Déclaration de M. Philippe Douste-Blazy, ministre de la santé et de la protection sociale, sur l'application du plan urgences, notamment la garantie de son efficacité et un bilan d'étape de sa mise en place, Paris le 9 avril 2004.

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Circonstance : Congrès annuel des urgentistes à Paris le 9 avril 2004

Texte intégral

Messieurs les Présidents,
Madame, Monsieur,
Mes chers confrères,
C'est un réel plaisir pour moi d'intervenir lors de votre congrès " Urgences 2004 ", et je souhaite vous remercier de votre invitation.
Un réel plaisir tout d'abord de vous retrouver. Je reconnais parmi vous de nombreuses personnalités dont j'ai eu la chance d'apprécier dans le passé les qualités humaines et professionnelles.
Malgré le calendrier parlementaire - vous savez que la loi de santé publique est discutée en ce moment à l'assemblée - j'ai souhaité être là, avec vous. Je veux d'abord saluer le travail remarquable que vous avez réalisé.
La qualité des services d'urgence et l'amélioration de la condition des urgentistes constitue pour moi une priorité dans la modernisation de notre dispositif de santé publique.
J'ai d'ailleurs tenu à me rendre, 24 heures après ma nomination, dans trois services d'urgences, et j'ai souhaité y retourner hier soir pour conforter mes impressions : j'ai ainsi pu mesurer sur le terrain le dévouement des personnels hospitaliers. Dans le même temps, j'ai pu voir et entendre les difficultés quotidiennes auxquelles vous êtes chaque jour confrontés, qui m'ont convaincu d'accélérer notre action. Il y a de fortes inquiétudes. J'ai entendu les attentes.
Il y a dix ans, j'ai été à l'origine du premier plan sur les urgences, des premiers décrets et de la mise en place du 1er concours de praticiens hospitaliers en médecine d'urgence. Il m'avait déjà apparu essentiel que cette discipline trouve sa reconnaissance et sa place dans l'hôpital.
La question à l'époque était de sénioriser les services, dont la majorité ne comportait aucun médecin titulaire.
Aujourd'hui, il nous faut aller plus loin. Beaucoup plus loin.
En 10 ans, la demande de soins urgents a pris une place prépondérante dans notre société. L'exigence de nos concitoyens porte à la fois sur la quantité et la qualité des prestations. Une attente légitime à laquelle il vous faut répondre chaque jour sans avoir nécessairement les ressources et le temps pour vous y adapter.
Les ressources, vous le savez, sont désormais réunies dans le " plan urgence " mis en place cette année. Le temps, je vous propose que nous le prenions ensemble, dès aujourd'hui.
Les urgences connaissent aujourd'hui encore des difficultés de fonctionnement, et ceci pour trois raisons majeures : le manque de coordination avec les acteurs de la prise en charge en amont et notamment la médecine de ville, le manque de moyens techniques et logistiques à l'intérieur même des services d'urgence, et enfin, le manque de relais en aval dans les autres services hospitaliers.
Pour répondre à ces difficultés, le plan urgences doit être appliqué sans délai : voilà maintenant trois mois que ce plan a été notifié.
- je vous propose, tout d'abord, la mise en place immédiate d'un système national d'enregistrement et de suivi des dépenses du plan, qu'elles soient directement financières ou qu'elles portent sur les créations de postes. Je le dis d'autant plus facilement que nous avions fait le choix d'une délégation rapide de crédit. Nous pourrons ainsi pour la première fois inscrire la gestion de la réforme dans une transparence comptable ouvrant la voie à une meilleure maîtrise de l'efficacité des services.
- Donc première proposition : opération-vérité avec des chiffres régulièrement publiés.
- Deuxième proposition : aider davantage deux secteurs en difficulté : les urgences pédiatriques et les hôpitaux de proximité me paraissent, à ce titre, hautement prioritaires.
