Texte intégral
Question.: M. le Ministre, vous avez évoqué à São Paulo les questions de la justice commerciale, vous faites référence à quoi exactement ? Est-ce que vous pourriez être plus spécifique sur cette question ?
Réponse.: Le terme de justice commerciale n'est pas le bon, mais une des convictions que j'ai c'est que le Brésil a besoin d'avoir une administration performante, fiable, transparente, avec des règles du jeu qui soient connues de tous les acteurs, qu'ils soient brésiliens ou étrangers, bien sûr, de manière à ce que, quels que soient les problèmes rencontrés, les acteurs économiques sachent qu'ils peuvent s'appuyer sur un système qui fonctionne selon des règles connues et qui ne changent pas. Nous vivons dans un monde de droit, il est nécessaire pour l'acteur économique de savoir qu'il vit dans ce monde de droit.
Q.: Est-ce que vous vous référez en particulier à des entreprises françaises qui seraient en difficulté, qui seraient victimes de ce manque de règles du jeu ?
R.: Je ne me réfère pas particulièrement à ces cas, même s'ils en font partie. Je tenais, moi, à exprimer le sentiment que dans le monde économique globalisé dans lequel nous vivons, avec l'intérêt pour tous les pays d'attirer au maximum l'attention des investisseurs étrangers, mais aussi de permettre aux investisseurs locaux d'avoir confiance dans le fonctionnement de leur pays, je faisais référence à tout cela pour dire que c'est probablement l'un des sujets importants pour le Brésil, en tout cas de modernisation de son fonctionnement, qui, s'il est bien traité, devrait apporter les conditions nécessaires, même si elles ne sont pas suffisantes, pour permettre au pays de se développer encore plus rapidement qu'il n'a su le faire jusqu'à présent.
Q.: Prétendez-vous aborder avec M. Palocci les questions liées aux réformes en cours de la sécurité sociale, en France ainsi qu'au Brésil, et au ralentissement de l'économie des deux pays ?
R.: Les réformes qui sont en cours au Brésil ou en France ne sont pas particulières à ces deux pays. En fait il y a la prise de conscience progressive mais simultanée de la plupart des pays qui comptent sur le plan économique, des conséquences de ce que l'on appelle la mondialisation, la globalisation. La mondialisation suppose la liberté des acteurs économiques de choisir la meilleure manière pour eux de prospérer. Elle se met en oeuvre au travers de la concurrence. Et elle implique l'apparition d'un certain nombre d'autorités, y compris privées, qui considèrent que leur travail consiste à aider les acteurs économiques à prendre les meilleures ou les moins mauvaises décisions. Ces organismes ont comme objectif d'éclairer les problèmes rencontrés par les différents pays dans lesquels cette activité économique peut se développer librement. De la même manière qu'ils éclairent les actionnaires, ou les investisseurs individuels, sur le mérite respectif des différentes entreprises qui vont un petit peu faire appel à leur épargne. D'où par exemple les agences de notation qui spontanément, sans qu'on leur demande leur avis, émettent des remarques sur la solidité des finances, ou du système de retraite de tel ou tel pays. C'est cela qui amène tous les pays en même temps à découvrir, que ce soit aux Etats Unis, en Europe, au Brésil, demain en Chine et aujourd'hui au Japon, que, face à cette demande de clarification, un certain nombre de problèmes doivent être traités d'une manière transparente et compréhensible par l'acteur économique, par celui qui aide l'acteur économique à prendre ses décisions. C'est pour cela que dans les cas des retraites, en France, compte tenu de notre profil démographique, nous avons le devoir de traiter ce problème du financement des retraites d'une manière adaptée à ce profil démographique, au risque, pour nous, si on ne le faisait pas, d'avoir une opinion émise par différents canaux sur l'économie française qui serait "dubitative", voire négative. C'est pour cela que ce problème par exemple des retraites se retrouve posé en même temps dans la plupart des pays, y compris dans le vôtre. Cela ne veut pas dire que la solution est la même d'un pays à l'autre. Mais, cela veut dire que tous nos pays, y compris la France et le Brésil, ont dorénavant le devoir d'affronter, d'une manière aussi transparente, méthodique et explicable que nécessaire, des problèmes dont la difficulté les a amenés dans le passé à se dire qu'il était "urgent d'attendre".
C'est ce genre de question que j'ai l'intention d'évoquer avec mes collègues pour, très certainement, partager avec eux le sentiment que ces problèmes font partie des nouveaux problèmes que nos administrations, nos gouvernements doivent traiter. Et que si on peut s'entraider quant aux solutions, pour traiter ces problèmes, pourquoi pas !
Parce que derrière cela, je peux me permettre d'insister, vous trouvez la manifestation au niveau des Etats des décisions qu'on pris ces Etats ensemble lorsqu'ils ont décidé que l'avenir de leur pays était mieux assuré par cette ouverture sur l'autre. Ce n'est que la conséquence de cette décision des Etats, qu'ils découvrent maintenant, sans jamais l'avoir très bien compris, lorsqu'ils prenaient cette décision.
Q.: M. le Ministre, pourriez-vous nous parler de l'entretien que vous avez eu ce matin avec M. Furlan ?
R.: Nous n'avons pas eu de difficulté avec M. Furlan pour constater notre accord sur la plupart des points que nous avions à traiter dans nos pays, pour les raisons que je viens d'évoquer.
J'ai eu notamment l'occasion, avec lui, de constater ce que j'avais déjà ressenti, c'est à dire la volonté du Brésil de donner un contenu économique plus fort à l'élargissement du Mercosul, à son approfondissement.
Nous avons ensemble aussi constaté que le poids agricole de la valeur ajoutée brésilienne était encore élevé compte tenu de ce que 25 % des brésiliens continuaient à vivre de la terre, et que donc l'un des moyens pour aider le Brésil à se développer consistait pour l'Europe à faciliter aussi vite et aussi profondément que possible l'entrée des produits agricoles brésiliens sur le marché européen.
