Texte intégral
R. Elkrief - Merci d'être avec nous. Bien sûr, d'abord cette tuerie de Nanterre, comment réagissez-vous ?
- "C'est un carnage, c'est une terrible tragédie. On a tous envie d'être aux côtés des familles des victimes dans cette épreuve. Mais c'est peut-être en même temps un révélateur d'une situation de la société où aujourd'hui la violence est dans l'école, elle est dans les mairies et, bien sûr, dans les rues. Et cette dérive à l'américaine, on souhaitait ne pas la voir en France."
Est-ce que cela va contribuer, je dirais, à renforcer le sentiment de l'insécurité ? Est-ce qu'il faut le rapprocher de l'insécurité quotidienne ?
- "Oui, bien sûr. Mais sur cette question de l'insécurité, je pense que l'on peut franchement faire reculer la violence et la délinquance dans notre société. On en fait bien évidemment un enjeu de campagne électorale. Mais moi j'observe que les propositions des uns et des autres sont très fortement rapprochées. Ce n'est peut-être pas la peine de faire semblant de se battre sur le fond sur des propositions sur lesquelles nous sommes maintenant tous d'accord."
Vous êtes d'accord avec L. Jospin qui dit qu'il faut en faire une cause nationale et arrêter d'en faire des enjeux politiciens ?
- "Oui mais il faut arrêter de le dire. Moi, ce que j'observe, c'est que tout le monde a évolué dans cette affaire, plutôt sur une ligne qui était la mienne. Souvenez-vous que, moi, je disais que c'était d'abord une affaire de moyens donnés à la justice. Quand la justice n'a pas les moyens de faire respecter la loi, lorsqu'il n'y a pas assez de places dans les prisons, lorsqu'il n'y a pas les établissements spécialisés pour les mineurs délinquants, eh bien, la loi n'est pas respectée. Si la loi n'est pas respectée, ceci contribue à l'augmentation de la délinquance. Donc, tout le monde aujourd'hui est d'accord pour redonner des moyens à la justice. Et c'est quand même vrai que le total du budget de la justice et de la police en France est inférieur à la moitié de la facture des 35 Heures. Vous vous rendez compte ? Donc, peut-être que les Français auraient fait d'autres choix si on leur avait donné un autre choix. Donc je pense que, aujourd'hui, il y a une assez grande convergence des uns et des autres et qu'il est important de dire aussi que derrière le problème de sécurité, de justice et de police, il faut aussi s'attaquer aux causes, dans ces cités où toute une part de la jeunesse, tout une part de nos quartiers fait France à part. C'est le sens de beaucoup de propositions que j'ai faites depuis longtemps."
En même temps, on a le sentiment quand même d'une incrédulité des électeurs, d'un manque d'appétence pour les principaux candidats, dont vous êtes victime aussi comme petit candidat, puisque vous avez eu beau ces derniers temps, multiplier les gages, enlever votre cravate, parler du PACS, du cannabis, etc Et vous ne décollez pas, j'ai envie de dire. Alors, à votre avis, qu'est ce qu'il se passe ? Pourquoi les gens n'ont pas envie de politique ?
- "La France a besoin en même temps d'un vrai débat. Et moi, je notais [dans] l'éditorial d'A. Duhamel, le flou dans les programmes. Et c'est vrai que ce débat politique est un peu consternant. Comme le dit la publicité de RTL, un vrai débat peut vous faire changer une opinion. Et moi j'attends avec impatience, de faire changer l'opinion, parce que j'en ai besoin."
Pourquoi ça ne marche pas ? Pourquoi l'opinion ne change pas, pourquoi reste-t-elle sceptique ?
- "Que disent les Français ? Ils disent d'une part que les propositions se ressemblent et qu'elles sont tièdes. Lorsque 74% des Français ne voient pas la différence entre les programmes de Chirac et de Jospin, c'est qu'il y a un problème. Et lorsque les propositions sont un peu plus fortes, ils disent que tout ça c'est du baratin, qu'elles ne seront pas appliquées. Donc il y a un véritable problème de crédibilité, après cinq ans de cohabitation, de la politique. Moi je propose, comme je l'ai fait d'ailleurs moi-même avec un projet, des propositions, une méthode, un calendrier de 200 jours pour faire bouger la France. Je propose que tous les candidats s'engagent devant les Français sur les mesures clés de leurs programmes avec un calendrier précis - moi c'est 200 jours, 300 jours, 400 jours peu importe - pour que cet engagement ne constitue pas une promesse de plus. C'est un vrai contrat de confiance avec les Français. Je prends ces engagements, je les tiens ou je pars, au bout du délai fixé. Et si je rencontre un blocage dans la société - ce qui peut parfaitement arriver - moi, j'ai été élu démocratiquement pour tenir cet engagement, alors je consulte les Français par référendum et je m'engage à partir si je suis battu. Je vous assure que si tous les candidats faisaient cela, la politique retrouverait de la crédibilité."
