Texte intégral
Mesdames et Messieurs les Ministres,
Monsieur le Président,
Monsieur le Vice-Président,
Mesdames, Messieurs,
Je suis heureux de rencontrer le Conseil National Consultatif des Personnes Handicapées. Je veux saluer son nouveau président, Francis HAMMEL, député, et son vice-président, Paul BOULINIER. On me dit que c'est la première fois qu'un chef de Gouvernement s'adresse à votre Conseil. Il est bien en tout cas que plusieurs ministres m'accompagnent. Nous marquons ainsi l'importance que ce Gouvernement attache aux préoccupations de plus de trois millions de nos concitoyens et la volonté que la politique conduite soit pleinement interministérielle.
Nous conduisons, pour améliorer la situation des personnes handicapées, une politique globale et équilibrée. Ni classe sociale, ni minorité, ces femmes, ces hommes, ces enfants, divers dans leurs aspirations, différents dans leurs projets, veulent être reconnus, s'intégrer : vivre comme les autres. Mais les gestes, les attitudes, les activités les plus quotidiennes leur sont plus difficiles. Dans une société qui n'est pas toujours ouverte aux différences, à la différence, et que traversent encore beaucoup d'inégalités, ils n'ont pas les mêmes chances que d'autres d'accéder à l'instruction, à l'emploi, à la culture, aux loisirs. Pour y remédier, nous poursuivons depuis deux ans et demi trois objectifs : plus de solidarité, plus d'autonomie, pour une société plus fraternelle.
1 - Envers ceux que le handicap atteint le plus durement, la solidarité est notre premier devoir.
- Il doit être exercé avec vigilance.
C'est parfois à l'urgence qu'il faut faire face. Des classes d'âges plus nombreuses d'enfants handicapés, atteignant l'âge adulte, quittent chaque année les Instituts Médico-Educatifs ou y sont maintenus par dérogation. Il fallait trouver les moyens de les accueillir. Nous avons engagé en 1999 avec Martine AUBRY un plan pluriannuel pour créer 16 500 places nouvelles dans les établissements spécialisés pour adultes. Il mobilise sur deux ans près de 800 millions de francs et a permis de créer 7200 places. Il faut poursuivre.
Il faut réparer aussi des injustices. Si tous les enfants ont droit à l'éducation, certains ne pourront jamais fréquenter l'école ordinaire. Pour ceux-ci, les établissements médico-sociaux sont indispensables. Pourtant un trop grand nombre d'entre eux restent à la charge de leurs parents. Il fallait mettre fin à des situations indignes de notre pays. 30 millions de francs de mesures nouvelles financeront cette année des sections adaptées aux enfants les plus fragiles. Nous y ajouterons sur les trois années suivantes 120 millions de francs.
- Le handicap recouvre des situations diverses et souvent évolutives.
Il nous faut soulager les difficultés de chacun par des réponses diversifiées. Le drame de l'autisme et la situation des traumatisés crâniens appelaient de nouvelles mesures. Un plan de remise à niveau était engagé depuis 1995. 50 millions de francs y étaient affectés chaque année. Devant l'ampleur des besoins, nous doublons dès cette année ces moyens. 300 millions de francs y seront donc consacrés dans les trois ans qui viennent. Pour certains types de handicap, pour les situations rares de déficience, il faut imaginer des solutions adaptées. Afin de mieux les prendre en charge, trois " centres ressources " ont été créés l'an dernier qui forment les professionnels et informent les familles. Pour clarifier la procédure d'autorisation des établissements accueillant des handicaps rares, un décret, que vous avez aidé à élaborer, sera signé dans les prochains jours.
De nombreux besoins restent insatisfaits. Il faut prendre en compte des phénomènes nouveaux. Comme nous tous, les adultes handicapés vivent plus longtemps. Ils éprouvent avec plus d'acuité les difficultés du vieillissement. Cette réalité soulève la question de leur statut et de leur prise en charge. Je souhaite que votre Conseil fasse rapidement des propositions sur l'hébergement des personnes handicapées vieillissantes. Sans attendre, nous envisageons d'amplifier le plan pluriannuel de 1999 et, dans ce plan, de créer de nouvelles places pour l'accueil des personnes le plus lourdement handicapées, notamment les plus âgées. 45 millions de francs seront à cet effet consacrés à de nouveaux projets.
Pour satisfaire pleinement cette exigence de solidarité, l'effort que nous avons engagé en deux ans était indispensable. Mais nous voulons aller plus loin.
2 - Nous voulons favoriser l'autonomie de ceux qui peuvent y aspirer pour préparer leur intégration.
Il faut leur offrir la liberté de choisir leurs modes de vie, une égale participation aux activités de tous, la fraternité effective d'une République qui proscrit toute forme de discrimination. Il faut pour cela considérer la personne dans la globalité de ses besoins et de ses attentes. Il faut pour cela admettre que le handicap est toujours relatif et souvent évolutif et refuser de l'enfermer dans un statut. Si l'environnement social change, le handicap change aussi. Notre politique marque à cet égard un infléchissement très net par rapport à celles qui l'ont précédée, et un infléchissement que vous avez, me semble-t-il, souhaité. Elle reconnaît les répercussions de la déficience sur les capacités et l'identité des personnes. Mais elle s'attache surtout à valoriser les potentialités de chacun et à lever les obstacles auxquels tous se heurtent pour s'intégrer mieux.
