Texte intégral
discours de 15 novembre 1993.
En venant ici poser la première pierre de l'hôpital "Européen Georges Pompidou", je dois vous dire mon émotion de participer à la naissance d'un nouvel hôpital en cette fin du XXème siècle, à Paris
Ce nouvel hôpital marquera une nouvelle étape dans l'histoire de cette grande institution qu'est l'Assistance Publique - Hôpitaux de Paris porteuse des meilleures traditions de la médecine française Ce sera pour notre pays un symbole et, je l'espère un modèle de l'hôpital de demain.
Comme vous l'avez indiqué justement, Monsieur le Maire, cet hôpital pour la France sera aussi un hôpital pour les Parisiens. Vous savez l'attachement que je porte à ce XVème arrondissement. Je me réjouis que ses habitants, ceux des arrondissements et des communes voisines trouvent ainsi les services qu'ils attendent depuis longtemps.
Poser aujourd'hui la première pierre d'un nouvel hôpital peut paraître une gageure en ces temps où, à juste titre, on dit qu'il faut fermer des lits.
Mais le projet médical de l'hôpital Européen Georges Pompidou a su répondre aux difficiles enjeux de la restructuration hospitalière et préfigure une démarche qui est, je crois, comme vous l'avez souligné Monsieur le Maire, exemplaire. Je voudrais, à cet égard, mettre l'accent sur plusieurs points forts de ce projet.
Même s'il faut relativiser la notion du nombre de lits, l'opération de regroupement des quatre hôpitaux concernés sur le nouvel hôpital va permettre de supprimer 402 lits de soins aigus. Ces suppressions permettront de créer, à coûts constants, des unités gérontologiques sur les sites libérés et d'assurer ainsi une meilleure prise en charge de la dépendance des personnes âgées dans la capitale.
L'organisation de l'Assistance Publique - Hôpitaux de Paris, premier ensemble hospitalier européen, a évidemment facilité cette restructuration.
Exemplaire pour illustrer les avantages d'une politique de restructuration intelligente le projet est porteur également de grandes ambitions.
Le projet médical est organisé en effet autour des grandes préoccupations de santé publique.
Premièrement : l'accueil des urgences. Mission de service public par excellence, elle implique non seulement une bonne prise en charge médicale mais aussi un accueil de qualité ouvert à toutes les catégories de la population, notamment les plus démunies devant le monde hospitalier.
L'organisation proposée pour le nouvel hôpital s'inscrit parfaitement dans cet objectif. Elle permettra également de développer des activités de pointe avec la création de structures intégrées telles que "SOS embolies pulmonaires", "SOS mains", "SOS infarctus", mais aussi "SOS SIDA" qui réunira les moyens de l'hôpital Broussais et de l'hôpital Laënnec et pourra répondre 24 h sur 24 aux patients et à leurs médecins.
Deuxièmement : la prise en charge des maladies cardio-vasculaires, qui reste la première cause de mortalité dans notre pays. Elle se fera avec le regroupement des activités de l'hôpital Broussais et de l'hôpital Laënnec au sein d'un centre lourd de 14 000 m2 qui couvrira l'ensemble du champ cardio-vasculaire, médical comme chirurgical.
Troisièmement : la prise en charge des maladies cancéreuses, qui est la deuxième cause de mortalité des Français, avec la mise en place d'un ensemble cancérologique complet et performant.
L'hôpital "Européen Georges POMPIDOU" sera aussi l'hôpital universitaire du XXIème siècle : la recherche et l'innovation se trouvent naturellement placées au cur de ses missions. Des moyens importants y seront consacrés. Tout sera fait notamment pour favoriser la coopération avec l'INSERM et ses laboratoires.
Il faut être ici très ambitieux, il faut vouloir dégager de véritables pôles d'excellence. Notre pays ne peut se satisfaire d'appliquer correctement les découvertes des autres, nous devons créer, innover, promouvoir de nouvelles méthodes diagnostiques et thérapeutiques, aider l'industrie pharmaceutique à mettre au point de nouvelles molécules.
Il faut aussi encourager vivement le développement de la recherche clinique, c'est-à-dire celle qui est la plus proche du malade.
Bien entendu, cet hôpital, centre hospitalier et universitaire, doit être conçu de manière efficace et moderne.
Mais l'innovation doit se traduire également, et je dirais principalement, dans les conditions d'accueil des malades. Aussi, faut-il relever la volonté dans ce projet d'associer un hébergement hôtelier pour les patients et les familles à un plateau technique très performant.
Il s'agit là à l'évidence d'un choix prometteur tant pour le confort du malade que pour la réduction des capacités d'hospitalisation traditionnelle.
Il en va de même pour la création de cent places d'hospitalisation de moins de 24 heures, qui témoigne de la volonté de développer réellement toutes alternatives possibles à l'hospitalisation classique.
L'innovation à l'hôpital, c'est aussi une ambition nouvelle en matière de gestion et d'organisation
L'Assistance Publique - Hôpitaux de Paris a souvent été pionnière en ce domaine, et il faut la féliciter de proposer au travers de ce projet une nouvelle approche de gestion a la fois plus médicalisée et plus décentralisée.
Les nouvelles techniques d'archivage et de communication permettent d'éviter les pertes de temps inutiles, les examens redondants. Elles doivent servir à renforcer la personnalisation de l'accueil des malades, à simplifier les formalités et les circuits, à obtenir dans des délais réduits de l'information médicale pertinente, et enfin à faciliter les échanges avec les médecins de l'Assistance Publique - Hôpitaux de Paris qu'ils soient aigus ou de moyen et de long séjour.
J'ai appris avec beaucoup d'intérêt qu'il était envisagé de confier des responsabilités de gestion à ceux qui assument la responsabilité médicale. Il s'agit là d'une voie d'avenir, comme j'ai déjà eu l'occasion de le dire à plusieurs reprises.
Ainsi, vous le voyez, nous sommes ambitieux pour cet hôpital, mais nous sommes aussi ambitieux pour l'avenir de l'hospitalisation en France.
La politique de restructuration hospitalière que j'évoquais au début de mon propos n'a d'autre objectif que de permettre à notre pays de se donner les moyens de cette ambition.
Nous avons la volonté forte de mobiliser l'ensemble des professionnels pour cette mission courageuse.
L'hôpital " Européen Georges Pompidou " nous en donne une occasion exemplaire. Votre présence Monsieur le Premier ministre témoigne de la détermination du Gouvernement de s'engager dans cette voie difficile.
A mon tour, je vous remercie au nom de tous ceux qui sont ici.
Discours du 06 décembre 1993.
Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs les élus,
Mesdames, Messieurs,
Vous l'avez rappelé, Monsieur le Président, c'est la troisième fois que je viens ouvrir les travaux de votre fédération. Vous avez bien voulu y voir un témoignage de mon attachement à l'hôpital public. C'est en effet pour moi un grand plaisir que de me retrouver à nouveau aujourd'hui parmi vous pour l'ouverture de ces 15èmes Assises Nationales de l'Hospitalisation.
Il y a maintenant près de vingt ans que j'ai une première fois exercé des fonctions gouvernementales dans le domaine de la santé. Je suis donc particulièrement bien placée pour constater l'importance des évolutions que l'hôpital a su conduire et les changements à bien des égards positifs qu'il a su mener.
Non, l'hôpital n'est pas comme on le lit parfois à bout de souffle. Il traverse une phase décisive d'adaptation, de difficultés, d'incertitude et aussi d'espérance.
Mais la situation, vous le savez, reste préoccupante d'une part parce que les contraintes économiques demeurent fortes et d'autre part parce que les évolutions structurelles nécessaires pour maintenir la qualité des soins à un niveau optimum n'ont pas été conduites aussi loin et aussi vite qu'il eût été souhaitable ; il est indispensable que nous poursuivions de manière volontariste et efficace l'adaptation de notre système hospitalier.
