Texte intégral
Mesdames,Messieurs,
En observant l'assemblée que nous formons aujourd'hui, je me dis que nous n'avons pas respecté la parité. Mais la célébration de la journée internationale des femmes nous y autorise et c'est un très grand plaisir pour moi, en ce 8 mars, d'accueillir beaucoup plus de fermmes que d'hommes.
Cette joumée doit être l'occasion pour nous tous de rappeler l'importance des multiples actions conduites pour réaliser l'égalité entre les hommes et les femmes. L'occasion de dire aussi combien ces actions sont et doivent être menées avec obstination dans la durée -ce que tous et toutes savez et dont témoignent vos activités
Le combat pour l'égalité est ancien : d'abord porté -et qui le reste- par les femmes elles-mêmes, par les militantes féministes ; mais combat relayé souvent mais pas exclusivement par les forces de gauche, femmes et hommes confondus.
Combat sans cesse repris et sans cesse renouvelé : du droit de vote au droit à l'avortement, ce sont à chaque fois des libertés déjà acquises qu'il faut conforter ou approfondir -je pense en particulier au droit à la contraception-, et de nouveaux espaces de liberté qu'il faut conquérir. Comme l'a bien exprimé le ministre de l'emploi et de la solidarité, Martine AUBRY: dans ce combat là, rien n'est jamais acquis.
Combat essentiel : qui doit marquer une nouvelle étape de la démocratie
S'il existe un certain archaïsme de la démocratie française, c'est bien celui qui se lit encore dans la place -la portion congrue, devrais-je dire- réservée aux femmes notre vie publique.
Rappelons seulement que les femmes ne disposent du droit de vote en France que depuis 1945, c'est-à-dire bien après la plupart de nos voisins. Aujourd'hui encore, ces électrices, qui représentent plus de la moitié du corps électoral, sont trop rarement élues. Depuis juin 1997, l'Assemblée nationale compte 11% de député e -s : un record jusqu'à présent inégalé... Mais qui laisse néanmoins la France en avant-dernière position parmi ses partenaires européens et au 41éme rang des démocraties parlementaires. Leur présence est plus faible encore au Sénat. Elle progresse, mais insuffisamment, dans les conseils municipaux. Seul le Parlement européen réserve un meilleur sort aux femmes, puisqu'elles y représentent 30% des élus français.
Convaincu de la nécessité de moderniser et d'approfondir notre démocratie, j'ai indiqué, dans ma déclaration de politique générale devant l'Assemblée nationale,que serait proposée une révision de la Constitution afin d'y inscrire l'objectif de la parité Dans son principe comme dans ses modalités, la parité suscite des débats : Querelles de juristes, controverses entre laqno; universalistes abstraites" qui ne veulent pas dans la citoyenneté distinguer hommes et femmes et laqno; paritaristes " soucieux de la mixité des assemblées, entre partisans et adversaires des quota ... Enoncer un principe est rarement suffisant. Je le sais. Mais je sais aussi la valeur des symboles et la force du droit. Je reste donc favorable à cette révision, même si je connais les difficultés qui entourent sa réalisation. Je prends celles-ci en considération, mais elles n'entament pas détermination.
Les principes comptent ; les actes et les comportements plus encore.
Par volontarisme politique, les Socialistes avaient tenu à réserver aux dernières législatives un pourcentage élevé -plus de 30%- de circonscriptions laqno; gagnables " à des femmes. Contrairement à ce que certains sceptiques avançaient alors, ces circonscriptions étaient réellement gagnables : la meilleure preuve en étant que, dans bien des cas, elles ont été gagnées... Peu à peu, d'autres partis s'engagent dans la même voie ce dont je me réjouis.
Mais je n'oublie pas les résistances, les frilosités, le scepticisme qu'il nous aura fallu vaincre -y compris au sein de ma formation politique - avant de parvenir à ce résultat. Là encore, l'action doit être poursuivie.
