Texte intégral
Mesdames et messieurs,
L'AFSSE a été longtemps attendue. Alors que le législateur en avait décidé la création en mai 2001, elle ne disposait un an plus tard ni de conseil d'administration, ni de personnels, ni de budget. Nos prédécesseurs nous avaient laissé le soin de lui donner un contenu.
Nous avons consacré depuis lors beaucoup d'énergie, Jean-François MATTEI et moi-même, à faire sortir de terre cette agence. C'est vous dire tout le plaisir que j'ai aujourd'hui à procéder à son inauguration, qui marque le véritable démarrage de ce qui devra très vite devenir la référence française en matière de risques sanitaires liés à l'environnement.
Bien évidemment, tout n'est pas réglé. Au contraire, il serait plus juste de dire que tout reste à faire. Le conseil d'administration et le Président viennent à peine d'être nommés, les équipes restent à constituer, les locaux sont provisoires. Mais la machine est en route, et je crois pouvoir dire qu'elle ne s'arrêtera plus.
Jean-François MATTEI a cité plusieurs des sujets qui avaient attiré l'attention des médias récemment. J'ai aussi en tête la pollution de l'air, l'exposition au bruit, ou les incinérateurs d'ordures ménagères. Les événements espagnols font écho aux nombreux questionnements de 2000 sur la toxicité du fioul de l'Erika.
Aucun de ces dossiers n'a été épargné par la polémique. Cela tient d'abord à la sensibilité croissante des Français à l'impact des modifications de l'environnement sur la santé : un sondage réalisé en avril dernier à l'initiative de la Commission européenne plaçait le sujet santé et environnement au premier rang des préoccupations environnementales des Européens, et en particulier des Français. Cela tient aussi à la complexité des questions traitées : autant l'on sait correctement appréhender l'impact des expositions aiguës, autant l'exercice est plus difficile quand il s'agit de pollutions diffuses et multiples portant sur des populations nombreuses. Un risque individuel faible peut, du fait du nombre de personnes qu'il concerne, induire, en cas d'exposition prolongée, un risque collectif suffisamment important pour devenir un véritable enjeu de santé publique.
Au total, quelles qu'en soient les raisons, le résultat est le même : ces questions ont été jusqu'à présent trop souvent traitées sur fond de polémique, et parfois de scandales ou de révélations, vraies ou fausses. Cette façon de procéder ne peut plus être la nôtre à l'avenir, et c'est je crois un des objectifs que le législateur avait en tête. Le grand défi de l'AFSSE, c'est celui-là : poser le débat, sur des sujets par nature passionnés.
L'AFSSE répond à deux impératifs, qui correspondent à deux priorités que je me suis fixées, et qui devront trouver une traduction opérationnelle dans le fonctionnement de l'agence : la sécurité, et la concertation.
L'impératif de sécurité figure dans l'intitulé même de l'agence. Il est intimement lié à la préoccupation de développement durable dont le Président et le Premier Ministre ont souhaité qu'ils imprègnent l'ensemble de l'action du Gouvernement. Une société soucieuse du développement durable doit en effet faire de l'évaluation et de la gestion des risques collectifs une de ses premières priorités, et cesser de considérer que les progrès de la science suffiront dans le futur à réparer les conséquences des risques que nous prenons aujourd'hui. Nous devons à tout prix nous débarrasser de cette philosophie qui, implicitement ou explicitement, a guidé certaines de nos décisions par le passé. Dans le séminaire gouvernemental que le Premier Ministre consacre demain matin au développement durable, j'ai d'ailleurs souhaité qu'un des thèmes de réflexion soit intitulé " prévention, précaution et police ".
Si l'on prend l'exemple des substances chimiques, sur lesquelles une réglementation européenne est en préparation, il est symptomatique que la majorité de celles qui sont aujourd'hui sur le marché ne disposent pas d'une évaluation détaillée des risques sanitaires et environnementaux qu'elles engendrent. Nous entreprenons, au niveau européen, de corriger le tir, et l'AFSSE sera largement mise à contribution pour cela.
Le domaine des liens santé-environnement est nouveau, et largement inexploré. Il faudra que l'AFSSE fédère et renforce l'expertise existante, et qu'elle donne une impulsion à de nouveaux travaux scientifiques, tels que ceux que mon ministère soutenait jusqu'à présent dans le cadre de l'appel à projets " environnement et santé ".