- Troisième proposition : renforcer l'efficacité des " plans blancs ". L'actualité montre qu'il est de notre devoir de prévoir. Je veillerai donc personnellement à la tenue régulière d'exercices de simulation de ces plans d'urgence. Je connais votre expertise, votre savoir-faire dans ce domaine, vous l'avez déjà démontré et je peux en témoigner.
- Enfin, quatrième proposition : élaborer un outil d'évaluation des services d'urgences.
Voilà les axes que je vous invite tous à suivre, avec réalisme et détermination, pour qu'ensemble, nous rendions aux services d'urgence l'efficacité dont ils ont légitimement besoin.
I - Garantir l'efficacité du plan " Urgences "
La priorité de mon action ira donc à la mise en place efficace et rapide du plan urgences ainsi enrichi et complété. Au total, 489 millions d'euros sur cinq ans dont 150 millions d'euros y seront consacrés en 2004. Ce plan a bénéficié des travaux du groupe urgences qui se réunit de façon régulière et soutenue depuis septembre 2002. Je souhaite ici remercier les professionnels qui s'y sont engagés, notamment Monsieur Pelloux, Monsieur Giroud et Monsieur Kopferschmitt.
Je voudrais ici saluer Pierre Mardegan, chef du service des urgences du centre hospitalier de Montauban et coordonnateur du premier pôle départemental des urgences hospitalières, pour le professionnalisme avec lequel il s'est attelé depuis le mois de janvier, à la mission qui lui a été confiée. Il s'agit de savoir quelles sont les difficultés rencontrées dans la mise en place du plan urgences. Je le félicite pour ses qualités d'écoute et de compréhension.
I-2 / Bilan d'étape de la mise en oeuvre du plan urgences
Le bilan réalisé à la fin mars 2004 révèle que 759 postes médicaux et paramédicaux ont d'ores et déjà été créés au sein des services d'urgences, des SAMU et des SMUR. Ces créations de postes concernent toutes les catégories de professionnels qui interviennent dans ces services.
144 postes de permanenciers
266 postes d'infirmières dans les SMUR et aux urgences
176 postes de praticiens hospitaliers, dont 93 en SAMU-SMUR et 83 aux urgences
52 postes d'ambulanciers de SMUR
121 postes d'aides soignants et agent de service hospitalier
Je voudrais également citer le renforcement des services gériatriques au sein des services d'urgences. Ainsi, 435 postes sont dédiés à l'amélioration de la prise en charge des personnes âgées. Enfin, s'agissant des capacités d'hospitalisation, 39 lits d'éveil " coma " ont été financés.
Enfin, il me paraît important de souligner l'importance de développer des lits de soins de suite indispensables pour réduire les files d'attente dans les services d'urgences. A ce jour, il est prévu d'augmenter les capacités de 1028 lits.
Ainsi, au total, la mise en oeuvre initiale du plan urgences a permis la création de près de 1200 postes qui viennent renforcer les personnels des services et développer les capacités de prise en charge en aval des urgences.
Le plan Urgences ne constituait bien sûr qu'une partie de la réponse. Les moyens financiers dégagés dans ce cadre pour les urgences ne peuvent porter leurs effets sans que soit repensée toute l'organisation de la chaîne des urgences dans notre système de soins. La circulaire du 16 avril 2003 constituait une première pierre à l'édifice. Sa mise en oeuvre a été soutenue par le plan urgences. Je souhaite aujourd'hui allez plus loin et revoir le dispositif réglementaire applicable aux établissements de santé autorisé pour prendre en charge les urgences pour une meilleure lisibilité et une meilleure coordination des hommes et des structures.
J'ai pris ce problème à coeur dès mon arrivée en donnant un cadre organisationnel à la permanence des soins de la médecine de ville. Ainsi un cahier des charges concerté entre tous les acteurs concernés par les soins non programmés sera élaboré dans chaque département. Par ailleurs, l'organisation de la garde départementale assurant la permanence du transport sanitaire a fait l'objet de travaux soutenus avec les professionnels concernés et fait depuis juillet 2003 l'objet d'un financement spécifique. Ainsi, pendant la garde, un véhicule et un équipage sont désormais dédiés aux demandes du SAMU.
