Texte intégral
LCI
Le 19 octobre 2004
Q- N. Sarkozy veut faire du rapport Camdessus la Bible du futur président de l'UMP ; est-ce que cela peut être la Bible du Gouvernement ?
R-C'est un rapport très intéressant, il va être dévoilé officiellement ce matin. Ce que j'en entends et ce que j'en sais depuis quelque temps, c'est qu'il y a pas mal d'idées contenues dans ce rapport que nous avons déjà reprises dans le projet de loi de finances - dont nous commençons aujourd'hui la discussion -, c'est-à-dire essayer de dégraisser là où on peut faire des économies, tout mettre au service de l'emploi. C'est un document qui va faire du bruit et je trouve que c'est bien que dans un pays comme le nôtre, il y ait débat.
Q-Ce rapport demande la rapidité dans les réformes ; est-ce que vous allez assez vite ? On a reproché, par exemple, le recul du Gouvernement sur le problème des licenciements.
R-Franchement, on nous a plutôt dit à certains moments que nous allions trop vite, qu'on enchaînait les réformes ; la réforme de l'assurance maladie après les retraites, c'était beaucoup. Donc, je crois que c'est un rythme comme il le faut et le Premier ministre, J.-P. Raffarin souhaite qu'on n'encombre pas la session parlementaire et que les députés et les sénateurs aient le temps de travailler normalement sur les projets de loi. Je crois que nous avons atteint aujourd'hui le bon rythme.
Q-Pour ce qui vous concerne, vous êtes parti pour un véritable marathon, puisque vous avez à présenter ce budget à partir d'aujourd'hui à la discussion parlementaire. Vous êtes parti d'une hypothèse de croissance de 2,5 % pour l'année 2005. Premièrement, est-ce que cette hypothèse n'est pas trop optimiste par rapport à ce que disent les experts et les économistes qui disent plutôt 2,2 %, et puis aussi parce qu'il y a ce problème de prix du pétrole qui ne cesse d'augmenter.
R-C'est très difficile de prendre une hypothèse de taux de croissance. F. Mer et A. Lambert l'an dernier, pour le budget présenté à la même époque, avaient fait une hypothèse prudente : 1,7 ; on termine l'année normalement à 2,4 -2,5 %. Ils avaient choisi la prudence. Nous, nous annonçons 2,5 pour deux raisons. La première, c'est ce que disent les économistes : ils pensent que seront sur les mêmes tendances de croissance que l'an passé.
Q-Ils disent plutôt 2,2 %...
R-Cela dépend desquels ; la moyenne, c'est plutôt autour de 2,5. On a pris plutôt la valeur moyenne. Et puis, je pense qu'il est important également de montrer la volonté politique de ce Gouvernement, de continuer à tout mettre en uvre au service de la croissance. Donc 2,5 %, c'est à la fois un souhait, un objectif et une prévision raisonnable.
Q-Mais tous les facteurs expliquent que la montée du prix du pétrole risquent d'être durables : la stabilité au Moyen-Orient ne va pas se résoudre d'ici demain, la tension avec une croissance de reprise et avec la demande chinoise, notamment. Donc beaucoup de facteurs qui vont être durables.
R-Il n'y a pas que cela. L'augmentation de la croissance chinoise, c'est durable, bien que le Gouvernement chinois ait pris des mesures pour essayer de stopper la surchauffe. Mais, par exemple, ce qui vient de se passer, comme les grèves sur les gisements pétroliers en Norvège, les cyclones, ouragans, typhons dans le golfe du Mexique, les évènements au Nigeria, tout cela n'est pas structurel.
Q-Vous croyez que cela va se calmer ?
R-Aujourd'hui, il faut être très malin pour savoir si nous sommes devant une augmentation conjoncturelle ou structurelle. J'ai apporté un graphique - je ne sais pas si on peut le voir sur votre antenne - ; c'est ce qui s'est passé récemment pour les prix du pétrole. On voit bien, en regardant ses courbes, que ce n'est pas quelque chose de linéaire, qui monte et qui descend. C'est quelque chose qui fait des à-coups. Donc, il y a deux hypothèses, soyons clairs : ou on continue avec des à-coups et à ce moment-là, notre hypothèse de 36,5 du baril l'an prochain est une hypothèse crédible, ou alors, on est à 60 et quelque en permanence, et dans ce cas-là, il faudra naturellement re-réfléchir à nos hypothèses de croissance.
