Texte intégral
Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs les Ministres,
Mesdames, Messieurs,
Je tiens tout d'abord à vous remercier de m'avoir fait l'honneur d'introduire vos travaux consacrés à la lutte contre le dopage.
Je n'oublie pas, en effet, que le Conseil de l'Europe a été la première organisation politique internationale à se préoccuper de ce très grave problème et à mettre en place des structures d'échanges et de propositions pour combattre ce fléau.
Pour être encore trop modestes les avancées récentes n'en sont pas moins significatives et il me paraît relever de la plus élémentaire justice que de reconnaître la part qui vous revient en la matière.
Comme vos travaux antérieurs l'ont démontré, on ne peut parler de l'avenir du sport en évacuant le combat contre le dopage.
Nous sommes souvent en cette année 2000, amenés à parler du sport au 21 siècle.
Comment assurer l'accessibilité pour toutes et tous aux pratiques sportives dans leur diversité, partout sur la planète ? Comment faire de cette accessibilité un facteur de coopération, d'échange de paix entre les peuples ?
Comment préserver l'unité, la cohésion du mouvement sportif associatif qu'il soit amateur ou professionnel ? Comment préserver le sens même du sport ; l'épanouissement, le plaisir des individus, ses valeurs ; le dépassement individuel et collectif, la rencontre avec d'autres, le respect des règles face aux tentatives de déstabilisation de quelques groupes marchands qui veulent utiliser cette activité humaine à des fins de rentabilité ?
Mais surtout, comment préserver demain la pratique sportive de tout ce qui porte atteinte à l'intégrité physique et morale des hommes et des femmes que sont les champions et les championnes ? Comment préserver l'exemplarité du sport, son rôle social et citoyen ?
La lutte contre le dopage, c'est avant tout cela. C'est refuser que des individus soient placés en état de dépendance, par rapport à des produits, à des procédés. C'est refuser que la tricherie vienne ternir le geste sportif, que la suspicion vienne ternir l'événement sportif.
Bien sûr, nous le savons, le dopage est lié à une série de facteurs sur laquelle il faut agir :
Des calendriers sportifs de plus en plus surchargés ne permettant pas des temps de récupération suffisants,
Une grande précarité dans le statut social des sportifs et sportives,
Un poids grandissant des enjeux économiques liés au sport qui poussent aux résultats à tout prix,
Mais aussi, puisque le dopage touche aussi des jeunes amateurs,
Une banalisation de la prise de produits pour augmenter la performance,
Une surestimation du rôle du résultat sportif dans la construction de leur avenir pour des populations défavorisées.
Il faut intervenir sur tous ces facteurs.
Mais, il est nécessaire d'agir directement contre le dopage lui-même, au nom de la santé publique et au nom de l'éthique du sport.
C'est dans cette perspective que je me permets de vous livrer les analyses et les propositions sur lesquelles se fonde l'action du gouvernement français et qui recoupent votre projet de résolution.
Cette action, je le pense, se conjugue en terme de
Prévention, c'est-à-dire information et suivi médical
Recherche des moyens de détection performants
Sanctions sportives à partir de contrôles
Sanctions pour les pourvoyeurs.
L'enjeu est de taille, il nécessite la mobilisation de tous les acteurs et actrices du sport.
Il me semble, en premier lieu, qu'une véritable dynamique de lutte contre le dopage passe par une coopération étroite et confiante entre les pouvoirs publics et le mouvement sportif, chacun dans le champ de compétence qui leur incombe. On peut parler de complémentarité tout en sachant que de part et d'autre il s'agit d'abord de manifester une volonté claire d'action.
Cet investissement partagé s'impose naturellement d'abord au niveau national et c'est précisément le sens du dispositif législatif que nous avons récemment adopté en France.
L'Etat prend en charge les infrastructures de la prévention et de la surveillance médicale, l'organisation des contrôles, la recherche pour détecter les substances nouvelles et la mobilisation des moyens de police et de douanes pour combattre les réseaux de trafiquants et de pourvoyeurs.
Les fédérations sportives, avec l'aide financière des pouvoirs publics, s'investissent dans le suivi de la santé des sportifs, dans l'information et l'éducation de leurs adhérents, dans la formation de leurs cadres et dans la mise en uvre de procédures disciplinaires pour sanctionner les sportifs contrôlés positifs.