Et même si mon homologue a considéré qu'on n'allait pas assez vite, il a accepté quand même mon sentiment que les récentes décisions qui ont été prises à l'initiative de la France et de l'Allemagne permettaient aux futures discussions avec le Mercosul et plus généralement à l'OMC d'avoir des perspectives heureuses, davantage qu'elles ne l'auraient été il y a un an.
J'ai aussi insisté sur le fait que dès lors qu'on était sur des marchés de plus en plus mondiaux, l'intérêt pour le Brésil d'un développement agricole n'est pas à mesurer en termes de tonnes ou de chiffres d'affaires, mais en termes de valeur ajoutée, c'est à dire des marges qui restent acquises pour le Brésil.
Je connais suffisamment bien les marchés de commodités pour vous dire qu'il n'y a pas de différence entre la manière de gérer le marché mondial de l'acier et le marché mondial de la viande. Et que le fait d'avoir les meilleurs coûts de production, y compris pour la viande, pour le sucre ou pour une autre spéculation agricole n'est pas suffisant.
Ce qui compte c'est d'avoir non seulement les meilleurs coûts, mais aussi la meilleure stratégie commerciale, c'est à dire la meilleure capacité de vendre une valeur ajoutée à des clients qui ont envie de l'acheter.
Et c'est cela le fonds du problème. Il découle toujours de cette même globalisation. C'est le client qui a le pouvoir, et pas le producteur. Quels que soient les coûts du producteur, il faut qu'il crée les conditions pour que le client ait envie d'acheter le produit ou le service qu'il propose, bien entendu au meilleur prix.
C'est donc au producteur, y compris brésilien, de découvrir progressivement la manière dont il va pouvoir capter durablement l'intérêt de tel ou tel client, en termes non pas de personnes, mais de pays ou de sous-ensembles d'un pays, de capter l'intérêt de ce client pour le décider à acheter plutôt au Brésil que dans un autre pays, ou dans une autre entreprise.
Voilà la discussion que nous avons eue.
Q.: Pourriez-vous nous faire un bilan des investissements français réalisés au Brésil ?
R.: S'agissant des investissements au Brésil, je vous rappelle que l'Europe représente la moitié des investissements étrangers au Brésil, et que la France et l'Allemagne ensemble représentent une très grosse partie de cette moité. Comme vous le savez, la France a beaucoup investi au Brésil, continuera à beaucoup investir au Brésil, dans beaucoup de domaines, parce que la culture brésilienne a l'air de plaire aux investisseurs français.
Q.: Vous avez dit que l'on cherchait plus de transparence des règles du jeu. Je souhaiterais savoir s' il y a eu une demande spécifique à ce sujet de la part du gouvernement brésilien ?
R.: Non, je me suis bien gardé de préciser tel ou tel point d'une pensée, qui n'est qu'une pensée. Mais, connaissant le Brésil depuis un certain temps, et voyant les considérables changements de perception du Brésil sur lui-même et par rapport à l'étranger, j'ai le sentiment que cette dimension du problème n'a pas encore suffisament été travaillée, alors que, à mes yeux, avec ma petite expérience, elle a une grosse importance pour créer les meilleures conditions d'attractivité du Brésil vis à vis, je le répète, de tous ceux qui investissent, qu'ils soient brésiliens ou étrangers. Car autrement ils auront tendance à aller investir ailleurs.
Q.: Selon un article publié dans "Le Monde" d'aujourd'hui, Peugeot serait en train de renvoyer 500 employés temporaires, suite à la diminution de la demande interne. C'est le même problème auquel fait face le Brésil et qui serait lié à l'activité économique. Je souhaiterais savoir si la France, d'après ce qui a été diffusé au Brésil, serait disposée à adopter des mesures afin de faciliter les ventes de ces constructeurs.
R.: Vous savez que les entreprises, quel que soit leur passeport, sont amenées à respirer en fonction de l'évolution de leur clientèle. Si vous citez Peugeot, vous pourriez citer - la semaine précédente - Volkswagen, l'interview a été donné au Financial Times: Volkswagen renvoyait 4.000 personnes, je crois, ou à peu près - cela veut dire simplement que le Brésil passe par une période de forte diminution de la consommation, que la capacité installée au Brésil en matière de fabrication de voitures est trop grande par rapport à la consommation actuelle et que tous les acteurs doivent s'adapter à l'intérêt finalement de leur entreprise et donc du pays dans lequel ils travaillent. Quant à la notion d'exportation, il est clair que PSA, comme Volkswagen, Renault et autres, ont depuis longtemps considéré le Brésil comme une plate-forme de production et pas uniquement comme un marché de consommation. Ce qui veut dire que, stratégiquement, ils considèrent leur problème mondial et, en fonction des cartes qu'ils ont en mains, ils essaient d'optimiser en temps réel les adaptations positives ou négatives qu'ils doivent faire en fonction de l'évolution du marché mondial de la voiture.
Et on retombe sur la première question, à savoir la mondialisation.
Q.: Suite aux conversations que vous avez eues avec M. Furlan, vous diriez que le Brésil n'offre pas encore aux investisseurs étrangers assez de conditions de sécurité juridique ?
R.: Je répète que j'ai évidemment une grande confiance dans la capacité de développement du Brésil, et le conseil que je me permets de donner, si tant que je puisse donner des conseils, c'est qu'effectivement tous les investisseurs soient parfaitement à l'aise avec la manière dont, au niveau fédéral, au niveau local, au niveau de l'Etat, les contrats, les engagements, etc., qu'ils ont pris, sont respectés. Et là aussi, M. Furlan était d'accord avec moi.
