Déclaration commune des ministres des finances et des gouverneurs de Banque centrale des pays industrialisés, sur la situation économique et la coopération économique internationale, New-York le 25 janvier 1992.

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Circonstance : Réunion des ministres des finances et des gouverneurs des sept pays les plus industrialisés à New York le 25 janvier 1992

Texte intégral

1. Les ministres des finances et les gouverneurs des banques centrales de l'Allemagne, du Canada, des Etats-Unis, de la France, de l'Italie, du Japon et du Royaume-Uni se sont réunis le 25 janvier à New York, et ont convenu d'intensifier leurs efforts de coopération en vue du renforcement de la croissance économique mondiale. Les ministres ont passé en revue l'évolution économique dans le monde avec le directeur général du Fonds Monétaire International, dans le cadre du processus de coordination économique en cours, ainsi que la situation économique dans l'ancienne Union soviétique.
- 2. Les ministres et les gouverneurs ont exprimé leur inquiétude à cause de l'affaiblissement de l'activité économique depuis leur dernière réunion. Les premiers signes de reprise n'ont pas été soutenus dans certains pays, alors que d'autres enregistraient une décélération à partir de taux élevés de croissance, en compromettant des progrès réalisés au cours de la dernière décennie en ce qui concerne l'emploi et en créant un danger de retour au protectionnisme. La confiance des consommateurs et du monde des affaires est restée faible, en retardant la reprise de l'activité économique.
- 3. Les ministres et les gouverneurs sont cependant convaincus que les forces qui ont inhibé l'activité économique dans plusieurs pays sont en train de dissiper, et que les conditions d'une croissance globale meilleure existent. Les prévisions en ce qui concerne l'inflation se sont considérablement améliorées et, exception faite de certains pays, la pression des prix et des salaires a considérablement diminué. Les taux d'intérêt ont diminué dans tous les pays, en certains cas substantiellement ; les prix du pétrole sont restés stables.
- 4. Afin de renforcer le processus de reprise, les ministres et les gouverneurs sont convenus que, dans les circonstances actuelles, il est nécessaire d'intensifier leurs efforts de coopération pour améliorer les conditions d'une croissance non-inflationniste dans leurs économies, en renforçant ainsi l'économie internationale. Les ministres et les gouverneurs sont, par conséquent, convenus qu'il faudrait fournir un cadre de politiques stables, susceptible de créer l'environnement pour une confiance renouvelée dans l'économie. Ils sont fermement convaincus que le cadre approprié consiste dans des politiques fiscales et monétaires visant à une croissance susceptible d'être soutenue, accompagnée par la stabilité des prix à moyen terme. Ce sont les conditions essentielles pour des taux d'intérêt plus bas et pour des investissements productifs qui soutiendraient la reprise et conduiraient à une réduction du chômage.
- 5. Les ministres et les gouverneurs ont confirmé leur engagement en ce qui concerne le processus de coordination des politiques qui a contribué à la bonne performance de l'économie mondiale dans les années 1980. Ils ont réaffirmé la nécessité d'augmenter l'épargne sur le plan mondial. Ils ont fortement insisté sur la nécessité de maintenir des marchés globaux ouverts et efficaces, afin d'aider à la fois les économies des pays industrialisés et des pays en voie de développement. Ils ont souligné qu'une conclusion satisfaisante de l'Uruguay Round intensifierait la confiance du secteur privé et contribuerait de façon essentielle à la croissance économique globale. Il a été reconnu que l'achèvement du marché interne de la Communauté européenne à la fin de cette année et les récentes décisions de Maastricht renforceraient ultérieurement les bases d'une croissance économique en Europe.
6. En ce qui concerne les politiques économiques dans leurs pays respectifs, les ministres et les gouverneurs ont convenu que chaque pays mettrait en vigueur des politiques fiscales, monétaires et structurelles visant à encourager les conditions d'une croissance soutenue et de la stabilité des prix, le degré de recours à l'une ou l'autre politique étant différent en fonction des circonstances dans chaque pays. En ce qui concerne la politique fiscale, les ministres et les gouverneurs ont constaté que, dans certains pays, la dépense publique pourrait être redistribuée à travers des mesures spécifiques, visant à améliorer la confiance et à augmenter la productivité. Ils ont toutefois insisté sur le fait que les pays ayant d'importants déficits fiscaux et un endettement public élevé doivent poursuivre leurs efforts à moyen terme pour réaliser la consolidation fiscale, cette dernière étant un moyen pour améliorer l'épargne nationale et réduire les taux d'intérêt réels.
