Interview de Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de l'écologie et du développement durable, à France 2 le 17 juillet 2003, sur les conséquences de la tempête ayant sévi dans le Sud-Ouest, une partie du Centre et en Maine-et-Loire dans la nuit du 15 au 16 et sur la sécheresse qui pénalise l'agriculture.

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Média : France 2 - Télévision

Texte intégral

F. Laborde -. Nous allons évidemment parler environnement, risque et catastrophe naturelle, après notamment ce qui vient de se passer dans une partie de la France, le Sud-Ouest, une partie du Centre touchée. Hier, vous êtes allée vous-même dans le Maine-et-Loire, juste après le Conseil des ministres, le Maine-et-Loire qui est aussi votre région d'ailleurs.
- "Tout à fait, elle a été très durement touchée. J'ai eu l'occasion de rencontrer les victimes, c'est très impressionnant, elles ont vécu une nuit véritablement de cauchemar, une nuit d'apocalypse, avec une tempête qui a soufflée de façon très forte. Un jeune homme du Maine-et-Loire est décédé dans le camping de Gennes mais il y a eu des morts également dans les Landes. Nous avons appris cette nuit qu'une petite fille de deux ans avait succombé suite à la chute d'un arbre dans un camping à Biscarrosse. Evidemment, nos pensées vont vers les victimes. Ce sont souvent des gens modestes qui passaient leurs vacances dans des campings. Il y a aussi des saisonniers, beaucoup de saisonniers, qui s'abritent la nuit sous des tentes. Un certain nombre avait trouvé refuge dans une construction, hélas précaire, et un mur est tombé sur les jeunes : deux jeunes ont été gravement blessés."
On va revenir sur cette question des saisonniers, parce que les agriculteurs ont de multiples inquiétudes mais pas seulement celles-là. Pour revenir à la prévention, puisque c'est un des objets de votre loi sur les risques naturelles, quand il y a une alerte, comme l'annonce Météo France, on ne peut pas aller jusqu'à un point de précision suffisant pour dire, "attention à la foudre, attention à tel ou tel phénomène climatique aussi violent, à tel endroit" ?
- "Météo France avait averti des zones à risque. Météo France avait dit, d'ailleurs, que dans ce cas-là on pouvait s'attendre à un épisode météorologique qui mettait en danger les vies humaines. Donc, l'alerte avait été faite mais de façon large, évidemment. On est tout à fait surpris par le caractère très localisé..."
Le maire de Biscarrosse ne pouvait rien faire, ne pouvait pas prévoir...
- "Voilà. Donc, on voit bien par exemple dans le cas du Maine-et-Loire, que j'ai visité hier, que le phénomène est comme une sorte de coup de rabot qui traverse le département, et à quelques mètres près, il ne se passe rien dans ces épisodes météorologiques extrêmes. Il y a par contre des catastrophes naturelles que l'on peut prévoir, sur lesquelles l'alerte de la population peut être faite. C'est le sens de la loi sur les risques qui a été adoptée en deuxième lecture à l'Assemblée nationale avant-hier. Là, l'information de la population est tout à fait importante puisqu'on se rend bien compte à chaque fois que des morts auraient pu être évités quand un certain nombre de comportements de précaution sont pris."
Pour ce qui se relève de l'indemnisation, les départements touchés vont être déclarés... Il y aura quoi, un arrêté de... ?
- "Il y a deux choses. Il y a le système assurantiel qui fait que les dégâts causés par le vent, la tempête elle-même, sont pris en charge par les assurances..."
L'assurance de la maison, l'assurance de la voiture...
- "Voilà, l'assurance de la voiture, etc., les assurances des entreprises. Et pour ce qui concerne les dégâts causés par l'eau, l'arrêté de catastrophe naturelle permettra de faire cette prise en charge. Les préfets sont en train d'instruire le dossier et présenteront ces dossiers au Gouvernement. Les arrêtés de catastrophe naturelle seront pris dans les départements concernés."
Les départements c'est les Landes, les Pyrénées ?
- "Les Landes, les Pyrénées-Atlantiques, La Gironde, le Maine-et-Loire, entre autres, la Charente-Maritime."
Est-ce que l'on peut faire un rapprochement entre ces catastrophes, ces violentes tempêtes, la sécheresse qui sévit de façon très forte et l'évolution du climat ? Est-ce que l'on est en train d'assister à un phénomène climatique nouveau ?
- "Il est tout à fait évident qu'on observe des changements climatiques extrêmement profonds, un phénomène de réchauffement, avec la survenue de plus en plus fréquente d'épisodes météorologiques extrêmes. Actuellement, les spécialistes du climat constatent ces coïncidences sans faire de relation absolue entre la survenue de ces épisodes météorologiques et le réchauffement climatique. Néanmoins, je suis persuadée qu'un comportement de précaution s'impose et que nous devons tout faire pour réduire le réchauffement climatique, réduire nos émission de gaz à effet de serre. C'est le sens de l'effort diplomatique de la France pour que nous mettions en oeuvre le protocole de Kyoto, par exemple, et que nous réduisions ces gaz à effet de serre."
Les agriculteurs du Maine-et-Loire ou des Landes, par exemple, se plaignent des phénomènes de sécheresse. Est-ce que l'on aura un impôt sécheresse ? Est-ce que c'est de la même ampleur que ce qui s'est passé en 1976 ?
- "Dans l'état actuel de la crise de sécheresse majeure que nous traversons, nous sommes très loin de la crise de 1976."
Donc, pas d'impôt sécheresse cette année ?
- "Bien sûr, Nous ne sommes pas à la fin de l'été, nous constaterons les dégâts à la fin de l'été. Mon collègue, H. Gaymard, a fait le point d'ailleurs avant-hier sur cette affaire. Ce que nous constatons également, c'est que l'état de la nappe phréatique est bien plus satisfaisant qu'en 1976. Donc, à la fois ,la crise de sécheresse elle-même n'a pas l'ampleur de 1976 et l'état de nos nappes d'eau est bien meilleur. Donc, il n'est pas question pour l'instant d'un impôt sécheresse."
Deuxième question : comment faire pour aider ces agriculteurs qui disent aujourd'hui que de nombreux saisonniers ont quitté les régions frappées par ces tempêtes et qu'ils vont avoir du mal pour leur récolte ? De même que dans toutes les régions où il y avait beaucoup de tourisme, comme les Landes, qui avait déjà subit la pollution du Prestige, elles voient à nouveau les touristes s'en aller ?
- "Nos agriculteurs sont en grande difficulté, surtout ceux qui employaient ces saisonniers qui ont été durement touchés par les épisodes de tempêtes. Cela est majoré ensuite par le fait qu'un certain nombre d'opérations que l'on pouvait mécaniser - je pense à l'écimage du maïs que l'on est en train de faire actuellement ..."
Pour le maïs de semence, effectivement...
- "Pour le maïs de semence, on est en train d'écimer ce maïs. On pouvait le faire mécaniquement, comme les maïs ont été couchés, on ne peut plus le faire que manuellement. Donc, des cellules de crise ont été mises en place par les préfets pour faire en sorte que les saisonniers nécessaires - il y a un appel à un volontariat -, soient mis en place."
Donc vous lancez cet appel ?
- "Voilà, tout à fait. On a d'autant plus besoin des saisonniers maintenant !"
Et pour les Landes, la Gironde qui avaient déjà subi Le Prestige ?
-"La solidarité nationale, bien entendu, sera à l'oeuvre."
(Source : premier-ministre, Service d'information du gouvernement, le 17 juillet 2003)