Texte intégral
Monsieur le Premier ministre, Monsieur le maire de Lyon, Monsieur le Président, cher ami, Lucien Rebuffel, Monsieur le Président Turcat, Messieurs les ministres, Mesdames et Messieurs les parlementaires, Mesdames et Messieurs les élus, Mesdames et Messieurs les chefs d'entreprise, chers amis, il n'y a guère plus d'un an - le temps passe vite - nous étions à Bordeaux où la Confédération Générale des Petites et Moyennes Entreprises avait bien voulu m'inviter, et je vous avais, à l'époque, donné la primeur de ce qui est devenu le plan PME/PMI pour la France.
Nous voici, aujourd'hui, à nouveau réunis. Je voudrais tout d'abord saluer Monsieur Raymond Barre dont la Ville accueille, ce soir, le banquet des 1000. Vous savez que, lui et moi, partageons souvent les mêmes analyses, je lui suis reconnaissant du soutien qu'il veut bien apporter au Gouvernement dans l'action que nous conduisons depuis plus de 20 mois, parce qu'il la juge, avec la liberté d'esprit qu'on lui connaît, indispensable au redressement de notre pays.
Je voudrais aussi saluer, très amicalement, tous les élus de la région Rhône-Alpes, je ne peux tous les citer, je me contenterai d'évoquer le nom du Président du Conseil Régional, en même temps ministre de la Défense, Charles Millon.
Cher Président Rebuffel, le moins que l'on puisse dire - et cela fait maintenant combien d'années que nous nous connaissons - c'est que vous n'avez toujours pas votre langue dans la poche. Vous venez de vous exprimer avec cette franchise qu'aiment vos troupes. On dit "franchise" en termes diplomatiques, j'ai appris cela au Quai d'Orsay, lorsqu'on veut faire passer des choses parfois un peu rugueuses. Mais vous le faites avec tellement d'enthousiasme, tellement de conviction, tellement de sincérité, qu'on ne peut vous en tenir grief. Je voudrais vous en remercier d'autant que vous m'offrez ainsi la possibilité de vous répondre avec la même liberté de ton.
Votre dynamisme, cher Président, est à l'image de celui que déploient tous les chefs de PME-PMI, artisans et commerçants, réunis ce soir. Et je dois dire que cela me fait du bien de vous voir ainsi réunis, chaleureux, convaincus, enthousiastes, bref, apportant la démonstration quasiment physique que cette morosité ambiante dont on nous a tant parlé il y a quelques mois - la mode a un peu passé maintenant - ne correspond pas, quand on y réfléchit bien, à la réalité profonde de notre pays.
Vous êtes aussi, cher Président, à la tête d'une organisation syndicale marquée par l'esprit d'ouverture et de propositions. La porte de Matignon vous est ouverte en permanence - dans le sens de l'entrée, cela va de soi - et vous la franchissez fréquemment, ce dont je me réjouis.
Nous sommes réunis, ce soir, dans un cadre moins officiel qu'à Bordeaux l'an dernier. Ce banquet est un peu synonyme de fête, de réjouissances, de joie. Le mot même de "banquet" évoque ces réunions fraternelles et sympathiques dans la grande tradition de celle que la IIIe République savait organiser. Mais je n'y vois pas de signe d'un retour en arrière, bien au contraire ! Tout simplement celui du maintien d'habitudes chaleureuses et conviviales.
Ce banquet des 1000 est le second d'une série que vous allez tenir tout au long de cette année. Je voudrais, si vous le voulez bien, profiter de l'occasion qui m'est donnée pour réaffirmer d'abord ma conviction, celle du Gouvernement et, si je puis, celle du Président de la République, que les petites et les moyennes entreprises constituent l'une des sources les plus fécondes de la création de richesses et d'emplois dans notre pays.
On parle souvent dans les discours, et même dans les cérémonies de vux, des forces vives de la France. Je me demande si nos concitoyens ne s'interrogent pas, parfois, en se disant : "Mais quelles sont ces forces vives ?". Ce mot a une sorte d'aura un peu mystérieuse. Eh bien, proclamons-le ce soir : ces fameuses forces vives de notre pays, c'est d'abord vous, PME-PMI, artisans et commerçants de France.
Si notre pays continue d'aller de l'avant, s'il veut être présent au grand rendez-vous du XXIe siècle, il le devra, notamment, à vous tous qui avez toujours su mettre au premier rang les valeurs de courage et de dynamisme. Il le devra à des hommes et à des femmes comme vous, tous animés d'un esprit combatif, imaginatif, conquérant.
On dit souvent que la jeunesse de France manque de repères, c'est vrai ! Et c'est souvent notre faute. Je suis sûr que vous lui réserverez le meilleur accueil pour qu'elle puisse découvrir dans vos entreprises, dans vos ateliers, dans vos bureaux, dans vos commerces, comment le goût d'entreprendre et le goût de risquer donne de la saveur à la vie professionnelle et peut-être tout simplement à la vie tout court.
Le mérite, le travail, le sens de l'effort et des responsabilités, l'esprit de conquête, cher à Jacques Chirac, voilà autant de valeurs que vous pratiquez et que, d'une certaine manière, vous incarnez.
Le Gouvernement compte donc sur vous pour produire, pour créer, pour innover, pour offrir des emplois à nos jeunes. Car offrir des emplois à nos jeunes, c'est bien là notre obsession quotidienne.
Monsieur le Président, dans votre propos liminaire, vous avez bien voulu souligner l'action positive conduite par le Gouvernement, et tout particulièrement certains de ses ministres ici présents, depuis son arrivée, et je vous en remercie. Après tout, il n'est pas si fréquent, dans une réunion publique, nombreuse, devant la presse, de recevoir, je n'irais pas jusqu'à dire un satisfecit, mais, tout de même, quelques compliments, et j'y ai été très sensible, d'autant plus que c'est rare. Je viens de le dire.
