Déclaration de Mme Michèle Alliot-Marie, ministre de la défense, sur le maintien du statut militaire des gendarmes, leur mission en matière de sécurité intérieure et les mesures en faveur de la gendarmerie, Paris le 5 juillet 2002.

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Circonstance : Réunion des commandants d'unités de gendarmerie départementale, de gendarmerie mobile et de la Garde Républicaine, Paris le 5 juillet 2002

Texte intégral

Monsieur le ministre,
Messieurs les Directeurs généraux,
Mesdames et Messieurs les officiers généraux, officiers et sous-officiers,
Mesdames, Messieurs,
Cette réunion des commandants d'unité de la gendarmerie départementale, mobile et de la garde républicaine résulte de notre volonté commune, à Nicolas Sarkozy et moi-même.
Il nous a semblé utile de vous rassembler aujourd'hui pour vous dire, en direct, ce que le gouvernement attend de vous au service de la sécurité quotidienne, conformément aux orientations données par le Président de la République et par le Premier Ministre.
Vous le savez, et peut être mieux que quiconque du fait de votre proximité avec nos concitoyens, les attentes de sécurité ont été mises en évidence de façon particulièrement claire et forte par les Français au cours du débat politique de ces derniers mois.
Il y a urgence à réagir, à entreprendre le rétablissement de la sécurité intérieure, à répondre à l'attente de restauration de l'autorité de l'État, exprimé par nos concitoyens.
Dans ce but, le Président de la République a décidé de confier, au-delà de la tradition inscrite dans le décret du 20 mai 1903, au ministre de l'intérieur, de la sécurité intérieure et des libertés locales, l'autorité directe sur l'emploi des forces de gendarmerie dans l'exécution de leurs missions de sécurité intérieure.
Dans le même temps, il a été réaffirmé avec force que la gendarmerie conservait son statut militaire, ses missions militaires, à l'intérieur comme à l'extérieur du territoire, et bien évidemment aussi ses missions judiciaires. Son rattachement au ministère de la Défense est donc maintenu.
Ce contexte étant rappelé, je voudrais attirer votre attention sur trois points.
Le premier concerne le statut militaire qui est le vôtre.
Je le redis avec force, la gendarmerie nationale fait partie intégrante des forces armées. Elle relève à ce titre du statut militaire.
Composante à part entière de l'institution militaire, la gendarmerie permet au gouvernement d'exercer, sans discontinuité, la gestion des crises, du temps de paix jusqu'éventuellement, le temps de guerre.
L'État a besoin de disposer d'une force armée capable en permanence d'affronter de manière certaine, instantanée et efficace les situations pouvant revêtir un caractère extrême.
C'est cette exigence qui justifie que la gendarmerie demeure soumise au statut militaire ; ses principes fondamentaux ne sauraient donc être remis en cause.
La condition militaire revêt des qualités particulières, qualités humaines d'abord, des qualités professionnelles aussi.
Elle impose des sujétions, dont celle de la disponibilité n'est pas la moindre, et il est légitime que ces sujétions entraînent des compensations particulières et une protection spécifique. Tel est bien le sens du statut général des militaires.
Et ce statut est, pour la gendarmerie, un élément de force et d'efficacité. Il lui permet d'affirmer sa pleine complémentarité avec la police nationale dans l'accomplissement des missions de sécurité intérieure qui lui seront assignées.
Dans ce cadre, je serai attentive à toutes les questions statutaires qui vous concernent au même titre que les militaires des autres armées.
Je n'ignore pas les contraintes que ce statut implique pour vous-mêmes et aussi pour les militaires qui relèvent de votre commandement. Je ne méconnais pas les difficultés auxquelles les gendarmes sont confrontés dans leur vie professionnelle, mais aussi, je le sais, dans leur vie personnelle.
Je m'emploierai à ce qu'il soit tenu compte, dans l'unité de la condition militaire, en particulier des situations auxquelles les gendarmes sont plus spécifiquement astreints.
C'est également dans le cadre de ce statut que la protection, qui vous est due par l'État quand vous faites l'objet de menaces voire de violences dans l'exercice de vos fonctions, vous sera assurée.
Et, je n'ignore rien des conditions souvent difficiles dans lesquelles vous exercez vos fonctions ; elles prennent malheureusement parfois, dans le cadre d'une société trop souvent marquée par la violence, la forme de menaces, d'injures, voire d'agressions.