C'est de la politique consumériste, c'est comme dans les grands magasins, avec un contrat de confiance.
- "Personne n'a le monopole du mot " contrat de confiance ", mais le mot confiance dans la politique c'est justement ce qu'il manque."
Et ça me rappelle un peu S. Berlusconi, non qui a fait un peu un contrat avant d'être élu ? Vous souteniez S. Berlusconi ici même quand il a été élu, vous avez dit c'est quelqu'un de formidable. Il a trois millions d'Italiens dans la rue ?
- "Peut-être vous vous souvenez si vous avez de la mémoire, que lorsque nous en avions parlé à l'époque à votre micro, j'avais dit, formidable Italie et formidable prédécesseur de Berlusconi - qui était de gauche d'ailleurs - avec un Premier Ministre ancien communiste, qui avait réussi à faire bouger l'Italie dans le sens de réformes qui apparaîtraient impossible maintenant en France. Donc moi j'en tire la conclusion"
Lui aussi il veut faire bouger aujourd'hui mais il va trop vite
- "Vous me permettrez de ne pas participer aujourd'hui à une sorte de anti-italianisme, anti-Berlusconisme primaire qui prend le relais de l'anti-américanisme"
Ce n'est plus votre modèle alors ?
- "Non, non, ce n'est pas ça. Mais je vois aujourd'hui la gauche et l'extrême-gauche en train de fabriquer un épouvantail de Berlusconi. Ce sont les mêmes qui faisaient hier un épouvantail de M. J.-M. Le Pen, et qui disent maintenant qu'il faut absolument lui trouver des signatures. Ce sont les mêmes qui refusent de serrer la main de M. Berlusconi au Salon du Livre mais qui trouvent tout à fait normal d'aller à Cuba au Salon du Livre pour serrer la main de F. Castro. Alors ça suffit. "
(source : Premier ministre, Service d'information du gouvernement, le 28 mars 2002)
- "C'est un carnage, c'est une terrible tragédie. On a tous envie d'être aux côtés des familles des victimes dans cette épreuve. Mais c'est peut-être en même temps un révélateur d'une situation de la société où aujourd'hui la violence est dans l'école, elle est dans les mairies et, bien sûr, dans les rues. Et cette dérive à l'américaine, on souhaitait ne pas la voir en France."
Est-ce que cela va contribuer, je dirais, à renforcer le sentiment de l'insécurité ? Est-ce qu'il faut le rapprocher de l'insécurité quotidienne ?
- "Oui, bien sûr. Mais sur cette question de l'insécurité, je pense que l'on peut franchement faire reculer la violence et la délinquance dans notre société. On en fait bien évidemment un enjeu de campagne électorale. Mais moi j'observe que les propositions des uns et des autres sont très fortement rapprochées. Ce n'est peut-être pas la peine de faire semblant de se battre sur le fond sur des propositions sur lesquelles nous sommes maintenant tous d'accord."
Vous êtes d'accord avec L. Jospin qui dit qu'il faut en faire une cause nationale et arrêter d'en faire des enjeux politiciens ?
- "Oui mais il faut arrêter de le dire. Moi, ce que j'observe, c'est que tout le monde a évolué dans cette affaire, plutôt sur une ligne qui était la mienne. Souvenez-vous que, moi, je disais que c'était d'abord une affaire de moyens donnés à la justice. Quand la justice n'a pas les moyens de faire respecter la loi, lorsqu'il n'y a pas assez de places dans les prisons, lorsqu'il n'y a pas les établissements spécialisés pour les mineurs délinquants, eh bien, la loi n'est pas respectée. Si la loi n'est pas respectée, ceci contribue à l'augmentation de la délinquance. Donc, tout le monde aujourd'hui est d'accord pour redonner des moyens à la justice. Et c'est quand même vrai que le total du budget de la justice et de la police en France est inférieur à la moitié de la facture des 35 Heures. Vous vous rendez compte ? Donc, peut-être que les Français auraient fait d'autres choix si on leur avait donné un autre choix. Donc je pense que, aujourd'hui, il y a une assez grande convergence des uns et des autres et qu'il est important de dire aussi que derrière le problème de sécurité, de justice et de police, il faut aussi s'attaquer aux causes, dans ces cités où toute une part de la jeunesse, tout une part de nos quartiers fait France à part. C'est le sens de beaucoup de propositions que j'ai faites depuis longtemps."