J'ai la faiblesse de penser qu'ils n'étaient pas totalement immérités, car le plan PME pour la France est presque entièrement réalisé en à peine plus d'un an. Et cela représente une quantité de travail législatif, réglementaire ou administratif, conduit en étroite concertation avec vous, tout à fait considérable.
Vous avez tous sans doute, ici, en mémoire les grands chapitres de ce plan. Lucien Rebuffel les a rappelés :
- Faciliter le financement et la constitution des fonds propres des PME-PMI,
- Adapter progressivement la fiscalité,
- Simplifier et clarifier les relations avec les administrations et les collectivités publiques,
- Moraliser la concurrence,
- Réformer l'urbanisme commercial.
Dans tous ces secteurs qui étaient les grands axes de mon discours du 27 novembre 1995, des mesures concrètes ont été prises. Vous en avez cité quelques-unes, il y en a beaucoup d'autres.
Cet exercice de bilan, rapide, du plan PME-PMI pour la France, nous l'avons mené davantage dans le détail, il y a quelques jours, dans le cadre de la Conférence annuelle des PME. La première rencontre de ce type organisée en France et, là encore, conformément aux engagements pris en novembre 1995.
Je voudrais insister brièvement sur quelques aspects que tout le monde n'a pas encore nécessairement à l'esprit dans ce plan, et en le faisant, j'espère pouvoir répondre à certaines préoccupations que vous avez évoquées sur la situation de notre pays.
Je pense, par exemple, aux nouveaux produits de la Banque de Développement des PME qui vient de voir le jour et dont vous êtes, Monsieur Rebuffel, Président du Conseil de surveillance. Le Président de son Directoire est également, ici, parmi nous, Monsieur Jacques-Henri David. BDPME, Banque du Développement des PME, sur laquelle nous fondons beaucoup d'espérances. Et je souhaite, Monsieur le Président, c'est une proposition que je vous fais ce soir, que nous restions en contact, mois après mois, pour voir si elle tient ses promesses et si elle n'est pas peu à peu engluée dans des réglementations ou des habitudes qu'on ne manquera pas de lui faire tomber dessus, en provenance notamment de certaines administrations bien connues.
Je voudrais citer aussi la mise en uvre effective de l'impôt à 19 %, en cas de bénéfices réinvestis, la création de fonds communs de placement dans l'innovation qui profiteront, je le souhaite, aux entreprises de la région lyonnaise fortement tournées vers les produits de haute technologie. Voilà autant de leviers de développement que nous avons mis en place.
A cette liste qui est loin d'être exhaustive, j'ajouterai les opportunités nouvelles données aux chefs d'entreprise grâce à la baisse des taux d'intérêt. Cette baisse ne s'est pas faite par hasard, c'est le fruit d'une politique déterminée de maîtrise de la dépense publique que le Gouvernement a conduit depuis son arrivée. Et qui aurait pu prédire que nous arriverions à un tel résultat en aussi peu de mois ? Les taux d'intérêt à long terme sont aujourd'hui, en France, à leur plus bas niveau depuis 35 ans. Ce sont les plus bas du Monde, après le Japon, au sein de tous les grands pays industrialisés. Et cette baisse des taux d'intérêt a fini par se répercuter sur le coût du crédit. Pour les PME, moins que pour les autres, peut-être ! Moins que pour les grandes, mais en moyenne les taux à 5 ans ont baissé de 3 points, ceux des crédits de trésorerie sont descendus à moins de 4,5 %, alors qu'ils se situaient à plus de 8 % lorsque j'ai été nommé Premier ministre.
Vous le voyez, les conditions sont aujourd'hui réunies pour qu'en 1997 les entreprises puissent investir et se développer dans de meilleures conditions.
Pour investir, me direz-vous, il faut une conjoncture favorable, un climat de confiance retrouvé, des perspectives claires, et je connais la distinction que le Président Rebuffel fait toujours entre le structurel et le conjoncturel.
Le problème, cher Président, c'est que, dans le structurel, on peut décider de réformes. Le conjoncturel, cela ne se distribue pas, surtout quand les caisses sont vides. Comme c'est malheureusement la situation devant laquelle je me suis trouvé. Mais pourtant, et j'avais eu l'occasion de le dire en octobre dernier, je crois que, du point de vue conjoncturel aussi, même si vous nous avez trouvés un peu chiches, 1997 sera une meilleure année que 1996.
J'en voudrais comme première preuve, la croissance. En 1996, elle est restée à un niveau relativement faible. Je note toutefois que, contrairement à ce qu'on nous a dit pendant toute l'année, la consommation globale - je sais bien que les chiffres globaux, c'est loin des réalités et du terrain - a crû en 1996 de 2,4 %, ce qui est le meilleur résultat obtenu par la France depuis 1990. On s'en est aperçu en décembre, et pas dans les onze mois qui ont précédé. Et pourtant c'est le résultat des douze derniers mois.
Qu'en est-il pour 1997 ? Nous avons prévu 2,3 % de croissance - c'est une prévision - et je pense que nous allons la tenir, et j'écoute avec beaucoup d'intérêt ceux qui me disent aujourd'hui, ils sont de plus en plus nombreux, que nous allons même la dépasser.
Il est vrai que nous bénéficions d'un contexte économique favorable. Grâce à l'effort de tous les Français, nous sommes parvenus à maîtriser l'inflation, à avoir un franc stable, des taux d'intérêt faibles, je l'ai dit, et il faut tenir le cap. Nous avons aussi, et c'est peut-être une chance, c'est sûrement une chance, un environnement international plus porteur. Vous avez vu les chiffres de croissance aux États-Unis. J'étais hier à Londres et le Premier ministre me disait qu'il s'attendait à une croissance de 3 % en 1997 et, vraisemblablement, de 3,5 en 1998. Nous sommes très interdépendants les uns avec les autres.