L'intégration se joue dès la naissance, quand le handicap de l'enfant est annoncé aux parents. Les médecins et les personnels soignants doivent être formés à cette confrontation, toujours douloureuse. Les parents doivent être accompagnés et soutenus pour mieux assumer les déficiences et connaître les possibilités de leur enfant. Les équipes pluridisciplinaires des centres d'action médico-sociale précoce (CAMSP) peuvent les y aider. Nous avons voulu les multiplier et en doter chaque département. 40 millions de francs ont été mobilisés à cette fin sur les deux dernières années. En parallèle, le Gouvernement a entrepris de développer les services d'éducation spéciale et de soins à domicile (SESSAD).
Leur appui est déterminant pour l'intégration scolaire.
Ce n'est plus aujourd'hui seulement à l'élève, mais aussi à l'école de s'adapter. Celle-ci doit s'efforcer d'accueillir les enfants dans toutes leurs différences. Le " plan Handiscol " élaboré par Ségolène ROYAL et Dominique GILLOT prévoit de doubler (en le portant à 50 000) le nombre d'enfants et d'adolescents accueillis en milieu scolaire ordinaire. Nous voulons faire progresser chacun le plus loin possible, en nous appuyant sur ses talents, en conjuguant le droit à l'éducation avec le droit aux soins. Trop de familles vivent leurs relations avec l'école comme une course d'obstacles. Les parents doivent être écoutés, informés de leurs droits, soutenus dans leurs démarches. Des " groupes Handiscol " les associent dans chaque département à la conception d'un plan d'accueil pour leurs enfants. Un guide pratique a été pour cela diffusé à 75 000 exemplaires.
Ecoles primaires et collèges s'adaptent déjà. Les classes d'intégration scolaire et les unités pédagogiques d'intégration se multiplient. L'aide des associations a permis de créer des services départementaux d'auxiliaires d'intégration. Près de 800 jeunes aident ainsi des élèves lourdement handicapés à vivre en milieu scolaire ordinaire. 1600 emplois-jeunes interviennent par ailleurs auprès de personnes handicapées.
Toute la communauté éducative doit s'ouvrir. 12 000 enseignants des écoles pratiquent déjà l'intégration scolaire. Les personnels d'encadrement et d'inspection sont sensibilisés aux problèmes qu'elle pose. Tous les professeurs des écoles comme ceux du second degré suivront dès la rentrée prochaine une formation en IUFM. Une mission a été créée sur les troubles d'apprentissage du langage -les dyslexies et les dysphasies. Un plan sera élaboré pour le printemps prochain afin d'améliorer la scolarisation des enfants qui en sont atteints.
Cet effort sans précédent a commencé de porter ses fruits. En une seule année, le nombre des intégrations individuelles dans les écoles est passé de 24 000 à plus de 27 000. Dans le même temps, le nombre d'adolescents souffrant de déficience mentale intégrés dans les collèges a progressé de 450 à près de 800.
Une intégration scolaire réussie, une formation adaptée sont les gages d'une entrée plus facile dans la vie active.
Trouver un emploi, c'est tout à la fois devenir autonome et s'intégrer. Martine AUBRY a relancé la politique de l'emploi des personnes handicapées. L'emploi direct est replacé au cur du dispositif. Celui-ci s'appuie sur un partenariat rénové avec les grands acteurs institutionnels. Une convention signée en 1999 avec l'AGEFIPH va permettre de mobiliser des fonds dans le cadre d'un programme exceptionnel de 1,5 milliards de francs sur trois ans. Les premiers résultats sont là. Plus de 40 000 travailleurs handicapés ont bénéficié l'an dernier du dispositif " nouveau départ ". Près de 80 000 autres ont bénéficié d'un contrat aidé. Nous ferons bientôt un bilan plus approfondi de ces actions.
Pour accéder à l'emploi, les personnes handicapées doivent être en mesure d'évoluer au quotidien dans le cadre de vie ordinaire. Se déplacer librement, vivre chez soi, participer à toutes les activités de la vie en commun sont des objectifs étroitement liés entre eux. Les besoins et les attentes de ces personnes s'affirment : elles ne quémandent pas, elles revendiquent la plénitude de leurs droits et des devoirs qui leur sont attachés.
3 - C'est pourquoi le Gouvernement entend les aider à vivre parmi nous dans une société plus fraternelle.
Notre société tout entière doit s'ouvrir à une autre approche du handicap, pour offrir véritablement à ceux qu'il touche une " vie ordinaire ". Chacun doit pouvoir se déplacer en voiture, prendre l'avion, le train, les transports collectifs ; mais aussi partir en vacances, pratiquer un sport, accéder à la culture et aux loisirs.
C'est la ville tout entière qui doit devenir plus accueillante. La loi du 13 juillet 1991 sur l'accessibilité des lieux recevant du public a marqué une étape décisive. La mobilisation des constructeurs et des transporteurs s'est confirmée. Les villes ont multiplié les initiatives pour développer les transports en commun accessibles. Mais ceux dont la mobilité est réduite se heurtent encore à des obstacles excessifs.