Je savais avant de vous entendre pouvoir compter sur le concours de tous. Après vous avoir écouté et malgré les difficultés que vous avez évoquées et que je n'entends pas sous-estimer, j'en suis plus que jamais convaincue.
La Fédération Hospitalière de France a toujours su défendre les intérêts du service public hospitalier. Je suis certaine que face aux enjeux majeurs auxquels nous sommes confrontés elle saura, une nouvelle fois, être un artisan du changement.
Votre soutien à tous me sera précieux et notamment le votre, M. le Président, vous qui portez un regard toujours lucide sur notre société et un jugement jamais partisan sur notre système de santé.
L'hôpital public a été l'un des premiers à s'engager sur la voie de la maîtrise des dépenses de santé. Je tiens, devant vous, à le rappeler publiquement.
Les efforts qu'il a accomplis à ce titre ne doivent pas être oubliés ou passés sous silence. L'hôpital qui représentait plus de 40 % des dépenses de santé en 1980 n'en représente plus aujourd'hui que 36 %.
Au cours des 8 dernières années l'équipement en lits des hôpitaux publics a diminué de 10,4 % . Cela représente la fermeture de 41000 lits.
Pendant la même période son activité a notablement augmenté et s'est profondément modifiée. L'hôpital prend en charge des pathologies plus diversifiées et plus lourdes.
La durée de séjour était, faut-il le rappeler de 10 jours en 1980, elle est aujourd'hui inférieure à 7 jours.
Nous ne pouvons que nous féliciter des efforts importants menés pour améliorer l'accueil et les conditions d'hébergement du malade.
Ces actions ont été conduites dans un contexte de fortes contraintes budgétaires.
Elles n'ont été possibles que grâce aux capacités d'adaptation dont ont su faire preuve les hospitaliers et à une nouvelle conception de la gestion. Les restructurations sont déjà une réalité, quoi qu'on en dise, même si leurs effets restent encore trop limités.
Pourtant qui peut nier que la situation demeure préoccupante et même devient encore plus préoccupante ? Vous le savez, la dégradation des comptes sociaux s'est révélée plus importante que ne le laissaient prévoir les estimations initiales.
Le gouvernement a récemment relevé la participation des assurés au financement des dépenses. C'était une nécessité mais on ne peut guère aller beaucoup plus loin : le taux global de couvertures des dépenses de maladie par les assurances sociales devient en France inférieur à ce qu'il est dans de nombreux pays européens : entre 1980 et aujourd'hui, il est passé de 78 % à 74 %.
Les dépenses de santé connaissent, en effet, et il faut le dire un rythme de croissance excessif incompatible avec le contexte économique général.
En 1980, la France occupait le 7ème rang mondial pour la part des ressources nationales consacrée à la santé. Nous occupons aujourd'hui la troisième place en terme de dépenses alors que notre pays n'occupe qu'un rang moyen pour les indicateurs de morbidité les plus couramment utilisés.
C'est la raison pour laquelle l'encadrement budgétaire ne peut que demeurer rigoureux. Croyez que le gouvernement est bien conscient des efforts qui sont demandés en 1994 aux hôpitaux.
Le taux directeur 1994 nous est imposé par la situation économique que traverse notre pays. Il est certes inférieur au taux directeur 1993 mais il n'en est pas pour autant irréaliste puisqu'il prend en compte tant en matière salariale qu'au niveau de l'évolution des prix les hypothèses économiques retenues pour tous les comptes publics. Outre la part du taux directeur destiné au financement des mesures catégorielles, la croissance des dépenses hospitalières sera, en 1994, de 2,25 % alors que l'augmentation prévisionnelle des prix et des salaires est un peu inférieure à 2 %. Certains pays, vous le savez, ont décidé de diminuer leurs dépenses hospitalières et ont effectivement appliqué cette décision ; nous n'en sommes pas là, fort heureusement ; mais nous parviendrons d'autant plus facilement à améliorer la prise en charge des malades, que l'évolution des coûts sera maîtrisée et compatible avec la croissance de la richesse nationale.
Le respect impératif du taux directeur 1994 vous oblige, je le sais, à prendre dès le début de l'année prochaine les mesures qui s'imposent en termes de redéploiement, de gain de productivité, de gestion adaptée des effectifs.
Pour l'année en cours, je connais les difficultés que rencontrent certains établissements pour financer la revalorisation des gardes et astreintes médicales.
J'ai demandé à mes services de me faire des propositions pour prendre en compte les effets budgétaires réels de ces revalorisations ; les mesures prises vous seront annoncées dans les prochains jours.
Sachant que les dispositions qui ont été arrêtées pour le recrutement des "Faisant Fonction d'Internes" étrangers suscitaient dans certains cas des difficultés d'application, j'ai décidé de repousser leur date d'entrée en vigueur en mai 1994 ; les établissements qui ne seraient pas prêts au 1er janvier prochain pourront prendre les décisions qui s'imposent pour garantir la continuité du service public. Je crois néanmoins devoir souligner que ces nouvelles exigences, qui ne permettent plus désormais de recruter comme "faisant fonction d'interne'' que des médecins inscrits à un cursus universitaire de haut niveau, et non plus à un diplôme universitaire souvent sans rapport avec leur exercice professionnel à l'hôpital, sont destinées à améliorer la qualité des soins ; nous garantissons ainsi a tous les hôpitaux une qualification de leurs médecins comparable à celle qui est exigée de nos internes et résidents.
J'ai vérifié les statistiques. Contrairement à ce que l'on croit souvent le nombre de médecins à l'hôpital n'a nullement diminué. Bien au contraire chaque année, des postes médicaux sont créés. Le nombre des postes vacants lui-même diminue grâce à l'augmentation du nombre des candidatures aux concours de praticien hospitalier. Je ne souhaite pas masquer les difficultés sur un sujet aussi essentiel mais la vérité doit être rétablie car bien loin de se détériorer, la situation s'améliore même si des difficultés sont encore rencontrées dans certains établissements.
Les difficultés conjoncturelles ne doivent pas nous faire oublier l'essentiel. Vous savez que le gouvernement entend faire de la politique de santé une de ses priorités, d'abord pour en améliorer la qualité, mais aussi pour maîtriser ses conséquences financières pour la collectivité.
Une politique de santé ambitieuse n'a de sens que si elle s'appuie sur des objectifs de santé publique.
L'hôpital doit rester l'outil performant, à la pointe du progrès médical, ouvert à toutes les catégories de la population et perçu comme une référence dans le domaine des traitements médicaux.
Les modes de vie des Français changent ; l'hôpital doit suivre, en adaptant ses structures - par exemple les alternatives à l'hospitalisation - et ses modes d'accueil, - par exemple ses horaires et jours de consultation ; j'ai visité récemment un service hospitalier destiné aux malades du SIDA pouvant encore exercer une activité professionnelle : ce service accueille ses malades en consultation en fin d'après-midi et en début de soirée. Je pourrais citer de nombreux exemples de cette nature, que je vous demande de multiplier.
L'hôpital c'est aussi le maintien de l'égal accès de tous aux soins, en particulier pour les plus démunis ; il doit participer à la lutte contre l'exclusion. Je sais que vous partagez cette conviction et c'est d'ailleurs pour cette raison qu'il a été décidé de confier à l'hôpital public l'organisation des soins aux détenus, qui pourront ainsi bénéficier de prestations de qualité qui leur font actuellement gravement défaut.
Mais je n'oublie pas qu'un système de santé performant repose aussi sur la capacité de l'hôpital à promouvoir le progrès médical grâce à des plateaux techniques performants et des compétences hautement qualifiées
Cela suppose une volonté permanente d'innovation et d'adaptation.
