Déclaration de M. Jean-Pierre Raffarin, Premier ministre, sur l'instauration d'un plan exceptionnel d'investissement (PEI) pour le développement économique et social de la Corse, Ajaccio le 5 novembre 2004

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Circonstance : Déplacement en Corse le 5 novembre 2004

Texte intégral

Monsieur le président de l'exécutif, monsieur le président de l'Assemblée, messieurs les ministres, mesdames, messieurs les parlementaires, les élus.
Je vous propose dans cette réunion de travail de vous faire-part de mes convictions, de mes projets et, ensuite, ouvrir la parole pour que chacun puisse s'exprimer et me faire-part de ses avis, projets et commentaires.
Je voudrais vous dire combien je suis heureux d'être aujourd'hui à nouveau en Corse pour réaffirmer un message important concernant l'engagement de l'État. Engagement de l'État que je veux exprimer pour vous à l'occasion du retour dans notre pays de la croissance. Vous le savez, nous avons eu une période difficile entre 2002 et 2003 de rupture de croissance. Aujourd'hui, nous revenons dans une situation de croissance plus positive et nous voulons rendre cette croissance fertile en emplois, fertile en efficacité économique et sociale et nous souhaitons que la Corse prenne toute sa place dans cette mobilisation pour une croissance durable et fertile. Mon premier message est celui-ci : comment nous mobiliser pour le développement économique et social ? Je voudrais vous dire aussi que pour moi, le temps du débat institutionnel n'est plus. Il y a eu un débat institutionnel, il y a eu un référendum, les électeurs se sont exprimés, le sujet est pour moi institutionnellement clos. Donc, dans une sorte de triangle isocèle où il y a un État de droit auquel nous sommes tous attachés, celui de la République, une stabilité institutionnelle à laquelle aujourd'hui nous sommes tous attachés aujourd'hui et demain parce que c'est ce qu'a souhaité l'opinion publique, les électeurs qui se sont exprimés, il nous reste cette base du triangle qu'est le développement économique et social, sujet sur lequel je souhaite que nous travaillions avec détermination.
Je suis heureux de pouvoir parler avec vous de développement économique et d'emploi, puisque la collectivité territoriale corse est finalement le lieu le plus avancé en France de la décentralisation. Votre organisation, votre travail, votre capacité aujourd'hui à mener les projets qui sont les vôtres et à vivre le partenariat original que vous avez avec l'État vous conduit à être la structure la plus avancée de décentralisation.
L'État restera évidemment à vos côtés parce que si vous êtes la plus avancée en matière de décentralisation, vous avez aussi une situation pour laquelle la solidarité nationale est une nécessité. Elle s'est exprimée, mes prédécesseurs l'avaient formulée notamment à l'occasion du programme exceptionnel d'investissement, j'entends poursuivre cette voie de la solidarité nationale pour ce programme exceptionnel d'investissement. Je voudrais vous dire que pour l'année 2005, je souhaite que nous misions au niveau national sur les questions majeures de l'emploi dans toutes les régions de France. Nous voulons que cette croissance qui est aujourd'hui de retour, cette croissance pour laquelle nous avons, les uns et les autres, fait un certain nombre d'efforts et d'initiatives, ce qui nous place aujourd'hui à un point au-dessus de la moyenne de la zone euro. Nous avons aujourd'hui en France une capacité à rendre cette croissance plus forte et plus durable.
Pour cela, il nous faut la rendre plus riche en emplois. C'est pour cela que nous sommes attachés à un certain nombre initiatives nationales qui vous concernent comme la création d'entreprises. Je suis heureux de voir qu'en Corse, le niveau de création d'entreprises est très important, à 2 200 entreprises par an dans la période récente, c'est un niveau très important de développement, donc de confiance et de capacité d'initiative des jeunes entrepreneurs notamment. Tout ce qui touche la revalorisation du travail est un objectif de mon gouvernement. Je pense notamment à la revalorisation du SMIC, au pouvoir d'achat la prime pour l'emploi, tout ce que nous devons faire aussi pour valoriser le travail.
Il nous faut développer de nouvelles passerelles pour rendre l'emploi plus facile dans l'entreprise pour les jeunes. C'est un sujet sur lequel nous avons travaillé ce matin. Avec le service public de l'emploi, nous avons un effort important à faire au plan national, mais aussi en Corse pour l'apprentissage. L'apprentissage est le moyen de développer une plus grande qualification avec une meilleure insertion professionnelle, de veiller à ce que les jeunes puissent autant que faire ce peut travailler au pays, travailler dans les entreprises qu'ils peuvent connaître.