Il faut aujourd'hui leur permettre de circuler librement. Cela suppose d'adapter encore l'architecture et les infrastructures, d'organiser la continuité des déplacements dans les politiques d'aménagement. Jean-Claude GAYSSOT a demandé au Conseil général des Ponts et Chaussées un audit sur la réalité des équipements adaptés. Un code de bonne conduite sera bientôt conclu entre la direction générale de l'aviation civile et les compagnies aériennes. Il harmonisera les règles d'embarquement des personnes handicapées. Une campagne nationale de communication sera lancée cette année contre les incivilités et pour le respect du stationnement réservé. La politique du logement que met en oeuvre Louis BESSON vise à mieux appliquer la réglementation dans les opérations de construction et d'aménagement et à simplifier les démarches et les procédures pour trouver ou adapter les logements. Nouvelle instance de concertation, le comité de liaison pour l'accessibilité (COLIAC), compétent pour le transport, le logement, les bâtiments, le tourisme et les espaces publics, traite globalement la question de l'accessibilité pour tous. Pour donner impulsion et cohérence à ces actions, une déléguée interministérielle à l'accessibilité, Mme BACHELIER, vient d'être nommée.
Une société vraiment fraternelle doit donner à tous un égal accès à la culture. Les actions entreprises par Catherine TRAUTMANN visent à favoriser l'accès des personnes handicapées aux lieux de production, aux pratiques culturelles, aux créations artistiques. Pour dialoguer avec les associations, la ministre de la culture et de la communication a souhaité installer auprès d'elle une commission nationale " culture/handicapés ". Dans ce mouvement, il s'agit aussi de mesurer combien chacune de ces personnes peut nous enrichir de son regard original, des talents qu'elle a développés en luttant contre ses déficiences, de l'énergie qu'envers et contre tout elle met à vivre, à aimer et à créer.
Pour les personnes sourdes, une large concertation a été conduite sur la base d'un rapport de Dominique GILLOT. Des centres d'information sur la surdité seront créés dans chaque région. L'accès aux aides techniques et humaines sera facilité, notamment pour des actions d'interprétariat.
La société de l'information doit être ouverte aux non-voyants. Martine AUBRY et Dominique GILLOT ont récemment chargé Bernard DESCARGUES, administrateur civil non voyant, d'évaluer en liaison avec le Service d'Information du Gouvernement l'accessibilité des sites internet des ministères.
Participer aux loisirs est aussi un droit. Michèle DEMESSINE a fait du droit aux vacances pour tous une priorité. Elle a sensibilisé efficacement les professionnels du tourisme comme le grand public par des campagnes de communication. Un guide " Accueil et accessibilité " vient d'être publié. Un label sera créé, qui attestera l'accessibilité des équipements de tourisme. La pratique du sport par les personnes handicapées sera plus largement encouragée. La loi sur la promotion des activités physiques et sportives que Marie-George BUFFET défendra en février prochain devant l'Assemblée nationale y contribuera. L'inventaire des obstacles à la fréquentation des équipements sportifs sera dressé. La fête du sport, de la jeunesse et de l'éducation populaire, en septembre 2000, sera pour tous, avec les jeux paralympiques de Sydney, une occasion de se mobiliser.
La réalisation de ces objectifs que, je crois, nous partageons, suppose une action ambitieuse. Pour cette ambition, l'Etat consacrera les moyens indispensables. Il réformera le cadre législatif.
Nous engagerons sur la période 2001-2003 un plan pour l'accès des personnes handicapées au milieu de vie ordinaire. Il traduira en actes l'engagement de la collectivité envers ces femmes, ces hommes et ces enfants. Près d'un milliard de francs de mesures nouvelles sera dégagé en trois ans sur les budgets de l'Etat et de l'assurance maladie.
Afin de mieux accueillir l'enfance handicapée, de répondre durablement à l'ampleur des besoins et aux attentes des familles, les services qui accompagnent les enfants et permettent leur intégration en milieu scolaire verront dès l'an prochain leurs moyens augmenter. Les CAMS et les SESSAD bénéficieront d'ici 2003 de 300 millions de francs supplémentaires. L'accueil des élèves en milieu scolaire ordinaire demande également un matériel pédagogique spécifique, en particulier pour les déficiences sensorielles et motrices. J'ai souhaité, dans le cadre de ce plan pluriannuel, que l'Education nationale soit en mesure d'en faire l'acquisition. Un effort supplémentaire de 170 millions de francs sera fait sur trois ans.
L'emploi des personnes handicapées demeure prioritaire. La loi sur la formation professionnelle en préparation contribuera à réduire les inégalités dans l'accès aux dispositifs. Il nous faudra veiller à une meilleure liaison entre les établissements spécialisés d'éducation, de formation et de travail protégé et le milieu ordinaire de travail. L'Etat renforcera et modernisera les Ateliers Protégés. 100 millions de francs de crédits nouveaux seront pour cela engagés sur trois ans. Dans ce cadre, les administrations doivent remplir pleinement leur obligation d'emploi. D'ores et déjà, un fonds interministériel d'aide à l'insertion a été créé en 1999 pour adapter les postes de travail et permettre diverses actions d'accompagnement. Mais il faut agir plus fortement. Une concertation avec les partenaires sociaux et les principales associations de personnes handicapées a été menée l'an passé. Des directives seront données aux ministères pour accroître les recrutements et pour favoriser le reclassement des fonctionnaires devenus inaptes en cours de carrière.