Cela suppose aussi que l'évaluation entre effectivement dans les pratiques hospitalières. La démarche évaluative constitue l'un des principaux outils nécessaires à l'amélioration de la qualité des soins. De nombreux pays se sont engagés résolument dans des programmes d'évaluation. Je souhaite vivement que dans notre pays, l'évaluation ne reste pas une pétition de principe mais qu'elle devienne enfin une réalité. Le rôle de l'État est d'en promouvoir le concept et le contenu, mais sa mise en oeuvre ne peut que résulter d'actions volontaires des professionnels hospitaliers. Je suis persuadée que la Fédération Hospitalière de France a un rôle capital à jouer pour convaincre ses adhérents et participer à la mise en place des outils nécessaires.
Trop souvent, dans le passé, l'incapacité à prévoir les évolutions a eu des conséquences fâcheuses tant en termes de santé publique que de maîtrise des dépenses. Aussi suis-je attachée, à l'avenir, à ce que l'on puisse anticiper les évolutions prévisibles résultant des données démographiques, des nouvelles pathologies et des innovations biotechnologiques et que l'on en tire les conséquences pour notre système de santé.
Dans cet ordre d'idée, l'anticipation concerne, à mes yeux, non seulement les structures d'offre de soins, mais également le secteur du matériel médical.
Les entreprises concernées, dont je salue le dynamisme, sont confrontées à l'application du marché unique européen et leur compétitivité a parfois souffert de retards apportés à sa mise en oeuvre.
D'ores et déjà, le gouvernement s'est attaché à rattraper le retard accumulé et à préparer, par anticipation, l'application des nouvelles dispositions européennes. C'est ainsi que j'ai proposé au Parlement les textes qui permettront de rendre effectif, au ler janvier 1995, le marché unique pour le matériel médical.
Dans le même temps, je suis en mesures de vous annoncer ma décision de créer une voie française cohérente et efficace de mise sur le marché des matériels médicaux. Nous allons être l'un des tous premiers pays à disposer d'un organisme de certification du matériel médical valable pour toute l'Europe. Nous regrouperons dès le début de l'année prochaine les moyens existants sous la forme d'un groupement d'intérêt économique qui sera habilité à délivrer les certificats d'autorisation de mise sur le marché.
Soucieuse des impératifs de santé publique, l'administration conservera son rôle de vigilance quant au suivi des incidents ou risques d'incidents liés à l'utilisation des matériels médicaux.
Prévoir les évolutions, c'est aussi se donner la capacité d'atténuer les disparités de moyens constatées aussi bien entre les régions qu'entre les établissements, facteurs d'inégalité devant les soins pour les malades. Nous devons parvenir à les réduire par une répartition plus juste des ressources.
Des efforts ont été faits dans ce sens, depuis quelques années, mais ils restent insuffisants ; j'ai demandé au directeur des hôpitaux d'accélérer la politique de redistribution des moyens hospitaliers en modulant la répartition des marges de manoeuvre régionales.
L'expérimentation menée à l'initiative de Monsieur DOUSTE BLAZY, Ministre Délégué à la Santé, en région Languedoc Roussillon nous permettra de tester et d'évaluer de nouveaux modes de répartition des ressources basés sur une approche médicalisée de l'activité. D'autres expérimentations pourront être menées notamment sur la base des propositions de la Fédération Hospitalière de France. J'attends de ces expérimentations une allocation plus pertinente des ressources entre les établissements afin de sortir de la logique du budget global, que vous dénoncez à juste titre, et qui aboutit au maintien des situations acquises.
Cette politique de santé ambitieuse suppose un cadre juridique adapté.
La dernière loi hospitalière a défini les outils juridiques permettant de restructurer l'organisation hospitalière.
La planification, désormais fondée sur une approche plus globale des besoins de santé, doit permettre de contrôler, maîtriser et réguler le développement des équipements hospitaliers les plus coûteux et susciter les conditions indispensables d'une coopération trop longtemps ignorée entre les acteurs du système de santé dont les vocations sont différentes mais complémentaires.
Je n'ai pas souhaité un nouveau bouleversement de la législation hospitalière ; j'ai pensé toutefois que la loi du 31 juillet 1991 devait faire l'objet de quelques évolutions pour permettre à l'Etat d'exercer pleinement son rôle et aux établissements, leurs responsabilités. Tel est le sens de certains articles du projet de loi que le gouvernement a soumis au Parlement et qui est actuellement en cours de discussion.
Parmi les dispositions de ce projet, je voudrais insister sur celles qui m'apparaissent déterminantes pour la politique hospitalière que j'entends mener.
Chacun sait qu'il y a dans nos établissements beaucoup de lits inutilisés, mais aussi des lits mal utilisés et qui ne subsistent que par la force de l'habitude ; des fermetures de lits sont donc indispensables ; c'est le sens de la disposition législative qui permettra des suppressions de lits ou d'activités, non seulement pour des motifs de santé publique, mais aussi pour des raisons de sous occupation manifeste.
J'ai été sensible, Monsieur le Président, aux propositions de la Fédération Hospitalière de France sur ce sujet. Le gouvernement a, vous le savez, déposé à l'Assemblée Nationale un amendement destiné à éviter que les lits et activités qui seraient supprimés ne puissent permettre à d'autres établissements de les recréer au seul motif qu'existeraient des places disponibles à la carte sanitaire : cet amendement répondait à un voeu que vous aviez exprimé auprès de moi et auquel j'avais donné mon accord.
J'indique également que le projet de loi permettra aux établissements de santé de créer et gérer des activités sociales et médico-sociales, l'objectif étant de favoriser les opérations de restructurations et de reconversions dans une perspective d'aménagement du territoire et d'une meilleure couverture des besoins notamment dans le domaine de la prise en charge des personnes âgées.
Je suis pour ma part convaincue que l'autonomie juridique des hôpitaux est le gage d'une gestion moderne et efficace.
C'est pourquoi, les chefs d'établissements disposeront bientôt d'une autonomie plus grande dans le suivi de leurs budgets puisque le projet de loi, s'il est voté par le Parlement, leur donnera plus de liberté dans l'affectation des crédits à l'intérieur de chaque groupe fonctionnel de dépenses. Par ailleurs, Monsieur DOUSTE BLAZY, Ministre Délégué à la Santé réfléchit à des mesures de nature à assouplir la gestion. interne des établissements encore trop lourde et trop complexe.
Mais je tiens à réaffirmer, dans le même temps, que l'Etat doit exercer pleinement son rôle et ses responsabilités ; c'est à l'Etat, et à lui seul, qu'appartient en dernier ressort, le droit d'arrêter l'organisation territoriale de notre système hospitalier, ainsi que les missions des différents établissements. L'autonomie de gestion ne saurait se confondre, dans le secteur hospitalier, avec la liberté de développer des activités qui feraient double emploi avec les institutions existantes, ou qui seraient contraires à l'intérêt de la santé publique et aux équilibres économiques de notre pays.
J'ai proposé à monsieur le Premier Ministre, qui l'a accepté, une politique de restructuration ambitieuse.
Comme je l'indiquais il y a quelques instants, il n'est plus acceptable de maintenir des lits inoccupés ou sous utilisés.
Plus encore, n'est pas acceptable la dispersion, que j'ai constatée dans bien des cas, d'activités très spécialisées et coûteuses sur un nombre trop important d'établissements.
Cet éparpillement des moyens lorsqu'il existe interdit toute économie d'échelle. La qualité du geste du praticien étant aussi liée à sa fréquence, un regroupement de ces activités sur un nombre de sites plus limité doit permettre de disposer d'équipes médicales encore plus performantes et d'améliorer ce faisant leurs conditions de travail en limitant notamment leur participation aux tours de gardes.
La restructuration concerne aussi les petits hôpitaux où il n'est pas possible de répondre de manière satisfaisante aux besoins de la population. en raison d'une activité insuffisante, qui engendre une perte du savoir faire des équipes médicales et paramédicales.
Je pense en particulier à de petits services de chirurgie, d'obstétrique ; là encore des reconversions s'imposent au profit de structures pour personnes âgées dont notre pays a grand besoin. En ce qui concerne les urgences, le rapport que m'a récemment remis Monsieur le Pr STEG montre la voie à suivre.