Q-En attendant, cela pose beaucoup de problèmes à un certain nombre de catégories. Vous avez fait des gestes pour les artisans d'atelier... Pardon, pour...
R-C'est bientôt pour les artisans d'atelier.
Q-Les artisans d'atelier, c'est annoncé pour jeudi. Est-ce que vous allez faire des gestes pour toutes les catégories qui commencent à parler : la fédération française du bâtiment, les taxis, les commerçants itinérants ?
R-Les gestes ont été faits, non pas de manière clientéliste, comme je l'ai lu quelque part, mais de manière juste. Il y a des gens pour lesquels, le gazole c'est l'outil de travail ; c'est le cas des transporteurs routiers français, c'est le cas de nos agriculteurs, pêcheurs et d'autres encore. Pour ceux-là, comme c'est l'outil de travail, on a fait des gestes pour baisser le prix d'utilisation des outils de travail. Ensuite, il y a d'autres catégories qui viennent frapper à la porte du Gouvernement...
Q-Et vous allez les entendre ?
R-Nous allons naturellement parler avec elles et faire le point. Quand ils ont de bons arguments, nous les entendons. Les routiers et les taxis, c'est différent, mais toutes les revendications sont à écouter. Maintenant, se pose la question de l'ensemble des Français. Est-ce que nous pouvons agir pour l'ensemble des Français ? C'est tout le problème du débat sur la TIPP. Et là, nous disons que le moment n'est pas venu. Mais nous sommes attentifs aux Français qui, par exemple, viennent de remplir leur cuve de mazout et qui se sont aperçus que la facture avait augmenté de 30 %. Donc, le Gouvernement entend ces messages et réagira, s'il faut réagir, le moment venu.
Q-C'est quoi "le moment venu" ? Est-ce que vous êtes bien sûr que N. Sarkozy ne va pas vous brûler la politesse et annoncer cet après-midi une mesure sur la TIPP ?
R-Il y a deux choses sur le prix. Il y a d'abord le prix du baril, tel qu'on l'achète sur les marchés internationaux, il y a la TIPP. Contrairement à ce que pensent beaucoup de nos concitoyens, ce n'est pas un impôt proportionnel. Il est proportionnel au litrage mais pas au prix. Et il y a la TVA sur laquelle joue le facteur prix. Donc, nous avons utilisé nos marges de manuvre pour les catégories. Maintenant, la réponse, à mon avis, n'est pas qu'une réponse française, c'est une réponse européenne. Il y a des grandes réunions européennes de prévues cette semaine au niveau des ministres des Finances. C'est peut-être l'occasion de poser le problème.
Q-Pour être clair : vous dites que ce n'est pas le moment, mais vous ne l'excluez pas dans les semaines ou les mois à venir ?
R-Quand nous entendons certains messages, naturellement, nous n'excluons rien, le Gouvernement ne peut rien exclure. Simplement, il faut être honnête. Il faut dire : 15 centimes de TIPP, si on l'enlève, cela coûte 800 000 millions d'euros à l'Etat et que cette année nous avons été heureux de diminuer le déficit de quelques milliards d'euros. Donc, on voit bien d'un côté les charges, de l'autre côté, l'absence de recette. C'est une décision politique qui est placée devant le Gouvernement, si cette décision devait un jour se produire. Mais pour l'instant, je crois vraiment que la réponse en France, pour les catégories sociales qui utilisent le pétrole, la réponse globale est au niveau européen, sinon au niveau mondial.
Q-Rapidement quelques précisions sur la discussion de ce budget : des problèmes avec votre majorité sur l'ISF. Proposition d'amendement : indexation du barème ISF sur l'inflation ; c'est d'accord ?
