Texte intégral
La crise que traverse notre système de santé, illustrée ces dernières semaines par les multiples actions de mobilisation des médecins, confirme pleinement le diagnostic des entrepreneurs. Depuis le 1er octobre 2001, leurs organisations représentatives, Medef et CGPME, ont décidé de ne plus participer à la gestion de l'assurance maladie, tant la confusion des responsabilités, des missions et des financements paralyse toute réforme et toute maîtrise du système existant. Après le détournement des ressources de la sécurité sociale pour le financement des 35 heures - ultérieurement sanctionné par le Conseil constitutionnel -, il nous est apparu inutile de maintenir la fiction d'une gestion paritaire de l'assurance maladie.
A l'évidence, l'Etat s'arroge toutes les libertés en la matière sans jamais assumer ses responsabilités dès lors qu'il s'agit de prendre des mesures difficiles ou d'envisager des réformes nécessaires. Le mouvement revendicatif des médecins généralistes en est une nouvelle caricature, puisque les pouvoirs publics s'abritent derrière la CNAM censée négocier avec les professions de santé sans disposer en fait de la moindre autonomie. La CNAM s'est vue accorder, début avril 2001 seulement, une enveloppe déléguée étriquée pour les dépenses de médecine ambulatoire, une large partie de l'enveloppe financière globale pour les dépenses d'assurance maladie ayant été affectée au financement des 35 heures à l'hôpital public ! A ce conflit s'ajoutent les mécontentements des infirmières, des spécialistes, de l'hospitalisation privée, des personnels de l'hôpital public, de l'industrie pharmaceutique : bref, l'ensemble du système de santé est en voie d'implosion.
Face à l'ampleur de cette crise, hélas prévisible, il faut envisager non pas de continuer à prendre des décisions financières dans l'urgence médiatique et politique, qui ne peuvent qu'apporter un répit transitoire au malaise des professions de santé et de ceux qui sont les " usagers " de ce système, en aggravant le déficit de la sécurité sociale, mais une réforme structurelle. C'est pourquoi le Medef a présenté le 20 novembre dernier un projet de nouvelle architecture de la sécurité sociale.
Il s'agit d'abord d'un exercice démocratique. C'est la volonté d'un acteur de la société civile, en l'occurrence celui des entrepreneurs, employant plus de 15 millions de salariés, et représentant les premiers contributeurs financiers au régime de la protection sociale, de proposer les axes d'une grande réforme des mécanismes d'assurance sociale pour notre pays. Avec le souhait d'enrichir le débat public sur ces questions majeures pour tous nos concitoyens et pour l'avenir de notre pays. Et en espérant qu'il suscite d'autres initiatives, d'autres contributions susceptibles de préciser les voies et moyens d'une réforme de la sécurité sociale que la quasi-totalité des forces politiques et sociales considèrent urgente et inévitable.
La réforme que propose le MEDEF aux Français affirme, précise et renforce les trois principes fondamentaux sur lesquels repose depuis un demi-siècle la protection sociale des Français, particulièrement dans le domaine de l'assurance maladie. Notre proposition garantit l'universalité, renforce la solidarité, rétablit l'égalité. Elle permet de surcroît, last but not least, d'atteindre le principe d'efficacité.
Le principe d'universalité tout d'abord est respecté : tous les résidents sont assurés contre le risque maladie, tous les salariés contre les accidents du travail et les maladies professionnelles. Jamais les entrepreneurs, contrairement à ce qu'affirment certains commentateurs de mauvaise foi, n'envisageraient un système qui laisserait des Français au bord de la route.
Le principe de solidarité est renforcé : le financement intégral de l'assurance maladie par la CSG déductible proposé par le Medef permet de faire que tout Français cotise en fonction de son revenu, jamais en fonction de son état de santé. Ce financement par une cotisation proportionnelle est d'ailleurs conforme au caractère universel de la couverture. Ce financement est infiniment plus clair, plus transparent, plus démocratique que le financement actuel de la Sécurité sociale qui a atteint un degré de complexité et de confusion tel que nul ne peut pénétrer la mécanique des transferts et comprendre le sens des redistributions. Pour les salariés, les cotisations salariales et patronales seraient réintégrées dans le salaire brut et ils verseraient la CSG sans modification de leur revenu net. Chacun sera à même de connaître le coût exact de la protection sociale maladie. Et les choix collectifs en matière de santé ne viendront pas grever le coût du travail, alourdir le salaire indirect et perturber les relations salariales. Le débat récurrent sur les charges et les exonérations de charge n'aura plus lieu d'être.