Les aides techniques et humaines sont indispensables à l'autonomie. Permettre au plus grand nombre d'acquérir à moindre coût les matériels les plus performants : tel est notre objectif. Cela demande des financements. Le Gouvernement entend y prendre part. Mais pour mobiliser toutes les ressources disponibles, chacun doit assumer ses responsabilités. La contribution des caisses de sécurité sociale et des Conseils généraux est, en raison de leurs compétences, nécessaire. Michel MERCIER, qui aurait dû être présent aujourd'hui, représente auprès de vous l'Assemblée des Départements de France. Je me réjouis que les Conseils généraux soient désormais représentés dans votre Conseil National. Nous avons commencé de travailler ensemble -associations, pouvoirs publics, partenaires sociaux et professionnels. A partir de l'expérience acquise sur quatre sites, quinze départements seront dotés dès cette année d'une instance d'information. Elle conseillera les personnes handicapées et leurs familles dans le choix des matériels et les orientera vers des formules de financement. Le plan pour l'accès au milieu de vie ordinaire généralisera progressivement à tout le pays ces " sites pour la vie autonome ". Si d'autres partenaires s'engagent, l'Etat pourra contribuer à la constitution de fonds départementaux de compensation afin de favoriser l'acquisition par les personnes handicapées d'aides techniques souvent onéreuses. Nous consacrerons dans le cadre du plan pour l'accès à la vie ordinaire 185 millions de francs à ces actions.
Les aides à domicile contribuent également à l'autonomie. La loi de financement de la sécurité sociale permet, depuis 1999, d'exonérer de charges sociales les personnes handicapées qui emploient des aides à domicile. Mais nous devons aller plus loin. Le nombre d'auxiliaires de vie est trop éloigné de la réalité des besoins. Pour passer de 1864 postes aujourd'hui à 5000 postes en 2003, l'Etat abondera de 200 millions de francs l'aide qu'il apporte aux associations. Cet effort devrait permettre aux départements d'assumer ensuite pleinement leur rôle dans l'aide à domicile. Les personnes handicapées ne peuvent aujourd'hui que par dérogation recevoir chez eux des soins infirmiers. 45 millions de francs de nouveaux crédits leur permettront d'y avoir davantage accès. Un décret va très vite ouvrir ce droit sans dérogation.
L'action des CDES et des COTOREP sera décisive. Ces commissions sont chargées d'évaluer et d'orienter les enfants et les adultes handicapés. Le Gouvernement a dégagé en leur faveur 30 millions de francs dans le budget 2000. 45 millions de francs s'y ajouteront d'ici 2003. Une mission d'appui du ministère de l'Emploi et de la Solidarité fera des propositions pour renforcer leur efficacité et leur cohérence.
Mesdames, Messieurs,
Vous le voyez, nous dégageons les moyens nécessaires pour conduire dans la durée cette politique ambitieuse. Au total, d'ici 2003, et sans compter l'effort de recherche, en particulier sur le génome humain, que j'ai annoncé dans un autre cadre, 2 milliards 500 millions de francs de crédits supplémentaires y seront consacrés.
Mais la mobilisation des femmes et des hommes que vous représentez est indispensable à son succès. Défendant les intérêts des personnes, responsables de dispositifs qu'elles ont aidé à bâtir, les associations jouent un rôle fondamental. J'ai souhaité, en venant participer à cette réunion de votre Conseil National, rendre hommage à leur professionnalisme, à leur rigueur et à la pertinence des contributions dont elles nourrissent notre réflexion commune.
L'apport des personnels professionnels n'est pas moins essentiel. Ils font un métier difficile. Au contact direct des personnes handicapées, ils sont souvent leur premier lien avec la société. Il doivent donc être les premiers garants de leur dignité. En cas de maltraitance, leur intervention est décisive, car le silence n'est pas admissible. Ils doivent pouvoir, sans craindre une menace pour leur emploi, dénoncer ces actes intolérables.
Nous devrons enfin réformer le cadre dans lequel tous ensemble vous agissez. Il convient aujourd'hui d'adapter la loi de 1975. En vingt-cinq ans, l'action sociale et médico-sociale a profondément renouvelé ses concepts et ses méthodes. La personne, considérée dans la diversité de ses besoins, de ses aspirations, de ses capacités doit être au centre de nos préoccupations. Le travail en réseau se développe. Mais de fortes disparités géographiques persistent. Pour les corriger, de nouveaux outils de programmation sont nécessaires. Un travail de fond s'est engagé. Je sais qu'une concertation nourrie a été conduite sur la modernisation des établissements et des services dédiés au handicap. Elle permettra de faire la synthèse des expériences menées ces dernières années et de définir les instruments d'une politique rénovée. Un projet de loi sera déposé au Parlement avant la fin de cette session.
Mesdames, Messieurs,
Il nous faut bâtir ensemble une société plus accueillante pour les personnes handicapées et plus respectueuse de leurs droits. Notre politique a dans un premier temps renforcé les moyens d'un accueil adapté aux besoins les plus divers. Elle vise aujourd'hui à promouvoir davantage l'autonomie. Communiquer toujours avec ceux qui sont les plus frappés et dont nous ne savons pas parfois s'ils nous comprennent, accompagner dans leurs efforts ceux qui luttent pour surmonter leur déficience, rendre hommage à la contribution qu'apportent à la vie de la cité ceux qui agissent parmi nous et qui exercent pleinement leurs droits de citoyens, c'est reconnaître en chacun l'égale dignité de la personne humaine et l'aider à se promouvoir.