Le second principe sur lequel je voudrais insister est celui de la participation. La demande sociale face au risque ne peut être satisfaite uniquement par la diffusion d'informations brutes. Il nous faut tout d'abord travailler à la qualité de l'information et à sa lisibilité par le grand public. Si les questions de santé-environnement suscitent des peurs, c'est aussi parce qu'elles sont particulièrement difficiles à saisir. L'effort que l'AFSSE consacrera à rester accessible doit être en conséquence important. Mais au delà de cette exigence fondamentale d'information, il convient également de mobiliser efficacement tous les acteurs concernés, scientifiques ou non, dans les différentes étapes de l'analyse des risques, c'est à dire depuis la formulation des problèmes jusqu'à l'évaluation des actions qui auront été mises en uvre. Ce principe va d'ailleurs de pair avec le principe de transparence, qui doit s'appliquer au contenu des expertises, mais aussi aux procédures et aux mécanismes de décision.
Mesdames et messieurs, nous savons que le risque existe, dans le domaine de la sécurité sanitaire environnementale comme ailleurs. Cela n'est pas nouveau. Nous ne parviendrons jamais à le supprimer totalement, dans ses différentes facettes. Mais l'AFSSE doit nous permettre en premier lieu de le minimiser, en l'identifiant tout d'abord, puis en nous aidant à définir des politiques de prévention intelligentes et rationnelles. Au-delà, elle doit aussi nous aider à prendre conscience du risque et à l'accepter en société adulte. C'est un beau chantier. J'ai bien noté la grande motivation avec lequel il était abordé par le président de l'AFSSE, Guy PAILLOTIN, et sa directrice générale, Michèle VEDRINE.
Demain, le débat voulu par le Président de la République sur la Charte de l'Environnement nous permettra de porter au niveau constitutionnel les quatre principes fondamentaux de la sécurité environnementale : précaution, prévention, réparation et participation. Dès aujourd'hui, vous contribuez à leur donner corps par votre action. Je voulais vous en remercier très chaleureusement, et souhaiter bon vent à l'AFSSE.
(Source http://www.environnement.gouv.fr, le 28 novembre 2002)
L'AFSSE a été longtemps attendue. Alors que le législateur en avait décidé la création en mai 2001, elle ne disposait un an plus tard ni de conseil d'administration, ni de personnels, ni de budget. Nos prédécesseurs nous avaient laissé le soin de lui donner un contenu.
Nous avons consacré depuis lors beaucoup d'énergie, Jean-François MATTEI et moi-même, à faire sortir de terre cette agence. C'est vous dire tout le plaisir que j'ai aujourd'hui à procéder à son inauguration, qui marque le véritable démarrage de ce qui devra très vite devenir la référence française en matière de risques sanitaires liés à l'environnement.
Bien évidemment, tout n'est pas réglé. Au contraire, il serait plus juste de dire que tout reste à faire. Le conseil d'administration et le Président viennent à peine d'être nommés, les équipes restent à constituer, les locaux sont provisoires. Mais la machine est en route, et je crois pouvoir dire qu'elle ne s'arrêtera plus.
Jean-François MATTEI a cité plusieurs des sujets qui avaient attiré l'attention des médias récemment. J'ai aussi en tête la pollution de l'air, l'exposition au bruit, ou les incinérateurs d'ordures ménagères. Les événements espagnols font écho aux nombreux questionnements de 2000 sur la toxicité du fioul de l'Erika.
Aucun de ces dossiers n'a été épargné par la polémique. Cela tient d'abord à la sensibilité croissante des Français à l'impact des modifications de l'environnement sur la santé : un sondage réalisé en avril dernier à l'initiative de la Commission européenne plaçait le sujet santé et environnement au premier rang des préoccupations environnementales des Européens, et en particulier des Français. Cela tient aussi à la complexité des questions traitées : autant l'on sait correctement appréhender l'impact des expositions aiguës, autant l'exercice est plus difficile quand il s'agit de pollutions diffuses et multiples portant sur des populations nombreuses. Un risque individuel faible peut, du fait du nombre de personnes qu'il concerne, induire, en cas d'exposition prolongée, un risque collectif suffisamment important pour devenir un véritable enjeu de santé publique.
