Déclaration de M. Alain Juppé, Premier ministre, sur l'insertion professionnelle des jeunes, la mise en réseau des établissements scolaires, la lutte contre l'illettrisme et la baisse de la TVA sur le multimédia à caractère éducatif et culturel, Paris le 13 mars 1997.

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Circonstance : Séminaire gouvernemental sur l'état d'avancement des projets annoncés par le Président Chirac le 10 mars, à Paris le 13 mars 1997

Texte intégral

A. Juppé : "D'abord tout ce qui concerne l'éducation et la formation qui a tenu une grande place dans l'entretien du président de la République d'où la présence à mes côtés de F. Bayrou. Je voudrais très rapidement évoquer quelques questions précises sous ce thème général.
Le président de la République a parlé des programmes scolaires et de la nécessité d'associer la représentation nationale à une réflexion d'ensemble sur la philosophie de ces programmes. Dans cet esprit, un débat sera organisé à l'Assemblée nationale au mois de juin, débat au cours duquel le ministre de l'Education nationale pourra présenter le travail qui a déjà été fait pour réécrire toute une série de programmes, le travail qui reste à faire et, écouter les parlementaires qui ont des orientations ou des idées à faire valoir dans ce domaine extrêmement important pour la formation de nos jeunes.
Deuxième sujet évoqué sous ce thème général par le président de la République : la mise en réseau des établissements scolaires. Cette action avait été intégrée par J.-C. Gaudin dans la préparation du schéma national d'aménagement du territoire qui sera présenté au mois d'avril prochain lors du Comité interministériel, le CIAT comme on dit, que je présiderai. J'ai souhaité que les ministres plus particulièrement compétents, M. Bayrou et M. Fillon, dans le cadre de ce schéma général, me présentent dans les toutes prochaines semaines un plan d'action qui pourrait dans un premier temps concerner quelques régions choisies comme des régions tests, plan d'action qui permettra de présenter concrètement la manière dont nous allons équiper les établissements scolaires et pour être tout à fait concret, dissiper peut-être quelques inquiétudes ou quelques idées fausses sur cette idée de "réseau", je dirais qu'il s'agit tout simplement - ce sera je crois efficace - d'équiper chaque classe de ces établissements scolaires, d'une prise de téléphone - il y a des prises de téléphone dans les établissements scolaires mais il n'y en a pas une dans chaque classe - de façon que sur chacune de ces prises on puisse brancher des terminaux, des ordinateurs personnels. Nous sommes en train de discuter avec France Télécom d'une réforme de la tarification de l'utilisation de ces terminaux sur les lignes téléphoniques et nous réfléchissons également au contenu à faire passer de façon que la mise en réseau ne soit pas simplement la généralisation d'Internet mais aussi l'accès à la télévision éducative ou à d'autres réseaux de proximité. Donc plan d'action dans les toutes prochaines semaines avec application en 1997-1998.
Troisième sujet évoqué par le Président : la lutte contre l'illettrisme. Il avait présidé d'ailleurs il y a quelques semaines un Conseil restreint à l'Elysée sur ce sujet et les choses ont avancé puisque M. Bentolila qui est un des grands spécialistes de l'illettrisme a été chargé dès le 26 février dernier par M. Bayrou et par M. Barrot d'une mission sur cette question. Dans la loi de cohésion sociale qui sera bientôt discutée au Parlement, est également prévue la rénovation des mécanismes administratifs et politiques, c'est-à-dire la création d'un Comité interministériel de lutte contre l'illettrisme et d'un Secrétariat national de lutte contre l'illettrisme qui permettront de moderniser, de dynamiser ce qui existe jusqu'à présent.
Quatrième sujet : la baisse de la TVA sur les CD-Rom et les services en ligne à caractère éducatif et culturel. Avec M. Arthuis, nous avons décidé de saisir nos partenaires européens d'une révision de la nomenclature des produits au titre de la TVA et ce dès le mois de juin prochain de façon que cette baisse de la TVA annoncée puisse être opérationnelle au plus tard à l'été ou en tout cas en septembre.
Enfin, le Président avait évoqué tout ce qui a trait à la formation. Je vous rappelle que M. Barrot avait lancé, il y a plusieurs mois, un travail en profondeur sur ce sujet qui avait abouti à certaines propositions : le chèque formation, le compte épargne temps, la question de la validation des compétences pour ceux qui font de la formation continue. M. Barrot a lancé un groupe paritaire de réflexion pour passer de l'étude générale à la concrétisation, ce groupe paritaire devrait déposer ses conclusions au mois de juin, une concertation avec les partenaires sociaux serait ensuite organisée et le texte législatif qui sera nécessaire sur ce sujet de la formation continue sera déposé à l'automne au Parlement.