(source http://www.ambafrance-br.org.br, le 7 août 2003)
Conférence de pressedu 24 juillet
Question.: M. le Ministre, vous avez évoqué à São Paulo les questions de la justice commerciale, vous faites référence à quoi exactement ? Est-ce que vous pourriez être plus spécifique sur cette question ?
Réponse.: Le terme de justice commerciale n'est pas le bon, mais une des convictions que j'ai c'est que le Brésil a besoin d'avoir une administration performante, fiable, transparente, avec des règles du jeu qui soient connues de tous les acteurs, qu'ils soient brésiliens ou étrangers, bien sûr, de manière à ce que, quels que soient les problèmes rencontrés, les acteurs économiques sachent qu'ils peuvent s'appuyer sur un système qui fonctionne selon des règles connues et qui ne changent pas. Nous vivons dans un monde de droit, il est nécessaire pour l'acteur économique de savoir qu'il vit dans ce monde de droit.
Q.: Est-ce que vous vous référez en particulier à des entreprises françaises qui seraient en difficulté, qui seraient victimes de ce manque de règles du jeu ?
R.: Je ne me réfère pas particulièrement à ces cas, même s'ils en font partie. Je tenais, moi, à exprimer le sentiment que dans le monde économique globalisé dans lequel nous vivons, avec l'intérêt pour tous les pays d'attirer au maximum l'attention des investisseurs étrangers, mais aussi de permettre aux investisseurs locaux d'avoir confiance dans le fonctionnement de leur pays, je faisais référence à tout cela pour dire que c'est probablement l'un des sujets importants pour le Brésil, en tout cas de modernisation de son fonctionnement, qui, s'il est bien traité, devrait apporter les conditions nécessaires, même si elles ne sont pas suffisantes, pour permettre au pays de se développer encore plus rapidement qu'il n'a su le faire jusqu'à présent.
Q.: Prétendez-vous aborder avec M. Palocci les questions liées aux réformes en cours de la sécurité sociale, en France ainsi qu'au Brésil, et au ralentissement de l'économie des deux pays ?
R.: Les réformes qui sont en cours au Brésil ou en France ne sont pas particulières à ces deux pays. En fait il y a la prise de conscience progressive mais simultanée de la plupart des pays qui comptent sur le plan économique, des conséquences de ce que l'on appelle la mondialisation, la globalisation. La mondialisation suppose la liberté des acteurs économiques de choisir la meilleure manière pour eux de prospérer. Elle se met en oeuvre au travers de la concurrence. Et elle implique l'apparition d'un certain nombre d'autorités, y compris privées, qui considèrent que leur travail consiste à aider les acteurs économiques à prendre les meilleures ou les moins mauvaises décisions. Ces organismes ont comme objectif d'éclairer les problèmes rencontrés par les différents pays dans lesquels cette activité économique peut se développer librement. De la même manière qu'ils éclairent les actionnaires, ou les investisseurs individuels, sur le mérite respectif des différentes entreprises qui vont un petit peu faire appel à leur épargne. D'où par exemple les agences de notation qui spontanément, sans qu'on leur demande leur avis, émettent des remarques sur la solidité des finances, ou du système de retraite de tel ou tel pays. C'est cela qui amène tous les pays en même temps à découvrir, que ce soit aux Etats Unis, en Europe, au Brésil, demain en Chine et aujourd'hui au Japon, que, face à cette demande de clarification, un certain nombre de problèmes doivent être traités d'une manière transparente et compréhensible par l'acteur économique, par celui qui aide l'acteur économique à prendre ses décisions. C'est pour cela que dans les cas des retraites, en France, compte tenu de notre profil démographique, nous avons le devoir de traiter ce problème du financement des retraites d'une manière adaptée à ce profil démographique, au risque, pour nous, si on ne le faisait pas, d'avoir une opinion émise par différents canaux sur l'économie française qui serait "dubitative", voire négative. C'est pour cela que ce problème par exemple des retraites se retrouve posé en même temps dans la plupart des pays, y compris dans le vôtre. Cela ne veut pas dire que la solution est la même d'un pays à l'autre. Mais, cela veut dire que tous nos pays, y compris la France et le Brésil, ont dorénavant le devoir d'affronter, d'une manière aussi transparente, méthodique et explicable que nécessaire, des problèmes dont la difficulté les a amenés dans le passé à se dire qu'il était "urgent d'attendre".
C'est ce genre de question que j'ai l'intention d'évoquer avec mes collègues pour, très certainement, partager avec eux le sentiment que ces problèmes font partie des nouveaux problèmes que nos administrations, nos gouvernements doivent traiter. Et que si on peut s'entraider quant aux solutions, pour traiter ces problèmes, pourquoi pas !
Parce que derrière cela, je peux me permettre d'insister, vous trouvez la manifestation au niveau des Etats des décisions qu'on pris ces Etats ensemble lorsqu'ils ont décidé que l'avenir de leur pays était mieux assuré par cette ouverture sur l'autre. Ce n'est que la conséquence de cette décision des Etats, qu'ils découvrent maintenant, sans jamais l'avoir très bien compris, lorsqu'ils prenaient cette décision.
Q.: M. le Ministre, pourriez-vous nous parler de l'entretien que vous avez eu ce matin avec M. Furlan ?
R.: Nous n'avons pas eu de difficulté avec M. Furlan pour constater notre accord sur la plupart des points que nous avions à traiter dans nos pays, pour les raisons que je viens d'évoquer.
J'ai eu notamment l'occasion, avec lui, de constater ce que j'avais déjà ressenti, c'est à dire la volonté du Brésil de donner un contenu économique plus fort à l'élargissement du Mercosul, à son approfondissement.