R-Le Gouvernement n'a inscrit dans le projet de loi de finances aucune mesure concernant l'ISF.
Q-Allez-vous accepter cet amendement ?
R-Nous allons écouter le Parlement. Le fait de savoir si nous l'acceptons ou pas, ce n'est pas pour l'instant décidé. Donc, nous verrons. Nous entendrons l'ensemble des amendements, ils seront discutés. Le Gouvernement, dans cette affaire, n'a qu'un seul objectif. On parlait tout à l'heure du rapport Camdessus...
Q-Qui arbitre ? C'est l'Elysée en fait...
R-C'est naturellement le chef du Gouvernement...
Q-Etes-vous sûr que ce n'est pas le chef de l'Etat ?
R-...Et le chef du Gouvernement, comme chacun le sait dans notre pays, travaille sous l'autorité du président de la République. Ce que je voudrais dire simplement, c'est que ce budget, nous l'avons construit, avec N. Sarkozy, sur l'emploi : faire démarrer la croissance et la partager au service de l'emploi des Français. Si on nous propose des mesures qui ont un impact sur l'emploi, nous les écouterons avec plus de plaisir que des mesures qui n'ont pas d'impact sur l'emploi. Il faut que les choses soient claires.
Q-Quand est-ce que les choses seront arbitrées ?
R-Il n'y a pas d'arbitrage à venir, il y a une discussion parlementaire qui va avoir lieu et, à ce moment-là, nous dirons ce que nous indique le Premier ministre, le chef du Gouvernement, sur ces sujets.
Q-Abattement d'impôt sur les emplois familiaux ; vous ferez un geste ?
R-C'est une très bonne mesure qui a été proposée dans le budget. Cela a pour but d'empêcher l'emploi noir et gris. Il y a des idées des parlementaires pour le rendre plus sensible à la dimension familiale, selon le nombre d'enfant. Ce sont des idées intéressantes que nous allons naturellement écouter et dont nous discuterons dans l'Hémicycle.
Q-Vous confirmez - ce n'est pas le budget de l'Etat en soi, c'est l'ensemble des comptes publics - que la soulte EDF sur les retraites sera de 9 milliards ?
R- La soulte EDF sur les retraites a été discutée ; son impact n'est pas sur le budget de l'Etat mais sur l'ensemble des grands équilibres financiers de l'Etat - budget de l'Etat, comptes sociaux et ensemble des comptes, y compris des collectivités locales. Donc, naturellement, elle participera à un bon équilibre de nos finances publiques l'an prochain, mais elle n'a pas d'influence sur le budget de l'Etat aujourd'hui.
(Source : premier-ministre, Service d'information du gouvernement, le 20 octobre 2004)
Europe 1
Le 20 octobre 2004
Q- A propos du prix de l'essence, on vous a détaillé à 7h30 l'usine à gaz montée par le Gouvernement. D. Bussereau est avec nous ; bonjour.
R- Bonjour, mais il ne s'agit pas d'une usine à gaz, monsieur Soumier, je vais vous en parler.
Q- Quand même, n'y avait-il pas moyen de faire plus simple ?
R- Il s'agit exactement de savoir ce qui se passe. On a aidé les populations qui ont besoin du gasoil pour leur travail - je pense aux agriculteurs, aux transporteurs routiers, à la batellerie qui va être reçue, aux pêcheurs. Pour le reste, pour nos concitoyens...
Q- Voilà, pour les particuliers maintenant...
R- Oui, pour les particuliers, le Gouvernement était "accusé" - entre guillemets - d'une chose un peu désagréable, c'est-à-dire de se faire de l'argent sur le dos des particuliers. Or, si on regarde nos prévisions pour 2004, on a prévu, en effet, d'avoir un peu plus de TVA, mais pas énormément, 200 millions d'euros, et moins de TIPP. Cela vous apparaît bizarre que l'on prenne moins de TIPP, que l'on paye sur notre litre de carburant quand le prix augmente. Mais parce que la TIPP n'est pas sur le prix mais sur le volume et quand les prix augmentent, on consomme moins. Donc, bizarrement, l'Etat pourrait se retrouver avec moins de recettes au moment où certains l'accusent d'en faire trop. D'où l'idée de faire le point et de faire le point le plus rapidement possible.
