Déclaration de M. Christian Pierret, secrétaire d'Etat à l'industrie, sur l'enjeu du passage à l'euro pour La Poste, Paris le 28 avril 1998.

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Circonstance : Convention Euro de la Poste à Paris le 28 avril 1998

Texte intégral

Monsieur le Président,
Monsieur le Directeur Général,
Mesdames, Messieurs,

Je voudrais tout d'abord vous remercier, Monsieur le Président, de votre invitation à participer à cette importante convention. En premier lieu parce que, à quelques jours maintenant de la réunion des chefs d'Etat et de Gouvernement au cours de laquelle sera prise une décision historique pour notre avenir, elle est consacrée à un sujet majeur pour La Poste, mais aussi pour notre pays et pour l'Europe.
D'autre part, je suis très heureux d'avoir l'occasion de venir à votre rencontre et de m'adresser à vous qui constituez la grande équipe de pilotage de La Poste et qui assumez donc une responsabilité de premier plan, essentielle pour l'avenir de cette belle entreprise.
La Poste est pour moi un service public à esprit d'entreprise, ouvert sur l'international. J'ai eu l'occasion depuis de développer cette conception qui guide mon action, et notamment il y a un peu plus de six mois lors d'une première rencontre avec les cadres de La Poste à laquelle certains d'entre vous participaient.
Il me semble que ce triptyque -service public, entreprise, international- convient parfaitement pour apprécier l'enjeu du passage à l'euro pour La Poste. Je voudrais sur cette base apporter ma contribution à vos travaux en développant quelques idées et en vous faisant part de quelques convictions fortes.
Premier élément du triptyque : La Poste - entreprise
La Poste est une entreprise et comme toute entreprise elle doit préparer et réussir le passage à l'euro. C'est d'abord un défi technique, le Ministre chargé de l'Industrie, au contact régulier des entreprises, est particulièrement bien placé pour en mesurer l'importance. Un très grand nombre d'activités et de procédures sont concernées, de la facturation aux achats, de la comptabilité à la gestion des opérations. C'est un défi que toutes les entreprises doivent relever mais qui prend des proportions particulières dans la votre ; en raison de sa taille et de la capillarité de son réseau, mais aussi bien sûr du fait de ses activités financières qui confèrent une dimension spécifique à un changement de monnaie.
Mais l'euro c'est aussi pour les entreprises un formidable enjeu commercial, en créant de nouvelles opportunités et en mettant en valeur sa capacité à répondre aux attentes et aux besoins de leurs clients. C'est bien sûr le cas pour La Poste, pour chacun de ses métiers. Je ne m'étendrai pas sur ces sujets pourtant très importants. Vous êtes réunis aujourd'hui pour en parler et vous préparer. Je sais que vous le faites avec compétence et professionnalisme.
Je voudrais simplement vous dire que j'ai une totale confiance dans votre capacité à relever ce défi et à en tirer le meilleur parti au plan commercial. La Poste a montré qu'elle savait conduire avec succès des opérations de cette ampleur. La tâche est lourde et complexe, mais je suis convaincu que vous la mènerez à bien en associant l'ensemble des postiers.
Deuxième volet du triptyque : La Poste - service public
Le passage à l'euro constitue pour La Poste une nouvelle occasion de faire la démonstration de sa contribution essentielle à la marche de notre société. Vous faites fonctionner l'un des tous premiers services publics en France par l'étendue des services quotidiens rendus à nos concitoyens. C'est pourquoi vous avez bien sûr un rôle de tout premier plan à jouer pour faire entrer l'euro dans la vie des Français.
Aucune entreprise en France n'est en mesure de contribuer de manière aussi décisive que la votre à la réussite du passage à l'euro auprès du grand public.
Par le nombre de ses clients d'abord : probablement tous les Français de plus de 13 ou 14 ans qui fréquentent un bureau de poste au moins une fois de temps en temps.
Par l'étendue du réseau de points de contact bien sûr, et son milliard de visites annuelles.
Par ses activités financières bien entendu, qui placent La Poste au troisième rang des acteurs acteursfinanciers français par les encours gérés et qui font des postiers des professionnels des métiers liés à la monnaie.
Par la vocation historique de La Poste constamment réaffirmée, à être à la pointe de la diffusion des innovations, notamment dans le domaine financier. Hier, le chèque postal et la carte bancaire, aujourd'hui, le Porte Monnaie Electronique et les transactions sur Internet.
Vous avez donc une responsabilité importante. C'est le propre du service public fondé sur des missions essentielles et l'accès de tous au service. Je souhaite que tous les postiers, sous votre impulsion, y attache une grande importance dans les mois qui viennent, en accordant une attention particulière aux plus fragiles de nos concitoyens et plus généralement à tous ceux pour qui ce changement sera plus difficile à assimiler. Je sais pouvoir compter sur vous.