Voilà pour ce premier grand sujet de l'éducation et de la formation. Je ne suis évidemment pas exhaustif, j'ai tenu simplement à mettre le projecteur sur quelques propositions fortes.
Deuxième grand sujet : l'insertion professionnelle. Nous en avons longuement débattu lors de la Conférence nationale pour l'emploi des jeunes qui, au total, rétrospectivement, a été, je crois, un temps fort de concertation et de dialogue social. Les choses avancent : en ce qui concerne les unités de première expérience professionnelle, vous savez de quoi il s'agit, c'est-à-dire la possibilité donnée à nos étudiants, dans leur cursus universitaire, de faire de l'alternance et d'aller en entreprise pour acquérir une première expérience professionnelle, le dispositif réglementaire est en cours de mise au point et tout devrait être opérationnel à la rentrée de 1997, à la rentrée universitaire de 1997.
En ce qui concerne les différents contrats d'embauche pour les jeunes ou contrats d'alternance, nous avançons également, l'opération "400 000 jeunes en alternance" progresse en liaison avec les organisations patronales et c'est le 18 mars prochain qu'au Conseil économique et social, sera lancée une grande campagne de développement de ces formations en alternance. Nous travaillons également avec les grandes entreprises pour atteindre l'objectif de 2 % de jeunes en alternance au sein de ces grandes entreprises qui sont très en deçà de ce pourcentage à l'heure actuelle alors que les PME le dépassent largement. De même, l'opération 100 000 jeunes au chômage de longue durée reçus et à qui l'on proposera des contrats d'insertion est déclenchée depuis le 1er mars et l'ANPE est au travail pour mener à bien cette opération très importante.
Troisième grand domaine, celui de la protection des jeunes, de l'enfance notamment, contre toute sorte de violences, de mauvais traitements, d'abus sexuels. J'en ai parlé longuement ce matin au siège du Centre international pour l'enfance et la famille - le Cidef. Nous avons en compagnie de J. Toubon et de X. Emmanuelli, présenté la grande cause nationale pour l'enfance maltraitée. Je ne vais pas y revenir longuement, je rappellerai simplement que le projet de loi sur la prévention et la répression des mauvais traitements et des abus sexuels à l'encontre des enfants a été approuvé par le Conseil des ministres et sera débattu à l'Assemblée nationale en avril prochain.
Le président de la République avait également souhaité que l'on développât les peines de réparation dans un certain nombre de cas, le garde des Sceaux est en train de préparer une circulaire au procureur pour que les possibilités qui existent dans la législation soient mieux utilisées qu'elles ne l'ont été jusqu'à présent.
Enfin, le Président avait évoqué la lutte contre la toxicomanie et la drogue, le nouveau plan triennal qui couvrira les années 1998-1999-2000 après celui qui vient de se développer sur 1995-1996-1997 est en cours de préparation et je présiderai un Comité interministériel au début du mois de mai pour lancer ce nouveau plan.
Je terminerai en évoquant également les questions de citoyenneté, le président de la République avait évoqué la possibilité d'une inscription automatique sur les listes électorales des jeunes qui arrivent à l'âge de 18 ans de façon à leur faciliter l'accès au droit de vote et à la citoyenneté. Il faut pour concrétiser cet engagement, une modification du code électoral et j'espère que les bonnes raisons que l'on m'a données pour ne pas le faire avant les prochaines élections ne tiendront pas devant notre détermination et que l'on arrivera à faire cette modification législative dès cette année de façon que cela puisse être opérationnel pour les grandes rencontres électorales de l'année 1998
Voilà ce que je voulais vous dire, je n'ai pas évoqué tous les sujets bien entendu, je voulais simplement confirmer que le Gouvernement était mobilisé, que beaucoup des propos présidentiels correspondaient à des actions engagées et des initiatives nouvelles évidemment sont venues compléter ce programme d'action du Gouvernement et que nous allons y mettre toute notre énergie et toute notre conviction. Voilà, si vous avez quelques questions sur ce programme de travail et sur ces actions, nous sommes bien évidemment avec les ministres qui m'entourent prêts à y répondre."