En même temps, on a le sentiment quand même d'une incrédulité des électeurs, d'un manque d'appétence pour les principaux candidats, dont vous êtes victime aussi comme petit candidat, puisque vous avez eu beau ces derniers temps, multiplier les gages, enlever votre cravate, parler du PACS, du cannabis, etc Et vous ne décollez pas, j'ai envie de dire. Alors, à votre avis, qu'est ce qu'il se passe ? Pourquoi les gens n'ont pas envie de politique ?
- "La France a besoin en même temps d'un vrai débat. Et moi, je notais [dans] l'éditorial d'A. Duhamel, le flou dans les programmes. Et c'est vrai que ce débat politique est un peu consternant. Comme le dit la publicité de RTL, un vrai débat peut vous faire changer une opinion. Et moi j'attends avec impatience, de faire changer l'opinion, parce que j'en ai besoin."
Pourquoi ça ne marche pas ? Pourquoi l'opinion ne change pas, pourquoi reste-t-elle sceptique ?
- "Que disent les Français ? Ils disent d'une part que les propositions se ressemblent et qu'elles sont tièdes. Lorsque 74% des Français ne voient pas la différence entre les programmes de Chirac et de Jospin, c'est qu'il y a un problème. Et lorsque les propositions sont un peu plus fortes, ils disent que tout ça c'est du baratin, qu'elles ne seront pas appliquées. Donc il y a un véritable problème de crédibilité, après cinq ans de cohabitation, de la politique. Moi je propose, comme je l'ai fait d'ailleurs moi-même avec un projet, des propositions, une méthode, un calendrier de 200 jours pour faire bouger la France. Je propose que tous les candidats s'engagent devant les Français sur les mesures clés de leurs programmes avec un calendrier précis - moi c'est 200 jours, 300 jours, 400 jours peu importe - pour que cet engagement ne constitue pas une promesse de plus. C'est un vrai contrat de confiance avec les Français. Je prends ces engagements, je les tiens ou je pars, au bout du délai fixé. Et si je rencontre un blocage dans la société - ce qui peut parfaitement arriver - moi, j'ai été élu démocratiquement pour tenir cet engagement, alors je consulte les Français par référendum et je m'engage à partir si je suis battu. Je vous assure que si tous les candidats faisaient cela, la politique retrouverait de la crédibilité."
C'est de la politique consumériste, c'est comme dans les grands magasins, avec un contrat de confiance.
- "Personne n'a le monopole du mot " contrat de confiance ", mais le mot confiance dans la politique c'est justement ce qu'il manque."
Et ça me rappelle un peu S. Berlusconi, non qui a fait un peu un contrat avant d'être élu ? Vous souteniez S. Berlusconi ici même quand il a été élu, vous avez dit c'est quelqu'un de formidable. Il a trois millions d'Italiens dans la rue ?
- "Peut-être vous vous souvenez si vous avez de la mémoire, que lorsque nous en avions parlé à l'époque à votre micro, j'avais dit, formidable Italie et formidable prédécesseur de Berlusconi - qui était de gauche d'ailleurs - avec un Premier Ministre ancien communiste, qui avait réussi à faire bouger l'Italie dans le sens de réformes qui apparaîtraient impossible maintenant en France. Donc moi j'en tire la conclusion"
Lui aussi il veut faire bouger aujourd'hui mais il va trop vite
- "Vous me permettrez de ne pas participer aujourd'hui à une sorte de anti-italianisme, anti-Berlusconisme primaire qui prend le relais de l'anti-américanisme"
Ce n'est plus votre modèle alors ?
- "Non, non, ce n'est pas ça. Mais je vois aujourd'hui la gauche et l'extrême-gauche en train de fabriquer un épouvantail de Berlusconi. Ce sont les mêmes qui faisaient hier un épouvantail de M. J.-M. Le Pen, et qui disent maintenant qu'il faut absolument lui trouver des signatures. Ce sont les mêmes qui refusent de serrer la main de M. Berlusconi au Salon du Livre mais qui trouvent tout à fait normal d'aller à Cuba au Salon du Livre pour serrer la main de F. Castro. Alors ça suffit. "
(source : Premier ministre, Service d'information du gouvernement, le 28 mars 2002)