Je suis prêt à ce que, dans le cadre du programme national, nous ayons un programme particulier, renforcé, spécifique pour la Corse. Je dois dire que la dynamique de l'emploi en Corse est significative puisque quand je regarde l'année 2003, je vois que l'emploi a progressé de près de 5 % sur l'île. Donc, il y a un certain nombre de résultats qui ont été acquis dans les périodes récentes par le travail qui a été engagé par l'ensemble des partenaires de la société publique et de la société civile. J'ai mobilisé Monsieur le Préfet, les services de l'État, pour qu'avec le plan de cohésion sociale, nous puissions mettre tous les moyens nécessaires pour créer davantage encore d'opportunités et traiter le problème du chômage en Corse, qui est un problème difficile qui concerne l'ensemble de la Nation.
C'est un sujet sur lequel nous devons faire des efforts, notamment en ce qui concerne le chômage des jeunes, c'est un sujet qui doit nous permettre d'obtenir des résultats, notamment grâce aux actions qui sont engagées dans le plan de cohésion sociale.
La Corse doit bénéficier de la solidarité nationale pour faire face au coût de l'insularité et aux différentes difficultés qui peuvent y être liées, je pense notamment à la faiblesse de la densité de la population ou à un certain déficit d'infrastructures. Je sais que vous avez des projets importants, le PEI est là en partie pour ça, je souhaite vous dire que le PEI est une démarche à laquelle je suis très attaché.
C'est une innovation de l'administration, c'est une innovation politique, ça donne de la durée pour les investisseurs, pour ceux qui sont les décideurs pour avoir la capacité de penser le développement à long terme. C'est aussi très important d'avoir ce phasage 2002-2006 avec les priorités qui sont aujourd'hui engagées. J'ai vu ce matin que vous avez un niveau de programmation tout à fait honorable et je vois bien que sur la période, vous allez engager les crédits nécessaires. Dès maintenant, nous devons préparer la deuxième étape du PEI, ce qui se passe après 2006 pour ne pas avoir, à l'issue de la première phase, une rupture avant de redémarrer une seconde phase, mais qu'il y ait une continuité de développement. D'ores et déjà, il est utile que nous puissions travailler sur les grandes priorités du PEI pour la période post-2006. Nous avons prévu des investissements très importants avec 485 millions d'euros pour la première phase, 2 milliards au total, nous pouvons avoir aujourd'hui une réflexion programmatique sur cette période au-delà de 2006 pour développer l'ensemble des projets que vous avez dans les cartons et surtout aider à la finalisation d'un certain nombre de projets qui sont très importants.
Je vois dans le PEI une grande opportunité pour la Corse, notamment pour développer un certain nombre de secteurs, je pense au secteur du BTP, où finalement, avec la commande publique qui va représenter près de 100 millions d'euros par an, il y a là un fort développement qui nous impose un certain nombre d'exigences. Je pense notamment à la qualification, à la valorisation des métiers du bâtiment, car il ne suffit pas d'avoir de la commande, il faut qu'il y ait des salariés dans les entreprises. Et là, les programmes d'accompagnement nous paraissent nécessaires pour développer cette capacité de levier qu'est le PEI pour l'emploi. En vitesse de croisière, le PEI va potentiellement doubler ce chiffre de 100 millions de commande publique, sans doute très vite, dès l'année 2006-2007, on sera à plus de 200 millions d'euros par an. Il est donc essentiel que les entreprises puissent être mobilisées sur ce secteur et que les procédures de l'État, en respectant les règles, puissent permettre aux entreprises d'avoir accès à ces marchés et notamment puissent se positionner, soit comme acteurs directs, soit comme acteurs de sous-traitance. S'il le souhaite, l'État pourra, à la demande des élus, faciliter l'ensemble de l'ingénierie, on a parlé de l'AMO, l'assistance avec les ouvrages, l'ensemble de l'ingénierie nécessaire pour que l'on puisse progresser normalement dans ce dispositif.