En toutes circonstances, vous devez rechercher activement les meilleures formules de coopération.
Il en résultera certes des fermetures de services, des reconversions d'établissements, mais c'est à ce prix que l'on pourra procéder aux redéploiements nécessaires et que l'on pourra ainsi éviter un bouleversement plus radical du cadre juridique et institutionnel de l'hôpital actuel auquel vous êtes attachés.
Mon expérience d'il y a vingt ans et ce que je constate actuellement confirme toutefois ma conviction que le département est un espace géographique trop restreint pour permettre les restructurations et redéploiements nécessaires : toute politique hospitalière n'a donc de sens que si elle est appréhendée au niveau régional.
Il me semble donc - et c'est en ce sens qu'ont été engagées les études de restructuration des services extérieurs de mon administration, avec l'expérience des DRISS dont je m'apprête à tirer les conclusions, que c'est au niveau régional que devra désormais s'exercer le contrôle des établissements hospitaliers ; les autorités de l'Etat au niveau régional deviendraient ainsi responsables des décisions à caractère stratégique, notamment en matière de planification et d'allocation de moyens. Tel est au moins le sens des propositions que je m'apprête à faire au Gouvernement.
Dans ce schéma une tutelle de proximité subsisterait bien entendu au niveau départemental pour mettre en oeuvre les principales décisions prises au niveau régional.
Dans le même temps, les Directions Régionales des Affaires Sanitaires et Sociales seraient dotées de compétences hospitalières spécifiques.
Il me semble en effet que la connaissance par les DRASS du fonctionnement des hôpitaux gagnerait à être confortée par l'apport des compétences d'experts disposant d'une expérience professionnelle en milieu hospitalier.
Je réfléchis donc à un renforcement des DRASS auxquelles pourraient être adjointes une équipe d'appui composée par exemple d'un directeur d'hôpital, d'un médecin hospitalier et d'une infirmière générale.
Un renforcement des structures de l'Etat au niveau régional est réalisable à court ou moyen terme, sans bouleversement des structures existantes, sans remise en cause des équilibres institutionnels et professionnels.
Tel est en tout cas, je l'évoque parce qu'elle a été rendu publique, la thèse que je défends au sein du Gouvernement.
J'ai bien entendu aussi, M. le Président, ce que vous m'avez dit des maires ; je suis en effet bien convaincue que, si le Parlement décidait qu'il n'était plus indispensable qu'ils assurent eux-mêmes la présidence du Conseil d'Administration, ils n'en seraient pas moins vigilants dans la défense les intérêts de leurs administrés et de leurs hôpitaux.
La politique de restructuration, indispensable et incontournable pour l'avenir de l'hôpital, ne peut en effet se faire sans l'adhésion et la participation active de l'ensemble des acteurs impliqués dans la gestion et le fonctionnement des établissements.
Je pense d'abord aux élus, avec qui nous devons travailler en étroite coopération. Nous ne pouvons pas leur imposer des schémas de restructuration qu'ils percevraient comme purement technocratique. A nous de les convaincre, et beaucoup l'ont déjà compris, de proposer ou d'accepter les évolutions nécessaires.
Je suis sûre qu'ils auront à coeur de faire prévaloir l'intérêt général, qui est avant tout celui du malade, d'autant que l'amélioration de la qualité des soins et la sécurité vont souvent de pair avec une gestion optimum des moyens.
Je rends hommage aux directeurs dont la tâche n'est pas facile par les temps qui courent ; ils ont su faire évoluer les institutions hospitalières, en faisant preuve de dynamisme, et d'esprit d'initiative pour les adapter aux fortes contraintes qui pèsent sur l'hôpital ; leur formation et leurs responsabilités les conduisent naturellement à défendre l'intérêt général. Je sais qu'au delà de la défense du service public et des établissements qu'ils dirigent, on trouve chez eux le sens de l'Etat au meilleur sens du terme.
Pour poursuivre ces efforts indispensables, les services de l'Etat et les Ministres en personne sont là pour vous apporter leur total soutien.
Je souhaite également m'adresser aux médecins, nombreux dans cette salle. Les médecins ont une responsabilité médicale, éthique, déontologique mais aussi économique. Ils ne peuvent plus occulter cette dernière dimension au moment où les dépenses médicales connaissent un rythme de croissance particulièrement soutenu. De leur volonté de participer activement à la politique de maîtrise des dépenses et de restructurations dépend largement non seulement l'avenir de l'hôpital public mais aussi celui de notre système de protection sociale, ce dont aujourd'hui tous n'ont pas encore pris suffisamment conscience.
Je vais adresser, à chacun d'entre eux, une lettre personnelle pour leur demander leur concours et appeler leur attention sur leurs responsabilités en cette matière, car rien ne pourra réussir sans eux.
Je rappelle que j'ai souhaité que certains hôpitaux expérimentent une formule, déjà connue dans certains pays étrangers, de participation à l'équipe de direction d'un médecin, ce qui permettrait de renforcer le caractère pluridisciplinaire de l'équipe de direction et d'affirmer encore davantage la dimension médicale de la gestion hospitalière dans le respect des prérogatives des Présidents de CME. Je serai très intéressée que des hôpitaux se portent volontaires pour prendre des initiatives en ce sens.
Les personnels enfin constituent le premier atout de l'hôpital. L'efficacité des établissements repose avant tout sur la qualité de ceux qui y travaillent. Des mesures importantes mais légitimes ont été prises ces dernières années en faveur des personnels. Près de 17 milliards de francs ont été consacrés en quelques années aux améliorations statutaires. Les travaux et réflexions dans le domaine de l'amélioration des conditions de travail, de la formation, de l'évaluation des hommes doivent se poursuivre.
Je sais que certains hôpitaux connaissent de réelles difficultés pour ramener la durée du temps de travail des personnels de nuit, à 35 heures. L'Inspection Générale des Affaires Sociales vient de me remettre un rapport sur la base duquel le Directeur des Hôpitaux aura prochainement des contacts avec les organisations signataires. En tout état de cause, cette mesure devra devenir effective dans des délais rapprochés. Ce dossier, il faut le répéter, doit conduire l'ensemble des établissements à repenser autant qu'il le faut l'organisation actuelle du travail.
Une gestion moderne passe par l'association des personnels à la gestion ; ceux-ci doivent être directement impliqués dans les projets d'établissements. La motivation des équipes, la recherche de leur adhésion doit vous amener à améliorer la communication et la concertation.
Je précise par ailleurs que le gouvernement prépare des mesures pour que, si nécessaire, un accompagnement social des restructurations soit mis en place afin que nul ne soit lésé et que soient prises en compte les situations individuelles.
M. le Président, dans les mêmes circonstances en 1991, vous faisiez justement remarquer que "la seule personne qui reste sereine dans ce monde d'inquiétude et d'angoisse est le malade qui continue à avoir confiance dans le monde hospitalier, dans l'accueil qui lui est réservé, dans la qualité des soins qui lui est donnée".
Que l'on soit médecin, directeur, soignant ou même ministre, nous avons tous nos obligations ; chacun a ses impératifs ; mais au delà des divergences, au delà des intérêts particuliers, nous devons tous nous retrouver autour d'une exigence commune : le malade. La qualité des soins, la qualité de l'accueil nous obligent à tout mettre en oeuvre pour conserver la confiance du malade.
Cette exigence impose un effort soutenu, une évolution des esprits, oserais-je dire une révolution culturelle de la part de l'ensemble des partenaires du monde hospitalier ; elle suppose des décisions courageuses, que nous avons le devoir de prendre si nous ne voulons pas que de manière insidieuse, notre système hospitalier perde la place éminente qui est encore la sienne dans le monde.
C'est ce défi que nous devons relever ; c'est celui que nos concitoyens attendent de nous.
Le gouvernement est résolu et déterminé. Je sais qu'il peut compter sur vous pour faciliter cette difficile mais exaltante transformation.