Notre environnement, en matière de change, s'est considérablement modifié depuis quelques mois et même depuis quelques semaines. Il est devenu beaucoup plus favorable avec un dollar à plus de 5,50 francs, une livre et une lire qui se sont également réappréciées.
A ces facteurs d'environnement et de contexte, s'ajoutent les effets de la politique du Gouvernement. Vous avez bien voulu, Monsieur le Président, tout à l'heure, évoquer les baisses d'impôt. Lorsque je suis allé parler à la télévision, au mois de septembre dernier, pour dire : "l'impôt sur le revenu va baisser. Nous allons soumettre au Parlement un plan en ce sens", ce fut le scepticisme général ! l'incrédulité générale !
Que constate-t-on aujourd'hui lorsqu'on est mensualisé et qu'on reçoit sa feuille d'impôt ? Que le prélèvement de janvier, février, mars aussi, baisse de 6 %. Quand on reçoit son tiers provisionnel pour le 15 février, on constate qu'il baisse de 6 %. Et cette réforme va se poursuivre sur les cinq prochaines années, je n'entre pas dans le détail de toutes les spécifications qu'elle contient.
Nous avons aussi, en ce mois de janvier, une baisse des cotisations sociales, de celles qui relèvent de l'État en tout cas ou de l'UNEDIC, ce n'est pas tout à fait vrai pour les cadres compte tenu des décisions qui ont été prises par l'ARGIC et par l'ARRCO, je le sais ! Et puis, toujours dans votre souci de donner du travail et donc d'alimenter la demande, je voudrais rappeler que, en janvier, se concrétise une mesure que j'avais également annoncée l'année dernière, c'est-à-dire pour ceux qui ne paient pas d'impôt et qui ne bénéficient pas, par définition, des baisses d'impôt, la mise en circulation dans l'économie de 15 milliards de francs destinés aux Français non imposables qui avaient ouvert des Plans d'Épargne Populaire et dont les primes capitalisées depuis 5 ou 6 ans sont versées d'un coup en janvier de cette année.
Si l'on comptabilise donc les baisses d'impôt, 25 milliards de francs, ces 15 milliards de primes de Plan d'Épargne Populaire, les baisses de cotisations sociales, c'est en réalité quelque chose comme 50 milliards de francs qui sont injectés dans l'économie sous la forme de baisse de prélèvements ou de distribution d'épargne mise en réserve.
Et puis il y a aussi quelque chose qui a changé, je crois - peut-être me détromperez-vous, ce soir, je ne sais pas ! - ce sont les têtes, c'est le moral. L'INSEE fait très régulièrement une enquête sur le moral des chefs d'entreprise. Je ne sais pas si vous avez été sondés, on est toujours très surpris quand on voit des sondages parce qu'on n'est jamais sondé soi-même, mais enfin peut-être l'avez-vous été ? Je n'en sais rien ! Avez-vous reçu des questionnaires ? Cette enquête fait la différence entre les chefs d'entreprise qui pensent que cela va aller plus mal et ceux qui pensent que cela va aller mieux. Ceux qui voient l'avenir en noir et ceux qui le voient davantage en rose.
La moyenne des dernières années, c'est moins 12 dans cette série statistique. C'est-à-dire qu'en moyenne il y a 12 % de chefs d'entreprise qui voient la vie en noir de plus que ceux qui voient la vie en rose.
Au mois de septembre dernier, le différentiel était de moins 30. Dans la dernière enquête qui date de décembre-janvier, il est de plus 1.
Alors, ça vaut ce que ça vaut ! Mais je suis fondé à dire, malgré tout, que le climat psychologique est en train de changer et que les anticipations sur l'avenir deviennent meilleures. L'économie, on le sait, c'est peut-être 50 ou 60 % de psychologie, voilà pourquoi je suis confiant dans les perspectives de l'année 1997. Et si la croissance est plus forte que nous ne l'avons prévue dans la loi de finances, alors nous pourrons faire ce que souhaitent beaucoup de ceux qui nous donnent des conseils, c'est-à-dire accélérer le mouvement de baisse des impôts, sans remettre en cause nos objectifs fondamentaux et notamment la réalisation de la monnaie européenne.
Reste, je le sais, l'investissement qui n'a pas encore redémarré, mais qui devrait être stimulé par le retour de meilleures perspectives de croissance.
Plein effet du plan PME pour la France, conjoncture économique plus favorable, voilà, je crois, pour les responsables d'entreprise que vous êtes, pour les commerçants, pour les artisans, une année 1997 qui s'ouvre sous de meilleurs auspices.
Je forme le vu qu'elle soit pour vous, grâce à vous, une année de croissance, une année de création de richesses, qui permettra de répondre aux attentes de toutes celles et de tous ceux qui connaissent le drame du chômage, et en particulier les plus jeunes, y compris dans nos propres familles.
C'est sur l'emploi que nous jugeront les jeunes générations, et elles auront raison. Bien sûr, il n'est pas question d'imposer des embauches aux chefs d'entreprise - certains en proposent 750 000 dans des programmes électoraux qui ont commencé à circuler - ou, au contraire, de manière autoritaire, à une réduction uniforme du temps du travail. Et, là, je partage tout à fait le point de vue de Lucien Rebuffel, ce serait néfaste pour notre économie et pour nos entreprises. De faire croire, enfin, que l'on va résoudre tous les problèmes de l'emploi avec une retraite à 55 ans que personne, aujourd'hui, ne pourrait payer.
Cette approche dirigiste de l'économie est d'un autre âge, et ce serait risible s'il ne s'agissait pas d'affaires aussi sérieuses. Il n'y a qu'en France, à ma connaissance, où l'on peut encore trouver des responsables politiques qui, visiblement, n'ont rien appris, rien compris, ou les deux à la fois.
