Déclaration de M. François Huwart, secrétaire d'Etat au commerce extérieur, sur le développement des relations franco-marocaines, sur les accords d'association Nord-Sud fondant le partenariat euro-méditerranéen, et sur son souhait qu'une intégration Sud-Sud le complète prochainement, Casablanca, le 12 mars 2002.

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Ce voyage, le deuxième que j'effectue au Maroc, a pour moi un sens très fort. En effet, je suis entré au gouvernement de Lionel Jospin en 1999, au beau milieu de cette année du Maroc où toute la France s'était mise aux couleurs du royaume à travers une multitude de manifestations culturelles et économiques. Tout au long de l'année, la réplique de la porte Bab El Mansour avait éclipsé l'obélisque sur la place de la Concorde. L'un de mes premiers voyages officiels avait été justement pour venir au Maroc, à l'occasion de la rencontre des Premiers ministres à Fès. Cette rencontre avait d'ailleurs marqué un tournant dans la relation franco-marocaine. Cet esprit de Fès a depuis inspiré deux moments forts : la visite d'Etat de Sa Majesté le Roi Mohammed VI à Paris en mars 2000 et la 4ème rencontre de nos Premiers ministres à Paris il y a tout juste un an.
Vous l'aurez compris, au delà même du plaisir personnel de venir à Casablanca, cette visite est surtout une nouvelle étape de ce qui est désormais un véritable partenariat stratégique. Etape d'autant plus importante dans la perspective de la rencontre des ministres du commerce à Tolède la semaine prochaine avant le sommet Euro-méditerranée de Valence, et les sommets de Monterrey sur le financement du développement ou de Johannesburg.
Autant de sujets dont je m'entretiendrai demain avec le Premier ministre, avec André Azoulay, conseiller du Roi, et plusieurs de mes collègues du gouvernement marocain et que j'évoquerai sans doute devant les étudiants de l'université Mohammed V à Rabat en fin d'après-midi.
Mais, ce soir, avant de revenir sur la modernisation économique de votre pays pour relever ces défis de la mondialisation, avant d'élargir la relation franco-marocaine au cadre euro-méditerranéen qui doit être l'une des grandes ambitions du 21ème siècle, je veux m'attarder un peu sur la qualité exceptionnelle de cette relation franco-marocaine aujourd'hui. Permettez-moi d'insister : pour être aujourd'hui une évidence, la qualité de cette relation bilatérale doit être rappelée, soulignée et appréciée à sa juste valeur. Rien ne serait plus dommage que de ne plus voir ce que l'on connaît trop bien.
Et je me réjouis de pouvoir rendre cet hommage à la qualité de notre partenariat justement ici, à Casablanca, au coeur de la plus grande métropole du Maghreb, qui accueille sans doute le plus prestigieux établissement français d'enseignement à l'étranger, le lycée Lyautey bien sûr.
J'y ajouterai une raison plus intime que je partage avec tous les cinéphiles et les admirateurs d'Ingrid Bergman car la plus belle Marseillaise au cinéma, c'est bien sûr celle de Casablanca ! Vous savez, quand les clients du café d'Humphrey Bogart se lèvent pour la chanter à tue-tête, je dois dire que c'est toujours un moment d'émotion !
Alors, dans cette ville mythique de Casablanca, permettez-moi de remercier chaleureusement l'artisan au quotidien de cette relation franco-marocaine si riche, Frédéric Grasset, notre ambassadeur, les services de la Mission économique, dirigés de main de maître par Michel Derrac ainsi que Jean-Claude Bouveur, président de la Chambre française de commerce et d'industrie du Maroc.
En mars 2000 à Paris, Sa Majesté le Roi Mohammed VI l'a dit en ces termes : " Au Maroc, la France est première partout. Premier investisseur, premier client, premier bailleur de fonds, première à avoir transformé une partie de sa dette en investissements productifs ".