Q- Vous n'y êtes pour rien : ce que je viens d'entendre est totalement incompréhensible... Le fuel domestique augmente de 30 %, et vous nous dites que l'Etat va ne rien gagner, qu'il va peut-être même perdre de l'argent ?
R- Oui. Si vous voulez, quand le fuel domestique augmente, par exemple quand on a fait le plein d'une cuve de gasoil récemment, ceux qui l'on fait se sont aperçu que c'était 30 % plus cher, et ils en ont souffert, ils nous l'ont dit. Dans ces cas-là, l'Etat gagne plus parce qu'il y a de la TVA, et il gagne autant sur la TIPP, parce que la TIPP est proportionnelle au volume et non pas au prix du litre. Ce qui veut dire que quand...
Q- On a toujours besoin d'autant de volume pour se chauffer !
R- Oui, mais quand le carburant augmente, qu'est-ce qui se passe, pas pour le chauffage, mais pour sa voiture ? On consomme moins, on fait attention. Donc, si vous voulez, bizarrement...
Q- Cela va faire une telle différence ?
R- Bizarrement, quand le carburant augmente, l'Etat a moins de rentrées. Donc, on va faire le point. Si on s'aperçoît dans ce point que l'Etat a gagné de l'argent, on remettra immédiatement cela à la disposition des consommateurs. Et je vais même vous dire plus : si on s'apercevait qu'on n'a pas gagné d'argent, qu'on en a même perdu, mais qu'en matière de TVA, on a fait une vraie plus-value, eh bien il est assez vraisemblable que le Gouvernement, le ministre de l'Economie et des Finances et le Premier ministre décideraient de redonner cette plus-value aux consommateurs, même s'il y a eu une perte pour l'Etat.
Q- Franchement, les socialistes avaient inventé un système simple, et on a l'impression que vous ne l'utilisez pas simplement parce qu'il est socialiste.
R- Non, ce n'est pas parce qu'il est socialiste, c'est parce qu'il n'a pas marché. Quand les socialistes avaient mis en place la TIPP flottante, d'abord, il y avait beaucoup moins de variation des cours qu'aujourd'hui, et deuxièmement, quand, par exemple, vous aviez une augmentation de 15 centimes sur un litre de gasoil, cela en redonnait deux au consommateur. C'était des pertes énormes pour le budget de l'Etat, c'était quelque chose que ressentait mal le consommateur, et en plus, c'était une mesure anti-européenne. Nous, on aide les populations, on fait le point ; si l'Etat dégage une plus-value, on le redonne au consommateur et on fait cela très vite.
Q- Le problème, c'est que le fuel, il faut le payer maintenant !
R- J'entends bien. Mais si redonne à quelqu'un qui a payé fortement une [inaud] de fuel...
Q- -Mais ce sera moins cher tout simplement ou il va y avoir un...
R- Non, cela veut pouvoir dire que si nous nous apercevons que nous avons eu des plus-values de TVA, je le répète, eh bien nous pourrons les redonner sous forme de déductions d'impôt, de mesures fiscales pour les consommateurs. Vous avez dit que c'était dans beaucoup de temps, au mois de novembre...
Q- ... Au moins de janvier.
R- Au mois de novembre, la commission se réunit. Pourquoi ? Parce que nous aurons le résultat du chiffre et des recettes, de fin octobre à la mi-novembre. On le décide à la mi-novembre, on le vote en décembre dans la loi de finances rectificative, et cela s'applique à tous les foyers au 1er janvier. Donc, c'est clair, net et précis. L'Etat ne fera pas de plus-value sur le dos des consommateurs et à la limite, même si l'Etat perd un peu d'argent, il fera un geste pour les consommateurs en
janvier.
Merci monsieur Bussereau. "Clair, net et précis...", vous êtes peut-être le seul à le penser ce matin...
