notre coopération économique.
Nous savons que la différence des systèmes de droit et d'administration entre la Chine et nos sociétés a souvent nécessité un important effort d'adaptation. Beaucoup de nouveaux venus ont su tirer des enseignements des expériences pionnières : je pense notamment à plusieurs PME qui abordent le marché chinois avec un grand professionnalisme.
Ce qu'apportera l'entrée de la Chine à l'OMC ce doivent être des règles mutuellement acceptées et appliquées ; Celles-ci favoriseront la consolidation de votre présence et son essor.
Les engagements souscrits vis-à-vis des Membres de l'Organisation - non discrimination, accès au marché, limitation des monopoles, encadrement des subventions, protection de la propriété intellectuelle - sont autant de gages donnés par les autorités chinoises que le mouvement d'ouverture se poursuivra et sera transparent. Le projet d'un cycle de négociations multilatérales, s'il aboutit, devrait permettre de poursuivre le mouvement de réduction des barrières aux échanges, et en particulier des barrières tarifaires. Les négociations sur les services donneront à la France, troisième exportateur mondial de services, la possibilité de faire valoir ses compétences dans des secteurs aussi importants que les télécommunications, les services environnementaux, les services financiers ou les services aux entreprises.
Nous devrons évidemment être attentifs au respect des engagements prix. Nous veillerons tout particulièrement, comme nous l'avons fait dans la négociation d'accession, en particulier dans le secteur de l'assurance, à ce que l'équité de traitement soit effective.
Cela veut dire aussi que les entreprises françaises devront faire face à une concurrence plus active sur le marché chinois, car le principe de l'OMC est l'octroi des mêmes avantages à tous, sans discrimination. J'ai confiance dans votre capacité à relever ce défi ici, comme vous le faites en Europe et sur les autres continents.
La régulation de la mondialisation
En intégrant la Chine au nombre de ses membres, l'OMC va changer d'échelle. En étendant la portée de son action de régulation et de dialogue économique à un quart de l'humanité qui n'y participait pas, l'organisation va prendre une ampleur véritablement mondiale.
Ce rééquilibrage en faveur d'une participation accrue des pays émergents et en développement à la régulation mondiale, par le biais de instances internationales, est au coeur de nos préoccupations. Nous aurons dans les années à venir à poursuivre cet effort dans les institutions sectorielles internationales, mais aussi, dans les organes internationaux de concertation politique sur les grands choix de politique économique.
Au moment où elle accueillera la Chine, la Conférence ministérielle de Doba aura aussi et d'abord pour objectif de lancer un cycle de négociation global : global veut dire, que la France et l'Europe, une démarche volontaire visant à conjuguer l'effort d'ouverture économique, l'approfondissement de la régulation internationale et le soutien au développement. Pour y parvenir, ne cachons pas qu'il reste des progrès à accomplir, en particulier dans le domaine agricole, social et environnemental. J'espère que nous réussirons à accomplir ces progrès car ces objectifs, qui sont ceux que reconnaît l'OMC, ceux que la France veut promouvoir, ce sont aussi les vôtres, comme vous le montrez quotidiennement dans votre effort en Chine. Je veux, en conclusion, vous féliciter chaleureusement.
(Source http://www.minefi.gouv.fr, le 13 novembre 2001)