Afin de réguler ce dispositif de responsabilités partagées, nous avons opté pour la création d'une autorité indépendante chargée d'agir en cas de défaillance des organisations sportives ou de l'Etat, d'être en instance de recours à donner des avis compétents en cas de débat : en cas de procédures ou en cas de débats scientifiques.
Cette complémentarité entre l'action du mouvement sportif et celle de l'Etat est également nécessaire au plan international.
Et je veux me féliciter des avancées qui ont eu lieu en ce domaine entre les Etats et le C.I.O. , entre les Etats et les fédérations internationales.
Nous venons d'en faire l'expérience positive à propos de la détection de l'E.P.O. exogène.
Mais pour être pleinement efficace, cette action commune contre le dopage doit être réellement planétaire. Cela demande une harmonisation des dispositions nationales existantes, ainsi que le propose le projet de résolution et une aide soutenue aux pays qui ne disposent pas aujourd'hui des moyens humains et financiers pour mener cette action.
L'universalité du sport ne peut en effet se satisfaire d'une juxtaposition de stratégies hétérogènes et dispersées. Elle nous impose, au contraire, une coopération internationale rigoureuse et efficace.
Dans ce contexte, je ne vois que des avantages à la généralisation d'accords bilatéraux concernant aussi bien les contrôles inopinés que la réalisation de programmes de recherche. La France a accueilli très favorablement la proposition de la présidence portugaise de l'Union Européenne de concevoir une approche multilatérale de ces protocoles. Les travaux du Conseil de l'Europe peuvent nous aider à harmoniser les procédures de mise en uvre de tels protocoles.
Cela étant, l'objectif que nous nous assignons ne pourra être atteint en l'absence d'une organisation internationale forte, reconnue, respectée et efficace.
L'année qui vient de s'écouler marque un progrès considérable avec la création de l'Agence Mondiale Antidopage (A.M.A.D.) associant paritairement les représentants gouvernementaux et les représentants sportifs. C'est un acquis incontestable qui est le fruit d'une réelle mobilisation partagée.
Bien sûr, il y a encore des points à préciser concernant l'organisation et le fonctionnement de cette agence.
Il me semble, en premier lieu, qu'après la période transitoire, l'Union Européenne et le Conseil de l'Europe doivent être représentés au sein du comité exécutif de l'A.M.A.D. Je concevrais mal, en effet, que les pays de l'Europe centrale et orientale dont la tradition et la culture sportives sont incontestables ne puissent participer au fonctionnement de l'AMAD. Dès aujourd'hui, il est souhaitable pour avancer que le Conseil de l'Europe désigne son représentant au comité exécutif parmi les membres du conseil de fondation.
S'agissant des missions de cette agence, une première implication concrète interviendrait avec la réalisation de 2500 contrôles inopinés avant les Jeux Olympiques de Sydney. Il reste à définir :
A plus long terme, je pense que les missions de l'A.M.A.D. doivent être clairement précisées quant à sa capacité à diligenter des contrôles dans l'ensemble des pays. C'est le sens des points 2 et 6 de votre projet de résolution. Cette action devra aussi concerner l'accréditation des laboratoires, quant à l'aide apportée aux Etats pour créer de nouveaux laboratoires ou encore quant à l'harmonisation des fondements institutionnels de la lutte contre le dopage.
Il me semble enfin que le statut de fondation privée est très insuffisant pour réaliser ces missions. Je suggère donc que l'A.M.A.D. se transforme rapidement en une institution publique internationale, reconnue et dotée de pouvoirs incontestables.
Plusieurs affaires récentes, survenues en France ou dans d'autres pays, montrent que nous ne sommes pas au bout de nos efforts pour atteindre l'objectif qui nous réunit aujourd'hui.
" Un sport propre et sain pour le troisième millénaire "
Pour autant, je refuse le discours fataliste qui voudrait que l'on n'y parvienne jamais, comme je refuse le constat erroné du " tous dopés ".
Nous savions que ce combat serait long et difficile mais il recueille le soutien très large des sportifs et des opinions. Ils attendent beaucoup des autorités publiques et de l'A.M.A.D.
Tous les pratiquants sportifs et en particulier tous les jeunes qui aiment le sport et qui croient en ses valeurs humanistes doivent percevoir notre volonté commune et déterminée de faire reculer, voire d'éradiquer ce fléau du dopage. On ne peut les décevoir.
Je sais que vous partagez cette conviction et cette exigence d'avancer ensemble.