Le principe d'égalité est enfin atteint. Notre proposition consiste à ce que le Parlement, à l'aide d'une agence ad hoc, définisse le panier de soins auquel tout Français a accès. Ce panier de soins est pris en charge intégralement. Il correspond aux priorités de santé publique définies par le Parlement. Il est révisé chaque année. On met ainsi fin à la situation actuelle où le Parlement décide d'un objectif de dépenses d'assurance maladie qui reste indicatif, n'arrête pas les priorités de santé publique et constate ex post l'évolution des recettes et des dépenses, le volume de ces dernières ne faisant l'objet d'aucune maîtrise. La distinction régime de base - régime complémentaire disparaît. Dans notre proposition, tous les Français ont accès aux soins et sont égaux devant le risque maladie, quel que soit leur revenu. Ce qui permet de supprimer le montage récent de la CMU qui génère des effets de seuil et inégalités, en intégrant sans discrimination les plus démunis à la couverture de tous.
Et le principe d'efficacité ? Il est d'abord atteint par la clarification des compétences. Les pouvoirs publics décident l'enveloppe financière cohérente avec le panier de soins qu'ils définissent, et lèvent la CSG déductible. Ils ont en charge comme aujourd'hui la réglementation relative à l'accès aux professions médicales. Ils exercent la tutelle et contrôlent le système. Mais l'offre du panier de soins, c'est à dire la gestion concrète est confiée à des " opérateurs de soins ", qui reçoivent un forfait budgétaire par assuré. Ceux-ci sont des organismes sui generis créés à l'initiative d'organismes publics, mutualistes ou privés. Les Français doivent avoir la liberté de leur affiliation - ils choisissent de s'affilier à l'opérateur de leur choix-, mais les opérateurs de soins n'ont quant à eux pas le droit de les sélectionner. Les opérateurs de soins sont en situation de gérer le risque maladie de chaque assuré de manière optimale. Ils mobilisent toutes les compétences médicales pour la prévention, le suivi et la thérapie.
Les opérateurs de soins doivent respecter un cahier des charges clair qui garantit en particulier la couverture géographique de tout le territoire, la prise en charge des urgences ou le développement d'activités de prévention. Les opérateurs de soins ont la charge des relations avec l'ensemble des professions médicales, et établissent avec eux contrats et conventions. Ils contractent avec les hôpitaux publics et privés, qui tarifient leurs prestations en fonction des pathologies traitées. Toutes les professions médicales sont ainsi amenées à établir de vraies relations contractuelles avec les opérateurs de soins. Ces relations pourront être beaucoup plus larges, plus diverses et plus profondes, plus symétriques parce que contractuelles, que les relations tumultueuses, conflictuelles et instables qui " lient " aujourd'hui les professions de santé à la CNAM et surtout à l'Etat qui veut se mêler de tout. Contrairement à la situation actuelle qui provoque l'exaspération des professions de santé, celles-ci auraient enfin de réels interlocuteurs avec lesquels discuter concrètement des conditions d'exercice de leurs métiers.
C'est dans cette décentralisation des décisions, prises par des gestionnaires responsables, c'est dans l'émulation entre opérateurs de soins librement choisis comme prestataires de services par les Français, c'est dans l'impératif absolu d'équilibre de leurs comptes, c'est en confiant des tâches de gestion à des entités dont c'est la vocation professionnelle que réside la nouvelle efficacité du système d'assurance maladie.
Aux professionnels de santé, ce système apporte à la fois plus de souplesse, de sécurité et d'efficacité, par la recherche constante d'accords gagnant-gagnant avec les opérateurs de soins. Les professionnels pourraient définir de manière beaucoup plus étroite et constructive les relations contractuelles qui les uniront aux opérateurs de soins.
En choisissant leur opérateur de soins, dont ils peuvent changer, les malades gardent le libre choix de leur médecin. Ils trouvent dans le nouveau système plus d'informations sur la qualité des soins et de conseils pour la gestion de leur santé. La prévention sera mieux prise en compte. Les entreprises, et en leur sein les partenaires sociaux, joueront un rôle important dans l'élaboration de véritables programmes de prévention et de santé. En liaison avec les partenaires sociaux, les entreprises peuvent par exemple élargir le panier de soins en prenant en charge des dépenses de prévention spécifiques à telle ou telle profession, ce qui permet une meilleure articulation entre la médecine du travail et la médecine hors travail. Mais il faut qu'in fine chaque assuré puisse s'affilier librement même si l'entreprise lui propose tel ou tel opérateur.
Le MEDEF propose ainsi une architecture originale, respectueuse des principes fondamentaux de la protection sociale à la française, clarifiant les responsabilités, les missions et les financements, combinant principes d'économie publique et d'économie concurrentielle, conjuguant équité et efficacité. D'autres architectures sont peut-être envisageables. Qu'elles se formulent. Le débat est nécessaire. Le MEDEF les examinera sans a priori. Seul l'examen attentif de toutes les propositions permettra d'éclairer réellement le choix des Français, comme il convient dans une vraie démocratie. Il sera alors possible de donner un avenir à notre système de santé aujourd'hui miné par le conflit récurrent.