L'objectif premier d'une entreprise, c'est de créer de la richesse. L'entreprise, je le sais, n'embauche que lorsqu'il y a un marché, qu'elle voit ses carnets de commandes se remplir. A quoi bon s'évertuer à diminuer les charges fiscales ou sociales qui pèsent sur les entreprises pour les remplacer par des charges d'une autre nature dont l'effet serait exactement le même.
Vous avez mentionné, Monsieur le Président, un certain nombre d'interrogations liées à la souplesse du droit au travail. Comme je l'avais annoncé lors de la Conférence annuelle des PME, j'ai demandé à Jacques Barrot de désigner un petit groupe d'experts, piloté par un homme tout à fait éminent, qui s'appelle Raymond Soubie, pour travailler sur ce sujet. Sa mission sera d'analyser les freins à l'embauche et de proposer au Gouvernement les mesures les plus concrètes pour y remédier. Je souhaite que ce groupe travaille vite.
Au-delà, le Gouvernement s'est engagé à progresser dans plusieurs directions, je n'en citerai que trois :
- la simplification des formalités.
Oui, Monsieur le Président, je persiste et je signe.
On dit souvent que les paroles volent et que les écrits restent. Eh bien, ce que j'ai écrit dans "Entre nous", je peux le répéter, ici, entre nous parce que j'y crois profondément. Cette année, et le Président de la République nous a demandé d'aller loin dans ce sens, sera celle de la simplification du bulletin de salaire, réduction du nombre de lignes sur les feuilles de paie, possibilité de les faire établir à l'extérieur de la toute petite entreprise, harmonisation des assiettes des prélèvements. Un certain nombre d'idées sont déjà bien expertisées, et on avance sur ce sujet.
- 1997 sera aussi l'année de la réforme des marchés publics et celle de l'aboutissement de la réflexion sur la sous-traitance que vous avez évoquée tout à l'heure.
- le dernier point sur lequel je voudrais insister - et, là encore, je me félicite de le faire dans la région lyonnaise qui a toujours été pionnière en la matière - s'atteler à l'exportation.
Votre Président me dit souvent qu'il s'agit d'un domaine où les PME-PMI seraient négligées, voire oubliées. Ce fut peut-être vrai à une certaine époque, mais je crois que cette époque est révolue et, partout où je passe, je suis frappé de voir combien les PME ont pris conscience que ce sont les marchés extérieurs qui sont le plus souvent les plus porteurs en termes de croissance économique. Et j'en vois qui prennent, dans ce domaine, des initiatives et des risques tout à fait admirables.
Après avoir rationalisé notre dispositif d'accompagnement national, il faut donc repenser notre organisation au plan local pour que les PME-PMI qui souhaitent conquérir de nouveaux marchés à l'étranger puissent le faire dans les meilleures conditions, et ce à quoi travaille Yves Galland.
Lorsque je dis : "il faut", je ne cède pas à l'incantation, j'évoque des chantiers très concrets. La qualité et la permanence du dialogue qui s'est instauré entre la CGPME et le Gouvernement nous permettra, j'en suis sûr, de progresser.
Et cela m'amène tout naturellement à réagir à votre souhait, Monsieur le Président, de voir tout cela traduit dans une sorte de "small business act". Je vous cite à mon tour, je reprends votre expression en formant simplement le vu qu'elle disparaisse rapidement de notre vocabulaire, parce que je suis très attaché à la langue de Voltaire. Alors, trouvons une façon de traduire cette expression américaine.
Cette loi américaine qui remonte à 1953 repose sur toute une série de dispositions qui, pour résumer, organisent une préférence PME dans un certain nombre de textes législatifs qui concernent l'entreprise. Les Américains ont ainsi voulu reconnaître à la PME une spécificité en raison de son importance dans la vie économique et sociale du pays. Ils la protègent, ils adaptent les réglementations à ses difficultés et caractéristiques propres. Vous avez eu raison de souligner que cela s'est passé dans un pays qui n'est pas réputé pour son dirigisme économique.
Faut-il adopter aujourd'hui, en France, un texte de même nature ? Une chose est sûre, les PME jouent un rôle fondamental dans l'organisation de notre économie et je suis donc favorable à ce qu'une réflexion soit approfondie sur ce sujet. Je demande à Jean-Pierre Raffarin, dont chacun connaît le dévouement au service des PME, de s'attaquer à ce nouveau chantier et de venir avec vous, Monsieur le Président, d'ici quelques mois, me dire ce que pourrait être une loi-cadre pour les PME-PMI.
Voilà, Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, ce que je voulais vous dire en substance. Je sens bien maintenant que les appétits s'aiguisent et que les fourchettes commencent à tinter, je vais donc essayer de m'arrêter. Et avant de m'arrêter, je voudrais simplement résumer ce que j'ai essayé de vous dire, ce soir, en quelques formules plus simples que l'énoncé de mesures législatives réglementaires ou administratives.
Je crois profondément, comme vous, que, pour mieux distribuer la richesse, il faut commencer par la produire, et que la France ne pourra donc pas faire acte de solidarité et de fraternité vis-à-vis de ceux qui en ont besoin si nous n'avons pas dans notre pays des forces vives épanouies.
Je crois profondément que, pour produire, il faut travailler, qu'il n'y a pas de progrès si l'on décourage ceux qui travaillent et qui prennent des risques.
Et je crois profondément que, pour inciter au travail, il faut permettre à ceux qui travaillent d'y prendre intérêt. Il n'y a pas de pays fort et entreprenant si on ne respecte pas le fruit du travail, qu'il soit matériel ou moral, si on ne récompense pas le mérite et la prise de responsabilité dont notre Société a tant besoin.