En venant ici poser la première pierre de l'hôpital "Européen Georges Pompidou", je dois vous dire mon émotion de participer à la naissance d'un nouvel hôpital en cette fin du XXème siècle, à Paris
Ce nouvel hôpital marquera une nouvelle étape dans l'histoire de cette grande institution qu'est l'Assistance Publique - Hôpitaux de Paris porteuse des meilleures traditions de la médecine française Ce sera pour notre pays un symbole et, je l'espère un modèle de l'hôpital de demain.
Comme vous l'avez indiqué justement, Monsieur le Maire, cet hôpital pour la France sera aussi un hôpital pour les Parisiens. Vous savez l'attachement que je porte à ce XVème arrondissement. Je me réjouis que ses habitants, ceux des arrondissements et des communes voisines trouvent ainsi les services qu'ils attendent depuis longtemps.
Poser aujourd'hui la première pierre d'un nouvel hôpital peut paraître une gageure en ces temps où, à juste titre, on dit qu'il faut fermer des lits.
Mais le projet médical de l'hôpital Européen Georges Pompidou a su répondre aux difficiles enjeux de la restructuration hospitalière et préfigure une démarche qui est, je crois, comme vous l'avez souligné Monsieur le Maire, exemplaire. Je voudrais, à cet égard, mettre l'accent sur plusieurs points forts de ce projet.
Même s'il faut relativiser la notion du nombre de lits, l'opération de regroupement des quatre hôpitaux concernés sur le nouvel hôpital va permettre de supprimer 402 lits de soins aigus. Ces suppressions permettront de créer, à coûts constants, des unités gérontologiques sur les sites libérés et d'assurer ainsi une meilleure prise en charge de la dépendance des personnes âgées dans la capitale.
L'organisation de l'Assistance Publique - Hôpitaux de Paris, premier ensemble hospitalier européen, a évidemment facilité cette restructuration.
Exemplaire pour illustrer les avantages d'une politique de restructuration intelligente le projet est porteur également de grandes ambitions.
Le projet médical est organisé en effet autour des grandes préoccupations de santé publique.
Premièrement : l'accueil des urgences. Mission de service public par excellence, elle implique non seulement une bonne prise en charge médicale mais aussi un accueil de qualité ouvert à toutes les catégories de la population, notamment les plus démunies devant le monde hospitalier.
L'organisation proposée pour le nouvel hôpital s'inscrit parfaitement dans cet objectif. Elle permettra également de développer des activités de pointe avec la création de structures intégrées telles que "SOS embolies pulmonaires", "SOS mains", "SOS infarctus", mais aussi "SOS SIDA" qui réunira les moyens de l'hôpital Broussais et de l'hôpital Laënnec et pourra répondre 24 h sur 24 aux patients et à leurs médecins.
Deuxièmement : la prise en charge des maladies cardio-vasculaires, qui reste la première cause de mortalité dans notre pays. Elle se fera avec le regroupement des activités de l'hôpital Broussais et de l'hôpital Laënnec au sein d'un centre lourd de 14 000 m2 qui couvrira l'ensemble du champ cardio-vasculaire, médical comme chirurgical.
Troisièmement : la prise en charge des maladies cancéreuses, qui est la deuxième cause de mortalité des Français, avec la mise en place d'un ensemble cancérologique complet et performant.
L'hôpital "Européen Georges POMPIDOU" sera aussi l'hôpital universitaire du XXIème siècle : la recherche et l'innovation se trouvent naturellement placées au cur de ses missions. Des moyens importants y seront consacrés. Tout sera fait notamment pour favoriser la coopération avec l'INSERM et ses laboratoires.
Il faut être ici très ambitieux, il faut vouloir dégager de véritables pôles d'excellence. Notre pays ne peut se satisfaire d'appliquer correctement les découvertes des autres, nous devons créer, innover, promouvoir de nouvelles méthodes diagnostiques et thérapeutiques, aider l'industrie pharmaceutique à mettre au point de nouvelles molécules.
Il faut aussi encourager vivement le développement de la recherche clinique, c'est-à-dire celle qui est la plus proche du malade.
Bien entendu, cet hôpital, centre hospitalier et universitaire, doit être conçu de manière efficace et moderne.
Mais l'innovation doit se traduire également, et je dirais principalement, dans les conditions d'accueil des malades. Aussi, faut-il relever la volonté dans ce projet d'associer un hébergement hôtelier pour les patients et les familles à un plateau technique très performant.
Il s'agit là à l'évidence d'un choix prometteur tant pour le confort du malade que pour la réduction des capacités d'hospitalisation traditionnelle.
Il en va de même pour la création de cent places d'hospitalisation de moins de 24 heures, qui témoigne de la volonté de développer réellement toutes alternatives possibles à l'hospitalisation classique.
L'innovation à l'hôpital, c'est aussi une ambition nouvelle en matière de gestion et d'organisation
L'Assistance Publique - Hôpitaux de Paris a souvent été pionnière en ce domaine, et il faut la féliciter de proposer au travers de ce projet une nouvelle approche de gestion a la fois plus médicalisée et plus décentralisée.
Les nouvelles techniques d'archivage et de communication permettent d'éviter les pertes de temps inutiles, les examens redondants. Elles doivent servir à renforcer la personnalisation de l'accueil des malades, à simplifier les formalités et les circuits, à obtenir dans des délais réduits de l'information médicale pertinente, et enfin à faciliter les échanges avec les médecins de l'Assistance Publique - Hôpitaux de Paris qu'ils soient aigus ou de moyen et de long séjour.
J'ai appris avec beaucoup d'intérêt qu'il était envisagé de confier des responsabilités de gestion à ceux qui assument la responsabilité médicale. Il s'agit là d'une voie d'avenir, comme j'ai déjà eu l'occasion de le dire à plusieurs reprises.
Ainsi, vous le voyez, nous sommes ambitieux pour cet hôpital, mais nous sommes aussi ambitieux pour l'avenir de l'hospitalisation en France.
La politique de restructuration hospitalière que j'évoquais au début de mon propos n'a d'autre objectif que de permettre à notre pays de se donner les moyens de cette ambition.
Nous avons la volonté forte de mobiliser l'ensemble des professionnels pour cette mission courageuse.
L'hôpital " Européen Georges Pompidou " nous en donne une occasion exemplaire. Votre présence Monsieur le Premier ministre témoigne de la détermination du Gouvernement de s'engager dans cette voie difficile.
A mon tour, je vous remercie au nom de tous ceux qui sont ici.
Discours du 06 décembre 1993.
Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs les élus,
Mesdames, Messieurs,
Vous l'avez rappelé, Monsieur le Président, c'est la troisième fois que je viens ouvrir les travaux de votre fédération. Vous avez bien voulu y voir un témoignage de mon attachement à l'hôpital public. C'est en effet pour moi un grand plaisir que de me retrouver à nouveau aujourd'hui parmi vous pour l'ouverture de ces 15èmes Assises Nationales de l'Hospitalisation.
Il y a maintenant près de vingt ans que j'ai une première fois exercé des fonctions gouvernementales dans le domaine de la santé. Je suis donc particulièrement bien placée pour constater l'importance des évolutions que l'hôpital a su conduire et les changements à bien des égards positifs qu'il a su mener.
Non, l'hôpital n'est pas comme on le lit parfois à bout de souffle. Il traverse une phase décisive d'adaptation, de difficultés, d'incertitude et aussi d'espérance.
Mais la situation, vous le savez, reste préoccupante d'une part parce que les contraintes économiques demeurent fortes et d'autre part parce que les évolutions structurelles nécessaires pour maintenir la qualité des soins à un niveau optimum n'ont pas été conduites aussi loin et aussi vite qu'il eût été souhaitable ; il est indispensable que nous poursuivions de manière volontariste et efficace l'adaptation de notre système hospitalier.
