Texte intégral
Monsieur le Président,
Mesdames, Messieurs,
C'est avec beaucoup de plaisir que je participe aujourd'hui pour la seconde fois à votre assemblée générale, et je veux vous remercier, Monsieur le Président, pour votre accueil et vos mots chaleureux. Notre rencontre est l'occasion de faire ensemble le point sur les grands événements de l'année 2002 et sur les échéances qui nous attendent. Votre exposé, Monsieur le Président, témoigne combien les valeurs de solidarité et de respect mutuel conservent toute leur actualité et leur pertinence dans cette période charnière où la pêche maritime française doit rapidement s'adapter au nouveau contexte de la PCP. Je suis heureux de constater que nous partageons le même souci d'améliorer les conditions de renouvellement et d'installation. A cet effet, l'accord communautaire de décembre 2002 nous permet, à court et moyen terme, d'exploiter au mieux les possibilités offertes par le maintien des aides à la construction jusqu'au 31 décembre 2004, pour autant que l'objectif global de réduction de 3 % de la flotte métropolitaine soit atteint. Les décisions d'attribution des aides pour ces projets de construction et les engagements financiers qui en découlent devront ainsi intervenir avant le 31 décembre 2004, et les opérations physiques de construction et de modernisation être achevées avant le 31 décembre 2006. Les aides à la modernisation ne concernant pas la capacité de pêche pourront, quant à elles, être attribuées jusqu'au 31 décembre 2006.
Afin de tirer le meilleur parti de la réforme de la Politique Commune de la Pêche, nous devons engager, dans les meilleurs délais, une double action :
- d'une part, un plan de modernisation, visant à faciliter les investissements de renouvellement et à rajeunir nos flottilles ;
- d'autre part, un plan de sortie de flotte des navires de pêche. L'élaboration de ces deux dispositifs se fera dans le cadre d'une large concertation avec l'ensemble des professionnels concernés ainsi qu'avec les collectivités territoriales. J'en présenterai les grandes lignes lors d'un prochain CSO ou à l'occasion de l'Assemblée Générale du CNPMEM, le 10 juillet prochain. Sans préjuger de l'issue de la concertation qui va s'engager dans les prochains jours avec les organisations professionnelles, je peux, dès à présent, vous indiquer les objectifs que je poursuis.
- tout d'abord, privilégier les investissements liés à l'amélioration de la sécurité, des conditions de travail et de la qualité des produits ;
- conforter également la viabilité économique des armements, en veillant notamment à ce que les investissements qui feront l'objet d'un financement public soient compatibles avec la disponibilité de la ressource ;
- respecter, enfin, les équilibres socio-économiques et territoriaux de la pêche française, et préserver la diversité de nos flottilles. Notre action ne pourra se soustraire d'une contrainte : l'absence d'aide à la remotorisation. En dépit de l'opposition de nombreux Etats-membres, la Commission vient en effet, de confirmer que les aides à la remotorisation ne sont pas permises, comme cela était déjà le cas pour les navires appartenant à un segment en retard avant le 31 décembre 2002. Dans le même temps, les aides à la sortie de flotte devraient, à mon sens, viser à alléger la pression exercée sur les stocks dont les quotas ont été réduits ou sont insuffisants pour couvrir les besoins de la flotte. Elles contribueraient ainsi à améliorer la gestion durable de la ressource et à améliorer la viabilité économique des armements.