Ces principes et ces valeurs de bon sens tiennent finalement en un mot ou en deux : l'esprit d'entreprise. Et c'est la raison pour laquelle, non pas par flatterie à votre égard, mais par conviction, quand je dis : Vive la PME-PMI, j'ai conscience tout simplement, d'une certaine manière, de dire : Vive la France.
Nous voici, aujourd'hui, à nouveau réunis. Je voudrais tout d'abord saluer Monsieur Raymond Barre dont la Ville accueille, ce soir, le banquet des 1000. Vous savez que, lui et moi, partageons souvent les mêmes analyses, je lui suis reconnaissant du soutien qu'il veut bien apporter au Gouvernement dans l'action que nous conduisons depuis plus de 20 mois, parce qu'il la juge, avec la liberté d'esprit qu'on lui connaît, indispensable au redressement de notre pays.
Je voudrais aussi saluer, très amicalement, tous les élus de la région Rhône-Alpes, je ne peux tous les citer, je me contenterai d'évoquer le nom du Président du Conseil Régional, en même temps ministre de la Défense, Charles Millon.
Cher Président Rebuffel, le moins que l'on puisse dire - et cela fait maintenant combien d'années que nous nous connaissons - c'est que vous n'avez toujours pas votre langue dans la poche. Vous venez de vous exprimer avec cette franchise qu'aiment vos troupes. On dit "franchise" en termes diplomatiques, j'ai appris cela au Quai d'Orsay, lorsqu'on veut faire passer des choses parfois un peu rugueuses. Mais vous le faites avec tellement d'enthousiasme, tellement de conviction, tellement de sincérité, qu'on ne peut vous en tenir grief. Je voudrais vous en remercier d'autant que vous m'offrez ainsi la possibilité de vous répondre avec la même liberté de ton.
Votre dynamisme, cher Président, est à l'image de celui que déploient tous les chefs de PME-PMI, artisans et commerçants, réunis ce soir. Et je dois dire que cela me fait du bien de vous voir ainsi réunis, chaleureux, convaincus, enthousiastes, bref, apportant la démonstration quasiment physique que cette morosité ambiante dont on nous a tant parlé il y a quelques mois - la mode a un peu passé maintenant - ne correspond pas, quand on y réfléchit bien, à la réalité profonde de notre pays.
Vous êtes aussi, cher Président, à la tête d'une organisation syndicale marquée par l'esprit d'ouverture et de propositions. La porte de Matignon vous est ouverte en permanence - dans le sens de l'entrée, cela va de soi - et vous la franchissez fréquemment, ce dont je me réjouis.
Nous sommes réunis, ce soir, dans un cadre moins officiel qu'à Bordeaux l'an dernier. Ce banquet est un peu synonyme de fête, de réjouissances, de joie. Le mot même de "banquet" évoque ces réunions fraternelles et sympathiques dans la grande tradition de celle que la IIIe République savait organiser. Mais je n'y vois pas de signe d'un retour en arrière, bien au contraire ! Tout simplement celui du maintien d'habitudes chaleureuses et conviviales.
Ce banquet des 1000 est le second d'une série que vous allez tenir tout au long de cette année. Je voudrais, si vous le voulez bien, profiter de l'occasion qui m'est donnée pour réaffirmer d'abord ma conviction, celle du Gouvernement et, si je puis, celle du Président de la République, que les petites et les moyennes entreprises constituent l'une des sources les plus fécondes de la création de richesses et d'emplois dans notre pays.
On parle souvent dans les discours, et même dans les cérémonies de vux, des forces vives de la France. Je me demande si nos concitoyens ne s'interrogent pas, parfois, en se disant : "Mais quelles sont ces forces vives ?". Ce mot a une sorte d'aura un peu mystérieuse. Eh bien, proclamons-le ce soir : ces fameuses forces vives de notre pays, c'est d'abord vous, PME-PMI, artisans et commerçants de France.
Si notre pays continue d'aller de l'avant, s'il veut être présent au grand rendez-vous du XXIe siècle, il le devra, notamment, à vous tous qui avez toujours su mettre au premier rang les valeurs de courage et de dynamisme. Il le devra à des hommes et à des femmes comme vous, tous animés d'un esprit combatif, imaginatif, conquérant.
On dit souvent que la jeunesse de France manque de repères, c'est vrai ! Et c'est souvent notre faute. Je suis sûr que vous lui réserverez le meilleur accueil pour qu'elle puisse découvrir dans vos entreprises, dans vos ateliers, dans vos bureaux, dans vos commerces, comment le goût d'entreprendre et le goût de risquer donne de la saveur à la vie professionnelle et peut-être tout simplement à la vie tout court.
Le mérite, le travail, le sens de l'effort et des responsabilités, l'esprit de conquête, cher à Jacques Chirac, voilà autant de valeurs que vous pratiquez et que, d'une certaine manière, vous incarnez.
Le Gouvernement compte donc sur vous pour produire, pour créer, pour innover, pour offrir des emplois à nos jeunes. Car offrir des emplois à nos jeunes, c'est bien là notre obsession quotidienne.
Monsieur le Président, dans votre propos liminaire, vous avez bien voulu souligner l'action positive conduite par le Gouvernement, et tout particulièrement certains de ses ministres ici présents, depuis son arrivée, et je vous en remercie. Après tout, il n'est pas si fréquent, dans une réunion publique, nombreuse, devant la presse, de recevoir, je n'irais pas jusqu'à dire un satisfecit, mais, tout de même, quelques compliments, et j'y ai été très sensible, d'autant plus que c'est rare. Je viens de le dire.
J'ai la faiblesse de penser qu'ils n'étaient pas totalement immérités, car le plan PME pour la France est presque entièrement réalisé en à peine plus d'un an. Et cela représente une quantité de travail législatif, réglementaire ou administratif, conduit en étroite concertation avec vous, tout à fait considérable.