(source http://www.jeunesse-sports.gouv.fr, le 30 mai 2000)
Mesdames et Messieurs les Ministres,
Mesdames, Messieurs,
Je tiens tout d'abord à vous remercier de m'avoir fait l'honneur d'introduire vos travaux consacrés à la lutte contre le dopage.
Je n'oublie pas, en effet, que le Conseil de l'Europe a été la première organisation politique internationale à se préoccuper de ce très grave problème et à mettre en place des structures d'échanges et de propositions pour combattre ce fléau.
Pour être encore trop modestes les avancées récentes n'en sont pas moins significatives et il me paraît relever de la plus élémentaire justice que de reconnaître la part qui vous revient en la matière.
Comme vos travaux antérieurs l'ont démontré, on ne peut parler de l'avenir du sport en évacuant le combat contre le dopage.
Nous sommes souvent en cette année 2000, amenés à parler du sport au 21 siècle.
Comment assurer l'accessibilité pour toutes et tous aux pratiques sportives dans leur diversité, partout sur la planète ? Comment faire de cette accessibilité un facteur de coopération, d'échange de paix entre les peuples ?
Comment préserver l'unité, la cohésion du mouvement sportif associatif qu'il soit amateur ou professionnel ? Comment préserver le sens même du sport ; l'épanouissement, le plaisir des individus, ses valeurs ; le dépassement individuel et collectif, la rencontre avec d'autres, le respect des règles face aux tentatives de déstabilisation de quelques groupes marchands qui veulent utiliser cette activité humaine à des fins de rentabilité ?
Mais surtout, comment préserver demain la pratique sportive de tout ce qui porte atteinte à l'intégrité physique et morale des hommes et des femmes que sont les champions et les championnes ? Comment préserver l'exemplarité du sport, son rôle social et citoyen ?
La lutte contre le dopage, c'est avant tout cela. C'est refuser que des individus soient placés en état de dépendance, par rapport à des produits, à des procédés. C'est refuser que la tricherie vienne ternir le geste sportif, que la suspicion vienne ternir l'événement sportif.
Bien sûr, nous le savons, le dopage est lié à une série de facteurs sur laquelle il faut agir :
Des calendriers sportifs de plus en plus surchargés ne permettant pas des temps de récupération suffisants,
Une grande précarité dans le statut social des sportifs et sportives,
Un poids grandissant des enjeux économiques liés au sport qui poussent aux résultats à tout prix,
Mais aussi, puisque le dopage touche aussi des jeunes amateurs,
Une banalisation de la prise de produits pour augmenter la performance,
Une surestimation du rôle du résultat sportif dans la construction de leur avenir pour des populations défavorisées.
Il faut intervenir sur tous ces facteurs.
Mais, il est nécessaire d'agir directement contre le dopage lui-même, au nom de la santé publique et au nom de l'éthique du sport.
C'est dans cette perspective que je me permets de vous livrer les analyses et les propositions sur lesquelles se fonde l'action du gouvernement français et qui recoupent votre projet de résolution.
Cette action, je le pense, se conjugue en terme de
Prévention, c'est-à-dire information et suivi médical
Recherche des moyens de détection performants
Sanctions sportives à partir de contrôles
Sanctions pour les pourvoyeurs.
L'enjeu est de taille, il nécessite la mobilisation de tous les acteurs et actrices du sport.
Il me semble, en premier lieu, qu'une véritable dynamique de lutte contre le dopage passe par une coopération étroite et confiante entre les pouvoirs publics et le mouvement sportif, chacun dans le champ de compétence qui leur incombe. On peut parler de complémentarité tout en sachant que de part et d'autre il s'agit d'abord de manifester une volonté claire d'action.
Cet investissement partagé s'impose naturellement d'abord au niveau national et c'est précisément le sens du dispositif législatif que nous avons récemment adopté en France.
L'Etat prend en charge les infrastructures de la prévention et de la surveillance médicale, l'organisation des contrôles, la recherche pour détecter les substances nouvelles et la mobilisation des moyens de police et de douanes pour combattre les réseaux de trafiquants et de pourvoyeurs.
Les fédérations sportives, avec l'aide financière des pouvoirs publics, s'investissent dans le suivi de la santé des sportifs, dans l'information et l'éducation de leurs adhérents, dans la formation de leurs cadres et dans la mise en uvre de procédures disciplinaires pour sanctionner les sportifs contrôlés positifs.