Nous avons ensemble aussi constaté que le poids agricole de la valeur ajoutée brésilienne était encore élevé compte tenu de ce que 25 % des brésiliens continuaient à vivre de la terre, et que donc l'un des moyens pour aider le Brésil à se développer consistait pour l'Europe à faciliter aussi vite et aussi profondément que possible l'entrée des produits agricoles brésiliens sur le marché européen.
Et même si mon homologue a considéré qu'on n'allait pas assez vite, il a accepté quand même mon sentiment que les récentes décisions qui ont été prises à l'initiative de la France et de l'Allemagne permettaient aux futures discussions avec le Mercosul et plus généralement à l'OMC d'avoir des perspectives heureuses, davantage qu'elles ne l'auraient été il y a un an.
J'ai aussi insisté sur le fait que dès lors qu'on était sur des marchés de plus en plus mondiaux, l'intérêt pour le Brésil d'un développement agricole n'est pas à mesurer en termes de tonnes ou de chiffres d'affaires, mais en termes de valeur ajoutée, c'est à dire des marges qui restent acquises pour le Brésil.
Je connais suffisamment bien les marchés de commodités pour vous dire qu'il n'y a pas de différence entre la manière de gérer le marché mondial de l'acier et le marché mondial de la viande. Et que le fait d'avoir les meilleurs coûts de production, y compris pour la viande, pour le sucre ou pour une autre spéculation agricole n'est pas suffisant.
Ce qui compte c'est d'avoir non seulement les meilleurs coûts, mais aussi la meilleure stratégie commerciale, c'est à dire la meilleure capacité de vendre une valeur ajoutée à des clients qui ont envie de l'acheter.
Et c'est cela le fonds du problème. Il découle toujours de cette même globalisation. C'est le client qui a le pouvoir, et pas le producteur. Quels que soient les coûts du producteur, il faut qu'il crée les conditions pour que le client ait envie d'acheter le produit ou le service qu'il propose, bien entendu au meilleur prix.
C'est donc au producteur, y compris brésilien, de découvrir progressivement la manière dont il va pouvoir capter durablement l'intérêt de tel ou tel client, en termes non pas de personnes, mais de pays ou de sous-ensembles d'un pays, de capter l'intérêt de ce client pour le décider à acheter plutôt au Brésil que dans un autre pays, ou dans une autre entreprise.
Voilà la discussion que nous avons eue.
Q.: Pourriez-vous nous faire un bilan des investissements français réalisés au Brésil ?
R.: S'agissant des investissements au Brésil, je vous rappelle que l'Europe représente la moitié des investissements étrangers au Brésil, et que la France et l'Allemagne ensemble représentent une très grosse partie de cette moité. Comme vous le savez, la France a beaucoup investi au Brésil, continuera à beaucoup investir au Brésil, dans beaucoup de domaines, parce que la culture brésilienne a l'air de plaire aux investisseurs français.
Q.: Vous avez dit que l'on cherchait plus de transparence des règles du jeu. Je souhaiterais savoir s' il y a eu une demande spécifique à ce sujet de la part du gouvernement brésilien ?
R.: Non, je me suis bien gardé de préciser tel ou tel point d'une pensée, qui n'est qu'une pensée. Mais, connaissant le Brésil depuis un certain temps, et voyant les considérables changements de perception du Brésil sur lui-même et par rapport à l'étranger, j'ai le sentiment que cette dimension du problème n'a pas encore suffisament été travaillée, alors que, à mes yeux, avec ma petite expérience, elle a une grosse importance pour créer les meilleures conditions d'attractivité du Brésil vis à vis, je le répète, de tous ceux qui investissent, qu'ils soient brésiliens ou étrangers. Car autrement ils auront tendance à aller investir ailleurs.
Q.: Selon un article publié dans "Le Monde" d'aujourd'hui, Peugeot serait en train de renvoyer 500 employés temporaires, suite à la diminution de la demande interne. C'est le même problème auquel fait face le Brésil et qui serait lié à l'activité économique. Je souhaiterais savoir si la France, d'après ce qui a été diffusé au Brésil, serait disposée à adopter des mesures afin de faciliter les ventes de ces constructeurs.
R.: Vous savez que les entreprises, quel que soit leur passeport, sont amenées à respirer en fonction de l'évolution de leur clientèle. Si vous citez Peugeot, vous pourriez citer - la semaine précédente - Volkswagen, l'interview a été donné au Financial Times: Volkswagen renvoyait 4.000 personnes, je crois, ou à peu près - cela veut dire simplement que le Brésil passe par une période de forte diminution de la consommation, que la capacité installée au Brésil en matière de fabrication de voitures est trop grande par rapport à la consommation actuelle et que tous les acteurs doivent s'adapter à l'intérêt finalement de leur entreprise et donc du pays dans lequel ils travaillent. Quant à la notion d'exportation, il est clair que PSA, comme Volkswagen, Renault et autres, ont depuis longtemps considéré le Brésil comme une plate-forme de production et pas uniquement comme un marché de consommation. Ce qui veut dire que, stratégiquement, ils considèrent leur problème mondial et, en fonction des cartes qu'ils ont en mains, ils essaient d'optimiser en temps réel les adaptations positives ou négatives qu'ils doivent faire en fonction de l'évolution du marché mondial de la voiture.
Et on retombe sur la première question, à savoir la mondialisation.
Q.: Suite aux conversations que vous avez eues avec M. Furlan, vous diriez que le Brésil n'offre pas encore aux investisseurs étrangers assez de conditions de sécurité juridique ?
R.: Je répète que j'ai évidemment une grande confiance dans la capacité de développement du Brésil, et le conseil que je me permets de donner, si tant que je puisse donner des conseils, c'est qu'effectivement tous les investisseurs soient parfaitement à l'aise avec la manière dont, au niveau fédéral, au niveau local, au niveau de l'Etat, les contrats, les engagements, etc., qu'ils ont pris, sont respectés. Et là aussi, M. Furlan était d'accord avec moi.