La Poste est une chance pour la réussite de la transition vers l'euro. Cette dernière est une opportunité pour les postiers de réaffirmer l'importance de leur contribution à la qualité de la vie quotidienne des Français. L'attachement du Gouvernement à cette contribution spécifique sera manifestée par son inscription au contrat d'objectifs et de progrès que nous sommes en train de finaliser.
J'en viens enfin au troisième volet du triptyque : l'ouverture internationale
Puisque nous parlons aujourd'hui de l'euro, je m'en tiendrais à l'Europe. Il s'agit du coeur du sujet.
L'euro va nous faire franchir une nouvelle étape très importante dans l'unification du marché européen. C'est vrai dans tous les secteurs de l'économie, mais plus encore sans doute dans le secteur postal.
L'euro va provoquer un nouveau développement des échanges intra-communautaires : les entreprises françaises vont trouver de nouveaux débouchés chez nos voisins, leurs homologues européennes vont développer leurs ventes dans notre pays. Ces évolutions auront, j'en suis convaincu, un effet positif sur la demande de services postaux, prioritairement sur les flux de courrier et de colis entre pays européens.
Avec l'euro, les clients de la Poste vont avoir plus encore qu'aujourd'hui besoin de services européens, comparables aux services intérieurs en termes de qualité et de compétitivité. La Poste se doit d'y répondre. C'est à la fois une belle opportunité de croissance et une ardente obligation à l'avenir pour le prestataire du service universel.
Je considère, en accord avec votre Président et votre Directeur Général, que cet axe de développement doit être au coeur de la stratégie de l'entreprise pour les années qui viennent. Il figurera en bonne place dans le prochain contrat d'objectifs et de progrès.
Mais l'euro, parce qu'il apporte de nouvelles chances de développement, c'est aussi une plus grande exigence de qualité et de compétitivité. Avec le renforcement des échanges, avec la comparabilité des tarifs exprimés dans une monnaie désormais commune, les comparaisons de performance entre prestataires de services postaux en Europe sont appelées à se développer et ainsi les mises en concurrence entre opérateurs avec les conséquences qui peuvent en résulter sur l'activité de La Poste si son efficacité n'est pas suffisante.
Cela m'amène à évoquer le chantier réglementaire postal européen qui, comme l'euro, constitue une brique importante de la construction européenne. Vous le savez, nous transposerons dans les mois qui viennent la directive adoptée en décembre dernier. Celle-ci nous convient dans son économie générale :
- elle reconnaît la nécessité en Europe d'un service universel postal fondé sur le principe d'accès garanti pour tous sur tout le territoire et lui donne un contenu minimum satisfaisant.
- elle autorise la réservation de services pour le prestataire universel dans des proportions acceptables pour satisfaire aux obligations du service universel.
Je souhaite que son intégration dans notre droit s'opère dans le cadre de la loi de 1990 qui reste parfaitement adaptée. J'entends par ailleurs que La Poste continue de bénéficier d'un secteur réservé important, dans les limites fixées par la directive, car c'est la condition de la pérennité du service public du courrier et de la péréquation tarifaire qui en est une des caractéristiques essentielles.
Entendons nous bien. Je ne suis pas un défenseur du monopole par principe. Je reconnais au contraire de grands mérites à une concurrence organisée et ordonnée. Vous qui la vivez au quotidien, vous savez que c'est un stimulant efficace à la recherche permanente de la qualité du service rendu et de la satisfaction du client. Mais dans le secteur postal, son extension doit être subordonnée à un objectif supérieur : la fourniture du service universel partout dans des conditions économiques satisfaisantes. J'y serai particulièrement attentif dans le cadre des débats à venir relatifs à la révision de la directive et à l'évolution du secteur réservé pour l'après 2002.
J'évoquerai enfin le problème des frais terminaux qui règlent les échanges de courrier entre opérateurs postaux . Nous vivons aujourd'hui avec un système obsolète, juridiquement contesté et générateur de distorsions inadmissibles engendrant des pertes importantes pour La Poste. L'adoption d'un nouveau système est urgente, au moins pour le courrier intra-communautaire. La directive, très claire sur ce point, constitue une avancée incontestable. J'ai donc l'intention d'entreprendre une démarche auprès de la Commission de Bruxelles pour faire accélérer l'examen en cours de l'accord Reims II qui représente un progrès évident et a le mérite d'avoir été approuvé par 14 opérateurs de l'Union européenne sur 15.
Voilà les quelques mots que je voulais vous adresser à l'occasion de cette convention consacrée à cet important changement qui va marquer la fin de ce siècle. Je terminerai en vous disant mes encouragements pour le conduire avec succès pour ce qui vous concerne et ma conviction, contenue dans le slogan de cette journée, que l'euro est une opportunité pour La Poste et La Poste, une chance pour l'euro.

(Source http://www.industrie.gouv.fr, le 25 septembre 2001)