Je savais avant de vous entendre pouvoir compter sur le concours de tous. Après vous avoir écouté et malgré les difficultés que vous avez évoquées et que je n'entends pas sous-estimer, j'en suis plus que jamais convaincue.
La Fédération Hospitalière de France a toujours su défendre les intérêts du service public hospitalier. Je suis certaine que face aux enjeux majeurs auxquels nous sommes confrontés elle saura, une nouvelle fois, être un artisan du changement.
Votre soutien à tous me sera précieux et notamment le votre, M. le Président, vous qui portez un regard toujours lucide sur notre société et un jugement jamais partisan sur notre système de santé.
L'hôpital public a été l'un des premiers à s'engager sur la voie de la maîtrise des dépenses de santé. Je tiens, devant vous, à le rappeler publiquement.
Les efforts qu'il a accomplis à ce titre ne doivent pas être oubliés ou passés sous silence. L'hôpital qui représentait plus de 40 % des dépenses de santé en 1980 n'en représente plus aujourd'hui que 36 %.
Au cours des 8 dernières années l'équipement en lits des hôpitaux publics a diminué de 10,4 % . Cela représente la fermeture de 41000 lits.
Pendant la même période son activité a notablement augmenté et s'est profondément modifiée. L'hôpital prend en charge des pathologies plus diversifiées et plus lourdes.
La durée de séjour était, faut-il le rappeler de 10 jours en 1980, elle est aujourd'hui inférieure à 7 jours.
Nous ne pouvons que nous féliciter des efforts importants menés pour améliorer l'accueil et les conditions d'hébergement du malade.
Ces actions ont été conduites dans un contexte de fortes contraintes budgétaires.
Elles n'ont été possibles que grâce aux capacités d'adaptation dont ont su faire preuve les hospitaliers et à une nouvelle conception de la gestion. Les restructurations sont déjà une réalité, quoi qu'on en dise, même si leurs effets restent encore trop limités.
Pourtant qui peut nier que la situation demeure préoccupante et même devient encore plus préoccupante ? Vous le savez, la dégradation des comptes sociaux s'est révélée plus importante que ne le laissaient prévoir les estimations initiales.
Le gouvernement a récemment relevé la participation des assurés au financement des dépenses. C'était une nécessité mais on ne peut guère aller beaucoup plus loin : le taux global de couvertures des dépenses de maladie par les assurances sociales devient en France inférieur à ce qu'il est dans de nombreux pays européens : entre 1980 et aujourd'hui, il est passé de 78 % à 74 %.
Les dépenses de santé connaissent, en effet, et il faut le dire un rythme de croissance excessif incompatible avec le contexte économique général.
En 1980, la France occupait le 7ème rang mondial pour la part des ressources nationales consacrée à la santé. Nous occupons aujourd'hui la troisième place en terme de dépenses alors que notre pays n'occupe qu'un rang moyen pour les indicateurs de morbidité les plus couramment utilisés.
C'est la raison pour laquelle l'encadrement budgétaire ne peut que demeurer rigoureux. Croyez que le gouvernement est bien conscient des efforts qui sont demandés en 1994 aux hôpitaux.
Le taux directeur 1994 nous est imposé par la situation économique que traverse notre pays. Il est certes inférieur au taux directeur 1993 mais il n'en est pas pour autant irréaliste puisqu'il prend en compte tant en matière salariale qu'au niveau de l'évolution des prix les hypothèses économiques retenues pour tous les comptes publics. Outre la part du taux directeur destiné au financement des mesures catégorielles, la croissance des dépenses hospitalières sera, en 1994, de 2,25 % alors que l'augmentation prévisionnelle des prix et des salaires est un peu inférieure à 2 %. Certains pays, vous le savez, ont décidé de diminuer leurs dépenses hospitalières et ont effectivement appliqué cette décision ; nous n'en sommes pas là, fort heureusement ; mais nous parviendrons d'autant plus facilement à améliorer la prise en charge des malades, que l'évolution des coûts sera maîtrisée et compatible avec la croissance de la richesse nationale.
Le respect impératif du taux directeur 1994 vous oblige, je le sais, à prendre dès le début de l'année prochaine les mesures qui s'imposent en termes de redéploiement, de gain de productivité, de gestion adaptée des effectifs.
Pour l'année en cours, je connais les difficultés que rencontrent certains établissements pour financer la revalorisation des gardes et astreintes médicales.
J'ai demandé à mes services de me faire des propositions pour prendre en compte les effets budgétaires réels de ces revalorisations ; les mesures prises vous seront annoncées dans les prochains jours.
Sachant que les dispositions qui ont été arrêtées pour le recrutement des "Faisant Fonction d'Internes" étrangers suscitaient dans certains cas des difficultés d'application, j'ai décidé de repousser leur date d'entrée en vigueur en mai 1994 ; les établissements qui ne seraient pas prêts au 1er janvier prochain pourront prendre les décisions qui s'imposent pour garantir la continuité du service public. Je crois néanmoins devoir souligner que ces nouvelles exigences, qui ne permettent plus désormais de recruter comme "faisant fonction d'interne'' que des médecins inscrits à un cursus universitaire de haut niveau, et non plus à un diplôme universitaire souvent sans rapport avec leur exercice professionnel à l'hôpital, sont destinées à améliorer la qualité des soins ; nous garantissons ainsi a tous les hôpitaux une qualification de leurs médecins comparable à celle qui est exigée de nos internes et résidents.
J'ai vérifié les statistiques. Contrairement à ce que l'on croit souvent le nombre de médecins à l'hôpital n'a nullement diminué. Bien au contraire chaque année, des postes médicaux sont créés. Le nombre des postes vacants lui-même diminue grâce à l'augmentation du nombre des candidatures aux concours de praticien hospitalier. Je ne souhaite pas masquer les difficultés sur un sujet aussi essentiel mais la vérité doit être rétablie car bien loin de se détériorer, la situation s'améliore même si des difficultés sont encore rencontrées dans certains établissements.
Les difficultés conjoncturelles ne doivent pas nous faire oublier l'essentiel. Vous savez que le gouvernement entend faire de la politique de santé une de ses priorités, d'abord pour en améliorer la qualité, mais aussi pour maîtriser ses conséquences financières pour la collectivité.
Une politique de santé ambitieuse n'a de sens que si elle s'appuie sur des objectifs de santé publique.
L'hôpital doit rester l'outil performant, à la pointe du progrès médical, ouvert à toutes les catégories de la population et perçu comme une référence dans le domaine des traitements médicaux.
Les modes de vie des Français changent ; l'hôpital doit suivre, en adaptant ses structures - par exemple les alternatives à l'hospitalisation - et ses modes d'accueil, - par exemple ses horaires et jours de consultation ; j'ai visité récemment un service hospitalier destiné aux malades du SIDA pouvant encore exercer une activité professionnelle : ce service accueille ses malades en consultation en fin d'après-midi et en début de soirée. Je pourrais citer de nombreux exemples de cette nature, que je vous demande de multiplier.
L'hôpital c'est aussi le maintien de l'égal accès de tous aux soins, en particulier pour les plus démunis ; il doit participer à la lutte contre l'exclusion. Je sais que vous partagez cette conviction et c'est d'ailleurs pour cette raison qu'il a été décidé de confier à l'hôpital public l'organisation des soins aux détenus, qui pourront ainsi bénéficier de prestations de qualité qui leur font actuellement gravement défaut.
Mais je n'oublie pas qu'un système de santé performant repose aussi sur la capacité de l'hôpital à promouvoir le progrès médical grâce à des plateaux techniques performants et des compétences hautement qualifiées
Cela suppose une volonté permanente d'innovation et d'adaptation.