(source http://www.ambafrance-br.org.br, le 7 août 2003)
Réponse.: Le terme de justice commerciale n'est pas le bon, mais une des convictions que j'ai c'est que le Brésil a besoin d'avoir une administration performante, fiable, transparente, avec des règles du jeu qui soient connues de tous les acteurs, qu'ils soient brésiliens ou étrangers, bien sûr, de manière à ce que, quels que soient les problèmes rencontrés, les acteurs économiques sachent qu'ils peuvent s'appuyer sur un système qui fonctionne selon des règles connues et qui ne changent pas. Nous vivons dans un monde de droit, il est nécessaire pour l'acteur économique de savoir qu'il vit dans ce monde de droit.
Q.: Est-ce que vous vous référez en particulier à des entreprises françaises qui seraient en difficulté, qui seraient victimes de ce manque de règles du jeu ?
R.: Je ne me réfère pas particulièrement à ces cas, même s'ils en font partie. Je tenais, moi, à exprimer le sentiment que dans le monde économique globalisé dans lequel nous vivons, avec l'intérêt pour tous les pays d'attirer au maximum l'attention des investisseurs étrangers, mais aussi de permettre aux investisseurs locaux d'avoir confiance dans le fonctionnement de leur pays, je faisais référence à tout cela pour dire que c'est probablement l'un des sujets importants pour le Brésil, en tout cas de modernisation de son fonctionnement, qui, s'il est bien traité, devrait apporter les conditions nécessaires, même si elles ne sont pas suffisantes, pour permettre au pays de se développer encore plus rapidement qu'il n'a su le faire jusqu'à présent.
Q.: Prétendez-vous aborder avec M. Palocci les questions liées aux réformes en cours de la sécurité sociale, en France ainsi qu'au Brésil, et au ralentissement de l'économie des deux pays ?
R.: Les réformes qui sont en cours au Brésil ou en France ne sont pas particulières à ces deux pays. En fait il y a la prise de conscience progressive mais simultanée de la plupart des pays qui comptent sur le plan économique, des conséquences de ce que l'on appelle la mondialisation, la globalisation. La mondialisation suppose la liberté des acteurs économiques de choisir la meilleure manière pour eux de prospérer. Elle se met en oeuvre au travers de la concurrence. Et elle implique l'apparition d'un certain nombre d'autorités, y compris privées, qui considèrent que leur travail consiste à aider les acteurs économiques à prendre les meilleures ou les moins mauvaises décisions. Ces organismes ont comme objectif d'éclairer les problèmes rencontrés par les différents pays dans lesquels cette activité économique peut se développer librement. De la même manière qu'ils éclairent les actionnaires, ou les investisseurs individuels, sur le mérite respectif des différentes entreprises qui vont un petit peu faire appel à leur épargne. D'où par exemple les agences de notation qui spontanément, sans qu'on leur demande leur avis, émettent des remarques sur la solidité des finances, ou du système de retraite de tel ou tel pays. C'est cela qui amène tous les pays en même temps à découvrir, que ce soit aux Etats Unis, en Europe, au Brésil, demain en Chine et aujourd'hui au Japon, que, face à cette demande de clarification, un certain nombre de problèmes doivent être traités d'une manière transparente et compréhensible par l'acteur économique, par celui qui aide l'acteur économique à prendre ses décisions. C'est pour cela que dans les cas des retraites, en France, compte tenu de notre profil démographique, nous avons le devoir de traiter ce problème du financement des retraites d'une manière adaptée à ce profil démographique, au risque, pour nous, si on ne le faisait pas, d'avoir une opinion émise par différents canaux sur l'économie française qui serait "dubitative", voire négative. C'est pour cela que ce problème par exemple des retraites se retrouve posé en même temps dans la plupart des pays, y compris dans le vôtre. Cela ne veut pas dire que la solution est la même d'un pays à l'autre. Mais, cela veut dire que tous nos pays, y compris la France et le Brésil, ont dorénavant le devoir d'affronter, d'une manière aussi transparente, méthodique et explicable que nécessaire, des problèmes dont la difficulté les a amenés dans le passé à se dire qu'il était "urgent d'attendre".
C'est ce genre de question que j'ai l'intention d'évoquer avec mes collègues pour, très certainement, partager avec eux le sentiment que ces problèmes font partie des nouveaux problèmes que nos administrations, nos gouvernements doivent traiter. Et que si on peut s'entraider quant aux solutions, pour traiter ces problèmes, pourquoi pas !
Parce que derrière cela, je peux me permettre d'insister, vous trouvez la manifestation au niveau des Etats des décisions qu'on pris ces Etats ensemble lorsqu'ils ont décidé que l'avenir de leur pays était mieux assuré par cette ouverture sur l'autre. Ce n'est que la conséquence de cette décision des Etats, qu'ils découvrent maintenant, sans jamais l'avoir très bien compris, lorsqu'ils prenaient cette décision.
Q.: M. le Ministre, pourriez-vous nous parler de l'entretien que vous avez eu ce matin avec M. Furlan ?
R.: Nous n'avons pas eu de difficulté avec M. Furlan pour constater notre accord sur la plupart des points que nous avions à traiter dans nos pays, pour les raisons que je viens d'évoquer.
J'ai eu notamment l'occasion, avec lui, de constater ce que j'avais déjà ressenti, c'est à dire la volonté du Brésil de donner un contenu économique plus fort à l'élargissement du Mercosul, à son approfondissement.
Nous avons ensemble aussi constaté que le poids agricole de la valeur ajoutée brésilienne était encore élevé compte tenu de ce que 25 % des brésiliens continuaient à vivre de la terre, et que donc l'un des moyens pour aider le Brésil à se développer consistait pour l'Europe à faciliter aussi vite et aussi profondément que possible l'entrée des produits agricoles brésiliens sur le marché européen.