(Source http://www.medef.fr, le 2 mai 2002)
A l'évidence, l'Etat s'arroge toutes les libertés en la matière sans jamais assumer ses responsabilités dès lors qu'il s'agit de prendre des mesures difficiles ou d'envisager des réformes nécessaires. Le mouvement revendicatif des médecins généralistes en est une nouvelle caricature, puisque les pouvoirs publics s'abritent derrière la CNAM censée négocier avec les professions de santé sans disposer en fait de la moindre autonomie. La CNAM s'est vue accorder, début avril 2001 seulement, une enveloppe déléguée étriquée pour les dépenses de médecine ambulatoire, une large partie de l'enveloppe financière globale pour les dépenses d'assurance maladie ayant été affectée au financement des 35 heures à l'hôpital public ! A ce conflit s'ajoutent les mécontentements des infirmières, des spécialistes, de l'hospitalisation privée, des personnels de l'hôpital public, de l'industrie pharmaceutique : bref, l'ensemble du système de santé est en voie d'implosion.
Face à l'ampleur de cette crise, hélas prévisible, il faut envisager non pas de continuer à prendre des décisions financières dans l'urgence médiatique et politique, qui ne peuvent qu'apporter un répit transitoire au malaise des professions de santé et de ceux qui sont les " usagers " de ce système, en aggravant le déficit de la sécurité sociale, mais une réforme structurelle. C'est pourquoi le Medef a présenté le 20 novembre dernier un projet de nouvelle architecture de la sécurité sociale.
Il s'agit d'abord d'un exercice démocratique. C'est la volonté d'un acteur de la société civile, en l'occurrence celui des entrepreneurs, employant plus de 15 millions de salariés, et représentant les premiers contributeurs financiers au régime de la protection sociale, de proposer les axes d'une grande réforme des mécanismes d'assurance sociale pour notre pays. Avec le souhait d'enrichir le débat public sur ces questions majeures pour tous nos concitoyens et pour l'avenir de notre pays. Et en espérant qu'il suscite d'autres initiatives, d'autres contributions susceptibles de préciser les voies et moyens d'une réforme de la sécurité sociale que la quasi-totalité des forces politiques et sociales considèrent urgente et inévitable.
La réforme que propose le MEDEF aux Français affirme, précise et renforce les trois principes fondamentaux sur lesquels repose depuis un demi-siècle la protection sociale des Français, particulièrement dans le domaine de l'assurance maladie. Notre proposition garantit l'universalité, renforce la solidarité, rétablit l'égalité. Elle permet de surcroît, last but not least, d'atteindre le principe d'efficacité.
Le principe d'universalité tout d'abord est respecté : tous les résidents sont assurés contre le risque maladie, tous les salariés contre les accidents du travail et les maladies professionnelles. Jamais les entrepreneurs, contrairement à ce qu'affirment certains commentateurs de mauvaise foi, n'envisageraient un système qui laisserait des Français au bord de la route.
Le principe de solidarité est renforcé : le financement intégral de l'assurance maladie par la CSG déductible proposé par le Medef permet de faire que tout Français cotise en fonction de son revenu, jamais en fonction de son état de santé. Ce financement par une cotisation proportionnelle est d'ailleurs conforme au caractère universel de la couverture. Ce financement est infiniment plus clair, plus transparent, plus démocratique que le financement actuel de la Sécurité sociale qui a atteint un degré de complexité et de confusion tel que nul ne peut pénétrer la mécanique des transferts et comprendre le sens des redistributions. Pour les salariés, les cotisations salariales et patronales seraient réintégrées dans le salaire brut et ils verseraient la CSG sans modification de leur revenu net. Chacun sera à même de connaître le coût exact de la protection sociale maladie. Et les choix collectifs en matière de santé ne viendront pas grever le coût du travail, alourdir le salaire indirect et perturber les relations salariales. Le débat récurrent sur les charges et les exonérations de charge n'aura plus lieu d'être.
Le principe d'égalité est enfin atteint. Notre proposition consiste à ce que le Parlement, à l'aide d'une agence ad hoc, définisse le panier de soins auquel tout Français a accès. Ce panier de soins est pris en charge intégralement. Il correspond aux priorités de santé publique définies par le Parlement. Il est révisé chaque année. On met ainsi fin à la situation actuelle où le Parlement décide d'un objectif de dépenses d'assurance maladie qui reste indicatif, n'arrête pas les priorités de santé publique et constate ex post l'évolution des recettes et des dépenses, le volume de ces dernières ne faisant l'objet d'aucune maîtrise. La distinction régime de base - régime complémentaire disparaît. Dans notre proposition, tous les Français ont accès aux soins et sont égaux devant le risque maladie, quel que soit leur revenu. Ce qui permet de supprimer le montage récent de la CMU qui génère des effets de seuil et inégalités, en intégrant sans discrimination les plus démunis à la couverture de tous.
