Déclaration de Mme Elisabeth Guigou, ministre de l'emploi et de la solidarité, sur l'insertion des jeunes sans qualification dans l'entreprise, Paris le 19 février 2002.

Prononcé le

Intervenant(s) : 

Circonstance : Signature du renouvellement de l'accord-cadre en faveur de l'insertion des jeunes sans qualification entre le Ministère de l'emploi et de la solidarité et Reanult S.A. à Paris le 19 février 2002

Texte intégral

  • 1 - L'accord cadre entre le Ministère de l'Emploi et de la Solidarité et RENAULT illustre la priorité accordée à l'emploi des jeunes par tous les gouvernements de gauche.

Nous célébrons, presque jour pour jour, Monsieur le Président, la signature le 25 février 1992, par nos prédécesseurs respectifs Martine AUBRY et Raymond LEVY, d'un accord cadre qui a traversé le temps et survécu aux modifications de notre environnement économique et politique. Cet accord a déjà été renouvelé à deux reprises. Il a donné de telles preuves de réussite que nous nous proposons de le reconduire une nouvelle fois, jusqu'en 2004.
Que la première convention ait été conclue il y a dix ans, ne doit sans doute rien au hasard. Les gouvernements de gauche ont toujours accordé la priorité à l'emploi des jeunes et RENAULT a toujours ambitionné d'être à la pointe de l'innovation, en matière sociale aussi bien que dans le domaine de la technologie.
Lionel JOSPIN, comme tous les Premiers Ministres socialistes avant lui, a, dès 1997, affirmé sa volonté de lutter pour l'emploi des jeunes. La création des emplois-jeunes, comme celle du programme TRACE dans le cadre de la loi d'orientation contre la pauvreté et l'exclusion sociale, et enfin celle de la bourse d'accès à l'emploi, ont traduit cette exigence.
Pour ce qui est des contrats emploi jeunes, l'objectif de départ a été dépassé au début de l'année 2002, puisque 360 000 jeunes de moins de 25 ans, dont les 3/4 étaient demandeurs d'emploi, ont été embauchés dans ce cadre depuis 1998.
S'agissant du programme TRACE, 144 243 jeunes y ont eu accès, depuis le début de sa mise en oeuvre en 1998 jusqu'en décembre 2001. 120 000 nouvelles entrées sont prévues en 2002, soit un doublement de l'offre de places par rapport à l'année précédente. 58 % des jeunes ayant bénéficié de cette mesure ont trouvé un emploi ou une formation rémunérée à l'issue de leur parcours.
Depuis le 1er janvier dernier, une bourse d'accès à l'emploi - d'un montant de 300 euros par mois - a été instaurée pour garantir les ressources des jeunes entrés dans le dispositif TRACE, pendant les périodes non rémunérées de leur parcours d'insertion.
Cette dernière initiative me paraît tout particulièrement intéressante car elle inaugure une forme de contrat social que je crois porteuse d'avenir. Le jeune voit son autonomie financière s'améliorer après s'être engagé dans un parcours d'insertion professionnelle et après avoir apporté la preuve de sa volonté de réussite, celle-ci étant périodiquement vérifiée au cours des différentes étapes de sa progression vers l'emploi. Nous sommes clairement aux antipodes de l' " assistance ", dont certains cherchent actuellement à nous faire grief.
Cette politique a porté ses fruits. Le chômage des jeunes, qui avait atteint des records en 1996 (25 %, soit 625 000 demandeurs d'emploi de moins de 25 ans) a diminué de 40 % depuis juin 1997. La proportion des jeunes au chômage (14 %) aujourd'hui est la plus faible enregistrée depuis vingt ans (étude DARES).

  • 2 - La démarche d'insertion professionnelle des jeunes de faible niveau de qualification, que RENAULT met en oeuvre depuis dix ans en s'appuyant sur les dispositifs du Ministère de l'Emploi et de la Solidarité participe pleinement à la politique active de lutte contre le chômage que le gouvernement a souhaité. Cette coopération entre l'Etat et une grande entreprise est d'ailleurs exemplaire à plus d'un titre.