J'ai demandé aux ARH pour 2005, dans le cadre du plan d'avoir une écoute très attentive des besoins de vos services notamment dans les services d'urgences enfants. Sachez que je reste très vigilent sur les mesures concrètes mise en place cette année.
Je suis très attaché à l'exercice d'une médecine d'urgence de proximité, mais qui doit s'inscrire dans une démarche de sécurité, de qualité et d'égalité
* Dans cette logique de sécurité, chaque équipe SMUR, y compris de proximité, doit pouvoir compter sur la présence d'un infirmier au côté du médecin afin de donner toutes ses chances aux malades ou aux blessés en état grave.
* La qualité en médecine d'urgence pré-hospitalière et hospitalière à laquelle vous tenez messieurs les présidents doit reposer sur l'évaluation des activités, des pratiques et des moyens mis en place. Je vous soutiendrais dans ce domaine.
* L'égalité et la qualité pour tous dans l'accès aux soins urgents doivent reposer :
* D'une part, sur les renforts des équipes SMUR, des équipes d'Urgence d'unité de proximité mais aussi des équipes médicales et infirmiers des hôpitaux locaux afin de développer une véritable filière de soins de nos services de courts séjours.
* D'autre part, sur la mutualisation des équipes SAMU, SMUR, Urgences et aussi des équipes de proximité et de services d'urgences à plus forte activité comme le préconise la circulaire du 16 avril 2003 afin de trouver un équilibre dans la répartition des postes médicaux par bassin de population, par territoire...
II - Les travaux du groupe " urgences "
J'ai demandé au groupe de travail national d'explorer trois nouveaux axes dans les prochains mois. Je souhaite qu'il me propose des améliorations des décrets de 1997, une organisation plus rationnelle des transports héliportés, et des modalités d'informatisation des services d'urgences, qui à terme doivent permettre la mise en place d'un système d'alerte et de veille, que les services d'urgences contribueront à alimenter.
Ces nouveaux chantiers devraient pour certains aboutir à l'automne 2004.
Les travaux sur les aménagements des textes réglementaires applicables aux urgences ont, grâce à la mobilisation du groupe de travail, largement avancés et visent à reconnaître la prise en charge de l'urgence comme une mission essentielle de l'établissement qui doit mobiliser tous les services concernés au sein d'un territoire.
L'organisation des urgences en réseau sera également développée: les services d'urgences seront engagés dans un réseau associant établissements sanitaires, établissements médico-sociaux et médecins de ville. Ce réseau offrira les compétences médicales et les capacités d'hospitalisation garantissant une prise en charge de qualité en aval des urgences en médecine comme en soins de suite. Les travaux sont en cours dans le cadre du groupe urgences afin d'introduire cette notion de fonctionnement en réseau dans les textes réglementaires applicables aux établissements autorisés pour la prise en charge des urgences.
Enfin, je souhaiterais évoquer un élément d'information important, car je sais que ce sujet est chaque année pour vous une source de difficultés supplémentaire : les fermetures estivales des lits. Une circulaire a été adressée aux ARH afin de mieux anticiper et limiter les risques de dysfonctionnement des urgences, comme chaque année, ces fermetures feront l'objet d'un suivi attentif de mes services chargés de recenser les fermetures prévisionnelles de lits pour les spécialités médicales et chirurgicales. De cette façon, les situations à risque pourront être détectées et corrigées dans les meilleurs délais.
A quelques heures de la clôture de votre 4ème Congrès National des Urgences, je sais déjà par mes proches, que les Enseignements Supérieurs de Médecine d'Urgence, les Conférences ainsi que les communications libres présentées par nos jeunes confrères ont été d'un grand niveau scientifique. Permettez-moi de les féliciter et de les encourager à poursuivre dans cette voie de l'excellence de la médecine d'urgence française.
Mesdames et Messieurs les membres du comité d'organisation, Messieurs les Présidents des Sociétés Savantes, vous pouvez être fier de cette réussite.
Merci.


(source http://www.sante.gouv.fr, le 24 mai 2004)