A ce jour, 150 millions d'euros, dont 60 % de parts État ont été engagés sur la tranche 2002-2006 et je peux vous dire que d'ores et déjà, nous avons prévu l'estimation qui est faite à ce jour de 38 millions d'euros de crédits de paiement pour 2005, qui étaient nécessaires, je les rajoute pour 2005 de manière à ce que nous puissions être au niveau de la consommation des crédits dont vous avez besoin. Si vous avez une consommation des crédits accélérée, les financements de l'État seront aussi accélérés dans le cadre de l'enveloppe globale naturellement des 485 millions prévus. Mais ce contexte-là vous permet d'avoir la lisibilité de votre action.
Il y a un certain nombre d'autres sujets sur lesquels nous sommes prêts à intervenir à vos côtés et qui font partie de cette mobilisation. Je pense au dossier de la chaîne numérique de FRANCE 3 : l'État est prêt à compenser par un abondement, et non par un redéploiement du volet technologique de l'information et de la communication du PEI, les dépenses que la collectivité territoriale de Corse pourrait être amenée à réaliser sur cette première phase. Je souhaite que ce dispositif soit un dispositif ouvert, transparent, il s'agit là d'une étape importante de communication et d'expression culturelle. Chacun doit pouvoir participer à ce projet qui peut mobiliser de manière ouverte l'ensemble des acteurs de l'île.
Je voudrais vous dire également que l'État tiendra tous ses engagements en ce qui concerne le contrat de plan. Les crédits sont délégués à Monsieur le Préfet pour qu'il ne puisse y avoir aucun écart entre les engagements du contrat de plan et le PEI et que nous ayons un tuilage des financements qui corresponde à la réalisation des différents projets. La formule des contrats de plan est une bonne formule : c'est le moyen que l'État a de montrer ses priorités, mais aussi d'écouter les priorités du territoire, son originalité, sa spécificité, son identité, et de trouver l'équilibre entre les volontés de l'État et les attentes du territoire. C'est pour ça que la logique contractuelle sera poursuivie.
C'est pour ça qu'à la loi de finances rectificative, j'ajoute ces 300 millions d'euros d'autorisations de programmes pour que dans toutes les régions de France, nous puissions tenir les engagements de l'État en ce qui concerne les contrats de plan. Nous verrons à l'issue de cette génération de contrats de plan, comment nous organiserons le dispositif des contrats de plan dans l'avenir. Nous n'en sommes pas encore là. Au Parlement, il y a des réflexions qui sont engagées, mais d'ores et déjà, je pense que la Corse est un laboratoire contractuel parce que votre dispositif qui articule une programmation de longue durée, le PEI, et une programmation plus courte, peut-être le contrat de plan, est une piste intéressante qui pourrait dans l'avenir être développée pour l'ensemble des régions de France.
Un programme de long terme et des adaptations de court terme, chacun sait qu'il y a des projets qui ont un rythme de temps, un rythme court, d'autres qui ont un rythme long. De même, en ce qui concerne les financements, le volet territorial corse du Fonds national d'aménagement du territoire, pour lequel il y avait un retard qui m'avait été signalé par les élus, la délégation a été faite pour les crédits de manière à ce que tout ceci puisse fonctionner sans retard. Nous dégagerons également les moyens nécessaires, une enveloppe complémentaire de 2,2 millions d'euros pour l'action qui sera menée dans ce contexte-là, notamment en ce qui concerne les initiatives dont la collectivité territoriale corse se fait pilote pour tout ce qui est développement du numérique, développement du haut débit, tout ce qui est naturellement la lutte contre la fracture numérique. Nous avons sur ces sujets un programme exceptionnel, là aussi, de coopération, je peux vous dire que ce qui a été jusqu'à maintenant annoncé, je pense notamment aux 23 millions qui étaient annoncés, seront mis en place comme crédits d'État de droit commun pour ce projet.
Enfin, la Corse sera accompagnée par l'ensemble de l'organisation nationale pour obtenir les moyens nécessaires auprès de l'Union européenne dans le cadre de la politique, de la nouvelle politique régionale européenne. Nous souhaitons que la politique européenne puisse tenir compte, en matière de politique régionale, de l'insularité, de la périphéricité et d'un certain nombre d'éléments sur lesquels il faut que la cohésion territoriale de l'Europe intègre les handicaps naturels pour pouvoir venir soutenir les territoires qui sont mobilisés. Sur le plan économique, en matière agricole, nous avons un travail à poursuivre.
