Texte intégral
Monsieur le Commissaire, Cher Jacques Barrot,
Monsieur l'Ambassadeur des Pays-Bas représentant la Présidence de l'Union européenne,
Madame et Messieurs les présidents de Régions,
Mesdames et Messieurs,
Cette Conférence se déroule à un moment important pour l'avenir des régions ultrapériphériques de l'Union européenne pour deux raisons, qui sont liées à deux dates clefs : le 26 mai et le 18 juin 2004.
1 - Le 26 mai dernier, la communication de la Commission européenne relative à " un partenariat renforcé pour les régions ultrapériphériques " a été adoptée par le Collège des Commissaires.
Cette communication répond à deux engagements :
- elle s'inscrit dans le débat sur l'avenir de la politique régionale, en développant les modalités d'adaptation spécifiques de la politique de cohésion économique et sociale aux régions ultrapériphériques, à travers ses trois objectifs, " convergence ", " compétitivité et emploi " et " coopération territoriale européenne " ;
- elle apporte des premiers éléments de réponse aux conclusions du Conseil de Séville de juin 2002 et au mémorandum du 2 juin 2003 de l'Espagne, de la France, du Portugal et de leurs régions ultrapériphériques, visant à approfondir la mise en uvre de l'article 299-2 du Traité CE et à lui donner son plein effet.
Je tiens à saluer la qualité du travail de la Commission qui a abouti à la réalisation de ce document, et à rendre particulièrement hommage à la DG Regio, qui a eu la charge de piloter l'exercice.
Tout en comprenant que, sur certains sujets agricoles, la Commission ne puisse s'engager davantage à ce stade, je souhaite que les discussions avec elle sur les suites à donner à ce document permettent d'en améliorer les aspects les plus positifs.
D'ores et déjà, dans le cadre des travaux en cours, tant sur les projets de règlements relatifs à la réforme de la politique régionale, au sein des groupes du Conseil, que sur la mise en uvre de la communication elle-même ainsi que du rapport qui doit préciser le contenu des mesures qu'elle annonce, j'appelle son attention sur la question du mode d'allocation des crédits du " programme spécifique de compensation des surcoûts ".
J'attache une d'autant plus grande importance à ce programme que j'en avais évoqué l'hypothèse, lors de mon intervention à la Conférence des régions ultrapériphériques à la Martinique, en octobre dernier.
Ce programme, doté de 1,1 milliards d'euros dans le cadre du futur " objectif de convergence ", est destiné à tenir compte des contraintes très spécifiques que connaissent les régions ultrapériphériques, ainsi que de l'insuffisante adaptation à leurs particularités de certaines politiques communautaires. De ce fait, comme l'envisage le projet de règlement portant dispositions générales sur le FEDER, le FSE et le Fonds de cohésion, il paraît effectivement souhaitable d'appliquer aux crédits du FEDER réservés à ce programme des critères de répartition entre les régions concernées bien distincts de ceux prévus pour les autres programmes relevant de " l'objectif de convergence ".
Cependant, pour que ce programme remplisse le mieux possible son objectif de faciliter l'intégration des RUP dans le marché intérieur de l'Union et de compenser leurs contraintes spécifiques, il semble tout aussi nécessaire que ces critères de répartition se fondent sur les principaux facteurs de surcoût que ces handicaps occasionnent.
Ils devraient en particulier, me semble t-il, prendre pleinement en compte, comme critère simple et objectif et qui est le fondement de la notion de périphérie, l'éloignement des régions concernées, qui est l'une des causes majeures du déficit d'accessibilité et de compétitivité auquel ce programme veut répondre. Ils pourraient aussi s'appuyer sur le taux de chômage, qui constitue un bon indicateur de leur difficulté à attirer les investissements productifs pour diversifier leur économie.
Un recours à des critères équitables, permettant d'ajuster au mieux les enveloppes aux handicaps objectifs de chaque région, ne pourrait que renforcer l'efficacité de ce programme innovant à bien des égards, sa lisibilité par les bénéficiaires, la justification de sa création vis-à-vis des instruments existants, ainsi que son montant, dans une perspective de gestion plus cohérente et plus rigoureuse des crédits communautaires.
C'est en ce sens que j'ai écrit au commissaire Barrot le 7 juillet dernier.