Au total, quelles qu'en soient les raisons, le résultat est le même : ces questions ont été jusqu'à présent trop souvent traitées sur fond de polémique, et parfois de scandales ou de révélations, vraies ou fausses. Cette façon de procéder ne peut plus être la nôtre à l'avenir, et c'est je crois un des objectifs que le législateur avait en tête. Le grand défi de l'AFSSE, c'est celui-là : poser le débat, sur des sujets par nature passionnés.
L'AFSSE répond à deux impératifs, qui correspondent à deux priorités que je me suis fixées, et qui devront trouver une traduction opérationnelle dans le fonctionnement de l'agence : la sécurité, et la concertation.
L'impératif de sécurité figure dans l'intitulé même de l'agence. Il est intimement lié à la préoccupation de développement durable dont le Président et le Premier Ministre ont souhaité qu'ils imprègnent l'ensemble de l'action du Gouvernement. Une société soucieuse du développement durable doit en effet faire de l'évaluation et de la gestion des risques collectifs une de ses premières priorités, et cesser de considérer que les progrès de la science suffiront dans le futur à réparer les conséquences des risques que nous prenons aujourd'hui. Nous devons à tout prix nous débarrasser de cette philosophie qui, implicitement ou explicitement, a guidé certaines de nos décisions par le passé. Dans le séminaire gouvernemental que le Premier Ministre consacre demain matin au développement durable, j'ai d'ailleurs souhaité qu'un des thèmes de réflexion soit intitulé " prévention, précaution et police ".
Si l'on prend l'exemple des substances chimiques, sur lesquelles une réglementation européenne est en préparation, il est symptomatique que la majorité de celles qui sont aujourd'hui sur le marché ne disposent pas d'une évaluation détaillée des risques sanitaires et environnementaux qu'elles engendrent. Nous entreprenons, au niveau européen, de corriger le tir, et l'AFSSE sera largement mise à contribution pour cela.
Le domaine des liens santé-environnement est nouveau, et largement inexploré. Il faudra que l'AFSSE fédère et renforce l'expertise existante, et qu'elle donne une impulsion à de nouveaux travaux scientifiques, tels que ceux que mon ministère soutenait jusqu'à présent dans le cadre de l'appel à projets " environnement et santé ".
Le second principe sur lequel je voudrais insister est celui de la participation. La demande sociale face au risque ne peut être satisfaite uniquement par la diffusion d'informations brutes. Il nous faut tout d'abord travailler à la qualité de l'information et à sa lisibilité par le grand public. Si les questions de santé-environnement suscitent des peurs, c'est aussi parce qu'elles sont particulièrement difficiles à saisir. L'effort que l'AFSSE consacrera à rester accessible doit être en conséquence important. Mais au delà de cette exigence fondamentale d'information, il convient également de mobiliser efficacement tous les acteurs concernés, scientifiques ou non, dans les différentes étapes de l'analyse des risques, c'est à dire depuis la formulation des problèmes jusqu'à l'évaluation des actions qui auront été mises en uvre. Ce principe va d'ailleurs de pair avec le principe de transparence, qui doit s'appliquer au contenu des expertises, mais aussi aux procédures et aux mécanismes de décision.
Mesdames et messieurs, nous savons que le risque existe, dans le domaine de la sécurité sanitaire environnementale comme ailleurs. Cela n'est pas nouveau. Nous ne parviendrons jamais à le supprimer totalement, dans ses différentes facettes. Mais l'AFSSE doit nous permettre en premier lieu de le minimiser, en l'identifiant tout d'abord, puis en nous aidant à définir des politiques de prévention intelligentes et rationnelles. Au-delà, elle doit aussi nous aider à prendre conscience du risque et à l'accepter en société adulte. C'est un beau chantier. J'ai bien noté la grande motivation avec lequel il était abordé par le président de l'AFSSE, Guy PAILLOTIN, et sa directrice générale, Michèle VEDRINE.
Demain, le débat voulu par le Président de la République sur la Charte de l'Environnement nous permettra de porter au niveau constitutionnel les quatre principes fondamentaux de la sécurité environnementale : précaution, prévention, réparation et participation. Dès aujourd'hui, vous contribuez à leur donner corps par votre action. Je voulais vous en remercier très chaleureusement, et souhaiter bon vent à l'AFSSE.
(Source http://www.environnement.gouv.fr, le 28 novembre 2002)