Vous avez tous sans doute, ici, en mémoire les grands chapitres de ce plan. Lucien Rebuffel les a rappelés :
- Faciliter le financement et la constitution des fonds propres des PME-PMI,
- Adapter progressivement la fiscalité,
- Simplifier et clarifier les relations avec les administrations et les collectivités publiques,
- Moraliser la concurrence,
- Réformer l'urbanisme commercial.
Dans tous ces secteurs qui étaient les grands axes de mon discours du 27 novembre 1995, des mesures concrètes ont été prises. Vous en avez cité quelques-unes, il y en a beaucoup d'autres.
Cet exercice de bilan, rapide, du plan PME-PMI pour la France, nous l'avons mené davantage dans le détail, il y a quelques jours, dans le cadre de la Conférence annuelle des PME. La première rencontre de ce type organisée en France et, là encore, conformément aux engagements pris en novembre 1995.
Je voudrais insister brièvement sur quelques aspects que tout le monde n'a pas encore nécessairement à l'esprit dans ce plan, et en le faisant, j'espère pouvoir répondre à certaines préoccupations que vous avez évoquées sur la situation de notre pays.
Je pense, par exemple, aux nouveaux produits de la Banque de Développement des PME qui vient de voir le jour et dont vous êtes, Monsieur Rebuffel, Président du Conseil de surveillance. Le Président de son Directoire est également, ici, parmi nous, Monsieur Jacques-Henri David. BDPME, Banque du Développement des PME, sur laquelle nous fondons beaucoup d'espérances. Et je souhaite, Monsieur le Président, c'est une proposition que je vous fais ce soir, que nous restions en contact, mois après mois, pour voir si elle tient ses promesses et si elle n'est pas peu à peu engluée dans des réglementations ou des habitudes qu'on ne manquera pas de lui faire tomber dessus, en provenance notamment de certaines administrations bien connues.
Je voudrais citer aussi la mise en uvre effective de l'impôt à 19 %, en cas de bénéfices réinvestis, la création de fonds communs de placement dans l'innovation qui profiteront, je le souhaite, aux entreprises de la région lyonnaise fortement tournées vers les produits de haute technologie. Voilà autant de leviers de développement que nous avons mis en place.
A cette liste qui est loin d'être exhaustive, j'ajouterai les opportunités nouvelles données aux chefs d'entreprise grâce à la baisse des taux d'intérêt. Cette baisse ne s'est pas faite par hasard, c'est le fruit d'une politique déterminée de maîtrise de la dépense publique que le Gouvernement a conduit depuis son arrivée. Et qui aurait pu prédire que nous arriverions à un tel résultat en aussi peu de mois ? Les taux d'intérêt à long terme sont aujourd'hui, en France, à leur plus bas niveau depuis 35 ans. Ce sont les plus bas du Monde, après le Japon, au sein de tous les grands pays industrialisés. Et cette baisse des taux d'intérêt a fini par se répercuter sur le coût du crédit. Pour les PME, moins que pour les autres, peut-être ! Moins que pour les grandes, mais en moyenne les taux à 5 ans ont baissé de 3 points, ceux des crédits de trésorerie sont descendus à moins de 4,5 %, alors qu'ils se situaient à plus de 8 % lorsque j'ai été nommé Premier ministre.
Vous le voyez, les conditions sont aujourd'hui réunies pour qu'en 1997 les entreprises puissent investir et se développer dans de meilleures conditions.
Pour investir, me direz-vous, il faut une conjoncture favorable, un climat de confiance retrouvé, des perspectives claires, et je connais la distinction que le Président Rebuffel fait toujours entre le structurel et le conjoncturel.
Le problème, cher Président, c'est que, dans le structurel, on peut décider de réformes. Le conjoncturel, cela ne se distribue pas, surtout quand les caisses sont vides. Comme c'est malheureusement la situation devant laquelle je me suis trouvé. Mais pourtant, et j'avais eu l'occasion de le dire en octobre dernier, je crois que, du point de vue conjoncturel aussi, même si vous nous avez trouvés un peu chiches, 1997 sera une meilleure année que 1996.
J'en voudrais comme première preuve, la croissance. En 1996, elle est restée à un niveau relativement faible. Je note toutefois que, contrairement à ce qu'on nous a dit pendant toute l'année, la consommation globale - je sais bien que les chiffres globaux, c'est loin des réalités et du terrain - a crû en 1996 de 2,4 %, ce qui est le meilleur résultat obtenu par la France depuis 1990. On s'en est aperçu en décembre, et pas dans les onze mois qui ont précédé. Et pourtant c'est le résultat des douze derniers mois.
Qu'en est-il pour 1997 ? Nous avons prévu 2,3 % de croissance - c'est une prévision - et je pense que nous allons la tenir, et j'écoute avec beaucoup d'intérêt ceux qui me disent aujourd'hui, ils sont de plus en plus nombreux, que nous allons même la dépasser.
Il est vrai que nous bénéficions d'un contexte économique favorable. Grâce à l'effort de tous les Français, nous sommes parvenus à maîtriser l'inflation, à avoir un franc stable, des taux d'intérêt faibles, je l'ai dit, et il faut tenir le cap. Nous avons aussi, et c'est peut-être une chance, c'est sûrement une chance, un environnement international plus porteur. Vous avez vu les chiffres de croissance aux États-Unis. J'étais hier à Londres et le Premier ministre me disait qu'il s'attendait à une croissance de 3 % en 1997 et, vraisemblablement, de 3,5 en 1998. Nous sommes très interdépendants les uns avec les autres.
Notre environnement, en matière de change, s'est considérablement modifié depuis quelques mois et même depuis quelques semaines. Il est devenu beaucoup plus favorable avec un dollar à plus de 5,50 francs, une livre et une lire qui se sont également réappréciées.