Par ailleurs, compte tenu de l'importance pour les régions ultrapériphériques de la coopération dans leur zone de voisinage, je me réjouis des perspectives offertes par la mise en place du plan d'action " grand voisinage ".
Ce plan d'action répond à une demande du memorandum du 2 juin, la création de " zones de complémentarité économique ", qui avait été saluée comme " une belle idée " par le commissaire Barnier lors de son discours d'octobre dernier à l'occasion de la conférence des régions ultrapériphériques à la Martinique.
Il comporte deux axes. Le premier relève principalement de la future politique de cohésion économique et sociale et vise à cofinancer des projets de coopération transnationale et transfrontalière avec les pays-tiers voisins des régions ultrapériphériques, dans le cadre de l'objectif " coopération territoriale européenne ".
Le second, de nature commerciale, prévoit une meilleure prise en compte des intérêts des RUP dans la politique commerciale et douanière de l'Union, notamment dans le cadre des futurs accords de partenariat économique entre l'Union et les pays ACP.
En ce qui concerne le premier axe, à la lumière de l'expérience d'INTERREG sur laquelle l'objectif " coopération territoriale européenne " a été bâti, je crois utile d'appeler l'attention de la Commission sur ses modalités de mise en uvre, qui doivent être soigneusement définies, pour permettre, pour les départements d'outre-mer français en particulier, une mise en uvre réellement opérationnelle de la coordination FED/FEDER.
S 'agissant du second axe, la Commission a invité, dans sa communication du 26 mai, les régions et les États membres à lui communiquer les secteurs et les types d'échanges qu'ils jugent importants pour les régions ultrapériphériques.
Mes services se sont déjà mobilisés pour contribuer à l'avancement de ce chantier d'une grande importance pour l'avenir de nos départements d'outre-mer. Une première rencontre s'est tenue le 12 juillet dernier, qui a associé les représentants du monde économique, des exécutifs locaux et des services de l'État. Elle a permis de fixer le cadre de travail nécessaire à l'identification et au recensement des attentes des départements d'outre-mer en matière de coopération. La méthode de travail, proposée par mes services, suppose la tenue d'ateliers spécifiques dans chacune des grandes régions de l'outre-mer, Caraïbes et Océan indien. Ceux-ci sont programmés pour le mois d'octobre prochain, avec pour objectif d'identifier et décliner les intérêts de nos DOM pour leur meilleure prise en considération dans le cadre des Accords de partenariat. Mais, bien évidemment, le facteur déterminant de la qualité et de l'efficacité de ce travail commun sera en dernière instance l'implication du partenariat local.
2 - Mesdames et Messieurs, la deuxième date d'importance est le 18 juin 2004, où les chefs d'État et de gouvernement européens sont parvenus à un accord sur le texte final du traité établissant une constitution pour l'Europe, qui sera soumis à la ratification des États membres.
Ma position constante a toujours été que l'article 299-2 devait être consolidé au sein du nouveau traité constitutionnel. C'est ainsi qu'en temps utile, dans le cadre des travaux de la Convention sur l'avenir de l'Europe, l'attention du Commissaire Barnier avait été appelée sur la nécessité que le champ de cet article recouvre bien l'ensemble des politiques communautaires, que les quatre départements d'outre-mer français soient explicitement énumérés et que la liste des actes communautaires couverts par le projet de nouvel article inclue les lois, lois-cadres, règlements et décisions européens, pour tenir compte de la nouvelle hiérarchie des normes communautaires.
Cette préoccupation a été prise en compte dans le projet de traité constitutionnel, adopté par les chefs d'État et de Gouvernement à l'issue des travaux de la Conférence intergouvernementale.
En ses articles III-424 et IV-440-2 le projet de traité reprend en le consolidant l'article 299-2 du traité CE actuel. Les quatre départements d'outre-mer français sont ainsi énumérés, le champ d'adaptation possible du traité est étendu à l'ensemble des politiques communautaires, et les modalités de cette adaptation visent bien tous les actes européens susceptibles de produire leurs effets dans les régions ultrapériphériques.
Par ailleurs, à la demande de la France, Mayotte pourra bénéficier des dispositions de l'article IV-440-7, qui permet, sur décision du Conseil à l'unanimité, sans avoir à modifier le traité, de passer un territoire de la liste des Pays et Territoires d'Outre-Mer vers la liste des régions ultrapériphériques et inversement. En effet, une déclaration des hautes parties contractantes, annexée à l'acte final de la Conférence intergouvernementale qui a agréé le traité, reconnaît la vocation de Mayotte à devenir une région ultrapériphérique, dès que la France jugera que les conditions sont réunies.