Et le principe d'efficacité ? Il est d'abord atteint par la clarification des compétences. Les pouvoirs publics décident l'enveloppe financière cohérente avec le panier de soins qu'ils définissent, et lèvent la CSG déductible. Ils ont en charge comme aujourd'hui la réglementation relative à l'accès aux professions médicales. Ils exercent la tutelle et contrôlent le système. Mais l'offre du panier de soins, c'est à dire la gestion concrète est confiée à des " opérateurs de soins ", qui reçoivent un forfait budgétaire par assuré. Ceux-ci sont des organismes sui generis créés à l'initiative d'organismes publics, mutualistes ou privés. Les Français doivent avoir la liberté de leur affiliation - ils choisissent de s'affilier à l'opérateur de leur choix-, mais les opérateurs de soins n'ont quant à eux pas le droit de les sélectionner. Les opérateurs de soins sont en situation de gérer le risque maladie de chaque assuré de manière optimale. Ils mobilisent toutes les compétences médicales pour la prévention, le suivi et la thérapie.
Les opérateurs de soins doivent respecter un cahier des charges clair qui garantit en particulier la couverture géographique de tout le territoire, la prise en charge des urgences ou le développement d'activités de prévention. Les opérateurs de soins ont la charge des relations avec l'ensemble des professions médicales, et établissent avec eux contrats et conventions. Ils contractent avec les hôpitaux publics et privés, qui tarifient leurs prestations en fonction des pathologies traitées. Toutes les professions médicales sont ainsi amenées à établir de vraies relations contractuelles avec les opérateurs de soins. Ces relations pourront être beaucoup plus larges, plus diverses et plus profondes, plus symétriques parce que contractuelles, que les relations tumultueuses, conflictuelles et instables qui " lient " aujourd'hui les professions de santé à la CNAM et surtout à l'Etat qui veut se mêler de tout. Contrairement à la situation actuelle qui provoque l'exaspération des professions de santé, celles-ci auraient enfin de réels interlocuteurs avec lesquels discuter concrètement des conditions d'exercice de leurs métiers.
C'est dans cette décentralisation des décisions, prises par des gestionnaires responsables, c'est dans l'émulation entre opérateurs de soins librement choisis comme prestataires de services par les Français, c'est dans l'impératif absolu d'équilibre de leurs comptes, c'est en confiant des tâches de gestion à des entités dont c'est la vocation professionnelle que réside la nouvelle efficacité du système d'assurance maladie.
Aux professionnels de santé, ce système apporte à la fois plus de souplesse, de sécurité et d'efficacité, par la recherche constante d'accords gagnant-gagnant avec les opérateurs de soins. Les professionnels pourraient définir de manière beaucoup plus étroite et constructive les relations contractuelles qui les uniront aux opérateurs de soins.
En choisissant leur opérateur de soins, dont ils peuvent changer, les malades gardent le libre choix de leur médecin. Ils trouvent dans le nouveau système plus d'informations sur la qualité des soins et de conseils pour la gestion de leur santé. La prévention sera mieux prise en compte. Les entreprises, et en leur sein les partenaires sociaux, joueront un rôle important dans l'élaboration de véritables programmes de prévention et de santé. En liaison avec les partenaires sociaux, les entreprises peuvent par exemple élargir le panier de soins en prenant en charge des dépenses de prévention spécifiques à telle ou telle profession, ce qui permet une meilleure articulation entre la médecine du travail et la médecine hors travail. Mais il faut qu'in fine chaque assuré puisse s'affilier librement même si l'entreprise lui propose tel ou tel opérateur.
Le MEDEF propose ainsi une architecture originale, respectueuse des principes fondamentaux de la protection sociale à la française, clarifiant les responsabilités, les missions et les financements, combinant principes d'économie publique et d'économie concurrentielle, conjuguant équité et efficacité. D'autres architectures sont peut-être envisageables. Qu'elles se formulent. Le débat est nécessaire. Le MEDEF les examinera sans a priori. Seul l'examen attentif de toutes les propositions permettra d'éclairer réellement le choix des Français, comme il convient dans une vraie démocratie. Il sera alors possible de donner un avenir à notre système de santé aujourd'hui miné par le conflit récurrent.
(Source http://www.medef.fr, le 2 mai 2002)