(Source http://www.premier-ministre.gouv.fr, le 10 février 2000)
Monsieur le Président,
Monsieur le Vice-Président,
Mesdames, Messieurs,
Je suis heureux de rencontrer le Conseil National Consultatif des Personnes Handicapées. Je veux saluer son nouveau président, Francis HAMMEL, député, et son vice-président, Paul BOULINIER. On me dit que c'est la première fois qu'un chef de Gouvernement s'adresse à votre Conseil. Il est bien en tout cas que plusieurs ministres m'accompagnent. Nous marquons ainsi l'importance que ce Gouvernement attache aux préoccupations de plus de trois millions de nos concitoyens et la volonté que la politique conduite soit pleinement interministérielle.
Nous conduisons, pour améliorer la situation des personnes handicapées, une politique globale et équilibrée. Ni classe sociale, ni minorité, ces femmes, ces hommes, ces enfants, divers dans leurs aspirations, différents dans leurs projets, veulent être reconnus, s'intégrer : vivre comme les autres. Mais les gestes, les attitudes, les activités les plus quotidiennes leur sont plus difficiles. Dans une société qui n'est pas toujours ouverte aux différences, à la différence, et que traversent encore beaucoup d'inégalités, ils n'ont pas les mêmes chances que d'autres d'accéder à l'instruction, à l'emploi, à la culture, aux loisirs. Pour y remédier, nous poursuivons depuis deux ans et demi trois objectifs : plus de solidarité, plus d'autonomie, pour une société plus fraternelle.
1 - Envers ceux que le handicap atteint le plus durement, la solidarité est notre premier devoir.
- Il doit être exercé avec vigilance.
C'est parfois à l'urgence qu'il faut faire face. Des classes d'âges plus nombreuses d'enfants handicapés, atteignant l'âge adulte, quittent chaque année les Instituts Médico-Educatifs ou y sont maintenus par dérogation. Il fallait trouver les moyens de les accueillir. Nous avons engagé en 1999 avec Martine AUBRY un plan pluriannuel pour créer 16 500 places nouvelles dans les établissements spécialisés pour adultes. Il mobilise sur deux ans près de 800 millions de francs et a permis de créer 7200 places. Il faut poursuivre.
Il faut réparer aussi des injustices. Si tous les enfants ont droit à l'éducation, certains ne pourront jamais fréquenter l'école ordinaire. Pour ceux-ci, les établissements médico-sociaux sont indispensables. Pourtant un trop grand nombre d'entre eux restent à la charge de leurs parents. Il fallait mettre fin à des situations indignes de notre pays. 30 millions de francs de mesures nouvelles financeront cette année des sections adaptées aux enfants les plus fragiles. Nous y ajouterons sur les trois années suivantes 120 millions de francs.
- Le handicap recouvre des situations diverses et souvent évolutives.
Il nous faut soulager les difficultés de chacun par des réponses diversifiées. Le drame de l'autisme et la situation des traumatisés crâniens appelaient de nouvelles mesures. Un plan de remise à niveau était engagé depuis 1995. 50 millions de francs y étaient affectés chaque année. Devant l'ampleur des besoins, nous doublons dès cette année ces moyens. 300 millions de francs y seront donc consacrés dans les trois ans qui viennent. Pour certains types de handicap, pour les situations rares de déficience, il faut imaginer des solutions adaptées. Afin de mieux les prendre en charge, trois " centres ressources " ont été créés l'an dernier qui forment les professionnels et informent les familles. Pour clarifier la procédure d'autorisation des établissements accueillant des handicaps rares, un décret, que vous avez aidé à élaborer, sera signé dans les prochains jours.
De nombreux besoins restent insatisfaits. Il faut prendre en compte des phénomènes nouveaux. Comme nous tous, les adultes handicapés vivent plus longtemps. Ils éprouvent avec plus d'acuité les difficultés du vieillissement. Cette réalité soulève la question de leur statut et de leur prise en charge. Je souhaite que votre Conseil fasse rapidement des propositions sur l'hébergement des personnes handicapées vieillissantes. Sans attendre, nous envisageons d'amplifier le plan pluriannuel de 1999 et, dans ce plan, de créer de nouvelles places pour l'accueil des personnes le plus lourdement handicapées, notamment les plus âgées. 45 millions de francs seront à cet effet consacrés à de nouveaux projets.
Pour satisfaire pleinement cette exigence de solidarité, l'effort que nous avons engagé en deux ans était indispensable. Mais nous voulons aller plus loin.
2 - Nous voulons favoriser l'autonomie de ceux qui peuvent y aspirer pour préparer leur intégration.
Il faut leur offrir la liberté de choisir leurs modes de vie, une égale participation aux activités de tous, la fraternité effective d'une République qui proscrit toute forme de discrimination. Il faut pour cela considérer la personne dans la globalité de ses besoins et de ses attentes. Il faut pour cela admettre que le handicap est toujours relatif et souvent évolutif et refuser de l'enfermer dans un statut. Si l'environnement social change, le handicap change aussi. Notre politique marque à cet égard un infléchissement très net par rapport à celles qui l'ont précédée, et un infléchissement que vous avez, me semble-t-il, souhaité. Elle reconnaît les répercussions de la déficience sur les capacités et l'identité des personnes. Mais elle s'attache surtout à valoriser les potentialités de chacun et à lever les obstacles auxquels tous se heurtent pour s'intégrer mieux.