Je tiens à vous dire que vous aurez toujours mon soutien entier et total, dans les épreuves que vous pourrez rencontrer en accomplissant vos missions. Je tiens à vous redire que la protection de l'Etat vous sera assurée chaque fois que les circonstances l'exigeront.
Je souhaite en deuxième lieu souligner les responsabilités qui sont les miennes, et que je ressens comme telles, à l'égard de la gendarmerie.
J'apporterai sans réserve mon concours pour faire en sorte, au titre des compétences qui sont les miennes, que la gendarmerie nationale soit en mesure de toujours mieux répondre à l'attente de nos compatriotes dans le domaine de la sécurité.
Dans ce cadre, je veillerai personnellement à ce que le nouveau projet de loi de programmation militaire 2003-2008 que je suis en train de préparer soit en totale cohérence avec la loi d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure.
Le défi à relever est essentiel : il s'agit de créer les conditions de l'adaptation, pour les cinq prochaines années, de cette arme aux besoins créés par l'évolution de notre société.
C'est ainsi que j'ai proposé au ministre de l'intérieur de donner à la gendarmerie nationale les effectifs et les équipements supplémentaires qui lui sont nécessaires pour lui permettre d'accomplir ses missions avec efficacité, et dans des conditions satisfaisantes pour chacun.
Ces moyens supplémentaires, qui seront accordés par la loi d'orientation et de programmation pour la sécurité intérieure, seront pris en compte par la future loi de programmation militaire.
Ils porteront bien évidemment sur l'augmentation des recrutements, sur la remise à niveau des moyens d'investissement de la gendarmerie, sur l'acquisition et le renouvellement des matériels, bien nécessaires, qui soient propres à garantir l'efficacité des unités.
Il s'agit également d'améliorer la capacité du parc immobilier de la gendarmerie en vue d'offrir à ses personnels des conditions de travail, mais aussi des conditions de vie, en rapport avec les charges auxquelles ils doivent faire face.
Enfin, une attention toute particulière sera apportée à la formation initiale et continue des militaires de la gendarmerie. J'estime en effet que c'est la condition essentielle du maintien du professionnalisme dans l'ensemble des compétences.
Au total, la gendarmerie conserve donc pleinement son originalité de force militaire, dédiée à des missions de sécurité intérieure.
Compte tenu de la situation spécifique de la gendarmerie et des compétences désormais exercées par les ministères de la défense et de l'intérieur à cet égard, le nouveau dispositif de sécurité intérieure suppose, pour être pleinement efficace, une concertation étroite entre les deux ministres de l'intérieur et de la défense et je n'ai pas le sentiment que cela nous pose, à Nicolas Sarkozy et à moi-même, le moindre problème.
Je suis tout à fait déterminée à lui apporter mon concours pour la mise en uvre de la politique de sécurité intérieure qu'il a la lourde charge de conduire.
Je voudrais enfin m'adresser aux commandants d'unité que vous êtes dans votre immense majorité.
Vous êtes dépositaires de la fonction de chef que l'État vous a confiée. Cette fonction fait appel à vos qualités de femmes et d'hommes, de devoir et d'honneur, avec tout ce que cela suppose d'engagement personnel, d'exemplarité et de compétence.
Ces qualités sont d'autant plus importantes pour le succès de la gendarmerie que celle-ci est une institution profondément déconcentrée, où le sens de l'initiative et des responsabilités prend toute sa dimension.
Cela suppose aussi une capacité de dialogue et d'écoute de vos subordonnés, condition d'une pleine mobilisation des énergies.
Pour répondre à la confiance que les Français placent dans la gendarmerie, pour répondre à la confiance que le gouvernement vous renouvelle aujourd'hui, vous devrez oser entreprendre avec l'objectif de réussir, pas seulement pour vous mais aussi parce que la Nation l'attend de vous.
Le gouvernement vous confie la sécurité des Français. Cela signifie que vous avez aujourd'hui à leur égard une obligation de résultat.
Cela suppose donc que chacune de vos décisions soit prise en gardant à l'esprit sa finalité : donner aux Françaises et aux Français la meilleure qualité de service possible. C'est ce souci qui devra en permanence guider votre action.
Telles sont les précisions que je souhaitais vous apporter, en ouvrant cette séance et en me réjouissant de vous rencontrer.
Je veux vous rappeler que vous avez toute la confiance du chef de l'Etat et du gouvernement, que vous avez ma confiance et celle des Français.
(Source http://www.défense.gouv.fr, le 9 juillet 2002)