A ces facteurs d'environnement et de contexte, s'ajoutent les effets de la politique du Gouvernement. Vous avez bien voulu, Monsieur le Président, tout à l'heure, évoquer les baisses d'impôt. Lorsque je suis allé parler à la télévision, au mois de septembre dernier, pour dire : "l'impôt sur le revenu va baisser. Nous allons soumettre au Parlement un plan en ce sens", ce fut le scepticisme général ! l'incrédulité générale !
Que constate-t-on aujourd'hui lorsqu'on est mensualisé et qu'on reçoit sa feuille d'impôt ? Que le prélèvement de janvier, février, mars aussi, baisse de 6 %. Quand on reçoit son tiers provisionnel pour le 15 février, on constate qu'il baisse de 6 %. Et cette réforme va se poursuivre sur les cinq prochaines années, je n'entre pas dans le détail de toutes les spécifications qu'elle contient.
Nous avons aussi, en ce mois de janvier, une baisse des cotisations sociales, de celles qui relèvent de l'État en tout cas ou de l'UNEDIC, ce n'est pas tout à fait vrai pour les cadres compte tenu des décisions qui ont été prises par l'ARGIC et par l'ARRCO, je le sais ! Et puis, toujours dans votre souci de donner du travail et donc d'alimenter la demande, je voudrais rappeler que, en janvier, se concrétise une mesure que j'avais également annoncée l'année dernière, c'est-à-dire pour ceux qui ne paient pas d'impôt et qui ne bénéficient pas, par définition, des baisses d'impôt, la mise en circulation dans l'économie de 15 milliards de francs destinés aux Français non imposables qui avaient ouvert des Plans d'Épargne Populaire et dont les primes capitalisées depuis 5 ou 6 ans sont versées d'un coup en janvier de cette année.
Si l'on comptabilise donc les baisses d'impôt, 25 milliards de francs, ces 15 milliards de primes de Plan d'Épargne Populaire, les baisses de cotisations sociales, c'est en réalité quelque chose comme 50 milliards de francs qui sont injectés dans l'économie sous la forme de baisse de prélèvements ou de distribution d'épargne mise en réserve.
Et puis il y a aussi quelque chose qui a changé, je crois - peut-être me détromperez-vous, ce soir, je ne sais pas ! - ce sont les têtes, c'est le moral. L'INSEE fait très régulièrement une enquête sur le moral des chefs d'entreprise. Je ne sais pas si vous avez été sondés, on est toujours très surpris quand on voit des sondages parce qu'on n'est jamais sondé soi-même, mais enfin peut-être l'avez-vous été ? Je n'en sais rien ! Avez-vous reçu des questionnaires ? Cette enquête fait la différence entre les chefs d'entreprise qui pensent que cela va aller plus mal et ceux qui pensent que cela va aller mieux. Ceux qui voient l'avenir en noir et ceux qui le voient davantage en rose.
La moyenne des dernières années, c'est moins 12 dans cette série statistique. C'est-à-dire qu'en moyenne il y a 12 % de chefs d'entreprise qui voient la vie en noir de plus que ceux qui voient la vie en rose.
Au mois de septembre dernier, le différentiel était de moins 30. Dans la dernière enquête qui date de décembre-janvier, il est de plus 1.
Alors, ça vaut ce que ça vaut ! Mais je suis fondé à dire, malgré tout, que le climat psychologique est en train de changer et que les anticipations sur l'avenir deviennent meilleures. L'économie, on le sait, c'est peut-être 50 ou 60 % de psychologie, voilà pourquoi je suis confiant dans les perspectives de l'année 1997. Et si la croissance est plus forte que nous ne l'avons prévue dans la loi de finances, alors nous pourrons faire ce que souhaitent beaucoup de ceux qui nous donnent des conseils, c'est-à-dire accélérer le mouvement de baisse des impôts, sans remettre en cause nos objectifs fondamentaux et notamment la réalisation de la monnaie européenne.
Reste, je le sais, l'investissement qui n'a pas encore redémarré, mais qui devrait être stimulé par le retour de meilleures perspectives de croissance.
Plein effet du plan PME pour la France, conjoncture économique plus favorable, voilà, je crois, pour les responsables d'entreprise que vous êtes, pour les commerçants, pour les artisans, une année 1997 qui s'ouvre sous de meilleurs auspices.
Je forme le vu qu'elle soit pour vous, grâce à vous, une année de croissance, une année de création de richesses, qui permettra de répondre aux attentes de toutes celles et de tous ceux qui connaissent le drame du chômage, et en particulier les plus jeunes, y compris dans nos propres familles.
C'est sur l'emploi que nous jugeront les jeunes générations, et elles auront raison. Bien sûr, il n'est pas question d'imposer des embauches aux chefs d'entreprise - certains en proposent 750 000 dans des programmes électoraux qui ont commencé à circuler - ou, au contraire, de manière autoritaire, à une réduction uniforme du temps du travail. Et, là, je partage tout à fait le point de vue de Lucien Rebuffel, ce serait néfaste pour notre économie et pour nos entreprises. De faire croire, enfin, que l'on va résoudre tous les problèmes de l'emploi avec une retraite à 55 ans que personne, aujourd'hui, ne pourrait payer.
Cette approche dirigiste de l'économie est d'un autre âge, et ce serait risible s'il ne s'agissait pas d'affaires aussi sérieuses. Il n'y a qu'en France, à ma connaissance, où l'on peut encore trouver des responsables politiques qui, visiblement, n'ont rien appris, rien compris, ou les deux à la fois.
L'objectif premier d'une entreprise, c'est de créer de la richesse. L'entreprise, je le sais, n'embauche que lorsqu'il y a un marché, qu'elle voit ses carnets de commandes se remplir. A quoi bon s'évertuer à diminuer les charges fiscales ou sociales qui pèsent sur les entreprises pour les remplacer par des charges d'une autre nature dont l'effet serait exactement le même.