- 7. Quant à la politique monétaire, les ministres et les gouverneurs ont reconnu l'amélioration de la performance en ce qui concerne l'inflation dans plusieurs pays, au cours de l'année dernière. Les politiques monétaires devraient viser à préserver les progrès réalisés dans la réduction de l'inflation, tout en laissant une marge adéquate pour le financement d'une croissance soutenue. Les pays qui, à l'avenir, obtiendront de meilleurs résultats que prévu en ce qui concerne l'inflation, auront peut-être une base à partir de laquelle il leur sera possible d'assouplir les conditions monétaires et les taux d'intérêts sans compromettre l'engagement en ce qui concerne la stabilité des prix et les objectifs de taux de change.
- 8. Les ministres et les gouverneurs se sont félicités des efforts en cours en Allemagne pour réduire le recours à l'emprunt de la part du secteur public, et ont exprimé l'espoir que la modération salariale contribuera à mitiger les pressions des prix dans ce pays.
- 9. En ce qui concerne les politiques structurelles, les ministres et les gouverneurs ont insisté sur la nécessité de poursuivre des réformes en vue de réduire les rigidités, de renforcer les forces du marché et d'améliorer l'efficacité de leurs économies et de l'économie mondiale en général.
- 10. Les ministres et les gouverneurs ont passé en revue leurs politiques économiques à la lumière de ces développements et de ces objectifs.
- Les Etats-Unis annonceront, dans le discours du président sur l'état de l'Union, un programme exhaustif pour le renforcement de la croissance et de la compétitivité. Le programme comprendra des mesures pour améliorer la confiance des consommateurs, des encouragements à l'épargne et à l'investissement et des dépenses plus importantes pour la recherche et le développement. Ces mesures seront financées conformément au principe "pay as you go" (paiement au fur et à mesure) de la loi sur le budget de 1990.
- Le gouvernement japonais a présenté à la Diète le budget pour l'année fiscale 1992 et le programme fiscal d'investissement et d'emprunt dont l'objectif est d'accroître l'investissement public par le gouvernement central et les gouvernements locaux, et de contribuer au développement dans le monde par son aide officielle au développement ainsi que par d'autres mesures, malgré des conditions fiscales peu propices. Le gouvernement du Japon s'attend à ce que la Diète approuve rapidement ce programme. La récente décision de la Banque du Japon de réduire les taux d'intérêt vise aussi à maintenir une croissance soutenue en même temps que la stabilité des prix.
La reprise du Canada après sa récession a été hésitante, mais l'inflation est considérablement diminuée. Avec le déclin de l'inflation et des prévisions d'inflation, les conditions monétaires sont devenues plus faciles. Une bonne performance en ce qui concerne l'inflation crée la base monétaire indispensable pour une réduction des taux d'intérêt, ce qui encourage une reprise économique susceptible d'être soutenue. Les autorités canadiennes continueront à appliquer leur politique à moyen terme de réduction du déficit et de contrôle de la dépense, en se concentrant sur des politiques, telles que la formation, qui améliorent la compétitivité, poussent la croissance et les perspectives d'emploi et améliorent la confiance.
- Les autorités françaises continueront à appliquer une politique économique axée sur la stabilité monétaire et la croissance non inflationniste, capable de créer davantage d'emplois. Le taux de croissance s'est amélioré depuis le printemps dernier et le taux d'inflation a baissé (3,1 % en 1991), le contrôle sur la dépense publique a été maintenu sans rigueur excessive, pour soutenir la croissance, et le déficit fiscal dépasse les prévisions initiales pour 1992. Des dégrèvements à l'impôt sur les sociétés, l'encouragement aux industries à technologie avancée, le renforcement des petites et moyennes entreprises, des mesures visant à renforcer le capital propre des entreprises, et le développement de la formation et de l'apprentissage devraient contribuer à la croissance.