Les femmes représentent en effet un élément décisif de la rénovation de notre vie politique. Les projets de loi visant à limiter le cumul des mandats qui sont en cours d'examen au Conseil d'Etat favoriseront, sans nul doute, leur participation accrue à la vie politique et, ainsi, contribueront à l'indispensable renouvellement de notre personnel politique.
Si des résistances peuvent encore le ralentir, rien ne pourra plus arrêter le mouvement engagé : telle est ma conviction.
Le vocabulaire aussi devra bouger, J'ai beaucoup de respect pour la langue mais il me paraît opportun de corriger certaines inégalités... grammaticales qui ne sont que les traces d'une société disparue. Quand l'Académie Française a, en 1935 introduit le mot "pharmacienne", j'imagine qu'elle entérinait le fait que la femme
qui porte ce titre n'est plus l'épouse du pharmacien mais -si j'ose dire- le pharmacien lui-même. Et bien, la langue doit aujourd'hui encore s'adapter aux évolutions de la société. L'usage s'en charge déjà. Je rappelle par la circulaire parue ce dimanche 8 mars au journal officiel, aux administrations les termes du texte de 1986 relatif à la féminisation des titres et fonctions, qu'il est grand temps d'appliquer. Nous réfléchissons également à la possibilité d'élaborer un guide sur ce sujet, qui permettra à tous les citoyens -et en particulier à ceux qui manifestent une certaine inertie...- de se familiariser avec cette nécessaire évolution.
Les avancées dans la parité politique où les conquêtes grammaticales ne doivent pas pour autant masquer la persistance -et parfois même l'aggravation- des inégalités économiques et sociales,
Le monde politique n'est pas le seul à tarder à faire aux femmes la place qui leur revient. La question d'un partage équilibré des responsabilités et celle de l'égalité des chances doivent être posées, envisagées et résolues dans leur globalité.
L'occasion d'avancer nous sera donnée au début de l'année prochaine. Paris accueillera, en effet, au mois de janvier 1999, la 3ème Conférence européenne sur la participation des femmes à la prise de décision. L'Union européenne a déjà témoigné de son engagement au service de cette cause, notamment en contribuant activement aux succès des travaux de la conférence de Pékin en septembre 1995.
Sous l'impulsion de la présidence française de l'Union, le Conseil européen a adopté en décembre 1996 une recommandation incitant les Etats membres à développer les mesures appropriées pour que l'objectif de participation équilibrée des femmes et des hommes à la prise de décision devienne réalité, dans toute l'Europe, du au sud, et dans tous les domaines. Un rendez-vous a été fixé à la fin de l'année 1999, pour faire le bilan des actions engagées et des résultats obtenus.
Je souhaite contribuer à faire de l'échéance de décembre 1999 un symbole, celui d'une Europe prouvant sa modernité et affirmant sa conviction qu'une société démocratique doit offrir à tous, femmes et hommes, la possibilité de prendre leur part de responsabilité dans les choix et les décisions publics.
Pour ce qui la conceme, la France doit prendre des initiatives fortes, en particulier dans le domaine de la vie professionnelle.
S'agissant du secteur privé, depuis 1983 une loi qui doit beaucoup à Yvette ROUDY-que je salue amicalement-, pose le principe de l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes. Egalité des droits, égalité des chances. Cette loi est trop souvent négligée. Même si les partenaires sociaux restent les principaux artisans de la réalisation de cet objectif d'égalité, il nous faudra réfléchir aux moyens de rendre plus effectives leurs prescriptions.
D'ores et déjà, le Traité d'Amsterdam et le Sommet sur l'emploi de Luxembourg-lequel doit beaucoup à l'action du Gouvemement-, donnent une nouvelle impulsion à cette problématique de l'égalité des chances. Dans le Plan d'action pour l'emploi que nous allons présenter bientôt à nos partenaires européens, je veillerai personnellement à ce que les mesures visant à consolider le principe d'égalité figurent en bonne place.