Vous avez mentionné, Monsieur le Président, un certain nombre d'interrogations liées à la souplesse du droit au travail. Comme je l'avais annoncé lors de la Conférence annuelle des PME, j'ai demandé à Jacques Barrot de désigner un petit groupe d'experts, piloté par un homme tout à fait éminent, qui s'appelle Raymond Soubie, pour travailler sur ce sujet. Sa mission sera d'analyser les freins à l'embauche et de proposer au Gouvernement les mesures les plus concrètes pour y remédier. Je souhaite que ce groupe travaille vite.
Au-delà, le Gouvernement s'est engagé à progresser dans plusieurs directions, je n'en citerai que trois :
- la simplification des formalités.
Oui, Monsieur le Président, je persiste et je signe.
On dit souvent que les paroles volent et que les écrits restent. Eh bien, ce que j'ai écrit dans "Entre nous", je peux le répéter, ici, entre nous parce que j'y crois profondément. Cette année, et le Président de la République nous a demandé d'aller loin dans ce sens, sera celle de la simplification du bulletin de salaire, réduction du nombre de lignes sur les feuilles de paie, possibilité de les faire établir à l'extérieur de la toute petite entreprise, harmonisation des assiettes des prélèvements. Un certain nombre d'idées sont déjà bien expertisées, et on avance sur ce sujet.
- 1997 sera aussi l'année de la réforme des marchés publics et celle de l'aboutissement de la réflexion sur la sous-traitance que vous avez évoquée tout à l'heure.
- le dernier point sur lequel je voudrais insister - et, là encore, je me félicite de le faire dans la région lyonnaise qui a toujours été pionnière en la matière - s'atteler à l'exportation.
Votre Président me dit souvent qu'il s'agit d'un domaine où les PME-PMI seraient négligées, voire oubliées. Ce fut peut-être vrai à une certaine époque, mais je crois que cette époque est révolue et, partout où je passe, je suis frappé de voir combien les PME ont pris conscience que ce sont les marchés extérieurs qui sont le plus souvent les plus porteurs en termes de croissance économique. Et j'en vois qui prennent, dans ce domaine, des initiatives et des risques tout à fait admirables.
Après avoir rationalisé notre dispositif d'accompagnement national, il faut donc repenser notre organisation au plan local pour que les PME-PMI qui souhaitent conquérir de nouveaux marchés à l'étranger puissent le faire dans les meilleures conditions, et ce à quoi travaille Yves Galland.
Lorsque je dis : "il faut", je ne cède pas à l'incantation, j'évoque des chantiers très concrets. La qualité et la permanence du dialogue qui s'est instauré entre la CGPME et le Gouvernement nous permettra, j'en suis sûr, de progresser.
Et cela m'amène tout naturellement à réagir à votre souhait, Monsieur le Président, de voir tout cela traduit dans une sorte de "small business act". Je vous cite à mon tour, je reprends votre expression en formant simplement le vu qu'elle disparaisse rapidement de notre vocabulaire, parce que je suis très attaché à la langue de Voltaire. Alors, trouvons une façon de traduire cette expression américaine.
Cette loi américaine qui remonte à 1953 repose sur toute une série de dispositions qui, pour résumer, organisent une préférence PME dans un certain nombre de textes législatifs qui concernent l'entreprise. Les Américains ont ainsi voulu reconnaître à la PME une spécificité en raison de son importance dans la vie économique et sociale du pays. Ils la protègent, ils adaptent les réglementations à ses difficultés et caractéristiques propres. Vous avez eu raison de souligner que cela s'est passé dans un pays qui n'est pas réputé pour son dirigisme économique.
Faut-il adopter aujourd'hui, en France, un texte de même nature ? Une chose est sûre, les PME jouent un rôle fondamental dans l'organisation de notre économie et je suis donc favorable à ce qu'une réflexion soit approfondie sur ce sujet. Je demande à Jean-Pierre Raffarin, dont chacun connaît le dévouement au service des PME, de s'attaquer à ce nouveau chantier et de venir avec vous, Monsieur le Président, d'ici quelques mois, me dire ce que pourrait être une loi-cadre pour les PME-PMI.
Voilà, Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, ce que je voulais vous dire en substance. Je sens bien maintenant que les appétits s'aiguisent et que les fourchettes commencent à tinter, je vais donc essayer de m'arrêter. Et avant de m'arrêter, je voudrais simplement résumer ce que j'ai essayé de vous dire, ce soir, en quelques formules plus simples que l'énoncé de mesures législatives réglementaires ou administratives.
Je crois profondément, comme vous, que, pour mieux distribuer la richesse, il faut commencer par la produire, et que la France ne pourra donc pas faire acte de solidarité et de fraternité vis-à-vis de ceux qui en ont besoin si nous n'avons pas dans notre pays des forces vives épanouies.
Je crois profondément que, pour produire, il faut travailler, qu'il n'y a pas de progrès si l'on décourage ceux qui travaillent et qui prennent des risques.
Et je crois profondément que, pour inciter au travail, il faut permettre à ceux qui travaillent d'y prendre intérêt. Il n'y a pas de pays fort et entreprenant si on ne respecte pas le fruit du travail, qu'il soit matériel ou moral, si on ne récompense pas le mérite et la prise de responsabilité dont notre Société a tant besoin.
Ces principes et ces valeurs de bon sens tiennent finalement en un mot ou en deux : l'esprit d'entreprise. Et c'est la raison pour laquelle, non pas par flatterie à votre égard, mais par conviction, quand je dis : Vive la PME-PMI, j'ai conscience tout simplement, d'une certaine manière, de dire : Vive la France.