En effet, avec 5,3 milliards d'euros en 2001, la France, représente près de 30% du commerce extérieur du Royaume : un quart de ses importations et un tiers de ses exportations.
En ce qui concerne les investissements, la France est première en stocks (environ 30% des investissements directs étrangers au Maroc), comme en flux avec en moyenne un quart du total. 2001 a même été une année record avec plus de 2,5 milliards d'euros investis au Maroc par des entreprises françaises. L'opération-phare a bien sûr été l'entrée de Vivendi dans le capital de Maroc Télécom, mais je n'oublie pas toutes les autres opérations portées par les groupes Lafarge, Auchan, Accor, Club Med et bien d'autres encore.
Première, la France l'est dans le domaine du tourisme, pas seulement en matière d'investissement et de promotion - j'ai déjà cité les groupes Accor et Club Med, je peux ajouter Fram et quelques autres investisseurs de moyenne et petite taille - mais aussi en nombre de touristes visitant le Maroc. En effet, sur un total de l'ordre de 2,5 millions de touristes étrangers en 2000 et en 2001, les Français ont représenté pas loin d'un million de personnes et ont assuré plus du quart des recettes touristiques. Cela démontre surtout l'attrait, le prestige culturel et esthétique du Maroc de l'autre côté de la Méditerranée. Depuis Delacroix, touriste fameux et admiratif, le charme n'a cessé d'agir sur les Français !
De même, les transferts effectués par les 800 000 Marocains de France représentent la moitié du total des 3 milliards et demi d'euros rapatriés par les Marocains résidents à l'étranger en 2001. Nos deux gouvernements sont très attachés à cette solidarité inter-communautaire et à l'implication de la communauté marocaine de France au Maroc.
Dans le secteur bancaire également, la France est au 1er rang avec les 3 filiales de nos 3 grandes banques. BNP-Paribas, avec la Banque Marocaine pour le Commerce et l'Industrie, le Crédit Lyonnais avec le Crédit du Maroc et la Société Générale avec la Société Générale Marocaine de Banques. Ces trois établissements représentent près du tiers des parts de marché et se développent rapidement.
Au-delà des banques, la relation franco-marocaine est riche d'une très forte présence d'entreprises dans l'ensemble des secteurs d'activité du pays. Faut-il d'ailleurs s'en étonner quand on sait la longue histoire qui nous unit, la proximité géographique, l'identité linguistique, l'habitude de travailler ensemble et de mener des partenariats ?
La France compte plus de 500 sociétés au Maroc, auxquelles il faudrait ajouter des dizaines, des centaines d'entreprises mono-personnelles. Treize des quinze premiers groupes français sont implantés au Maroc. Au total, ces entreprises emploient plus de 65 000 personnes.
La qualité de cette relation économique entre nos deux pays est visible dans les projets industriels que nous menons ensemble. A Casablanca, comment ne pas évoquer à la fois le passé, avec la grande mosquée Hassan II, le présent, avec la distribution d'eau et d'électricité et le futur, avec les projets d'aménagement urbain et de développement du tourisme ?
Si votre pays s'est lancé sans hésitation dans le grand chantier du développement, il a fait le choix crucial d'un développement durable et de la préservation de son fabuleux patrimoine naturel et écologique. En témoignent les projets existent dans le domaine de l'énergie propre, l'éolien et l'hydraulique. Ces technologies connaissent aujourd'hui un essor extraordinaire. Dans la foulée du protocole de Kyoto sur la réduction des gaz à effet de serre, que la Russie avait d'ailleurs rejoint lors de la conférence de Marrakech à l'automne dernier, ces technologies seront demain incontournables.
Ainsi, après le parc éolien de Koudia Al Baïda avec EDF et Germa, Cegelec, associé à Nordex et Shell Energies, va soumettre son projet pour le parc éolien de Tanger et Tarfaya d'une puissance de 200 MW. Alstom est par ailleurs en train de construire à Afourer, pour le compte de l'Office national marocain de l'électricité, une centrale électrique d'une puissance de 450 MW équipée d'une station de transfert d'énergie par pompage.