La volonté des Françaises est claire : elles souhaitent travailler. Et l'économie française ne saurait se passer d'elles. Aussi, les entreprises, ne serait-ce que par intérêt bien compris, doivent leur accorder la considération qu'elles méritent et faciliter leur accès à l'emploi, à la formation et à la promotion professionnelles.
Et ceci à quelque étape de leur parcours professionnel que ce soit.
Les jeunes filles sont souvent de très bonnes élèves, et le nombre de jeunes femmes diplômées ne cesse de croître. Pourtant, leur entrée dans la vie active reste fragile et, plus que les garçons, elles sont touchées par le chômage et connaissent les formes d'emploi atypiques. Elles ne s'engagent pas toujours dans des voies qui favorisent leur insertion professionnelle et concentrent leurs choix sur une palette de métiers encore trop étroite. Elles subissent trop souvent encore des choix familiaux, ou des traditions pesantes ; et, il faut bien le reconnaître, on ne facilite pas toujours leur accès à informatjon.
Elargir les choix d'orientation des jeunes filles pour garantir la viabilité de leurs projets professionnels : voilà une tâche essentielle pour le Ministère de l'Education Nationale, pour le service public de l'emploi, mais aussi pour les entreprises.
Quels que soient les secteurs d'activité, trop d'inégalités subsistent entre les parcours professionnels des femmes actives et ceux de leurs collègues masculins. Inégalités des chances, inégalités de rémunération, -les femmes représentent 80% de la population percevant de bas ou de laqno;très bas salaires-, mais aussi inégalités de perspectives; en haut de la pyramide, subsiste ce laqno; plafond de verre " qui empêche les femmes actives d'accéder à l'encadrement supérieur.
Que ce soit dans la fonction publique ou dans le secteur privé, les femmes accèdent en effet moins facilement que les hommes aux postes de responsabilité et nombre d'entre elles restent injustement cantonnées en bas de l'échelle hiérarchique, à des postes peu qualifiés.
Si elle doit être formulée en des termes différents, la question de la promotion professionnelle et sociale des femmes ne s'en pose pas moins dans la fonction publique.
Dans le cadre de la réforme de l'Etat, il notls faudra donc renforcer les dispositifs existants, non seulement pour éviter toute discrimination, mais aussi pour veiller à ce que les responsabilités, de toutes natures, soient mieux partagées. Je souhaite que chacun des membres du Gouvemement mette en oeuvre une politique de promotion active dans ce domaine. Il reviendra au ministre de la Fonction publique de me faire des propositions pour assurer la cohérence globale des orientations qui seront retenues.
Ce qui caractérise le chômage féminin, car là aussi l'inégalité est sensible, c'est qu'il obéit à des facteurs structurels plus que conjoncturels. Parmi eux, d'abord, la concentration de l'activité féminine dans les emplois peu qualifiés et dans les entreprises de services ; ensuite, le développement de l'emploi précaire, où les femmes sont nombreuses ; un chômage de plus longue durée, enfin, qui s'explique par un accès aisé à l'information sur les dispositifs de lutte contre le chômage, des projets professionnels plus imprécis et des charges familiales complexes à gérer.
Certains pays occidentaux semblent considérer le chômage féminin comme secondaire comme si l'activité féminine était contingente. Nous ne pouvons partager cette vision des choses
Dans le cadre du Plan national d'action, que j'évoquais à l'instant, et que la France présentera prochainement à ses partenaires européens, des mesures seront proposées pour que les femmes au chômage puissent trouver des solutions adaptées aux problèmes qui leur sont propres et que je viens d'évoquer rapidement.
Reste enfin l'inégalité dans la conciliation entre la vie familiale et la vie professionnelle. Nous devons envisager les moyens de faciliter la vie quotidienne des femmes qui travaillent ou qui recherchent un emploi, et en particulier l'aide qui doit leur être apportée en matière de garde d'enfants ou de soutien aux personnes âgées, dont les familles ont souvent la charge.