Question inaudible.
A. Juppé : "Pas énormément, beaucoup moins que pour équiper chacune des pièces de votre appartement vraisemblablement."
Question inaudible.
A. Juppé : "Cela se fait de plus en plus. Ce n'est pas une dépense considérable. Il suffit, à partir du moment où le téléphone est dans l'établissement, de tirer des... C'est tout bête et c'est cela pourtant, la mise en réseau."
Journaliste : Il faut surtout avoir réglé le problème du coût...
A. Juppé : "De la tarification."
Journaliste : De la tarification. Honnêtement, cette nouvelle technique, cela ne coûte pas cher mais le problème, c'est la tarification.
A. Juppé : "Mais..."
Question inaudible
A. Juppé : "Pour les usages éducatifs et culturels au sein des établissements scolaires."
Intervenant (?) : "Pour la liaison au réseau, que les réseaux soient des réseaux internationaux - type Internet - ou qu'ils soient des réseaux spécifiques à l'Education nationale, de type intranet, il y en a beaucoup qui sont des réseaux déliés avec un serveur "Education nationale."
A. Juppé : "Je crois qu'il est très important de bien faire comprendre que la mise en réseau des établissements scolaires, cela ne veut pas dire l'ouverture de tranchées dans toutes nos villes pour y installer de nouvelles fibres optiques, les réseaux, ils existent, c'est le téléphone. Donc la mise en réseau, cela consiste tout simplement à utiliser ce qui existe, à donner les terminaux qui permettent d'accéder à tout cela et à veiller surtout au contenu "des programmes" qui peuvent être accessibles."
Question inaudible
A. Juppé : "Je vais laisser répondre le meilleur spécialiste de la question."
F. Bayrou : "Il ne s'agit pas d'arriver à une méthode unique, il s'agit d'essayer, une bonne fois pour toutes, d'approfondir l'approche pédagogique pour savoir ce qui marche et ce qui ne marche pas. Et c'est dans le courant du mois de mai que, après avoir travaillé avec les spécialistes du sujet qui sont nombreux et pas d'accord entre eux que nous allons travailler avec les praticiens, c'est-à-dire avec les enseignants eux-mêmes sur leur pratique pédagogique. Voilà, c'est donc au mois de mai que nous allons conduire ce grand travail de réflexion, que nous allons approfondir ce grand travail de réflexion sur la lecture de manière, en particulier, que ce dont a parlé le président de la République, c'est-à-dire la formation des enseignants dans les IUFM, que l'on ait quelque chose en place à la rentrée prochaine."
Journaliste : La réflexion sur la lecture va aboutir à des mesures concrètes dès la rentrée prochaine ?
F. Bayrou : "Non, je me suis mal exprimé. Une des mesures concrètes que le président de la République a évoquée, c'est la formation des enseignants en IUFM."
Question inaudible
F. Bayrou : "Le reste, il y aura, je l'espère, des mesures concrètes avant."
Journaliste : Pouvez-vous préciser quelles procédures vous allez utiliser pour baisser la TVA sur le multimédia à l'été alors que la Commission parle plutôt de 1999 et quelle est exactement l'étendue des produits concernés ?
A. Juppé : "Sur l'étendue des produits concernés, c'est très clair, il s'agit des CD-Rom puisque c'est ce qu'a dit le président de la République, également des services en ligne à vocation culturelle et pédagogique, donc le champ d'application est tout à fait limité. Sur la procédure, Monsieur le ministre de l'Economie ?"
J. Arthuis : "Il s'agit d'ajouter à la liste annexée à la directive communautaire dès 1992, les produits et les services que vient d'indiquer Monsieur le Premier ministre. J'ai bon espoir que d'ici le mois de juin, nous pourrons obtenir en Conseil des ministres de l'Economie et des Finances, une révision de cette liste pour y adjoindre le produit CD-Rom à vocation culturelle et éducative ainsi que les services en ligne. J'ai bon espoir que les Quinze seront d'accord sur ce créneau très spécifique."
A. Juppé : "S'ils ne l'étaient pas, nous trouverions peut-être d'autres voies pour parvenir au résultat. Voilà."
Question inaudible
A. Juppé : "Educatif et pédagogique, ce n'est pas très difficile à définir. Le code général des impôts a relevé d'autres défis que celui-là."
(Source http://www.premier-ministre.gouv.fr, le 14 mai 2002)