Parallèlement, il y a eu l'entrée de Vivendi au capital de Maroc Télécom et les investissements annoncés de Lafarge à Tétouan ou des groupes Accor et du Club Méditerranée ou encore l'alliance entre Auchan et l'ONA pour la grande distribution et enfin, l'arrivée de Vivendi à Tanger et Tétouan pour la gestion déléguée de l'eau et l'électricité de ces deux villes.
Un autre exemple de cette complicité économique franco-marocaine réside dans la Chambre française de commerce et d'industrie du Maroc elle-même, qui nous accueille ce soir. Avec 3 200 membres, vous êtes la première chambre économique au Maroc et la première chambre française à l'étranger. Je suis donc très heureux de vous saluer ce soir à Casablanca.
Je me félicite également de la convention de partenariat que vous allez signer tout à l'heure avec la Mission économique afin d'améliorer encore l'accompagnement des entreprises françaises soucieuses de développer leurs liens avec le Maroc.
Ce partenariat n'est cependant pas nouveau : la mobilisation de votre chambre et de la Mission économique a assuré le succès de France Expo 2001 en octobre dernier. Avec l'appui précieux d'Ubifrance, vous avez accueilli 325 exposants - un record - et près de 12 000 visiteurs ! C'est maintenant un succès à renouveler.
Cette dynamique est portée par la synergie entre acteurs privés et publics. Elle profite à l'évidence de l'engagement profond de la France qui est le premier bailleur de fonds au Maroc, avec un montant total d'aide publique au développement de l'ordre de 200 millions d'euros par an. Cette aide doit aussi beaucoup à la qualité des instruments mis en place.
- d'abord des instruments au service de la gestion active de la dette et des investissements. Je pense au mécanisme de conversion de dettes en investissements privés qui a porté en 5 ans sur un total de 410 M auxquels il faut ajouter 60 M de conversion de dette en investissements publics. C'est d'ailleurs à Fès qu'avait été décidée l'ouverture d'une dernière tranche de 105M. Ce mécanisme a été un tel succès qu'il est désormais épuisé.
- d'autres instruments se mettent en place en faveur des PME-PMI marocaines : c'est le cas de la ligne de crédit PME-PMI et du fonds de garantie français.
· la première, dotée de 30 M, est utilisée aujourd'hui à plus de 40% et a bénéficié à une vingtaine de projets.
Elle présente l'intérêt d'offrir un crédit à taux bonifié, 5,25% avec garantie du risque de change pour l'acquisition d'équipements ou de services français. Elle présente enfin l'originalité d'être gérée localement entre la banque gestionnaire, la Société générale marocaine de banques, la Mission économique, l'Agence française de développement et le Trésor marocain. Je suis heureux de pouvoir vous annoncer aujourd'hui que le plafond des projets va être abaissé à 100 000 pour permettre plus facilement le financement au bénéfice de plus petites PME.
· le second, doté également de 30 M, reste encore trop peu utilisé. Le fonds a déjà apporté sa garantie à 14 dossiers dans les secteurs du textile, de la métallurgie ou de la pêche. Ici aussi, des réflexions sont en cours pour faire évoluer cet outil au bénéfice de l'économie marocaine.
Par ailleurs, le Fonds d'aide et d'étude au secteur privé (FASEP) est précieux à la fois pour les entreprises françaises et le tissu économique marocain. Il offre un appui en amont des projets ou un soutien institutionnel qui aide à ouvrir des marchés nouveaux. On peut citer pêle-mêle des domaines aussi différents que l'aide à la télégestion de l'eau potable, le stockage de gaz, la définition de cartes géologiques, les innovations en matière d'énergie propres dont je parlais à l'instant : photovoltaïque , micro- éolien, gaz et biomasse. Je pourrais ajouter la modernisation de la bourse ou encore plus récemment, la réalisation du schéma directeur pour l'assainissement de la ville d'El Jadida.