(Source : premier-ministre, Service d'information du gouvernement, le 20 octobre 2004)
Le 19 octobre 2004
Q- N. Sarkozy veut faire du rapport Camdessus la Bible du futur président de l'UMP ; est-ce que cela peut être la Bible du Gouvernement ?
R-C'est un rapport très intéressant, il va être dévoilé officiellement ce matin. Ce que j'en entends et ce que j'en sais depuis quelque temps, c'est qu'il y a pas mal d'idées contenues dans ce rapport que nous avons déjà reprises dans le projet de loi de finances - dont nous commençons aujourd'hui la discussion -, c'est-à-dire essayer de dégraisser là où on peut faire des économies, tout mettre au service de l'emploi. C'est un document qui va faire du bruit et je trouve que c'est bien que dans un pays comme le nôtre, il y ait débat.
Q-Ce rapport demande la rapidité dans les réformes ; est-ce que vous allez assez vite ? On a reproché, par exemple, le recul du Gouvernement sur le problème des licenciements.
R-Franchement, on nous a plutôt dit à certains moments que nous allions trop vite, qu'on enchaînait les réformes ; la réforme de l'assurance maladie après les retraites, c'était beaucoup. Donc, je crois que c'est un rythme comme il le faut et le Premier ministre, J.-P. Raffarin souhaite qu'on n'encombre pas la session parlementaire et que les députés et les sénateurs aient le temps de travailler normalement sur les projets de loi. Je crois que nous avons atteint aujourd'hui le bon rythme.
Q-Pour ce qui vous concerne, vous êtes parti pour un véritable marathon, puisque vous avez à présenter ce budget à partir d'aujourd'hui à la discussion parlementaire. Vous êtes parti d'une hypothèse de croissance de 2,5 % pour l'année 2005. Premièrement, est-ce que cette hypothèse n'est pas trop optimiste par rapport à ce que disent les experts et les économistes qui disent plutôt 2,2 %, et puis aussi parce qu'il y a ce problème de prix du pétrole qui ne cesse d'augmenter.
R-C'est très difficile de prendre une hypothèse de taux de croissance. F. Mer et A. Lambert l'an dernier, pour le budget présenté à la même époque, avaient fait une hypothèse prudente : 1,7 ; on termine l'année normalement à 2,4 -2,5 %. Ils avaient choisi la prudence. Nous, nous annonçons 2,5 pour deux raisons. La première, c'est ce que disent les économistes : ils pensent que seront sur les mêmes tendances de croissance que l'an passé.
Q-Ils disent plutôt 2,2 %...
R-Cela dépend desquels ; la moyenne, c'est plutôt autour de 2,5. On a pris plutôt la valeur moyenne. Et puis, je pense qu'il est important également de montrer la volonté politique de ce Gouvernement, de continuer à tout mettre en uvre au service de la croissance. Donc 2,5 %, c'est à la fois un souhait, un objectif et une prévision raisonnable.
Q-Mais tous les facteurs expliquent que la montée du prix du pétrole risquent d'être durables : la stabilité au Moyen-Orient ne va pas se résoudre d'ici demain, la tension avec une croissance de reprise et avec la demande chinoise, notamment. Donc beaucoup de facteurs qui vont être durables.
R-Il n'y a pas que cela. L'augmentation de la croissance chinoise, c'est durable, bien que le Gouvernement chinois ait pris des mesures pour essayer de stopper la surchauffe. Mais, par exemple, ce qui vient de se passer, comme les grèves sur les gisements pétroliers en Norvège, les cyclones, ouragans, typhons dans le golfe du Mexique, les évènements au Nigeria, tout cela n'est pas structurel.
Q-Vous croyez que cela va se calmer ?
R-Aujourd'hui, il faut être très malin pour savoir si nous sommes devant une augmentation conjoncturelle ou structurelle. J'ai apporté un graphique - je ne sais pas si on peut le voir sur votre antenne - ; c'est ce qui s'est passé récemment pour les prix du pétrole. On voit bien, en regardant ses courbes, que ce n'est pas quelque chose de linéaire, qui monte et qui descend. C'est quelque chose qui fait des à-coups. Donc, il y a deux hypothèses, soyons clairs : ou on continue avec des à-coups et à ce moment-là, notre hypothèse de 36,5 du baril l'an prochain est une hypothèse crédible, ou alors, on est à 60 et quelque en permanence, et dans ce cas-là, il faudra naturellement re-réfléchir à nos hypothèses de croissance.