Ces problèmes trouveront une résonance plus large avec la tenue de la Conférence sur la famille que Martine AUBRY, la ministre de l'emploi et de la solidarité, organise pour le mois de juin prochain. Dans cette perspective, quatre
missions de réflexion ont été confiées à des personnalités reconnues -Michèle ANDRÉ, Dominique GILLOT, Irène THERY et Claude THELOT. Je m'attacherai à ce que les décisions prises sur la base de leurs propositions donnent une cohérence indiscutable aux divers volets de la politique familiale et, ainsi, facilitent la vie des femmes au sein de l'organisation familiale.
Dans un domaine où les évolutions nécessaires sont lentes et ne se feront qu'à travers de profonds changements culturels, l'Etat peut -et doit- donner les indispensables impulsions. C'est là le rôle important assigné à Geneviève FRAISSE, Déléguée interministérielle aux droits des femmes, que de servir d'aiguillon et de force de propositions pour faire bouger les choses. Dans cette perspective, l'éducation tient une place centrale. C'est pourquoi je me félicite que, sur proposition précisément de Geneviève FRAISSE, vienne de paraître une circulaire signée par Ségolène ROYAL, Ministre déléguée chargée de l'enseignement scolaire, qui programme l'organisation de débats entre enseignants et élèves, tout au long du mois de mars, au sujet de égalité des sexes.
Dans cet effort collectif, les femmes ont elles-mêmes un rôle essentiel à jouer. Qu'elles fassent connaître leurs attentes et leurs ambitions ; qu'elles exigent d'être respectées dans leurs droits et dans leur personne ; qu'elles cherchent à prendre des responsabilités dans les organismes professionnels, dans les chambres consulaires et dans toutes les instances représentatives de la vie socio-économique.
Je voudrais enfin au delà des femmes qui sont présentes ici, saluer personnellement les nombreuses femmes, moins connues dont l'engagement est une force précieuse pour notre société.
Je pense à toutes celles qui, avec une énergie et un dynamisme exemplaires, se mobilisent dans le secteur associatif. Qu'il s'agisse d'insertion, de solidarité dans les quartiers défavorisés, d'aide à la création d'entreprises, de soutien aux victimes de violences en France mais aussi à l'étranger, de consolidation des liens dans le milieu rural, d'information sur les questions de santé et de prévention, d'aide à l'intégration pour les personnes d'origine étrangère, -il me serait difficile de citer toutes les actions engagées-, les femmes font preuve de leur détermination et de leur sens de la solidarité.
Souvent -elles l'ont prouvé par le passé et le prouvent encore chaque jour-, les femmes représentent un ferment de changement et d'innovation dans la société. Leur engagement dans toutes les sphères de la vie publique, dans la vie professionnelle, dans la vie politique, dans la vie associative, dans la vie des quartiers mais aussi des communes rurales isolées, est un atout essentiel pour faire vivre la démocratie.
Que toutes soient assurées aujourd'hui de mon soutien et de celui des services de l'Etat pour les aider à poursuivre leur action, indispensable à la cohésion de notre société.
En ce 8 mars, nous pensons naturellement aux luttes des femmes partout dans le monde. Et particulièrement à celles qui doivent affronter l'oppression et la violence.
Ma pensée va aux femmes afghanes, - qui sont représentées ici- et qui ont particulièrement besoin de notre solidarité, alors qu'elles vivent recluses, privées de liberté, sans accès à l'éducation ni aux soins. Notre pensée se tourne aussi vers les femmes algériennes, qui luttent pour la paix, pour la Démocratie, pour la sécurité et pour la liberté, et parfois pour survivre, avec un courage et une dignité qui font d'elles un exemple de résistance au terrorisme.
Aussi symbolique que soit cette journée elle doit contribuer à affirmer notre volonté d'une action continue et, je l'espère, féconde.