Et même si mon homologue a considéré qu'on n'allait pas assez vite, il a accepté quand même mon sentiment que les récentes décisions qui ont été prises à l'initiative de la France et de l'Allemagne permettaient aux futures discussions avec le Mercosul et plus généralement à l'OMC d'avoir des perspectives heureuses, davantage qu'elles ne l'auraient été il y a un an.
J'ai aussi insisté sur le fait que dès lors qu'on était sur des marchés de plus en plus mondiaux, l'intérêt pour le Brésil d'un développement agricole n'est pas à mesurer en termes de tonnes ou de chiffres d'affaires, mais en termes de valeur ajoutée, c'est à dire des marges qui restent acquises pour le Brésil.
Je connais suffisamment bien les marchés de commodités pour vous dire qu'il n'y a pas de différence entre la manière de gérer le marché mondial de l'acier et le marché mondial de la viande. Et que le fait d'avoir les meilleurs coûts de production, y compris pour la viande, pour le sucre ou pour une autre spéculation agricole n'est pas suffisant.
Ce qui compte c'est d'avoir non seulement les meilleurs coûts, mais aussi la meilleure stratégie commerciale, c'est à dire la meilleure capacité de vendre une valeur ajoutée à des clients qui ont envie de l'acheter.
Et c'est cela le fonds du problème. Il découle toujours de cette même globalisation. C'est le client qui a le pouvoir, et pas le producteur. Quels que soient les coûts du producteur, il faut qu'il crée les conditions pour que le client ait envie d'acheter le produit ou le service qu'il propose, bien entendu au meilleur prix.
C'est donc au producteur, y compris brésilien, de découvrir progressivement la manière dont il va pouvoir capter durablement l'intérêt de tel ou tel client, en termes non pas de personnes, mais de pays ou de sous-ensembles d'un pays, de capter l'intérêt de ce client pour le décider à acheter plutôt au Brésil que dans un autre pays, ou dans une autre entreprise.
Voilà la discussion que nous avons eue.
Q.: Pourriez-vous nous faire un bilan des investissements français réalisés au Brésil ?
R.: S'agissant des investissements au Brésil, je vous rappelle que l'Europe représente la moitié des investissements étrangers au Brésil, et que la France et l'Allemagne ensemble représentent une très grosse partie de cette moité. Comme vous le savez, la France a beaucoup investi au Brésil, continuera à beaucoup investir au Brésil, dans beaucoup de domaines, parce que la culture brésilienne a l'air de plaire aux investisseurs français.
Q.: Vous avez dit que l'on cherchait plus de transparence des règles du jeu. Je souhaiterais savoir s' il y a eu une demande spécifique à ce sujet de la part du gouvernement brésilien ?
R.: Non, je me suis bien gardé de préciser tel ou tel point d'une pensée, qui n'est qu'une pensée. Mais, connaissant le Brésil depuis un certain temps, et voyant les considérables changements de perception du Brésil sur lui-même et par rapport à l'étranger, j'ai le sentiment que cette dimension du problème n'a pas encore suffisament été travaillée, alors que, à mes yeux, avec ma petite expérience, elle a une grosse importance pour créer les meilleures conditions d'attractivité du Brésil vis à vis, je le répète, de tous ceux qui investissent, qu'ils soient brésiliens ou étrangers. Car autrement ils auront tendance à aller investir ailleurs.
Q.: Selon un article publié dans "Le Monde" d'aujourd'hui, Peugeot serait en train de renvoyer 500 employés temporaires, suite à la diminution de la demande interne. C'est le même problème auquel fait face le Brésil et qui serait lié à l'activité économique. Je souhaiterais savoir si la France, d'après ce qui a été diffusé au Brésil, serait disposée à adopter des mesures afin de faciliter les ventes de ces constructeurs.
R.: Vous savez que les entreprises, quel que soit leur passeport, sont amenées à respirer en fonction de l'évolution de leur clientèle. Si vous citez Peugeot, vous pourriez citer - la semaine précédente - Volkswagen, l'interview a été donné au Financial Times: Volkswagen renvoyait 4.000 personnes, je crois, ou à peu près - cela veut dire simplement que le Brésil passe par une période de forte diminution de la consommation, que la capacité installée au Brésil en matière de fabrication de voitures est trop grande par rapport à la consommation actuelle et que tous les acteurs doivent s'adapter à l'intérêt finalement de leur entreprise et donc du pays dans lequel ils travaillent. Quant à la notion d'exportation, il est clair que PSA, comme Volkswagen, Renault et autres, ont depuis longtemps considéré le Brésil comme une plate-forme de production et pas uniquement comme un marché de consommation. Ce qui veut dire que, stratégiquement, ils considèrent leur problème mondial et, en fonction des cartes qu'ils ont en mains, ils essaient d'optimiser en temps réel les adaptations positives ou négatives qu'ils doivent faire en fonction de l'évolution du marché mondial de la voiture.
Et on retombe sur la première question, à savoir la mondialisation.
Q.: Suite aux conversations que vous avez eues avec M. Furlan, vous diriez que le Brésil n'offre pas encore aux investisseurs étrangers assez de conditions de sécurité juridique ?
R.: Je répète que j'ai évidemment une grande confiance dans la capacité de développement du Brésil, et le conseil que je me permets de donner, si tant que je puisse donner des conseils, c'est qu'effectivement tous les investisseurs soient parfaitement à l'aise avec la manière dont, au niveau fédéral, au niveau local, au niveau de l'Etat, les contrats, les engagements, etc., qu'ils ont pris, sont respectés. Et là aussi, M. Furlan était d'accord avec moi.