3 - Je ne saurais mettre un terme à mon intervention sans faire état de mes vives préoccupations concernant le projet de révision des lignes directrices relatives aux aides à finalité régionale communiqué par la Commission aux États membres en avril dernier.
Ce projet est globalement désavantageux pour les régions ultrapériphériques. Mais sa concrétisation serait particulièrement dévastatrice pour l'évolution des économies des départements d'outre-mer français, dans la mesure où ceux-ci subiraient la plus forte diminution des taux d'intensité d'aide de toutes les régions de l'Union du fait du cumul de la baisse générale des taux, hors régions ultrapériphériques, et de la diminution du " bonus RUP " proposé par la communication du 26 mai, par rapport à la situation actuelle.
De telles évolutions viendraient affecter les efforts publics d'aide conduits aussi bien au niveau communautaire, dans le cadre de la politique de la cohésion, que national, notamment avec la mise en place de la loi-programme pour l'outre-mer.
Tout le monde sait que les entreprises des départements d'outre-mer français n'interviennent que de façon marginale dans la concurrence européenne, et sans effet de distorsion sur celle-ci. Au contraire, les aides d'Etat dans nos départements d'outre-mer ont pour objet de favoriser la concurrence, en créant les conditions pour que celle-ci émerge.
En outre, le projet de révision proposé par la Commission serait en contradiction avec l'un des volets importants et innovateurs de la communication de la Commission du 26 mai, qui prévoit une meilleure insertion de ceux-ci dans leurs zones géographiques. Il n'est en effet guère cohérent d'inciter les départements d'outre-mer français à coopérer avec des pays voisins, aux coûts salariaux incomparablement plus bas, tout en restreignant parallèlement le soutien apporté à leurs entreprises, qui est un outil essentiel pour rétablir des conditions de compétitivité régionale faussées.
Il convient donc de réserver aux régions ultrapériphériques une approche spécifique, en particulier quant aux taux d'intensité d'aide, en tenant compte de leur situation socio-économique particulière et de leurs besoins de développement. En ce sens, il importe que la Commission exploite toutes les possibilités offertes par l'article 299-2, conformément aux propositions de l'Espagne, de la France et du Portugal et des régions ultrapériphériques, exprimées dans leur mémorandum commun du 2 juin 2003.
À cet égard, il n'est pas sans intérêt de relever que le nouvel article III-167-3-a du projet de traité constitutionnel, destiné à se substituer à l'article 87-3-a du Traité CE, prévoit l'accès automatique des régions ultrapériphériques au bénéfice du régime ouvert aux régions les plus défavorisées, et ce quel que soit leur niveau de PIB. Le fait que cette demande, qui figurait dans le mémorandum commun du 2 juin 2003, ait été agréée par les vingt-cinq États membres me semble traduire la volonté politique de ceux-ci de voir réservé un traitement spécifique aux régions ultrapériphériques, y compris dans un secteur où la Commission dispose d'un important pouvoir normatif.
Cet épisode me permet de conclure sur une note d'optimisme concernant l'avenir des régions ultrapériphériques au sein de l'Union européenne. Beaucoup d'entre vous nourrissaient certaines inquiétudes devant la perspective d'un élargissement à vingt-cinq et les risques de dilution des régions ultrapériphériques dans ce nouvel ensemble.
Lors de mon intervention à votre Conférence d'octobre dernier, je disais souhaiter que tous les États membres, actuels et futurs, comprennent que l'ultrapériphérie de l'Union est aussi importante que son centre. Je crois que cette perception de l'intérêt pour l'Europe élargie de ne pas se priver de bases avancées dans l'océan Atlantique, les Caraïbes, l'Amérique Latine, l'Océan Indien, dans un monde de plus en plus global, est en train, petit à petit, de progresser. Il ne tient qu'à nous d'accompagner ce mouvement, en expliquant ce que nous sommes, avec beaucoup de pédagogie et un peu d'obstination, et en montrant ce que nous pouvons apporter à l'Europe, avec modestie mais sans complexe.
Je vous remercie de votre attention.