L'intégration se joue dès la naissance, quand le handicap de l'enfant est annoncé aux parents. Les médecins et les personnels soignants doivent être formés à cette confrontation, toujours douloureuse. Les parents doivent être accompagnés et soutenus pour mieux assumer les déficiences et connaître les possibilités de leur enfant. Les équipes pluridisciplinaires des centres d'action médico-sociale précoce (CAMSP) peuvent les y aider. Nous avons voulu les multiplier et en doter chaque département. 40 millions de francs ont été mobilisés à cette fin sur les deux dernières années. En parallèle, le Gouvernement a entrepris de développer les services d'éducation spéciale et de soins à domicile (SESSAD).
Leur appui est déterminant pour l'intégration scolaire.
Ce n'est plus aujourd'hui seulement à l'élève, mais aussi à l'école de s'adapter. Celle-ci doit s'efforcer d'accueillir les enfants dans toutes leurs différences. Le " plan Handiscol " élaboré par Ségolène ROYAL et Dominique GILLOT prévoit de doubler (en le portant à 50 000) le nombre d'enfants et d'adolescents accueillis en milieu scolaire ordinaire. Nous voulons faire progresser chacun le plus loin possible, en nous appuyant sur ses talents, en conjuguant le droit à l'éducation avec le droit aux soins. Trop de familles vivent leurs relations avec l'école comme une course d'obstacles. Les parents doivent être écoutés, informés de leurs droits, soutenus dans leurs démarches. Des " groupes Handiscol " les associent dans chaque département à la conception d'un plan d'accueil pour leurs enfants. Un guide pratique a été pour cela diffusé à 75 000 exemplaires.
Ecoles primaires et collèges s'adaptent déjà. Les classes d'intégration scolaire et les unités pédagogiques d'intégration se multiplient. L'aide des associations a permis de créer des services départementaux d'auxiliaires d'intégration. Près de 800 jeunes aident ainsi des élèves lourdement handicapés à vivre en milieu scolaire ordinaire. 1600 emplois-jeunes interviennent par ailleurs auprès de personnes handicapées.
Toute la communauté éducative doit s'ouvrir. 12 000 enseignants des écoles pratiquent déjà l'intégration scolaire. Les personnels d'encadrement et d'inspection sont sensibilisés aux problèmes qu'elle pose. Tous les professeurs des écoles comme ceux du second degré suivront dès la rentrée prochaine une formation en IUFM. Une mission a été créée sur les troubles d'apprentissage du langage -les dyslexies et les dysphasies. Un plan sera élaboré pour le printemps prochain afin d'améliorer la scolarisation des enfants qui en sont atteints.
Cet effort sans précédent a commencé de porter ses fruits. En une seule année, le nombre des intégrations individuelles dans les écoles est passé de 24 000 à plus de 27 000. Dans le même temps, le nombre d'adolescents souffrant de déficience mentale intégrés dans les collèges a progressé de 450 à près de 800.
Une intégration scolaire réussie, une formation adaptée sont les gages d'une entrée plus facile dans la vie active.
Trouver un emploi, c'est tout à la fois devenir autonome et s'intégrer. Martine AUBRY a relancé la politique de l'emploi des personnes handicapées. L'emploi direct est replacé au cur du dispositif. Celui-ci s'appuie sur un partenariat rénové avec les grands acteurs institutionnels. Une convention signée en 1999 avec l'AGEFIPH va permettre de mobiliser des fonds dans le cadre d'un programme exceptionnel de 1,5 milliards de francs sur trois ans. Les premiers résultats sont là. Plus de 40 000 travailleurs handicapés ont bénéficié l'an dernier du dispositif " nouveau départ ". Près de 80 000 autres ont bénéficié d'un contrat aidé. Nous ferons bientôt un bilan plus approfondi de ces actions.
Pour accéder à l'emploi, les personnes handicapées doivent être en mesure d'évoluer au quotidien dans le cadre de vie ordinaire. Se déplacer librement, vivre chez soi, participer à toutes les activités de la vie en commun sont des objectifs étroitement liés entre eux. Les besoins et les attentes de ces personnes s'affirment : elles ne quémandent pas, elles revendiquent la plénitude de leurs droits et des devoirs qui leur sont attachés.
3 - C'est pourquoi le Gouvernement entend les aider à vivre parmi nous dans une société plus fraternelle.
Notre société tout entière doit s'ouvrir à une autre approche du handicap, pour offrir véritablement à ceux qu'il touche une " vie ordinaire ". Chacun doit pouvoir se déplacer en voiture, prendre l'avion, le train, les transports collectifs ; mais aussi partir en vacances, pratiquer un sport, accéder à la culture et aux loisirs.
C'est la ville tout entière qui doit devenir plus accueillante. La loi du 13 juillet 1991 sur l'accessibilité des lieux recevant du public a marqué une étape décisive. La mobilisation des constructeurs et des transporteurs s'est confirmée. Les villes ont multiplié les initiatives pour développer les transports en commun accessibles. Mais ceux dont la mobilité est réduite se heurtent encore à des obstacles excessifs.