(source http://www.ambafrance-br.org.br, le 7 août 2003)
Conférence de pressedu 24 juillet
Question.: M. le Ministre, vous avez évoqué à São Paulo les questions de la justice commerciale, vous faites référence à quoi exactement ? Est-ce que vous pourriez être plus spécifique sur cette question ?
Réponse.: Le terme de justice commerciale n'est pas le bon, mais une des convictions que j'ai c'est que le Brésil a besoin d'avoir une administration performante, fiable, transparente, avec des règles du jeu qui soient connues de tous les acteurs, qu'ils soient brésiliens ou étrangers, bien sûr, de manière à ce que, quels que soient les problèmes rencontrés, les acteurs économiques sachent qu'ils peuvent s'appuyer sur un système qui fonctionne selon des règles connues et qui ne changent pas. Nous vivons dans un monde de droit, il est nécessaire pour l'acteur économique de savoir qu'il vit dans ce monde de droit.
Q.: Est-ce que vous vous référez en particulier à des entreprises françaises qui seraient en difficulté, qui seraient victimes de ce manque de règles du jeu ?
R.: Je ne me réfère pas particulièrement à ces cas, même s'ils en font partie. Je tenais, moi, à exprimer le sentiment que dans le monde économique globalisé dans lequel nous vivons, avec l'intérêt pour tous les pays d'attirer au maximum l'attention des investisseurs étrangers, mais aussi de permettre aux investisseurs locaux d'avoir confiance dans le fonctionnement de leur pays, je faisais référence à tout cela pour dire que c'est probablement l'un des sujets importants pour le Brésil, en tout cas de modernisation de son fonctionnement, qui, s'il est bien traité, devrait apporter les conditions nécessaires, même si elles ne sont pas suffisantes, pour permettre au pays de se développer encore plus rapidement qu'il n'a su le faire jusqu'à présent.
Q.: Prétendez-vous aborder avec M. Palocci les questions liées aux réformes en cours de la sécurité sociale, en France ainsi qu'au Brésil, et au ralentissement de l'économie des deux pays ?
R.: Les réformes qui sont en cours au Brésil ou en France ne sont pas particulières à ces deux pays. En fait il y a la prise de conscience progressive mais simultanée de la plupart des pays qui comptent sur le plan économique, des conséquences de ce que l'on appelle la mondialisation, la globalisation. La mondialisation suppose la liberté des acteurs économiques de choisir la meilleure manière pour eux de prospérer. Elle se met en oeuvre au travers de la concurrence. Et elle implique l'apparition d'un certain nombre d'autorités, y compris privées, qui considèrent que leur travail consiste à aider les acteurs économiques à prendre les meilleures ou les moins mauvaises décisions. Ces organismes ont comme objectif d'éclairer les problèmes rencontrés par les différents pays dans lesquels cette activité économique peut se développer librement. De la même manière qu'ils éclairent les actionnaires, ou les investisseurs individuels, sur le mérite respectif des différentes entreprises qui vont un petit peu faire appel à leur épargne. D'où par exemple les agences de notation qui spontanément, sans qu'on leur demande leur avis, émettent des remarques sur la solidité des finances, ou du système de retraite de tel ou tel pays. C'est cela qui amène tous les pays en même temps à découvrir, que ce soit aux Etats Unis, en Europe, au Brésil, demain en Chine et aujourd'hui au Japon, que, face à cette demande de clarification, un certain nombre de problèmes doivent être traités d'une manière transparente et compréhensible par l'acteur économique, par celui qui aide l'acteur économique à prendre ses décisions. C'est pour cela que dans les cas des retraites, en France, compte tenu de notre profil démographique, nous avons le devoir de traiter ce problème du financement des retraites d'une manière adaptée à ce profil démographique, au risque, pour nous, si on ne le faisait pas, d'avoir une opinion émise par différents canaux sur l'économie française qui serait "dubitative", voire négative. C'est pour cela que ce problème par exemple des retraites se retrouve posé en même temps dans la plupart des pays, y compris dans le vôtre. Cela ne veut pas dire que la solution est la même d'un pays à l'autre. Mais, cela veut dire que tous nos pays, y compris la France et le Brésil, ont dorénavant le devoir d'affronter, d'une manière aussi transparente, méthodique et explicable que nécessaire, des problèmes dont la difficulté les a amenés dans le passé à se dire qu'il était "urgent d'attendre".
C'est ce genre de question que j'ai l'intention d'évoquer avec mes collègues pour, très certainement, partager avec eux le sentiment que ces problèmes font partie des nouveaux problèmes que nos administrations, nos gouvernements doivent traiter. Et que si on peut s'entraider quant aux solutions, pour traiter ces problèmes, pourquoi pas !
Parce que derrière cela, je peux me permettre d'insister, vous trouvez la manifestation au niveau des Etats des décisions qu'on pris ces Etats ensemble lorsqu'ils ont décidé que l'avenir de leur pays était mieux assuré par cette ouverture sur l'autre. Ce n'est que la conséquence de cette décision des Etats, qu'ils découvrent maintenant, sans jamais l'avoir très bien compris, lorsqu'ils prenaient cette décision.
Q.: M. le Ministre, pourriez-vous nous parler de l'entretien que vous avez eu ce matin avec M. Furlan ?
R.: Nous n'avons pas eu de difficulté avec M. Furlan pour constater notre accord sur la plupart des points que nous avions à traiter dans nos pays, pour les raisons que je viens d'évoquer.
J'ai eu notamment l'occasion, avec lui, de constater ce que j'avais déjà ressenti, c'est à dire la volonté du Brésil de donner un contenu économique plus fort à l'élargissement du Mercosul, à son approfondissement.
Nous avons ensemble aussi constaté que le poids agricole de la valeur ajoutée brésilienne était encore élevé compte tenu de ce que 25 % des brésiliens continuaient à vivre de la terre, et que donc l'un des moyens pour aider le Brésil à se développer consistait pour l'Europe à faciliter aussi vite et aussi profondément que possible l'entrée des produits agricoles brésiliens sur le marché européen.