(Source http://www.premier-ministre.gouv.fr, le 12 juin 2001)
En observant l'assemblée que nous formons aujourd'hui, je me dis que nous n'avons pas respecté la parité. Mais la célébration de la journée internationale des femmes nous y autorise et c'est un très grand plaisir pour moi, en ce 8 mars, d'accueillir beaucoup plus de fermmes que d'hommes.
Cette joumée doit être l'occasion pour nous tous de rappeler l'importance des multiples actions conduites pour réaliser l'égalité entre les hommes et les femmes. L'occasion de dire aussi combien ces actions sont et doivent être menées avec obstination dans la durée -ce que tous et toutes savez et dont témoignent vos activités
Le combat pour l'égalité est ancien : d'abord porté -et qui le reste- par les femmes elles-mêmes, par les militantes féministes ; mais combat relayé souvent mais pas exclusivement par les forces de gauche, femmes et hommes confondus.
Combat sans cesse repris et sans cesse renouvelé : du droit de vote au droit à l'avortement, ce sont à chaque fois des libertés déjà acquises qu'il faut conforter ou approfondir -je pense en particulier au droit à la contraception-, et de nouveaux espaces de liberté qu'il faut conquérir. Comme l'a bien exprimé le ministre de l'emploi et de la solidarité, Martine AUBRY: dans ce combat là, rien n'est jamais acquis.
Combat essentiel : qui doit marquer une nouvelle étape de la démocratie
S'il existe un certain archaïsme de la démocratie française, c'est bien celui qui se lit encore dans la place -la portion congrue, devrais-je dire- réservée aux femmes notre vie publique.
Rappelons seulement que les femmes ne disposent du droit de vote en France que depuis 1945, c'est-à-dire bien après la plupart de nos voisins. Aujourd'hui encore, ces électrices, qui représentent plus de la moitié du corps électoral, sont trop rarement élues. Depuis juin 1997, l'Assemblée nationale compte 11% de député e -s : un record jusqu'à présent inégalé... Mais qui laisse néanmoins la France en avant-dernière position parmi ses partenaires européens et au 41éme rang des démocraties parlementaires. Leur présence est plus faible encore au Sénat. Elle progresse, mais insuffisamment, dans les conseils municipaux. Seul le Parlement européen réserve un meilleur sort aux femmes, puisqu'elles y représentent 30% des élus français.
Convaincu de la nécessité de moderniser et d'approfondir notre démocratie, j'ai indiqué, dans ma déclaration de politique générale devant l'Assemblée nationale,que serait proposée une révision de la Constitution afin d'y inscrire l'objectif de la parité Dans son principe comme dans ses modalités, la parité suscite des débats : Querelles de juristes, controverses entre laqno; universalistes abstraites" qui ne veulent pas dans la citoyenneté distinguer hommes et femmes et laqno; paritaristes " soucieux de la mixité des assemblées, entre partisans et adversaires des quota ... Enoncer un principe est rarement suffisant. Je le sais. Mais je sais aussi la valeur des symboles et la force du droit. Je reste donc favorable à cette révision, même si je connais les difficultés qui entourent sa réalisation. Je prends celles-ci en considération, mais elles n'entament pas détermination.
Les principes comptent ; les actes et les comportements plus encore.
Par volontarisme politique, les Socialistes avaient tenu à réserver aux dernières législatives un pourcentage élevé -plus de 30%- de circonscriptions laqno; gagnables " à des femmes. Contrairement à ce que certains sceptiques avançaient alors, ces circonscriptions étaient réellement gagnables : la meilleure preuve en étant que, dans bien des cas, elles ont été gagnées... Peu à peu, d'autres partis s'engagent dans la même voie ce dont je me réjouis.
Mais je n'oublie pas les résistances, les frilosités, le scepticisme qu'il nous aura fallu vaincre -y compris au sein de ma formation politique - avant de parvenir à ce résultat. Là encore, l'action doit être poursuivie.