Q-En attendant, cela pose beaucoup de problèmes à un certain nombre de catégories. Vous avez fait des gestes pour les artisans d'atelier... Pardon, pour...
R-C'est bientôt pour les artisans d'atelier.
Q-Les artisans d'atelier, c'est annoncé pour jeudi. Est-ce que vous allez faire des gestes pour toutes les catégories qui commencent à parler : la fédération française du bâtiment, les taxis, les commerçants itinérants ?
R-Les gestes ont été faits, non pas de manière clientéliste, comme je l'ai lu quelque part, mais de manière juste. Il y a des gens pour lesquels, le gazole c'est l'outil de travail ; c'est le cas des transporteurs routiers français, c'est le cas de nos agriculteurs, pêcheurs et d'autres encore. Pour ceux-là, comme c'est l'outil de travail, on a fait des gestes pour baisser le prix d'utilisation des outils de travail. Ensuite, il y a d'autres catégories qui viennent frapper à la porte du Gouvernement...
Q-Et vous allez les entendre ?
R-Nous allons naturellement parler avec elles et faire le point. Quand ils ont de bons arguments, nous les entendons. Les routiers et les taxis, c'est différent, mais toutes les revendications sont à écouter. Maintenant, se pose la question de l'ensemble des Français. Est-ce que nous pouvons agir pour l'ensemble des Français ? C'est tout le problème du débat sur la TIPP. Et là, nous disons que le moment n'est pas venu. Mais nous sommes attentifs aux Français qui, par exemple, viennent de remplir leur cuve de mazout et qui se sont aperçus que la facture avait augmenté de 30 %. Donc, le Gouvernement entend ces messages et réagira, s'il faut réagir, le moment venu.
Q-C'est quoi "le moment venu" ? Est-ce que vous êtes bien sûr que N. Sarkozy ne va pas vous brûler la politesse et annoncer cet après-midi une mesure sur la TIPP ?
R-Il y a deux choses sur le prix. Il y a d'abord le prix du baril, tel qu'on l'achète sur les marchés internationaux, il y a la TIPP. Contrairement à ce que pensent beaucoup de nos concitoyens, ce n'est pas un impôt proportionnel. Il est proportionnel au litrage mais pas au prix. Et il y a la TVA sur laquelle joue le facteur prix. Donc, nous avons utilisé nos marges de manuvre pour les catégories. Maintenant, la réponse, à mon avis, n'est pas qu'une réponse française, c'est une réponse européenne. Il y a des grandes réunions européennes de prévues cette semaine au niveau des ministres des Finances. C'est peut-être l'occasion de poser le problème.
Q-Pour être clair : vous dites que ce n'est pas le moment, mais vous ne l'excluez pas dans les semaines ou les mois à venir ?
R-Quand nous entendons certains messages, naturellement, nous n'excluons rien, le Gouvernement ne peut rien exclure. Simplement, il faut être honnête. Il faut dire : 15 centimes de TIPP, si on l'enlève, cela coûte 800 000 millions d'euros à l'Etat et que cette année nous avons été heureux de diminuer le déficit de quelques milliards d'euros. Donc, on voit bien d'un côté les charges, de l'autre côté, l'absence de recette. C'est une décision politique qui est placée devant le Gouvernement, si cette décision devait un jour se produire. Mais pour l'instant, je crois vraiment que la réponse en France, pour les catégories sociales qui utilisent le pétrole, la réponse globale est au niveau européen, sinon au niveau mondial.
Q-Rapidement quelques précisions sur la discussion de ce budget : des problèmes avec votre majorité sur l'ISF. Proposition d'amendement : indexation du barème ISF sur l'inflation ; c'est d'accord ?