Afin de réguler ce dispositif de responsabilités partagées, nous avons opté pour la création d'une autorité indépendante chargée d'agir en cas de défaillance des organisations sportives ou de l'Etat, d'être en instance de recours à donner des avis compétents en cas de débat : en cas de procédures ou en cas de débats scientifiques.
Cette complémentarité entre l'action du mouvement sportif et celle de l'Etat est également nécessaire au plan international.
Et je veux me féliciter des avancées qui ont eu lieu en ce domaine entre les Etats et le C.I.O. , entre les Etats et les fédérations internationales.
Nous venons d'en faire l'expérience positive à propos de la détection de l'E.P.O. exogène.
Mais pour être pleinement efficace, cette action commune contre le dopage doit être réellement planétaire. Cela demande une harmonisation des dispositions nationales existantes, ainsi que le propose le projet de résolution et une aide soutenue aux pays qui ne disposent pas aujourd'hui des moyens humains et financiers pour mener cette action.
L'universalité du sport ne peut en effet se satisfaire d'une juxtaposition de stratégies hétérogènes et dispersées. Elle nous impose, au contraire, une coopération internationale rigoureuse et efficace.
Dans ce contexte, je ne vois que des avantages à la généralisation d'accords bilatéraux concernant aussi bien les contrôles inopinés que la réalisation de programmes de recherche. La France a accueilli très favorablement la proposition de la présidence portugaise de l'Union Européenne de concevoir une approche multilatérale de ces protocoles. Les travaux du Conseil de l'Europe peuvent nous aider à harmoniser les procédures de mise en uvre de tels protocoles.
Cela étant, l'objectif que nous nous assignons ne pourra être atteint en l'absence d'une organisation internationale forte, reconnue, respectée et efficace.
L'année qui vient de s'écouler marque un progrès considérable avec la création de l'Agence Mondiale Antidopage (A.M.A.D.) associant paritairement les représentants gouvernementaux et les représentants sportifs. C'est un acquis incontestable qui est le fruit d'une réelle mobilisation partagée.
Bien sûr, il y a encore des points à préciser concernant l'organisation et le fonctionnement de cette agence.
Il me semble, en premier lieu, qu'après la période transitoire, l'Union Européenne et le Conseil de l'Europe doivent être représentés au sein du comité exécutif de l'A.M.A.D. Je concevrais mal, en effet, que les pays de l'Europe centrale et orientale dont la tradition et la culture sportives sont incontestables ne puissent participer au fonctionnement de l'AMAD. Dès aujourd'hui, il est souhaitable pour avancer que le Conseil de l'Europe désigne son représentant au comité exécutif parmi les membres du conseil de fondation.
S'agissant des missions de cette agence, une première implication concrète interviendrait avec la réalisation de 2500 contrôles inopinés avant les Jeux Olympiques de Sydney. Il reste à définir :
A plus long terme, je pense que les missions de l'A.M.A.D. doivent être clairement précisées quant à sa capacité à diligenter des contrôles dans l'ensemble des pays. C'est le sens des points 2 et 6 de votre projet de résolution. Cette action devra aussi concerner l'accréditation des laboratoires, quant à l'aide apportée aux Etats pour créer de nouveaux laboratoires ou encore quant à l'harmonisation des fondements institutionnels de la lutte contre le dopage.
Il me semble enfin que le statut de fondation privée est très insuffisant pour réaliser ces missions. Je suggère donc que l'A.M.A.D. se transforme rapidement en une institution publique internationale, reconnue et dotée de pouvoirs incontestables.
Plusieurs affaires récentes, survenues en France ou dans d'autres pays, montrent que nous ne sommes pas au bout de nos efforts pour atteindre l'objectif qui nous réunit aujourd'hui.
" Un sport propre et sain pour le troisième millénaire "
Pour autant, je refuse le discours fataliste qui voudrait que l'on n'y parvienne jamais, comme je refuse le constat erroné du " tous dopés ".
Nous savions que ce combat serait long et difficile mais il recueille le soutien très large des sportifs et des opinions. Ils attendent beaucoup des autorités publiques et de l'A.M.A.D.
Tous les pratiquants sportifs et en particulier tous les jeunes qui aiment le sport et qui croient en ses valeurs humanistes doivent percevoir notre volonté commune et déterminée de faire reculer, voire d'éradiquer ce fléau du dopage. On ne peut les décevoir.
Je sais que vous partagez cette conviction et cette exigence d'avancer ensemble.
(source http://www.jeunesse-sports.gouv.fr, le 30 mai 2000)