Les femmes représentent en effet un élément décisif de la rénovation de notre vie politique. Les projets de loi visant à limiter le cumul des mandats qui sont en cours d'examen au Conseil d'Etat favoriseront, sans nul doute, leur participation accrue à la vie politique et, ainsi, contribueront à l'indispensable renouvellement de notre personnel politique.
Si des résistances peuvent encore le ralentir, rien ne pourra plus arrêter le mouvement engagé : telle est ma conviction.
Le vocabulaire aussi devra bouger, J'ai beaucoup de respect pour la langue mais il me paraît opportun de corriger certaines inégalités... grammaticales qui ne sont que les traces d'une société disparue. Quand l'Académie Française a, en 1935 introduit le mot "pharmacienne", j'imagine qu'elle entérinait le fait que la femme
qui porte ce titre n'est plus l'épouse du pharmacien mais -si j'ose dire- le pharmacien lui-même. Et bien, la langue doit aujourd'hui encore s'adapter aux évolutions de la société. L'usage s'en charge déjà. Je rappelle par la circulaire parue ce dimanche 8 mars au journal officiel, aux administrations les termes du texte de 1986 relatif à la féminisation des titres et fonctions, qu'il est grand temps d'appliquer. Nous réfléchissons également à la possibilité d'élaborer un guide sur ce sujet, qui permettra à tous les citoyens -et en particulier à ceux qui manifestent une certaine inertie...- de se familiariser avec cette nécessaire évolution.
Les avancées dans la parité politique où les conquêtes grammaticales ne doivent pas pour autant masquer la persistance -et parfois même l'aggravation- des inégalités économiques et sociales,
Le monde politique n'est pas le seul à tarder à faire aux femmes la place qui leur revient. La question d'un partage équilibré des responsabilités et celle de l'égalité des chances doivent être posées, envisagées et résolues dans leur globalité.
L'occasion d'avancer nous sera donnée au début de l'année prochaine. Paris accueillera, en effet, au mois de janvier 1999, la 3ème Conférence européenne sur la participation des femmes à la prise de décision. L'Union européenne a déjà témoigné de son engagement au service de cette cause, notamment en contribuant activement aux succès des travaux de la conférence de Pékin en septembre 1995.
Sous l'impulsion de la présidence française de l'Union, le Conseil européen a adopté en décembre 1996 une recommandation incitant les Etats membres à développer les mesures appropriées pour que l'objectif de participation équilibrée des femmes et des hommes à la prise de décision devienne réalité, dans toute l'Europe, du au sud, et dans tous les domaines. Un rendez-vous a été fixé à la fin de l'année 1999, pour faire le bilan des actions engagées et des résultats obtenus.
Je souhaite contribuer à faire de l'échéance de décembre 1999 un symbole, celui d'une Europe prouvant sa modernité et affirmant sa conviction qu'une société démocratique doit offrir à tous, femmes et hommes, la possibilité de prendre leur part de responsabilité dans les choix et les décisions publics.
Pour ce qui la conceme, la France doit prendre des initiatives fortes, en particulier dans le domaine de la vie professionnelle.
S'agissant du secteur privé, depuis 1983 une loi qui doit beaucoup à Yvette ROUDY-que je salue amicalement-, pose le principe de l'égalité professionnelle entre les femmes et les hommes. Egalité des droits, égalité des chances. Cette loi est trop souvent négligée. Même si les partenaires sociaux restent les principaux artisans de la réalisation de cet objectif d'égalité, il nous faudra réfléchir aux moyens de rendre plus effectives leurs prescriptions.
D'ores et déjà, le Traité d'Amsterdam et le Sommet sur l'emploi de Luxembourg-lequel doit beaucoup à l'action du Gouvemement-, donnent une nouvelle impulsion à cette problématique de l'égalité des chances. Dans le Plan d'action pour l'emploi que nous allons présenter bientôt à nos partenaires européens, je veillerai personnellement à ce que les mesures visant à consolider le principe d'égalité figurent en bonne place.