Nous avons, je crois, bien travaillé sur le surendettement, pour surmonter l'impasse financière dans laquelle étaient un grand nombre d'interlocuteurs agriculteurs. Mais, il nous faut aussi, comme l'a dit Hervé GAYMARD, avec Nicolas SARKOZY récemment, lancer un plan de renouveau de l'agriculture corse. C'est un point sur lequel nous sommes mobilisés. Sur les difficultés de charges, je pense à la dette bancaire, on a lancé une concertation qui a réussi, je crois que c'est une bonne méthode de travail qu'il faut poursuivre. De même, il faut faire en sorte que ce que nous avons fait sur les dettes bancaires puisse développer sur les dettes sociales, donc disposer d'une organisation, d'une procédure qui aide les agriculteurs à alléger leurs charges, moyen pour eux d'améliorer leurs comptes d'exploitation compte tenu de l'évolution des prix.
Je voudrais dire aussi qu'il nous faut, avec les agriculteurs, faire en sorte que nous puissions bien préparer cette échéance du 1er janvier 2006, ce qui est demain, c'est-à-dire à la fois le nouveau pacte et son organisation, mais aussi la loi nationale que nous voterons au même moment pour corriger un certain nombre de disparités entre la politique européenne et la politique nationale. La politique agricole en Corse doit pouvoir bénéficier d'un certain nombre de décisions nationales qui viendront en complément des décisions européennes. J'ai eu ce matin une rencontre avec des présidents d'associations de maires, je suis très attaché à ce que l'on puisse aider la ruralité, notamment les petites communes.
Et le classement de 22 communes en zone de handicap spécifique témoigne de notre engagement évidemment dans cette direction de l'aménagement du territoire en faveur notamment d'une agriculture, élément majeur de la ruralité. Enfin, dans le domaine très important de la reconstitution des titres de propriété, j'ai pris connaissance, je voudrais vous dire combien j'ai apprécié les travaux de la mission HUREL, j'ai trouvé là une équipe qui avait fait un travail pertinent à la fois avec le sens de l'intérêt général et en même temps des capacités d'écoute avancées. J'estime que la proposition d'une agence du patrimoine foncier corse, par exemple, sous forme de GIP, telle que proposé, est une idée novatrice. Elle pourrait associer les parties intéressées de Corse, je pense évidemment à l'administration fiscale, aux collectivités territoriales, aux professions notariales. Ce qui permettrait à l'agence d'être un outil efficace pour travailler dans la durée.
Je sais que les prochaines réunions de travail doivent permettre d'affiner le projet, mais il y a là une conclusion de la mission HUREL qui, du point de vue de l'État, est une conclusion positive si elle correspond aux aspirations des élus que vous êtes. Voilà pour ce qui est de cette partie économique de notre partenariat dont le PEI est un élément essentiel, dont le DOCUP et le contrat de plan sont deux autres éléments très importants. Cette vocation que vous avez à innover en matière de partenariat doit être poursuivie, c'est pour ça que j'ai été très heureux ce matin d'assister à l'installation de ce comité de pilotage du PEI avec les maîtres d'ouvrage principaux de l'île.
Je serai prêt à ce que nous ayons régulièrement, avec l'État ici en Corse, mais aussi au niveau national, un suivi, c'est, je crois, très important de mobiliser les crédits parce que derrière les crédits, il y a les projets. Je voudrais vous dire un mot aussi sur la politique de sécurité, car tout le développement économique évidemment est aussi fonction de la politique de sécurité et les Corses ont droit à l'application de la loi comme tous les citoyens, comme sur le reste de l'ensemble de notre territoire national. C'est pour ça que la délinquance de droit commun, la violence dite politique ou les dérives économiques sont condamnables ici comme ailleurs, je le dis avec force.
Il est très important de pouvoir assumer l'État de droit qui est celui de la République. Je rends hommage au travail réalisé par Dominique de VILLEPIN dans cette direction pour être à la tête des services de l'État et faire en sorte que les services de l'État se sentent mobilisés. J'ai rencontré tout à l'heure les gendarmes et leurs familles ainsi que d'autres fonctionnaires qui avaient été blessés dans leur sécurité et qui montraient leurs inquiétudes, mais aussi affirmaient leur courage et leur sens du devoir. J'ai tenu à leur rendre hommage. Je tiens à affirmer la fermeté sereine qui doit être celle de la République et c'est celle que démontre le gouvernement par l'engagement, et du ministère de l'Intérieur, et de l'autorité judiciaire. J'ai également été, comme beaucoup d'autres, particulièrement frappé par la recrudescence des actes racistes et xénophobes que je tiens ici à condamner avec la plus grande fermeté et je salue tous ceux, parmi les responsables corses, qui ont dénoncé ces actes racistes ou xénophobes. Les valeurs de la République doivent être défendues, et le racisme est une atteinte même à notre identité républicaine.