Et même si mon homologue a considéré qu'on n'allait pas assez vite, il a accepté quand même mon sentiment que les récentes décisions qui ont été prises à l'initiative de la France et de l'Allemagne permettaient aux futures discussions avec le Mercosul et plus généralement à l'OMC d'avoir des perspectives heureuses, davantage qu'elles ne l'auraient été il y a un an.
J'ai aussi insisté sur le fait que dès lors qu'on était sur des marchés de plus en plus mondiaux, l'intérêt pour le Brésil d'un développement agricole n'est pas à mesurer en termes de tonnes ou de chiffres d'affaires, mais en termes de valeur ajoutée, c'est à dire des marges qui restent acquises pour le Brésil.
Je connais suffisamment bien les marchés de commodités pour vous dire qu'il n'y a pas de différence entre la manière de gérer le marché mondial de l'acier et le marché mondial de la viande. Et que le fait d'avoir les meilleurs coûts de production, y compris pour la viande, pour le sucre ou pour une autre spéculation agricole n'est pas suffisant.
Ce qui compte c'est d'avoir non seulement les meilleurs coûts, mais aussi la meilleure stratégie commerciale, c'est à dire la meilleure capacité de vendre une valeur ajoutée à des clients qui ont envie de l'acheter.
Et c'est cela le fonds du problème. Il découle toujours de cette même globalisation. C'est le client qui a le pouvoir, et pas le producteur. Quels que soient les coûts du producteur, il faut qu'il crée les conditions pour que le client ait envie d'acheter le produit ou le service qu'il propose, bien entendu au meilleur prix.
C'est donc au producteur, y compris brésilien, de découvrir progressivement la manière dont il va pouvoir capter durablement l'intérêt de tel ou tel client, en termes non pas de personnes, mais de pays ou de sous-ensembles d'un pays, de capter l'intérêt de ce client pour le décider à acheter plutôt au Brésil que dans un autre pays, ou dans une autre entreprise.
Voilà la discussion que nous avons eue.
Q.: Pourriez-vous nous faire un bilan des investissements français réalisés au Brésil ?
R.: S'agissant des investissements au Brésil, je vous rappelle que l'Europe représente la moitié des investissements étrangers au Brésil, et que la France et l'Allemagne ensemble représentent une très grosse partie de cette moité. Comme vous le savez, la France a beaucoup investi au Brésil, continuera à beaucoup investir au Brésil, dans beaucoup de domaines, parce que la culture brésilienne a l'air de plaire aux investisseurs français.
Q.: Vous avez dit que l'on cherchait plus de transparence des règles du jeu. Je souhaiterais savoir s' il y a eu une demande spécifique à ce sujet de la part du gouvernement brésilien ?
R.: Non, je me suis bien gardé de préciser tel ou tel point d'une pensée, qui n'est qu'une pensée. Mais, connaissant le Brésil depuis un certain temps, et voyant les considérables changements de perception du Brésil sur lui-même et par rapport à l'étranger, j'ai le sentiment que cette dimension du problème n'a pas encore suffisament été travaillée, alors que, à mes yeux, avec ma petite expérience, elle a une grosse importance pour créer les meilleures conditions d'attractivité du Brésil vis à vis, je le répète, de tous ceux qui investissent, qu'ils soient brésiliens ou étrangers. Car autrement ils auront tendance à aller investir ailleurs.
Q.: Selon un article publié dans "Le Monde" d'aujourd'hui, Peugeot serait en train de renvoyer 500 employés temporaires, suite à la diminution de la demande interne. C'est le même problème auquel fait face le Brésil et qui serait lié à l'activité économique. Je souhaiterais savoir si la France, d'après ce qui a été diffusé au Brésil, serait disposée à adopter des mesures afin de faciliter les ventes de ces constructeurs.
R.: Vous savez que les entreprises, quel que soit leur passeport, sont amenées à respirer en fonction de l'évolution de leur clientèle. Si vous citez Peugeot, vous pourriez citer - la semaine précédente - Volkswagen, l'interview a été donné au Financial Times: Volkswagen renvoyait 4.000 personnes, je crois, ou à peu près - cela veut dire simplement que le Brésil passe par une période de forte diminution de la consommation, que la capacité installée au Brésil en matière de fabrication de voitures est trop grande par rapport à la consommation actuelle et que tous les acteurs doivent s'adapter à l'intérêt finalement de leur entreprise et donc du pays dans lequel ils travaillent. Quant à la notion d'exportation, il est clair que PSA, comme Volkswagen, Renault et autres, ont depuis longtemps considéré le Brésil comme une plate-forme de production et pas uniquement comme un marché de consommation. Ce qui veut dire que, stratégiquement, ils considèrent leur problème mondial et, en fonction des cartes qu'ils ont en mains, ils essaient d'optimiser en temps réel les adaptations positives ou négatives qu'ils doivent faire en fonction de l'évolution du marché mondial de la voiture.
Et on retombe sur la première question, à savoir la mondialisation.
Q.: Suite aux conversations que vous avez eues avec M. Furlan, vous diriez que le Brésil n'offre pas encore aux investisseurs étrangers assez de conditions de sécurité juridique ?
R.: Je répète que j'ai évidemment une grande confiance dans la capacité de développement du Brésil, et le conseil que je me permets de donner, si tant que je puisse donner des conseils, c'est qu'effectivement tous les investisseurs soient parfaitement à l'aise avec la manière dont, au niveau fédéral, au niveau local, au niveau de l'Etat, les contrats, les engagements, etc., qu'ils ont pris, sont respectés. Et là aussi, M. Furlan était d'accord avec moi.
(source http://www.ambafrance-br.org.br, le 7 août 2003)