Cette opération est avant toute chose exemplaire par sa réussite. Au total, grâce à RENAULT et aux entreprises qui ont rejoint sa démarche, 2 100 jeunes ont abordé ainsi le travail en entreprise depuis le démarrage, 82 % ont obtenu un CAP d'exploitant d'installations industrielles, 73 % ont trouvé une insertion professionnelle douze mois après le terme du parcours. Nous espérons que ces performances, d'autant plus exemplaires qu'elles concernent des publics de faible niveau de qualification (niveau VI) se répèteront, voire s'amélioreront, pour les 600 jeunes qui vont bénéficier du renouvellement de la convention.
Cette démarche me paraît aussi exemplaire par son évidente simplicité ; aucune mesure nouvelle, dérogatoire ou conjoncturelle, ajoutant à la complexité des dispositifs n'a été nécessaire. On a su utiliser de façon optimale les outils déjà disponibles. Le succès est dû à des recettes simples, qui ont été depuis largement diffusées dans nos dispositifs publics d'aide à l'emploi ; individualisation, accompagnement et tutorat, pragmatisme et adaptation, coopération renforcée des acteurs locaux. Pas de " miracle " donc, mais le résultat du soin apporté localement à la mobilisation des ressources conjointes d'une grande entreprise et des pouvoirs publics. De l'ouvrage bien fait, avec conscience, et volonté d'aboutir.
Je veux d'ailleurs saluer ici l'implication des 7 conseils régionaux concernés, à ce jour, par cette démarche qu'ils soutiennent sans faiblir ; le Nord Pas-de-Calais, le Poitou-Charentes, la Lorraine, la Haute Normandie, le Centre , les Pays de Loire et l'Ile-de-France.
Enfin, il me faut souligner que cette coopération prouve, sur la durée, qu'une entreprise peut aménager, au-delà de ses perspectives d'embauche directe, l'accueil et la professionnalisation de demandeurs d'emploi sans que cette solidarité vis-à-vis de personnes en difficulté ne soit totalement tributaire de la conjoncture économique.
Cette démarche n'entraîne pas de surcoûts pour l'entreprise, elle accroît ses capacités de réaction, son aptitude au changement, et l'ancre dans son environnement social.

La valeur ajoutée de cette organisation du travail entre le service public de l'emploi, les collectivités locales et les employeurs qui nouent des relations à l'échelle du bassin d'emploi, profite à tous :

  • aux entreprises, dans leur recherche de compétence ;
  • aux jeunes demandeurs d'emploi ;
  • aux pouvoirs publics dans leur effort de formation, de qualification et d'accès à l'emploi des personnes en difficulté.

À ces divers titres, cette démarche qui favorise l'emploi des jeunes dans le secteur marchand contribue au programme de prévention et de lutte contre la pauvreté et l'exclusion sociale. Elle illustre parfaitement cette recherche de partenariat entre l'Etat et les entreprises que le Gouvernement a la volonté de développer d'avantage.
Les succès de notre coopération, Monsieur le Président, ont fait des émules.

D'abord au sein de votre propre entreprise puisque l ' " affaire " est partie des sites de DOUAI, dont je salue le Sous-Préfet Xavier LETORRE qui a bien voulu être présent parmi nous, FLINS et LE MANS. Elle s'est progressivement élargie à CLEON, DIEPPE et SANDOUVILLE. 1 842 jeunes sont ainsi passés dans vos établissements dont je veux féliciter ici les cadres dirigeants et les salariés, qui ont su faire partager leurs valeurs et leur compétence.
Dans 150 autres entreprises également, qui appartiennent à des secteurs de production multiples comme l'agro-alimentaire, la verrerie, la mécanique, l'emballage, le caoutchouc, le cuir, la peinture, la métallurgie, la plasturgie etc.. Des entreprises de toutes tailles sont aujourd'hui associées à la démarche et ont signé avec le représentant de l'Etat des accords locaux reprenant les termes de l'accord-cadre inauguré en 1992, dans une douzaine de bassins d'emploi (SABLE, la vallée de la BRESLE, LA FLECHE, CHATELLERAULT, VENDÔME, ROMORANTIN, CHÂTEAUDUN, NOGENT LE ROTROU où le Sous-Préfet Bernard POUGET a obtenu de remarquables réussites, etc.). 300 jeunes ont ainsi accédé au travail et à la qualification dans ces entreprises.

J'espère vivement que cette démonstration probante que nous avons collectivement apportée, serve de gage pour d'autres grands groupes qui voudraient rejoindre notre démarche, afin de trouver les réponses aux questions qu'ils se posent en matière de qualification et de recrutement.
Monsieur le Président, nous avons, les uns et les autres, totalement rempli les objectifs assignés il y a 10 ans à notre coopération, tant en matière d'accueil de personnes éloignées de l'emploi que d'essaimage auprès d'autres entreprises. Ceci mérite d'être souligné.

Je suis donc persuadée de pouvoir signer ce nouvel avenant à l'accord cadre sans crainte d'être un jour démentie par les résultats. Je fais confiance à RENAULT, entreprise à la fois citoyenne et compétitive, qui a su porter cette expérience, l'approfondir et la diffuser pendant dix années, pour continuer à en améliorer l'efficacité.

(source http://www.travail.gouv.fr, le 21 février 2002)