(Source http://www.outre-mer.gouv.fr, le 6 septembre 2004)
Monsieur l'Ambassadeur des Pays-Bas représentant la Présidence de l'Union européenne,
Madame et Messieurs les présidents de Régions,
Mesdames et Messieurs,
Cette Conférence se déroule à un moment important pour l'avenir des régions ultrapériphériques de l'Union européenne pour deux raisons, qui sont liées à deux dates clefs : le 26 mai et le 18 juin 2004.
1 - Le 26 mai dernier, la communication de la Commission européenne relative à " un partenariat renforcé pour les régions ultrapériphériques " a été adoptée par le Collège des Commissaires.
Cette communication répond à deux engagements :
- elle s'inscrit dans le débat sur l'avenir de la politique régionale, en développant les modalités d'adaptation spécifiques de la politique de cohésion économique et sociale aux régions ultrapériphériques, à travers ses trois objectifs, " convergence ", " compétitivité et emploi " et " coopération territoriale européenne " ;
- elle apporte des premiers éléments de réponse aux conclusions du Conseil de Séville de juin 2002 et au mémorandum du 2 juin 2003 de l'Espagne, de la France, du Portugal et de leurs régions ultrapériphériques, visant à approfondir la mise en uvre de l'article 299-2 du Traité CE et à lui donner son plein effet.
Je tiens à saluer la qualité du travail de la Commission qui a abouti à la réalisation de ce document, et à rendre particulièrement hommage à la DG Regio, qui a eu la charge de piloter l'exercice.
Tout en comprenant que, sur certains sujets agricoles, la Commission ne puisse s'engager davantage à ce stade, je souhaite que les discussions avec elle sur les suites à donner à ce document permettent d'en améliorer les aspects les plus positifs.
D'ores et déjà, dans le cadre des travaux en cours, tant sur les projets de règlements relatifs à la réforme de la politique régionale, au sein des groupes du Conseil, que sur la mise en uvre de la communication elle-même ainsi que du rapport qui doit préciser le contenu des mesures qu'elle annonce, j'appelle son attention sur la question du mode d'allocation des crédits du " programme spécifique de compensation des surcoûts ".
J'attache une d'autant plus grande importance à ce programme que j'en avais évoqué l'hypothèse, lors de mon intervention à la Conférence des régions ultrapériphériques à la Martinique, en octobre dernier.
Ce programme, doté de 1,1 milliards d'euros dans le cadre du futur " objectif de convergence ", est destiné à tenir compte des contraintes très spécifiques que connaissent les régions ultrapériphériques, ainsi que de l'insuffisante adaptation à leurs particularités de certaines politiques communautaires. De ce fait, comme l'envisage le projet de règlement portant dispositions générales sur le FEDER, le FSE et le Fonds de cohésion, il paraît effectivement souhaitable d'appliquer aux crédits du FEDER réservés à ce programme des critères de répartition entre les régions concernées bien distincts de ceux prévus pour les autres programmes relevant de " l'objectif de convergence ".
Cependant, pour que ce programme remplisse le mieux possible son objectif de faciliter l'intégration des RUP dans le marché intérieur de l'Union et de compenser leurs contraintes spécifiques, il semble tout aussi nécessaire que ces critères de répartition se fondent sur les principaux facteurs de surcoût que ces handicaps occasionnent.
Ils devraient en particulier, me semble t-il, prendre pleinement en compte, comme critère simple et objectif et qui est le fondement de la notion de périphérie, l'éloignement des régions concernées, qui est l'une des causes majeures du déficit d'accessibilité et de compétitivité auquel ce programme veut répondre. Ils pourraient aussi s'appuyer sur le taux de chômage, qui constitue un bon indicateur de leur difficulté à attirer les investissements productifs pour diversifier leur économie.
Un recours à des critères équitables, permettant d'ajuster au mieux les enveloppes aux handicaps objectifs de chaque région, ne pourrait que renforcer l'efficacité de ce programme innovant à bien des égards, sa lisibilité par les bénéficiaires, la justification de sa création vis-à-vis des instruments existants, ainsi que son montant, dans une perspective de gestion plus cohérente et plus rigoureuse des crédits communautaires.
C'est en ce sens que j'ai écrit au commissaire Barrot le 7 juillet dernier.