Si l'on veut être exhaustif, il faut également citer la procédure de la réserve pays émergents : un des derniers protocoles concerne ainsi le Centre national d'études scientifiques des techniques nucléaires (CNESTEN) qui sera bientôt opérationnel. Quant au premier projet RPE au Maroc, j'avais eu le plaisir de le signer à Fès en novembre 1999, pour un montant de 30 M, au bénéfice du partenariat ONCF/Alstom pour la mise en sécurité des installations ferroviaires. Et je suis à nouveau très heureux de pouvoir annoncer aujourd'hui qu'un autre projet dans le domaine des transports ferroviaires devrait prochainement pouvoir être finalisé et bénéficier d'un nouveau crédit concessionnel au titre de la Réserve pays émergents.
Enfin, je ne peux pas ne pas citer le protocole céréalier qui permet le financement de 500 000 tonnes de céréales. Mais, si vous me permettez d'être un peu long sur ces aspects, je veux insister sur le " don sécheresse ". Grâce à lui, nous avons ainsi mobilisé 75 millions de dirhams en faveur des provinces du nord pour la construction de pistes rurales ou des petits locaux professionnels ainsi que sur des opérations de micro-crédit qui ont prouvé leur efficacité. 140 millions de dirhams ont été consacrés à ce qui est déjà la première des richesses et s'annonce comme un enjeu stratégique au 21ème siècle : l'eau. Dans le centre et le sud du pays, régions qui ont été le plus touchées par la sécheresse des années 1999 et 2000, des opérations d'accès à l'eau potable et de petite et moyenne hydraulique ont été lancées.
Accès à l'eau potable, assainissement, irrigation sont aussi des projets soutenus par l'Agence française de développement qui a engagé plus de 500 millions au Maroc depuis 10 ans. Au delà même de cette " bataille de l'eau ", l'AFD s'est engagée auprès des populations rurales, et a un programme important de lutte contre l'habitat insalubre.
Pardonnez-moi d'avoir été un peu long sur ce sujet, mais les instruments de notre coopération sont toujours plus diversifiés et plus efficaces. Ils reflètent tout simplement la qualité d'une relation bilatérale résolument tournée vers l'avenir. Ces instruments financiers se concentrent aujourd'hui sur les priorités du Maroc et associent tous les acteurs économiques: Etat, entreprises, organisations professionnelles et consulaires, universités, collectivités locales, associations, ou ONG.
Cette montée en puissance de la coopération française et de la présence des entreprises française est donc tout autant la traduction d'une fidélité au passé que d'une foi en l'avenir et dans les formidables promesses du Maroc.
Une foi dans l'avenir du Maroc qui se fonde à l'évidence sur la volonté de modernisation économique dont ce pays fait preuve.
Le Maroc bénéficie en effet des atouts indispensables pour relever les défis du développement.
Des atouts structurels, d'abord, avec la proximité du grand marché européen, l'amélioration de la situation économique du pays : la dette extérieure, en particulier, qui représentait 95% en 1990, a été ramenée en dessous des 44% en 2001. Autres atouts : la présence d'une main d'oeuvre bilingue ou trilingue de mieux en mieux formée et la dynamique nouvelle mise au service des PME et de l'investissement.
Mais les atouts du Maroc sont aussi sectoriels. Je ne reviens pas sur le potentiel touristique, mais je pense aussi à l'agro-industrie et la pêche, au textile/habillement qui emploie 200.000 personnes et assure plus du tiers des exportations, ou encore aux NTIC, secteur qui a connu une véritable explosion avec l'installation en 3 ans de très nombreux centres d'appels et de services Internet ; avec un parc d'abonnés au mobile passé de 300 000 à bientôt 5 millions ; avec la conception de logiciels ou la fabrication de composants électroniques.
Le Maroc prépare l'avenir en engageant un processus de modernisation de l'environnement des affaires ambitieux, mais qui reste inachevé.