Cela suppose aussi que l'évaluation entre effectivement dans les pratiques hospitalières. La démarche évaluative constitue l'un des principaux outils nécessaires à l'amélioration de la qualité des soins. De nombreux pays se sont engagés résolument dans des programmes d'évaluation. Je souhaite vivement que dans notre pays, l'évaluation ne reste pas une pétition de principe mais qu'elle devienne enfin une réalité. Le rôle de l'État est d'en promouvoir le concept et le contenu, mais sa mise en oeuvre ne peut que résulter d'actions volontaires des professionnels hospitaliers. Je suis persuadée que la Fédération Hospitalière de France a un rôle capital à jouer pour convaincre ses adhérents et participer à la mise en place des outils nécessaires.
Trop souvent, dans le passé, l'incapacité à prévoir les évolutions a eu des conséquences fâcheuses tant en termes de santé publique que de maîtrise des dépenses. Aussi suis-je attachée, à l'avenir, à ce que l'on puisse anticiper les évolutions prévisibles résultant des données démographiques, des nouvelles pathologies et des innovations biotechnologiques et que l'on en tire les conséquences pour notre système de santé.
Dans cet ordre d'idée, l'anticipation concerne, à mes yeux, non seulement les structures d'offre de soins, mais également le secteur du matériel médical.
Les entreprises concernées, dont je salue le dynamisme, sont confrontées à l'application du marché unique européen et leur compétitivité a parfois souffert de retards apportés à sa mise en oeuvre.
D'ores et déjà, le gouvernement s'est attaché à rattraper le retard accumulé et à préparer, par anticipation, l'application des nouvelles dispositions européennes. C'est ainsi que j'ai proposé au Parlement les textes qui permettront de rendre effectif, au ler janvier 1995, le marché unique pour le matériel médical.
Dans le même temps, je suis en mesures de vous annoncer ma décision de créer une voie française cohérente et efficace de mise sur le marché des matériels médicaux. Nous allons être l'un des tous premiers pays à disposer d'un organisme de certification du matériel médical valable pour toute l'Europe. Nous regrouperons dès le début de l'année prochaine les moyens existants sous la forme d'un groupement d'intérêt économique qui sera habilité à délivrer les certificats d'autorisation de mise sur le marché.
Soucieuse des impératifs de santé publique, l'administration conservera son rôle de vigilance quant au suivi des incidents ou risques d'incidents liés à l'utilisation des matériels médicaux.
Prévoir les évolutions, c'est aussi se donner la capacité d'atténuer les disparités de moyens constatées aussi bien entre les régions qu'entre les établissements, facteurs d'inégalité devant les soins pour les malades. Nous devons parvenir à les réduire par une répartition plus juste des ressources.
Des efforts ont été faits dans ce sens, depuis quelques années, mais ils restent insuffisants ; j'ai demandé au directeur des hôpitaux d'accélérer la politique de redistribution des moyens hospitaliers en modulant la répartition des marges de manoeuvre régionales.
L'expérimentation menée à l'initiative de Monsieur DOUSTE BLAZY, Ministre Délégué à la Santé, en région Languedoc Roussillon nous permettra de tester et d'évaluer de nouveaux modes de répartition des ressources basés sur une approche médicalisée de l'activité. D'autres expérimentations pourront être menées notamment sur la base des propositions de la Fédération Hospitalière de France. J'attends de ces expérimentations une allocation plus pertinente des ressources entre les établissements afin de sortir de la logique du budget global, que vous dénoncez à juste titre, et qui aboutit au maintien des situations acquises.
Cette politique de santé ambitieuse suppose un cadre juridique adapté.
La dernière loi hospitalière a défini les outils juridiques permettant de restructurer l'organisation hospitalière.
La planification, désormais fondée sur une approche plus globale des besoins de santé, doit permettre de contrôler, maîtriser et réguler le développement des équipements hospitaliers les plus coûteux et susciter les conditions indispensables d'une coopération trop longtemps ignorée entre les acteurs du système de santé dont les vocations sont différentes mais complémentaires.
Je n'ai pas souhaité un nouveau bouleversement de la législation hospitalière ; j'ai pensé toutefois que la loi du 31 juillet 1991 devait faire l'objet de quelques évolutions pour permettre à l'Etat d'exercer pleinement son rôle et aux établissements, leurs responsabilités. Tel est le sens de certains articles du projet de loi que le gouvernement a soumis au Parlement et qui est actuellement en cours de discussion.
Parmi les dispositions de ce projet, je voudrais insister sur celles qui m'apparaissent déterminantes pour la politique hospitalière que j'entends mener.
Chacun sait qu'il y a dans nos établissements beaucoup de lits inutilisés, mais aussi des lits mal utilisés et qui ne subsistent que par la force de l'habitude ; des fermetures de lits sont donc indispensables ; c'est le sens de la disposition législative qui permettra des suppressions de lits ou d'activités, non seulement pour des motifs de santé publique, mais aussi pour des raisons de sous occupation manifeste.
J'ai été sensible, Monsieur le Président, aux propositions de la Fédération Hospitalière de France sur ce sujet. Le gouvernement a, vous le savez, déposé à l'Assemblée Nationale un amendement destiné à éviter que les lits et activités qui seraient supprimés ne puissent permettre à d'autres établissements de les recréer au seul motif qu'existeraient des places disponibles à la carte sanitaire : cet amendement répondait à un voeu que vous aviez exprimé auprès de moi et auquel j'avais donné mon accord.
J'indique également que le projet de loi permettra aux établissements de santé de créer et gérer des activités sociales et médico-sociales, l'objectif étant de favoriser les opérations de restructurations et de reconversions dans une perspective d'aménagement du territoire et d'une meilleure couverture des besoins notamment dans le domaine de la prise en charge des personnes âgées.
Je suis pour ma part convaincue que l'autonomie juridique des hôpitaux est le gage d'une gestion moderne et efficace.
C'est pourquoi, les chefs d'établissements disposeront bientôt d'une autonomie plus grande dans le suivi de leurs budgets puisque le projet de loi, s'il est voté par le Parlement, leur donnera plus de liberté dans l'affectation des crédits à l'intérieur de chaque groupe fonctionnel de dépenses. Par ailleurs, Monsieur DOUSTE BLAZY, Ministre Délégué à la Santé réfléchit à des mesures de nature à assouplir la gestion. interne des établissements encore trop lourde et trop complexe.
Mais je tiens à réaffirmer, dans le même temps, que l'Etat doit exercer pleinement son rôle et ses responsabilités ; c'est à l'Etat, et à lui seul, qu'appartient en dernier ressort, le droit d'arrêter l'organisation territoriale de notre système hospitalier, ainsi que les missions des différents établissements. L'autonomie de gestion ne saurait se confondre, dans le secteur hospitalier, avec la liberté de développer des activités qui feraient double emploi avec les institutions existantes, ou qui seraient contraires à l'intérêt de la santé publique et aux équilibres économiques de notre pays.
J'ai proposé à monsieur le Premier Ministre, qui l'a accepté, une politique de restructuration ambitieuse.
Comme je l'indiquais il y a quelques instants, il n'est plus acceptable de maintenir des lits inoccupés ou sous utilisés.
Plus encore, n'est pas acceptable la dispersion, que j'ai constatée dans bien des cas, d'activités très spécialisées et coûteuses sur un nombre trop important d'établissements.
Cet éparpillement des moyens lorsqu'il existe interdit toute économie d'échelle. La qualité du geste du praticien étant aussi liée à sa fréquence, un regroupement de ces activités sur un nombre de sites plus limité doit permettre de disposer d'équipes médicales encore plus performantes et d'améliorer ce faisant leurs conditions de travail en limitant notamment leur participation aux tours de gardes.
La restructuration concerne aussi les petits hôpitaux où il n'est pas possible de répondre de manière satisfaisante aux besoins de la population. en raison d'une activité insuffisante, qui engendre une perte du savoir faire des équipes médicales et paramédicales.
Je pense en particulier à de petits services de chirurgie, d'obstétrique ; là encore des reconversions s'imposent au profit de structures pour personnes âgées dont notre pays a grand besoin. En ce qui concerne les urgences, le rapport que m'a récemment remis Monsieur le Pr STEG montre la voie à suivre.