Par ailleurs, compte tenu de l'importance pour les régions ultrapériphériques de la coopération dans leur zone de voisinage, je me réjouis des perspectives offertes par la mise en place du plan d'action " grand voisinage ".
Ce plan d'action répond à une demande du memorandum du 2 juin, la création de " zones de complémentarité économique ", qui avait été saluée comme " une belle idée " par le commissaire Barnier lors de son discours d'octobre dernier à l'occasion de la conférence des régions ultrapériphériques à la Martinique.
Il comporte deux axes. Le premier relève principalement de la future politique de cohésion économique et sociale et vise à cofinancer des projets de coopération transnationale et transfrontalière avec les pays-tiers voisins des régions ultrapériphériques, dans le cadre de l'objectif " coopération territoriale européenne ".
Le second, de nature commerciale, prévoit une meilleure prise en compte des intérêts des RUP dans la politique commerciale et douanière de l'Union, notamment dans le cadre des futurs accords de partenariat économique entre l'Union et les pays ACP.
En ce qui concerne le premier axe, à la lumière de l'expérience d'INTERREG sur laquelle l'objectif " coopération territoriale européenne " a été bâti, je crois utile d'appeler l'attention de la Commission sur ses modalités de mise en uvre, qui doivent être soigneusement définies, pour permettre, pour les départements d'outre-mer français en particulier, une mise en uvre réellement opérationnelle de la coordination FED/FEDER.
S 'agissant du second axe, la Commission a invité, dans sa communication du 26 mai, les régions et les États membres à lui communiquer les secteurs et les types d'échanges qu'ils jugent importants pour les régions ultrapériphériques.
Mes services se sont déjà mobilisés pour contribuer à l'avancement de ce chantier d'une grande importance pour l'avenir de nos départements d'outre-mer. Une première rencontre s'est tenue le 12 juillet dernier, qui a associé les représentants du monde économique, des exécutifs locaux et des services de l'État. Elle a permis de fixer le cadre de travail nécessaire à l'identification et au recensement des attentes des départements d'outre-mer en matière de coopération. La méthode de travail, proposée par mes services, suppose la tenue d'ateliers spécifiques dans chacune des grandes régions de l'outre-mer, Caraïbes et Océan indien. Ceux-ci sont programmés pour le mois d'octobre prochain, avec pour objectif d'identifier et décliner les intérêts de nos DOM pour leur meilleure prise en considération dans le cadre des Accords de partenariat. Mais, bien évidemment, le facteur déterminant de la qualité et de l'efficacité de ce travail commun sera en dernière instance l'implication du partenariat local.
2 - Mesdames et Messieurs, la deuxième date d'importance est le 18 juin 2004, où les chefs d'État et de gouvernement européens sont parvenus à un accord sur le texte final du traité établissant une constitution pour l'Europe, qui sera soumis à la ratification des États membres.
Ma position constante a toujours été que l'article 299-2 devait être consolidé au sein du nouveau traité constitutionnel. C'est ainsi qu'en temps utile, dans le cadre des travaux de la Convention sur l'avenir de l'Europe, l'attention du Commissaire Barnier avait été appelée sur la nécessité que le champ de cet article recouvre bien l'ensemble des politiques communautaires, que les quatre départements d'outre-mer français soient explicitement énumérés et que la liste des actes communautaires couverts par le projet de nouvel article inclue les lois, lois-cadres, règlements et décisions européens, pour tenir compte de la nouvelle hiérarchie des normes communautaires.
Cette préoccupation a été prise en compte dans le projet de traité constitutionnel, adopté par les chefs d'État et de Gouvernement à l'issue des travaux de la Conférence intergouvernementale.
En ses articles III-424 et IV-440-2 le projet de traité reprend en le consolidant l'article 299-2 du traité CE actuel. Les quatre départements d'outre-mer français sont ainsi énumérés, le champ d'adaptation possible du traité est étendu à l'ensemble des politiques communautaires, et les modalités de cette adaptation visent bien tous les actes européens susceptibles de produire leurs effets dans les régions ultrapériphériques.
Par ailleurs, à la demande de la France, Mayotte pourra bénéficier des dispositions de l'article IV-440-7, qui permet, sur décision du Conseil à l'unanimité, sans avoir à modifier le traité, de passer un territoire de la liste des Pays et Territoires d'Outre-Mer vers la liste des régions ultrapériphériques et inversement. En effet, une déclaration des hautes parties contractantes, annexée à l'acte final de la Conférence intergouvernementale qui a agréé le traité, reconnaît la vocation de Mayotte à devenir une région ultrapériphérique, dès que la France jugera que les conditions sont réunies.