Il faut aujourd'hui leur permettre de circuler librement. Cela suppose d'adapter encore l'architecture et les infrastructures, d'organiser la continuité des déplacements dans les politiques d'aménagement. Jean-Claude GAYSSOT a demandé au Conseil général des Ponts et Chaussées un audit sur la réalité des équipements adaptés. Un code de bonne conduite sera bientôt conclu entre la direction générale de l'aviation civile et les compagnies aériennes. Il harmonisera les règles d'embarquement des personnes handicapées. Une campagne nationale de communication sera lancée cette année contre les incivilités et pour le respect du stationnement réservé. La politique du logement que met en oeuvre Louis BESSON vise à mieux appliquer la réglementation dans les opérations de construction et d'aménagement et à simplifier les démarches et les procédures pour trouver ou adapter les logements. Nouvelle instance de concertation, le comité de liaison pour l'accessibilité (COLIAC), compétent pour le transport, le logement, les bâtiments, le tourisme et les espaces publics, traite globalement la question de l'accessibilité pour tous. Pour donner impulsion et cohérence à ces actions, une déléguée interministérielle à l'accessibilité, Mme BACHELIER, vient d'être nommée.
Une société vraiment fraternelle doit donner à tous un égal accès à la culture. Les actions entreprises par Catherine TRAUTMANN visent à favoriser l'accès des personnes handicapées aux lieux de production, aux pratiques culturelles, aux créations artistiques. Pour dialoguer avec les associations, la ministre de la culture et de la communication a souhaité installer auprès d'elle une commission nationale " culture/handicapés ". Dans ce mouvement, il s'agit aussi de mesurer combien chacune de ces personnes peut nous enrichir de son regard original, des talents qu'elle a développés en luttant contre ses déficiences, de l'énergie qu'envers et contre tout elle met à vivre, à aimer et à créer.
Pour les personnes sourdes, une large concertation a été conduite sur la base d'un rapport de Dominique GILLOT. Des centres d'information sur la surdité seront créés dans chaque région. L'accès aux aides techniques et humaines sera facilité, notamment pour des actions d'interprétariat.
La société de l'information doit être ouverte aux non-voyants. Martine AUBRY et Dominique GILLOT ont récemment chargé Bernard DESCARGUES, administrateur civil non voyant, d'évaluer en liaison avec le Service d'Information du Gouvernement l'accessibilité des sites internet des ministères.
Participer aux loisirs est aussi un droit. Michèle DEMESSINE a fait du droit aux vacances pour tous une priorité. Elle a sensibilisé efficacement les professionnels du tourisme comme le grand public par des campagnes de communication. Un guide " Accueil et accessibilité " vient d'être publié. Un label sera créé, qui attestera l'accessibilité des équipements de tourisme. La pratique du sport par les personnes handicapées sera plus largement encouragée. La loi sur la promotion des activités physiques et sportives que Marie-George BUFFET défendra en février prochain devant l'Assemblée nationale y contribuera. L'inventaire des obstacles à la fréquentation des équipements sportifs sera dressé. La fête du sport, de la jeunesse et de l'éducation populaire, en septembre 2000, sera pour tous, avec les jeux paralympiques de Sydney, une occasion de se mobiliser.
La réalisation de ces objectifs que, je crois, nous partageons, suppose une action ambitieuse. Pour cette ambition, l'Etat consacrera les moyens indispensables. Il réformera le cadre législatif.
Nous engagerons sur la période 2001-2003 un plan pour l'accès des personnes handicapées au milieu de vie ordinaire. Il traduira en actes l'engagement de la collectivité envers ces femmes, ces hommes et ces enfants. Près d'un milliard de francs de mesures nouvelles sera dégagé en trois ans sur les budgets de l'Etat et de l'assurance maladie.
Afin de mieux accueillir l'enfance handicapée, de répondre durablement à l'ampleur des besoins et aux attentes des familles, les services qui accompagnent les enfants et permettent leur intégration en milieu scolaire verront dès l'an prochain leurs moyens augmenter. Les CAMS et les SESSAD bénéficieront d'ici 2003 de 300 millions de francs supplémentaires. L'accueil des élèves en milieu scolaire ordinaire demande également un matériel pédagogique spécifique, en particulier pour les déficiences sensorielles et motrices. J'ai souhaité, dans le cadre de ce plan pluriannuel, que l'Education nationale soit en mesure d'en faire l'acquisition. Un effort supplémentaire de 170 millions de francs sera fait sur trois ans.
L'emploi des personnes handicapées demeure prioritaire. La loi sur la formation professionnelle en préparation contribuera à réduire les inégalités dans l'accès aux dispositifs. Il nous faudra veiller à une meilleure liaison entre les établissements spécialisés d'éducation, de formation et de travail protégé et le milieu ordinaire de travail. L'Etat renforcera et modernisera les Ateliers Protégés. 100 millions de francs de crédits nouveaux seront pour cela engagés sur trois ans. Dans ce cadre, les administrations doivent remplir pleinement leur obligation d'emploi. D'ores et déjà, un fonds interministériel d'aide à l'insertion a été créé en 1999 pour adapter les postes de travail et permettre diverses actions d'accompagnement. Mais il faut agir plus fortement. Une concertation avec les partenaires sociaux et les principales associations de personnes handicapées a été menée l'an passé. Des directives seront données aux ministères pour accroître les recrutements et pour favoriser le reclassement des fonctionnaires devenus inaptes en cours de carrière.