C'est dans cet esprit que nous chercherons à redonner des perspectives d'avenir aux jeunes marins pêcheurs souhaitant s'installer. A l'occasion de la mise en oeuvre du plan de modernisation, j'entends avant tout que nous améliorions progressivement l'environnement économique et la gestion halieutique, de façon à renforcer l'attractivité du secteur. Vous le savez, le respect de notre objectif global de capacité au 31 décembre 2004 fera peser sur nous une lourde contrainte. Dès à présent, je vous confirme que nous travaillons à dégager des marges de manoeuvre, de façon à pouvoir gérer les projets de renouvellement de navire avec la souplesse nécessaire. Dans le contexte communautaire et compte-tenu des objectifs que j'évoquais, je pense sincèrement qu'il serait cependant déraisonnable de vous promettre une enveloppe de GT et de KW " publics ", sans avoir auparavant connaissance des projets existants et de leur évaluation. Si une marge de manoeuvre venait à être dégagée, notamment en jauge, elle serait probablement réservée, en priorité, à l'amélioration de la sécurité, des conditions de travail et de la qualité des produits, à l'occasion du renouvellement de navires existants. Et dans ce cadre, l'installation des jeunes devra être assurément l'un des premiers critères qui guideront notre choix. Sur un plan plus structurel, plusieurs mesures fiscales avaient été décidées en 1997 et ont fait depuis lors la preuve de leur efficacité. Des contacts constructifs ont d'ores et déjà été engagés avec le Ministère chargé du Budget en vue de proroger ces mesures, je pense notamment à l'abattement fiscal en faveur des " jeunes pêcheurs ", à l'étalement de l'imposition des plus-values de cession de navires lorsque les capitaux sont réinvestis dans la pêche ou aux Sofipêches. Sur ce dernier point, nous allons travailler de concert, afin, d'une part, d'élaborer un dispositif adapté aux DOM et, d'autre part, de répondre à votre souci d'améliorer les Sofipêches métropolitaines, afin de les rendre encore plus favorables aux installations. Concernant l'aide socio-économique IFOP, prévue par la réglementation communautaire, pour l'installation des jeunes, vous m'aviez fait part, l'an dernier, de vos interrogations. Sachez que sa mise en oeuvre sera très prochainement revue et simplifiée. Ainsi pourrons-nous effectuer un versement quasi-immédiat de l'aide au jeune qui s'installe. Vous avez, par ailleurs, évoqué, Monsieur le Président, la création d'une " SAFER Pêche ", qui aurait pour objet de racheter les capacités afin de les réallouer, en s'exonérant du délai de deux ans prévu par le décret PME. Cette idée doit être étudiée au regard des règles communautaires régissant l'utilisation des financements publics. Sachez que je suis, pour ma part, tout à fait favorable à une réflexion sur les moyens d'améliorer les conditions d'installation et de transmission des entreprises de pêche, de façon à d'ores et déjà préparer l'après 2004. Dans cette perspective, la modification du décret PME pourrait naturellement être envisagée.
L'étude des mesures en faveur de l'installation montre combien une réflexion approfondie est nécessaire, si nous voulons, comme vous l'avez souligné, Monsieur le Président, définir le cadre national de la politique des pêches pour les années à venir. Dans cet esprit, j'entends que nous favorisions un environnement économique dans lequel les risques auront été évalués, et, chaque fois que cela sera possible, maîtrisés. La gestion durable de la ressource et, concrètement, sa disponibilité sont aujourd'hui des facteurs qui doivent être pris en compte -y compris par le banquier- dans l'évaluation de tout projet d'investissement. Il paraît indispensable d'évaluer les risques encourus, y compris ceux tenant au niveau des quotas et à la disponibilité de la ressource, en fonction des incertitudes pesant sur l'état des stocks. Bien entendu, un tel objectif suppose une évaluation scientifique aussi fiable que possible, et une optimisation de la gestion des quotas. S'agissant précisément de l'évaluation scientifique, la récente communication de la Commission sur l'amélioration de ces avis établit une critique, à ce stade constructive, des expertises sur lesquelles se fondent la PCP. Au niveau national, je note avec satisfaction les discussions qui ont lieu, afin d'aboutir prochainement, comme je le souhaite, à la signature d'une charte entre le Comité National des Pêches, l'IFREMER et la DPMA, de façon à mieux coordonner leurs actions dans le domaine de la gestion des pêches maritimes. L'optimisation de la gestion des quotas passe, par ailleurs, par leur gestion pluriannuelle dans le respect des équilibres socio-économiques. Cet outil doit permettre, d'une part, d'offrir aux pêcheurs des prévisions d'activité fiables et, d'autre part, de répondre à la nécessité d'élaborer des plans de gestion à moyen terme. Une gestion plus fine des quotas doit également permettre une meilleure valorisation de la pêche. Je suis tout à fait disposé, à cet égard, à renforcer le rôle des organisations de Producteurs, dans un cadre rénové. Celles-ci doivent permettre de mieux réguler les apports et d'adapter la qualité et le volume de la production à la demande des