C'est pour cela que, là encore, les forces de l'autorité seront mobilisées pour répondre aux actes odieux qui mettent en danger la cohésion nationale, la cohésion nationale dans tout le pays, y compris en Corse. Il n'est pas tolérable, en effet, que près de la moitié des actes racistes et xénophobes qui sont enregistrés en France par le ministère de l'Intérieur concerne l'île, d'autant que ces actes sont souvent, ici, d'une extrême violence. Je vous confirme que les forces de l'autorité républicaine ont été mobilisées pour répondre à ces actes odieux qui mettent en danger la cohésion sociale de la Corse. Quant à ceux qui menacent des élus, porteurs de la seule légitimité démocratique qu'est le suffrage universel, je veux vous dire qu'ils seront poursuivis et qu'ils seront condamnés. Et permettez-moi d'adresser un message particulier de solidarité à monsieur Émile ZUCCARELLI, qui vient d'être frappé dans ses biens par un de ces actes inexcusables et qui réagit avec ce que j'ai appelé cette "fermeté sereine".
En résumé, je voudrais vous dire qu'avec cet État de droit, avec cette stabilité institutionnelle aujourd'hui et cette volonté qui est la nôtre de développer la Corse en participant à un partenariat renforcé sur le plan économique et social, je dis à tous ceux qui sont aujourd'hui en Corse et je dis à tous ceux qui aiment la Corse qu'il ne faut pas avoir peur. Le développement est là, il y a des résultats importants et il faut se mobiliser pour le développement économique et social de la Corse. Nous y sommes prêts, nous connaissons les atouts qui sont les vôtres, les atouts culturels, l'atout de votre langue, l'atout de votre capacité historique à la mobilisation et à l'identité, je fais partie de ceux qui n'ont pas peur de l'identité. C'est une force considérable d'avoir au fond du cur quelque chose qui fait battre le cur, c'est très important, mais l'identité non pas comme un repli. Mon identité m'ouvre à l'autre.
C'est pour ça que l'identité est très importante. Une identité d'ouverture, une identité qui permet de concilier la tradition, à laquelle on doit être attaché, et la modernité, à laquelle il nous faut faire face et qui est la créativité d'un territoire et d'un peuple. Je crois vraiment qu'aujourd'hui, on regarde l'avenir de la Corse avec confiance et, je dirais, avec courage, le courage de l'optimisme, pas le courage de la posture qui consiste très souvent à se mettre en situation artificielle de courage où on peut se dire qu'au fond, par une attitude d'observation distante de spectateur non-engagé, on pourrait s'affirmer courageux. Non. Le courage, c'est l'action. Le courage, c'est l'optimisme. Le courage, c'est l'avenir. C'est ça dont la Corse doit faire preuve et pour lequel la majorité des élus ici rassemblés, je le sais, vous êtes de cet avis, c'est ce qui rassemble de très nombreux Corses dans cette volonté de faire face à l'avenir en respectant l'identité, mais en ayant la volonté d'ouverture, notamment sur ce grand espace euro-méditerranéen dans lequel la Corse a une place particulière.
Je sais bien que la Corse, comme toutes les régions de France, a ses spécificités, a ses complexités, et c'est ça, la France, c'est cette capacité à avoir un pays qui, à la fois, aime les consensus et aussi quelquefois valorise les antagonismes, c'est souvent ça la France. J'y suis confronté quotidiennement. Mais la France, elle doit être aimée pour ce qu'elle est, il faut l'aimer avec ses complexités, avec ses diversités, et je dirais ici, dans cette belle région qu'est la Corse, il faut aussi l'aimer pour ses diversités. René CHAR avait une belle phrase, il disait : "Aimer, c'est vouloir que les choses soient ce qu'elles sont." Eh bien, aimer la Corse, c'est vouloir aimer la Corse telle qu'elle est ! Je vous remercie.
(Source http://www.premier-ministre.gouv.fr, le 10 novembre 2004)