Des étapes importantes ont été franchies depuis le milieu des années 90, souvent d'ailleurs avec le soutien de la France, pour adapter l'économie marocaine aux mouvements de l'économie mondiale. Je peux citer rapidement le nouveau code de commerce, la loi sur les sociétés anonymes, l'instauration des tribunaux de commerce, la nouvelle législation relative aux marchés publics, la loi sur la concurrence et les prix, la loi relative à la protection de la propriété intellectuelle et industrielle, et j'en oublie.
Mais les investisseurs attendent d'autres réformes qui, je le sais, sont en préparation.
Il en va ainsi de toutes les mesures qui peuvent faciliter la création d'entreprise ou l'investissement. A cet égard, la mise en oeuvre du dispositif défini par la lettre royale relative à l'investissement du 9 janvier 2002 aura une importance particulière. L'instauration de centres régionaux d'investissement devrait à terme permettre d'alléger des procédures administratives qui pénalisent encore l'investissement au Maroc.
La modernisation de l'environnement des affaires, déjà bien entamée, doit être poursuivie sans faiblir par un certain nombre de mesures incontournables: adoption du code du travail, simplification du régime fiscal, diminution de la fiscalité directe et extension des prélèvements indirects, adoption du projet de loi sur les concessions, assainissement du régime de la propriété foncière.
Ces réformes, pour être consolidées, doivent s'appuyer sur une administration et une justice conscientes de l'importance de leur rôle et dotées de moyens suffisants. Les juges doivent être en mesure d'appliquer et d'interpréter une législation économique de plus en plus ambitieuse. Leurs décisions doivent être détaillées, les voies de recours facilitées. A cet égard, la création d'une institution de médiation entre l'administration et les administrés (Diwan Al Madhalim) et la rédaction d'un projet de loi visant à rendre obligatoire la motivation des décisions administratives, méritent d'être saluées.
Dans la perspective du libre échange complet avec l'Union européenne en 2012 et d'une exposition croissante à la concurrence internationale, le Maroc doit en outre relever le défi de la mise à niveau de son économie.
Sa Majesté Mohammed VI en a fait une de ses priorités : la lutte contre la pauvreté est au coeur de ce défi de la modernité économique et sociale. L'analphabétisme est un fléau en soi. Au sein d'une économie mondialisée, c'est un handicap écrasant qu'il faut combattre avec obstination, en y associant, comme vous le faites, un effort important de formation professionnelle.
Le Maroc s'est engagé sur la bonne voie. Il a clairement pour ambition de se doter des garanties et des attributs juridiques qui feront de lui un partenaire commercial crédible sur la scène internationale et une destination privilégiée pour les investisseurs étrangers. Mais il est clair aussi que les défis à relever sont encore nombreux.
Les Marocains savent que le soutien de la France et de ses partenaires européens leur est acquis.
En effet, ce partenariat franco-marocain, vous le savez bien, ne peut plus se concevoir sans référence au cadre euro-méditerranéen. J'ai même la conviction que le couple franco-marocain a vocation à être l'un des moteurs de la construction euro-méditerranéenne !
Le Maroc a fait depuis longtemps le choix de l'Europe. L'actualité de cette semaine est d'ailleurs doublement significative avec la tenue à Rabat, demain, du comité d'association, et après-demain, du second round des négociations agricoles. A ce dernier sujet, la France souhaite que ces négociations soient ambitieuses et que les négociateurs trouvent d'ici l'été un accord sur les ouvertures possibles, de part et d'autre.
L'actualité, c'est aussi la conférence des ministres du commerce à Tolède la semaine prochaine, elle-même préparatoire à la Conférence euro-méditerranéenne qui se tiendra le mois prochain à Valence.
La relation euro-marocaine, celle de l'accord d'association, est évidemment indissociable de la relation régionale euro-méditerranéenne, celle à 27 du processus de Barcelone. La relation bilatérale franco-marocaine ne doit pas seulement se fondre dans ce plus large ensemble, ce qui serait réducteur : elle doit l'animer, et lui insuffler son énergie !