La volonté des Françaises est claire : elles souhaitent travailler. Et l'économie française ne saurait se passer d'elles. Aussi, les entreprises, ne serait-ce que par intérêt bien compris, doivent leur accorder la considération qu'elles méritent et faciliter leur accès à l'emploi, à la formation et à la promotion professionnelles.
Et ceci à quelque étape de leur parcours professionnel que ce soit.
Les jeunes filles sont souvent de très bonnes élèves, et le nombre de jeunes femmes diplômées ne cesse de croître. Pourtant, leur entrée dans la vie active reste fragile et, plus que les garçons, elles sont touchées par le chômage et connaissent les formes d'emploi atypiques. Elles ne s'engagent pas toujours dans des voies qui favorisent leur insertion professionnelle et concentrent leurs choix sur une palette de métiers encore trop étroite. Elles subissent trop souvent encore des choix familiaux, ou des traditions pesantes ; et, il faut bien le reconnaître, on ne facilite pas toujours leur accès à informatjon.
Elargir les choix d'orientation des jeunes filles pour garantir la viabilité de leurs projets professionnels : voilà une tâche essentielle pour le Ministère de l'Education Nationale, pour le service public de l'emploi, mais aussi pour les entreprises.
Quels que soient les secteurs d'activité, trop d'inégalités subsistent entre les parcours professionnels des femmes actives et ceux de leurs collègues masculins. Inégalités des chances, inégalités de rémunération, -les femmes représentent 80% de la population percevant de bas ou de laqno;très bas salaires-, mais aussi inégalités de perspectives; en haut de la pyramide, subsiste ce laqno; plafond de verre " qui empêche les femmes actives d'accéder à l'encadrement supérieur.
Que ce soit dans la fonction publique ou dans le secteur privé, les femmes accèdent en effet moins facilement que les hommes aux postes de responsabilité et nombre d'entre elles restent injustement cantonnées en bas de l'échelle hiérarchique, à des postes peu qualifiés.
Si elle doit être formulée en des termes différents, la question de la promotion professionnelle et sociale des femmes ne s'en pose pas moins dans la fonction publique.
Dans le cadre de la réforme de l'Etat, il notls faudra donc renforcer les dispositifs existants, non seulement pour éviter toute discrimination, mais aussi pour veiller à ce que les responsabilités, de toutes natures, soient mieux partagées. Je souhaite que chacun des membres du Gouvemement mette en oeuvre une politique de promotion active dans ce domaine. Il reviendra au ministre de la Fonction publique de me faire des propositions pour assurer la cohérence globale des orientations qui seront retenues.
Ce qui caractérise le chômage féminin, car là aussi l'inégalité est sensible, c'est qu'il obéit à des facteurs structurels plus que conjoncturels. Parmi eux, d'abord, la concentration de l'activité féminine dans les emplois peu qualifiés et dans les entreprises de services ; ensuite, le développement de l'emploi précaire, où les femmes sont nombreuses ; un chômage de plus longue durée, enfin, qui s'explique par un accès aisé à l'information sur les dispositifs de lutte contre le chômage, des projets professionnels plus imprécis et des charges familiales complexes à gérer.
Certains pays occidentaux semblent considérer le chômage féminin comme secondaire comme si l'activité féminine était contingente. Nous ne pouvons partager cette vision des choses
Dans le cadre du Plan national d'action, que j'évoquais à l'instant, et que la France présentera prochainement à ses partenaires européens, des mesures seront proposées pour que les femmes au chômage puissent trouver des solutions adaptées aux problèmes qui leur sont propres et que je viens d'évoquer rapidement.
Reste enfin l'inégalité dans la conciliation entre la vie familiale et la vie professionnelle. Nous devons envisager les moyens de faciliter la vie quotidienne des femmes qui travaillent ou qui recherchent un emploi, et en particulier l'aide qui doit leur être apportée en matière de garde d'enfants ou de soutien aux personnes âgées, dont les familles ont souvent la charge.