3 - Je ne saurais mettre un terme à mon intervention sans faire état de mes vives préoccupations concernant le projet de révision des lignes directrices relatives aux aides à finalité régionale communiqué par la Commission aux États membres en avril dernier.
Ce projet est globalement désavantageux pour les régions ultrapériphériques. Mais sa concrétisation serait particulièrement dévastatrice pour l'évolution des économies des départements d'outre-mer français, dans la mesure où ceux-ci subiraient la plus forte diminution des taux d'intensité d'aide de toutes les régions de l'Union du fait du cumul de la baisse générale des taux, hors régions ultrapériphériques, et de la diminution du " bonus RUP " proposé par la communication du 26 mai, par rapport à la situation actuelle.
De telles évolutions viendraient affecter les efforts publics d'aide conduits aussi bien au niveau communautaire, dans le cadre de la politique de la cohésion, que national, notamment avec la mise en place de la loi-programme pour l'outre-mer.
Tout le monde sait que les entreprises des départements d'outre-mer français n'interviennent que de façon marginale dans la concurrence européenne, et sans effet de distorsion sur celle-ci. Au contraire, les aides d'Etat dans nos départements d'outre-mer ont pour objet de favoriser la concurrence, en créant les conditions pour que celle-ci émerge.
En outre, le projet de révision proposé par la Commission serait en contradiction avec l'un des volets importants et innovateurs de la communication de la Commission du 26 mai, qui prévoit une meilleure insertion de ceux-ci dans leurs zones géographiques. Il n'est en effet guère cohérent d'inciter les départements d'outre-mer français à coopérer avec des pays voisins, aux coûts salariaux incomparablement plus bas, tout en restreignant parallèlement le soutien apporté à leurs entreprises, qui est un outil essentiel pour rétablir des conditions de compétitivité régionale faussées.
Il convient donc de réserver aux régions ultrapériphériques une approche spécifique, en particulier quant aux taux d'intensité d'aide, en tenant compte de leur situation socio-économique particulière et de leurs besoins de développement. En ce sens, il importe que la Commission exploite toutes les possibilités offertes par l'article 299-2, conformément aux propositions de l'Espagne, de la France et du Portugal et des régions ultrapériphériques, exprimées dans leur mémorandum commun du 2 juin 2003.
À cet égard, il n'est pas sans intérêt de relever que le nouvel article III-167-3-a du projet de traité constitutionnel, destiné à se substituer à l'article 87-3-a du Traité CE, prévoit l'accès automatique des régions ultrapériphériques au bénéfice du régime ouvert aux régions les plus défavorisées, et ce quel que soit leur niveau de PIB. Le fait que cette demande, qui figurait dans le mémorandum commun du 2 juin 2003, ait été agréée par les vingt-cinq États membres me semble traduire la volonté politique de ceux-ci de voir réservé un traitement spécifique aux régions ultrapériphériques, y compris dans un secteur où la Commission dispose d'un important pouvoir normatif.
Cet épisode me permet de conclure sur une note d'optimisme concernant l'avenir des régions ultrapériphériques au sein de l'Union européenne. Beaucoup d'entre vous nourrissaient certaines inquiétudes devant la perspective d'un élargissement à vingt-cinq et les risques de dilution des régions ultrapériphériques dans ce nouvel ensemble.
Lors de mon intervention à votre Conférence d'octobre dernier, je disais souhaiter que tous les États membres, actuels et futurs, comprennent que l'ultrapériphérie de l'Union est aussi importante que son centre. Je crois que cette perception de l'intérêt pour l'Europe élargie de ne pas se priver de bases avancées dans l'océan Atlantique, les Caraïbes, l'Amérique Latine, l'Océan Indien, dans un monde de plus en plus global, est en train, petit à petit, de progresser. Il ne tient qu'à nous d'accompagner ce mouvement, en expliquant ce que nous sommes, avec beaucoup de pédagogie et un peu d'obstination, et en montrant ce que nous pouvons apporter à l'Europe, avec modestie mais sans complexe.
Je vous remercie de votre attention.
(Source http://www.outre-mer.gouv.fr, le 6 septembre 2004)