Ce n'est pas un hasard si mon administration a décidé depuis trois ans de faire du chantier euro-méditerranéen un enjeu majeur de sa réflexion et de son action.
En accueillant à Agadir en mai 2001, la Jordanie, la Tunisie et l'Egypte, pour démarrer les travaux devant conduire à une zone de libre échange, le Maroc a une nouvelle fois montré la voie. Ce qu'on appelle déjà " le processus d'Agadir " porte la promesse d'un grand marché euro-méditerranéen à venir.
Si les pays méditerranéens ont engagé un effort de modernisation de leurs sociétés, dont l'indice le plus significatif pourrait être l'avancée de leur transition démographique, ils doivent passer le cap des 20 prochaines années. Aubaine démographique, ou risque d'instabilité sociale, la période actuelle est tout simplement déterminante.
Or, de nombreux efforts, européens comme méditerranéens, sont encore nécessaires pour s'approcher de cet objectif ambitieux de prospérité partagée sur toutes les deux rives de la Méditerranée.
Le défi du partenariat euro-méditerranéen consiste justement à équilibrer l'élargissement à l'Est par une dynamique méridionale propre aux pays méditerranéens.
Les récents travaux conduits par mes services, auxquels a participé le Commissaire Lamy, ont permis de souligner que, six ans après Barcelone, des progrès importants ont été accomplis sur le volet économique et commercial. Une certaine masse critique a été atteinte en ce qui concerne les accords d'association entre l'Union européenne et la quasi totalité des pays méditerranéens. Pour autant, la signature d'un accord d'association ne constitue pas une fin en soi mais doit être conçue comme un outil.
L'association ne peut ainsi se résumer au simple libre échange industriel, et doit être appliquée pleinement, telle qu'elle est prévue dans les textes. Ainsi, la libéralisation progressive et réciproque des échanges agricoles doit véritablement s'enclencher. Par ailleurs, le développement des échanges de services devra compléter ce dispositif. Il représente indéniablement un potentiel de croissance et de rattrapage à défricher.
Le partenariat euro-méditerranéen ne saurait par ailleurs se résumer à une simple juxtaposition d'accords d'association " nord-sud ". L'ouverture nord-sud programmée a bien vocation à être complétée par une intégration Sud-Sud !
J'insiste sur ce point car il me paraît fondamental. Aujourd'hui, force est de constater que les échanges commerciaux sud/sud sont encore trop faibles (moins de 5% du total) et que les économies de la zone apparaissent plus concurrentes que complémentaires. A cet égard, je me félicite de la décision, prise lors du 5ème sommet Euromed des milieux d'affaires à Istanbul le 1er mars, de créer l'Union méditerranéenne des confédérations des entreprises (l'UMCE), dont le siège sera à Tunis et dont le président ne sera autre que celui de la CGEM, M. Hassan Chami. Une telle structure, regroupant l'ensemble des organisations patronales de la rive sud de la Méditerranée, sera un interlocuteur de poids dans le concert euro-méditerranéen.
A Marseille au second semestre 2000, la présidence française de l'Union avait cherché à favoriser cette double dynamique nord/sud et sud/sud dans l'espace euro-méditerranéen. La réunion des Ministres du Commerce, la semaine prochaine à Tolède, doit permettre d'approfondir ce dialogue, d'aller plus loin et plus vite !
Le défi est impressionnant : il est aussi exaltant. La relation franco-marocaine est exemplaire, elle est d'ores et déjà un axe fort du véritable espace unifié euro-méditerranéen qui reste à bâtir. Cette ambition, à nous de la faire partager et de transformer cette volonté de quelques Etats en grand projet collectif. C'est une autre façon de répondre aux défis qui ont été lancés au monde en ce début de XXIème siècle.
Je vous remercie.
(Source http://www.minefi.gouv.fr, le 26 mars 2002)