Ces problèmes trouveront une résonance plus large avec la tenue de la Conférence sur la famille que Martine AUBRY, la ministre de l'emploi et de la solidarité, organise pour le mois de juin prochain. Dans cette perspective, quatre
missions de réflexion ont été confiées à des personnalités reconnues -Michèle ANDRÉ, Dominique GILLOT, Irène THERY et Claude THELOT. Je m'attacherai à ce que les décisions prises sur la base de leurs propositions donnent une cohérence indiscutable aux divers volets de la politique familiale et, ainsi, facilitent la vie des femmes au sein de l'organisation familiale.
Dans un domaine où les évolutions nécessaires sont lentes et ne se feront qu'à travers de profonds changements culturels, l'Etat peut -et doit- donner les indispensables impulsions. C'est là le rôle important assigné à Geneviève FRAISSE, Déléguée interministérielle aux droits des femmes, que de servir d'aiguillon et de force de propositions pour faire bouger les choses. Dans cette perspective, l'éducation tient une place centrale. C'est pourquoi je me félicite que, sur proposition précisément de Geneviève FRAISSE, vienne de paraître une circulaire signée par Ségolène ROYAL, Ministre déléguée chargée de l'enseignement scolaire, qui programme l'organisation de débats entre enseignants et élèves, tout au long du mois de mars, au sujet de égalité des sexes.
Dans cet effort collectif, les femmes ont elles-mêmes un rôle essentiel à jouer. Qu'elles fassent connaître leurs attentes et leurs ambitions ; qu'elles exigent d'être respectées dans leurs droits et dans leur personne ; qu'elles cherchent à prendre des responsabilités dans les organismes professionnels, dans les chambres consulaires et dans toutes les instances représentatives de la vie socio-économique.
Je voudrais enfin au delà des femmes qui sont présentes ici, saluer personnellement les nombreuses femmes, moins connues dont l'engagement est une force précieuse pour notre société.
Je pense à toutes celles qui, avec une énergie et un dynamisme exemplaires, se mobilisent dans le secteur associatif. Qu'il s'agisse d'insertion, de solidarité dans les quartiers défavorisés, d'aide à la création d'entreprises, de soutien aux victimes de violences en France mais aussi à l'étranger, de consolidation des liens dans le milieu rural, d'information sur les questions de santé et de prévention, d'aide à l'intégration pour les personnes d'origine étrangère, -il me serait difficile de citer toutes les actions engagées-, les femmes font preuve de leur détermination et de leur sens de la solidarité.
Souvent -elles l'ont prouvé par le passé et le prouvent encore chaque jour-, les femmes représentent un ferment de changement et d'innovation dans la société. Leur engagement dans toutes les sphères de la vie publique, dans la vie professionnelle, dans la vie politique, dans la vie associative, dans la vie des quartiers mais aussi des communes rurales isolées, est un atout essentiel pour faire vivre la démocratie.
Que toutes soient assurées aujourd'hui de mon soutien et de celui des services de l'Etat pour les aider à poursuivre leur action, indispensable à la cohésion de notre société.
En ce 8 mars, nous pensons naturellement aux luttes des femmes partout dans le monde. Et particulièrement à celles qui doivent affronter l'oppression et la violence.
Ma pensée va aux femmes afghanes, - qui sont représentées ici- et qui ont particulièrement besoin de notre solidarité, alors qu'elles vivent recluses, privées de liberté, sans accès à l'éducation ni aux soins. Notre pensée se tourne aussi vers les femmes algériennes, qui luttent pour la paix, pour la Démocratie, pour la sécurité et pour la liberté, et parfois pour survivre, avec un courage et une dignité qui font d'elles un exemple de résistance au terrorisme.
Aussi symbolique que soit cette journée elle doit contribuer à affirmer notre volonté d'une action continue et, je l'espère, féconde.
(Source http://www.premier-ministre.gouv.fr, le 12 juin 2001)