En toutes circonstances, vous devez rechercher activement les meilleures formules de coopération.
Il en résultera certes des fermetures de services, des reconversions d'établissements, mais c'est à ce prix que l'on pourra procéder aux redéploiements nécessaires et que l'on pourra ainsi éviter un bouleversement plus radical du cadre juridique et institutionnel de l'hôpital actuel auquel vous êtes attachés.
Mon expérience d'il y a vingt ans et ce que je constate actuellement confirme toutefois ma conviction que le département est un espace géographique trop restreint pour permettre les restructurations et redéploiements nécessaires : toute politique hospitalière n'a donc de sens que si elle est appréhendée au niveau régional.
Il me semble donc - et c'est en ce sens qu'ont été engagées les études de restructuration des services extérieurs de mon administration, avec l'expérience des DRISS dont je m'apprête à tirer les conclusions, que c'est au niveau régional que devra désormais s'exercer le contrôle des établissements hospitaliers ; les autorités de l'Etat au niveau régional deviendraient ainsi responsables des décisions à caractère stratégique, notamment en matière de planification et d'allocation de moyens. Tel est au moins le sens des propositions que je m'apprête à faire au Gouvernement.
Dans ce schéma une tutelle de proximité subsisterait bien entendu au niveau départemental pour mettre en oeuvre les principales décisions prises au niveau régional.
Dans le même temps, les Directions Régionales des Affaires Sanitaires et Sociales seraient dotées de compétences hospitalières spécifiques.
Il me semble en effet que la connaissance par les DRASS du fonctionnement des hôpitaux gagnerait à être confortée par l'apport des compétences d'experts disposant d'une expérience professionnelle en milieu hospitalier.
Je réfléchis donc à un renforcement des DRASS auxquelles pourraient être adjointes une équipe d'appui composée par exemple d'un directeur d'hôpital, d'un médecin hospitalier et d'une infirmière générale.
Un renforcement des structures de l'Etat au niveau régional est réalisable à court ou moyen terme, sans bouleversement des structures existantes, sans remise en cause des équilibres institutionnels et professionnels.
Tel est en tout cas, je l'évoque parce qu'elle a été rendu publique, la thèse que je défends au sein du Gouvernement.
J'ai bien entendu aussi, M. le Président, ce que vous m'avez dit des maires ; je suis en effet bien convaincue que, si le Parlement décidait qu'il n'était plus indispensable qu'ils assurent eux-mêmes la présidence du Conseil d'Administration, ils n'en seraient pas moins vigilants dans la défense les intérêts de leurs administrés et de leurs hôpitaux.
La politique de restructuration, indispensable et incontournable pour l'avenir de l'hôpital, ne peut en effet se faire sans l'adhésion et la participation active de l'ensemble des acteurs impliqués dans la gestion et le fonctionnement des établissements.
Je pense d'abord aux élus, avec qui nous devons travailler en étroite coopération. Nous ne pouvons pas leur imposer des schémas de restructuration qu'ils percevraient comme purement technocratique. A nous de les convaincre, et beaucoup l'ont déjà compris, de proposer ou d'accepter les évolutions nécessaires.
Je suis sûre qu'ils auront à coeur de faire prévaloir l'intérêt général, qui est avant tout celui du malade, d'autant que l'amélioration de la qualité des soins et la sécurité vont souvent de pair avec une gestion optimum des moyens.
Je rends hommage aux directeurs dont la tâche n'est pas facile par les temps qui courent ; ils ont su faire évoluer les institutions hospitalières, en faisant preuve de dynamisme, et d'esprit d'initiative pour les adapter aux fortes contraintes qui pèsent sur l'hôpital ; leur formation et leurs responsabilités les conduisent naturellement à défendre l'intérêt général. Je sais qu'au delà de la défense du service public et des établissements qu'ils dirigent, on trouve chez eux le sens de l'Etat au meilleur sens du terme.
Pour poursuivre ces efforts indispensables, les services de l'Etat et les Ministres en personne sont là pour vous apporter leur total soutien.
Je souhaite également m'adresser aux médecins, nombreux dans cette salle. Les médecins ont une responsabilité médicale, éthique, déontologique mais aussi économique. Ils ne peuvent plus occulter cette dernière dimension au moment où les dépenses médicales connaissent un rythme de croissance particulièrement soutenu. De leur volonté de participer activement à la politique de maîtrise des dépenses et de restructurations dépend largement non seulement l'avenir de l'hôpital public mais aussi celui de notre système de protection sociale, ce dont aujourd'hui tous n'ont pas encore pris suffisamment conscience.
Je vais adresser, à chacun d'entre eux, une lettre personnelle pour leur demander leur concours et appeler leur attention sur leurs responsabilités en cette matière, car rien ne pourra réussir sans eux.
Je rappelle que j'ai souhaité que certains hôpitaux expérimentent une formule, déjà connue dans certains pays étrangers, de participation à l'équipe de direction d'un médecin, ce qui permettrait de renforcer le caractère pluridisciplinaire de l'équipe de direction et d'affirmer encore davantage la dimension médicale de la gestion hospitalière dans le respect des prérogatives des Présidents de CME. Je serai très intéressée que des hôpitaux se portent volontaires pour prendre des initiatives en ce sens.
Les personnels enfin constituent le premier atout de l'hôpital. L'efficacité des établissements repose avant tout sur la qualité de ceux qui y travaillent. Des mesures importantes mais légitimes ont été prises ces dernières années en faveur des personnels. Près de 17 milliards de francs ont été consacrés en quelques années aux améliorations statutaires. Les travaux et réflexions dans le domaine de l'amélioration des conditions de travail, de la formation, de l'évaluation des hommes doivent se poursuivre.
Je sais que certains hôpitaux connaissent de réelles difficultés pour ramener la durée du temps de travail des personnels de nuit, à 35 heures. L'Inspection Générale des Affaires Sociales vient de me remettre un rapport sur la base duquel le Directeur des Hôpitaux aura prochainement des contacts avec les organisations signataires. En tout état de cause, cette mesure devra devenir effective dans des délais rapprochés. Ce dossier, il faut le répéter, doit conduire l'ensemble des établissements à repenser autant qu'il le faut l'organisation actuelle du travail.
Une gestion moderne passe par l'association des personnels à la gestion ; ceux-ci doivent être directement impliqués dans les projets d'établissements. La motivation des équipes, la recherche de leur adhésion doit vous amener à améliorer la communication et la concertation.
Je précise par ailleurs que le gouvernement prépare des mesures pour que, si nécessaire, un accompagnement social des restructurations soit mis en place afin que nul ne soit lésé et que soient prises en compte les situations individuelles.
M. le Président, dans les mêmes circonstances en 1991, vous faisiez justement remarquer que "la seule personne qui reste sereine dans ce monde d'inquiétude et d'angoisse est le malade qui continue à avoir confiance dans le monde hospitalier, dans l'accueil qui lui est réservé, dans la qualité des soins qui lui est donnée".
Que l'on soit médecin, directeur, soignant ou même ministre, nous avons tous nos obligations ; chacun a ses impératifs ; mais au delà des divergences, au delà des intérêts particuliers, nous devons tous nous retrouver autour d'une exigence commune : le malade. La qualité des soins, la qualité de l'accueil nous obligent à tout mettre en oeuvre pour conserver la confiance du malade.
Cette exigence impose un effort soutenu, une évolution des esprits, oserais-je dire une révolution culturelle de la part de l'ensemble des partenaires du monde hospitalier ; elle suppose des décisions courageuses, que nous avons le devoir de prendre si nous ne voulons pas que de manière insidieuse, notre système hospitalier perde la place éminente qui est encore la sienne dans le monde.
C'est ce défi que nous devons relever ; c'est celui que nos concitoyens attendent de nous.
Le gouvernement est résolu et déterminé. Je sais qu'il peut compter sur vous pour faciliter cette difficile mais exaltante transformation.