- Au Royaume-Uni, avec la poursuite du déclin de l'inflation et une substantielle réduction du taux d'intérêt l'année dernière, les conditions d'une reprise de la croissance sont maintenant réunies. Le gouvernement britannique est toujours engagé à maintenir la parité de la livre et à évoluer le moment venu dans les marges plus étroites ; la politique fiscale continue d'être fixée de manière à réaliser l'équilibre budgétaire au cours du cycle économique. Ces politiques ainsi que la poursuite des effets des réformes structurelles offrent une perspective de croissance continue, combinée avec une inflation réduite.
- En Allemagne, on s'attend à la poursuite d'une solide croissance. Les mesures de promotion de l'investissement en Allemagne de l'Est deviennent de plus en plus visibles. La suspension de la surtaxe de sept et demi pour cent de l'impôt sur le revenu pour la mi-1992, et les aides fiscales prévues pour les familles renforceront la consommation. L'introduction de mesures spéciales d'encouragement stimulera la construction de logements. Afin de développer ultérieurement l'activité des investisseurs, l'imposition des entreprises sera réformée, une première étape de cette réforme étant prévue pour 1992 et d'autres devant être décidées avant la fin de l'année. Pour réduire les éventuelles conséquences sur la situation fiscale, et pour éviter un recours supplémentaire à l'emprunt, on réduira d'autres dépenses, y compris celles pour la défense et les subventions. Une plus grande marge pour la réduction des taux d'intérêt pourrait être créée par la poursuite de politiques de consolidation fiscale à moyen terme, avec la décélération de la forte croissance monétaire et de la demande de crédit, ainsi que par un assouplissement des pressions salariales et le retour à la stabilité des prix.
En Italie, une ultérieure réduction de l'inflation et le retour à une croissance susceptible d'être soutenue restent le double objectif de la politique économique. Dans ce but, les politiques monétaires et la politique de taux de change doivent rester inchangées. Des réductions du déficit public restent la pierre angulaire de la politique fiscale. Le gouvernement surveillera de près l'application du budget 1992 et décidera des mesures de correction aussi rapidement que nécessaire. Les ministres et les gouverneurs se sont félicités de la détermination du gouvernement italien de maintenir les salaires dans le secteur public dans les limites de la loi de finances, et de réduire la part du gouvernement dans l'économie.
- 11. Les ministres et les gouverneurs ont également passé en revue la situation sur les marchés de change. Ils ont constaté, dans le cadre de la coordination des politiques économiques, que leurs efforts au cours des dernières années ont contribué à créer des marchés plus stables. Ils ont convenu de continuer de suivre les développements du marché et ont réaffirmé leur engagement à coopérer sur les marchés de change, en contribuant ainsi à créer des conditions favorables pour des marchés de change stables et la reprise économique.
- 12. Les ministres et les gouverneurs ont discuté sur la situation dans l'ancienne Union soviétique et sur les mesures récemment appliquées dans certains des Etats indépendants. Ils se sont félicités du fait que le processus de réforme se soit déroulé de façon pacifique, tout en reconnaissant que la transformation de l'ancienne économie soviétique sera un processus difficile et long. Il ne peut réussir que si les Etats indépendants de l'ancienne Union soviétique coopèrent entre eux, maintiennent la liberté des échanges et créent des structures administratives efficaces. Les réformes économiques devraient être formulées et appliquées en étroite coopération avec le FMI. En outre, l'adhésion au MOU signé en novembre 1991 entre le G7 et les 8 Républiques, y compris la poursuite du paiement des obligations du service de la dette qui n'ont pas été renvoyées, serait un préalable pour maintenir la capacité d'obtenir des crédits et de faire appel à une aide financière ultérieure.
- 13. Les ministres et les gouverneurs ont pris note de la demande d'adhésion au FMI de la part des Etats Baltes, de la Russie, de l'Azerbaïdjian, du Kazakhstan et de l'Arménie. Ils ont demandé au FMI d'agir dans les meilleurs délais pour mettre au point d'ici la réunion du printemps les arrangements requis pour compléter les procédures d'adhésion pour les Etats dont la demande est actuellement examinée, et qui sont en mesure de répondre aux conditions d'adhésion.