consommateurs. J'observe, d'ailleurs, que les différents maillons de la filière -organisations de producteurs et mareyeurs- ont déjà engagé cette réflexion en concertation avec l'OFIMER et la DPMA. Vous avez fait référence, Monsieur le Président, aux Comités Consultatifs Régionaux et à la subsidiarité. J'y suis, bien sûr, très favorable, car ces Comités permettront d'améliorer encore la concertation avec tous les acteurs régionaux et locaux et ainsi les conditions de prise de décision. D'ores et déjà, au moins deux régions me semblent pouvoir rapidement mettre en oeuvre ces Comités : la Méditerranée, tout d'abord, en accord, naturellement avec nos voisins immédiats, et la Manche. Permettez-moi, Monsieur le Président de vous dire un dernier mot au sujet du plan de restauration cabillaud. La Commission est revenue à la charge sur ce point, et mes services sont en train d'analyser sa dernière proposition. Je ferai preuve de la plus extrême vigilance afin d'éviter l'adoption de mesures de réduction automatique des TAC et de gestion complexe de l'effort de pêche, sans oublier bien évidemment -et c'est un sujet central- la Manche Est. S'agissant des risques liés à l'environnement économique, le principal poste de charge concerné est, sans conteste, le gazole. Compte-tenu de l'alerte que nous avons connue au début de l'année, je vous invite à poursuivre vos réflexions sur le recours à des mécanismes d'assurance-prix sur le marché. C'est, à mon sens, la voie que nous devons privilégier pour améliorer de manière durable la réponse des entreprises aux fortes variations de cours. Par ailleurs, vous pouvez compter sur le soutien technique de notre Ministère, s'agissant notamment de l'extension à la pêche de la déduction fiscale pour aléa, initialement conçue pour l'agriculture. Enfin, dans un environnement plus prévisible et mieux assuré, il devient nécessaire de s'interroger sur les charges financières qu'impliquent aujourd'hui l'acquisition d'un navire. Car nous devons, d'ores et déjà, anticiper la fin des aides à la construction au 1er janvier 2005. A cet égard, un allègement des charges financières pourrait être recherché, et l'allongement de la durée de remboursement des prêts peut s'avérer une piste intéressante. Ces orientations vont dans le sens de la modernisation du secteur, que je souhaite encourager. Mais elles ne doivent pas nous faire oublier que la pêche demeure un métier dur et dangereux. Ainsi, tout en cherchant à assurer la relève, nous devons également favoriser l'amélioration des conditions de sécurité et de travail à bord. A cet égard, la deuxième phase du Plan sécurité décidé en juin 2002 et qui a débuté avec l'équipement des marins en VFI (Vêtements à Flottabilité Intégrée) sera mise en oeuvre. Des négociations avec la Commission se sont, en effet, avérées nécessaires pour assurer un financement public optimal. Il en ressort que des fonds nationaux et communautaires pourront financer 75 % du coût des projets collectifs d'équipement en balises et radeaux des navires de moins de 12 mètres.
Bien entendu, l'installation est tout aussi fondamentale pour la conchyliculture, et je suis également prêt à vous apporter tout notre soutien technique pour mettre en oeuvre les orientations que vous avez évoquées.
Monsieur le Président,
La " banque bleue " conserve une part importante de son activité dans le monde de la pêche et de la conchyliculture, et demeure un partenaire indispensable pour accompagner les évolutions que connaît ce secteur. A court terme, tout d'abord : pour vous permettre de répondre aux besoins de renouvellement et de modernisation des navires, mon collègue du Budget et moi-même avons décidé d'ouvrir cette année un enveloppe de prêts bonifiés de 30 millions d'euros au taux inchangé de 3,8 %. Ce volume de prêts est en phase avec les crédits votés et la consommation observée ces dernières années. Il permettra -j'en suis persuadé- de répondre aux besoins qui ont été évalués par vos Caisses régionales, et constitue, dans un contexte budgétaire tendu, un effort important du Gouvernement en faveur du littoral et des professionnels de la mer.
J'ai écouté avec attention le bilan de vos activités et les résultats de votre établissement. Et je veux saluer, à cet égard, le rapprochement opéré avec les Banques Populaires, à travers la fusion de leurs deux organes centraux, la Caisse Centrale de Crédit Coopératif et la Banque Fédérale des Banques Populaires. D'ores et déjà, on peut observer une amélioration de la notation de votre établissement, qui sort ainsi renforcé de ce rapprochement. Je suis heureux que l'identité de la " banque bleue " ait été préservée dans ce processus. Cela démontre vos capacités d'adaptation à un environnement économique mouvant, et votre capacité à concilier rigueur et liberté, deux caractères dans lesquels Victor HUGO voyait déjà l'essence du monde de la mer. L'établissement que vous présidez fait ainsi la preuve de sa capacité à s'adapter, à se diversifier et à se renforcer, tout en continuant à remplir ses missions spécifiques au service de la pêche et de l'aquaculture, et il peur compter sur moi pour l'y aider. Je vous remercie de votre attention.
(source http://www.agriculture.gouv.fr, le 15 mai 2003)