Les aides techniques et humaines sont indispensables à l'autonomie. Permettre au plus grand nombre d'acquérir à moindre coût les matériels les plus performants : tel est notre objectif. Cela demande des financements. Le Gouvernement entend y prendre part. Mais pour mobiliser toutes les ressources disponibles, chacun doit assumer ses responsabilités. La contribution des caisses de sécurité sociale et des Conseils généraux est, en raison de leurs compétences, nécessaire. Michel MERCIER, qui aurait dû être présent aujourd'hui, représente auprès de vous l'Assemblée des Départements de France. Je me réjouis que les Conseils généraux soient désormais représentés dans votre Conseil National. Nous avons commencé de travailler ensemble -associations, pouvoirs publics, partenaires sociaux et professionnels. A partir de l'expérience acquise sur quatre sites, quinze départements seront dotés dès cette année d'une instance d'information. Elle conseillera les personnes handicapées et leurs familles dans le choix des matériels et les orientera vers des formules de financement. Le plan pour l'accès au milieu de vie ordinaire généralisera progressivement à tout le pays ces " sites pour la vie autonome ". Si d'autres partenaires s'engagent, l'Etat pourra contribuer à la constitution de fonds départementaux de compensation afin de favoriser l'acquisition par les personnes handicapées d'aides techniques souvent onéreuses. Nous consacrerons dans le cadre du plan pour l'accès à la vie ordinaire 185 millions de francs à ces actions.
Les aides à domicile contribuent également à l'autonomie. La loi de financement de la sécurité sociale permet, depuis 1999, d'exonérer de charges sociales les personnes handicapées qui emploient des aides à domicile. Mais nous devons aller plus loin. Le nombre d'auxiliaires de vie est trop éloigné de la réalité des besoins. Pour passer de 1864 postes aujourd'hui à 5000 postes en 2003, l'Etat abondera de 200 millions de francs l'aide qu'il apporte aux associations. Cet effort devrait permettre aux départements d'assumer ensuite pleinement leur rôle dans l'aide à domicile. Les personnes handicapées ne peuvent aujourd'hui que par dérogation recevoir chez eux des soins infirmiers. 45 millions de francs de nouveaux crédits leur permettront d'y avoir davantage accès. Un décret va très vite ouvrir ce droit sans dérogation.
L'action des CDES et des COTOREP sera décisive. Ces commissions sont chargées d'évaluer et d'orienter les enfants et les adultes handicapés. Le Gouvernement a dégagé en leur faveur 30 millions de francs dans le budget 2000. 45 millions de francs s'y ajouteront d'ici 2003. Une mission d'appui du ministère de l'Emploi et de la Solidarité fera des propositions pour renforcer leur efficacité et leur cohérence.
Mesdames, Messieurs,
Vous le voyez, nous dégageons les moyens nécessaires pour conduire dans la durée cette politique ambitieuse. Au total, d'ici 2003, et sans compter l'effort de recherche, en particulier sur le génome humain, que j'ai annoncé dans un autre cadre, 2 milliards 500 millions de francs de crédits supplémentaires y seront consacrés.
Mais la mobilisation des femmes et des hommes que vous représentez est indispensable à son succès. Défendant les intérêts des personnes, responsables de dispositifs qu'elles ont aidé à bâtir, les associations jouent un rôle fondamental. J'ai souhaité, en venant participer à cette réunion de votre Conseil National, rendre hommage à leur professionnalisme, à leur rigueur et à la pertinence des contributions dont elles nourrissent notre réflexion commune.
L'apport des personnels professionnels n'est pas moins essentiel. Ils font un métier difficile. Au contact direct des personnes handicapées, ils sont souvent leur premier lien avec la société. Il doivent donc être les premiers garants de leur dignité. En cas de maltraitance, leur intervention est décisive, car le silence n'est pas admissible. Ils doivent pouvoir, sans craindre une menace pour leur emploi, dénoncer ces actes intolérables.
Nous devrons enfin réformer le cadre dans lequel tous ensemble vous agissez. Il convient aujourd'hui d'adapter la loi de 1975. En vingt-cinq ans, l'action sociale et médico-sociale a profondément renouvelé ses concepts et ses méthodes. La personne, considérée dans la diversité de ses besoins, de ses aspirations, de ses capacités doit être au centre de nos préoccupations. Le travail en réseau se développe. Mais de fortes disparités géographiques persistent. Pour les corriger, de nouveaux outils de programmation sont nécessaires. Un travail de fond s'est engagé. Je sais qu'une concertation nourrie a été conduite sur la modernisation des établissements et des services dédiés au handicap. Elle permettra de faire la synthèse des expériences menées ces dernières années et de définir les instruments d'une politique rénovée. Un projet de loi sera déposé au Parlement avant la fin de cette session.
Mesdames, Messieurs,
Il nous faut bâtir ensemble une société plus accueillante pour les personnes handicapées et plus respectueuse de leurs droits. Notre politique a dans un premier temps renforcé les moyens d'un accueil adapté aux besoins les plus divers. Elle vise aujourd'hui à promouvoir davantage l'autonomie. Communiquer toujours avec ceux qui sont les plus frappés et dont nous ne savons pas parfois s'ils nous comprennent, accompagner dans leurs efforts ceux qui luttent pour surmonter leur déficience, rendre hommage à la contribution qu'apportent à la vie de la cité ceux qui agissent parmi nous et qui exercent pleinement leurs droits de citoyens, c'est reconnaître en chacun l'égale dignité de la personne humaine et l'aider à se promouvoir.
(Source http://www.premier-ministre.gouv.fr, le 10 février 2000)