R-Le Gouvernement n'a inscrit dans le projet de loi de finances aucune mesure concernant l'ISF.
Q-Allez-vous accepter cet amendement ?
R-Nous allons écouter le Parlement. Le fait de savoir si nous l'acceptons ou pas, ce n'est pas pour l'instant décidé. Donc, nous verrons. Nous entendrons l'ensemble des amendements, ils seront discutés. Le Gouvernement, dans cette affaire, n'a qu'un seul objectif. On parlait tout à l'heure du rapport Camdessus...
Q-Qui arbitre ? C'est l'Elysée en fait...
R-C'est naturellement le chef du Gouvernement...
Q-Etes-vous sûr que ce n'est pas le chef de l'Etat ?
R-...Et le chef du Gouvernement, comme chacun le sait dans notre pays, travaille sous l'autorité du président de la République. Ce que je voudrais dire simplement, c'est que ce budget, nous l'avons construit, avec N. Sarkozy, sur l'emploi : faire démarrer la croissance et la partager au service de l'emploi des Français. Si on nous propose des mesures qui ont un impact sur l'emploi, nous les écouterons avec plus de plaisir que des mesures qui n'ont pas d'impact sur l'emploi. Il faut que les choses soient claires.
Q-Quand est-ce que les choses seront arbitrées ?
R-Il n'y a pas d'arbitrage à venir, il y a une discussion parlementaire qui va avoir lieu et, à ce moment-là, nous dirons ce que nous indique le Premier ministre, le chef du Gouvernement, sur ces sujets.
Q-Abattement d'impôt sur les emplois familiaux ; vous ferez un geste ?
R-C'est une très bonne mesure qui a été proposée dans le budget. Cela a pour but d'empêcher l'emploi noir et gris. Il y a des idées des parlementaires pour le rendre plus sensible à la dimension familiale, selon le nombre d'enfant. Ce sont des idées intéressantes que nous allons naturellement écouter et dont nous discuterons dans l'Hémicycle.
Q-Vous confirmez - ce n'est pas le budget de l'Etat en soi, c'est l'ensemble des comptes publics - que la soulte EDF sur les retraites sera de 9 milliards ?
R- La soulte EDF sur les retraites a été discutée ; son impact n'est pas sur le budget de l'Etat mais sur l'ensemble des grands équilibres financiers de l'Etat - budget de l'Etat, comptes sociaux et ensemble des comptes, y compris des collectivités locales. Donc, naturellement, elle participera à un bon équilibre de nos finances publiques l'an prochain, mais elle n'a pas d'influence sur le budget de l'Etat aujourd'hui.
(Source : premier-ministre, Service d'information du gouvernement, le 20 octobre 2004)
Europe 1
Le 20 octobre 2004
Q- A propos du prix de l'essence, on vous a détaillé à 7h30 l'usine à gaz montée par le Gouvernement. D. Bussereau est avec nous ; bonjour.
R- Bonjour, mais il ne s'agit pas d'une usine à gaz, monsieur Soumier, je vais vous en parler.
Q- Quand même, n'y avait-il pas moyen de faire plus simple ?
R- Il s'agit exactement de savoir ce qui se passe. On a aidé les populations qui ont besoin du gasoil pour leur travail - je pense aux agriculteurs, aux transporteurs routiers, à la batellerie qui va être reçue, aux pêcheurs. Pour le reste, pour nos concitoyens...
Q- Voilà, pour les particuliers maintenant...
R- Oui, pour les particuliers, le Gouvernement était "accusé" - entre guillemets - d'une chose un peu désagréable, c'est-à-dire de se faire de l'argent sur le dos des particuliers. Or, si on regarde nos prévisions pour 2004, on a prévu, en effet, d'avoir un peu plus de TVA, mais pas énormément, 200 millions d'euros, et moins de TIPP. Cela vous apparaît bizarre que l'on prenne moins de TIPP, que l'on paye sur notre litre de carburant quand le prix augmente. Mais parce que la TIPP n'est pas sur le prix mais sur le volume et quand les prix augmentent, on consomme moins. Donc, bizarrement, l'Etat pourrait se retrouver avec moins de recettes au moment où certains l'accusent d'en faire trop. D'où l'idée de faire le point et de faire le point le plus rapidement possible.
Q- Vous n'y êtes pour rien : ce que je viens d'entendre est totalement incompréhensible... Le fuel domestique augmente de 30 %, et vous nous dites que l'Etat va ne rien gagner, qu'il va peut-être même perdre de l'argent ?
R- Oui. Si vous voulez, quand le fuel domestique augmente, par exemple quand on a fait le plein d'une cuve de gasoil récemment, ceux qui l'on fait se sont aperçu que c'était 30 % plus cher, et ils en ont souffert, ils nous l'ont dit. Dans ces cas-là, l'Etat gagne plus parce qu'il y a de la TVA, et il gagne autant sur la TIPP, parce que la TIPP est proportionnelle au volume et non pas au prix du litre. Ce qui veut dire que quand...
Q- On a toujours besoin d'autant de volume pour se chauffer !
R- Oui, mais quand le carburant augmente, qu'est-ce qui se passe, pas pour le chauffage, mais pour sa voiture ? On consomme moins, on fait attention. Donc, si vous voulez, bizarrement...
Q- Cela va faire une telle différence ?
R- Bizarrement, quand le carburant augmente, l'Etat a moins de rentrées. Donc, on va faire le point. Si on s'aperçoît dans ce point que l'Etat a gagné de l'argent, on remettra immédiatement cela à la disposition des consommateurs. Et je vais même vous dire plus : si on s'apercevait qu'on n'a pas gagné d'argent, qu'on en a même perdu, mais qu'en matière de TVA, on a fait une vraie plus-value, eh bien il est assez vraisemblable que le Gouvernement, le ministre de l'Economie et des Finances et le Premier ministre décideraient de redonner cette plus-value aux consommateurs, même s'il y a eu une perte pour l'Etat.
Q- Franchement, les socialistes avaient inventé un système simple, et on a l'impression que vous ne l'utilisez pas simplement parce qu'il est socialiste.
R- Non, ce n'est pas parce qu'il est socialiste, c'est parce qu'il n'a pas marché. Quand les socialistes avaient mis en place la TIPP flottante, d'abord, il y avait beaucoup moins de variation des cours qu'aujourd'hui, et deuxièmement, quand, par exemple, vous aviez une augmentation de 15 centimes sur un litre de gasoil, cela en redonnait deux au consommateur. C'était des pertes énormes pour le budget de l'Etat, c'était quelque chose que ressentait mal le consommateur, et en plus, c'était une mesure anti-européenne. Nous, on aide les populations, on fait le point ; si l'Etat dégage une plus-value, on le redonne au consommateur et on fait cela très vite.
Q- Le problème, c'est que le fuel, il faut le payer maintenant !
R- J'entends bien. Mais si redonne à quelqu'un qui a payé fortement une [inaud] de fuel...
Q- -Mais ce sera moins cher tout simplement ou il va y avoir un...
R- Non, cela veut pouvoir dire que si nous nous apercevons que nous avons eu des plus-values de TVA, je le répète, eh bien nous pourrons les redonner sous forme de déductions d'impôt, de mesures fiscales pour les consommateurs. Vous avez dit que c'était dans beaucoup de temps, au mois de novembre...
Q- ... Au moins de janvier.
R- Au mois de novembre, la commission se réunit. Pourquoi ? Parce que nous aurons le résultat du chiffre et des recettes, de fin octobre à la mi-novembre. On le décide à la mi-novembre, on le vote en décembre dans la loi de finances rectificative, et cela s'applique à tous les foyers au 1er janvier. Donc, c'est clair, net et précis. L'Etat ne fera pas de plus-value sur le dos des consommateurs et à la limite, même si l'Etat perd un peu d'argent, il fera un geste pour les consommateurs en
janvier.
Merci monsieur Bussereau. "Clair, net et précis...", vous êtes peut-être le seul à le penser ce matin...
(Source : premier-ministre, Service d'information du gouvernement, le 20 octobre 2004)