Texte intégral
Mesdames, Messieurs les Ministres
Mesdames et Messieurs les Présidents,
Mesdames et Messieurs,
Vous venez de débattre sur le devenir de l'agriculture française et européenne à l'aube du XXIe siècle.
Permettez-moi de vous dire en quelques mots ma vision de la politique agricole européenne.
Faut-il rappeler au préalable, l'importance du développement agricole dans les institutions européennes des quarante dernières années. La France a bénéficié de la PAC dans des proportions qui peuvent nourrir des discussions, mais un constat positif s'impose.
Et c'est pour maintenir ces acquis, dans le prolongement des réformes adoptées en 1992, que le compromis du Luxembourg de juin 2003 a été adopté à juste raison.
Aujourd'hui, face aux inquiétudes des producteurs, devant les hésitations sur la réforme, il nous faut, dans la mise en oeuvre de ce nouveau dispositif, inventer une nouvelle politique agricole, ma volonté sera donc de mettre en oeuvre une PAC à visage humain.
Je serai attentif non seulement aux résultats, mais aussi aux méthodes de contrôle notamment, en veillant particulièrement à lutter contre la complexité, et cela avec la volonté de reconnaître qu'au centre du dispositif se trouve l'agriculteur qui doit se reconnaître et être reconnu à sa juste place, et cette reconnaissance pourrait prendre la forme d'une charte fixant les règles et surtout les faisant connaître.
Pour atteindre cet objectif et devant l'inadaptation des réponses apportées à ce jour par la Commission européenne, nous devons apporter des idées, des propositions nouvelles, comme par exemple dans la gestion des crises, et ouvrir de nouvelles pistes pour l'agriculture de demain.
Ces pistes, je vais les tracer en m'efforçant de veiller à maintenir un système accessible et performant.
Je pense que la grande spécificité des activités agricoles justifie pleinement l'intervention publique. Outre les questions évidentes d'autosuffisance alimentaire, les impératifs de santé publique, d'aménagement du territoire, de développement rural, sont autant de raisons pour la France et l'Union européenne de mener une politique agricole à la fois active et raisonnée.
C'est cette double vocation : nourrir l'humanité et occuper et entretenir l'espace, qui justifie à mon sens que l'on ne puisse s'en remettre uniquement au fonctionnement du marché, dont les limites sont bien connues.
Dans cette mesure, la PAC reste nécessaire, mais elle doit être adaptée aux besoins et aux contraintes du temps présent. L'adoption du découplage partiel et le renforcement des politiques de développement rural, mesures prises pour rendre notre agriculture plus efficiente, en sont les premiers moyens. Leurs bonnes applications sera une de mes priorités.
Certains pourraient voir là le signe que la réforme change radicalement la donne, c'est-à-dire rende impossible le maintien d'un modèle agricole dont l'Europe tire argument dans les négociations internationales à l'OMC. Et bien je pense qu'il n'en est rien et que le découplage, notamment, nous permettra au contraire de sécuriser les aspects les plus positifs de la PAC dans la décennie à venir, même si, indiscutablement ses conditions de fonctionnement et ses objectifs ont évolué.
Oui nous voulons maintenir notre modèle sur le plan interne et nous sommes en mesure de le faire parce que nous avons évité la réforme radicale du découplage total que souhaitait la Commission européenne. De fait, l'adaptation de l'offre à la demande se trouvera plus que par le passé au coeur de la démarche de production. Mais le découplage partiel que nous avons obtenu nous permettra de continuer à avoir des leviers sur l'orientation de cette production. Ma démarche sera connue et lisible. Par exemple, les agriculteurs vont recevoir dans les tout prochains jours un document détaillé sur la nouvelle politique agricole portant sur la conditionnalité 2005. Je tiens à ce que l'application qui en sera faite par mes services en 2005, dans le respect des engagements pris à Bruxelles soit pédagogique, pragmatique et attentive à la réalité du terrain.
C'est d'ailleurs l'une des raisons pour lesquelles nous avions craint un découplage total, qui nous semblait comporter des risques significatifs de ce point de vue. Le découplage que nous avons adopté est, vous le remarquerez, d'autant moins fort que les secteurs de production sont fragiles. Là où nous avons pu accepter un taux de 25 % de découplage dans les grandes cultures, nous avons maintenu un couplage beaucoup plus fort (50 % en moyenne) pour ce qui est du secteur animal, avec, dans certains cas, le maintien d'un couplage total (cas de la prime à la vache allaitante, par exemple).
Une autre priorité importante est de compléter le dispositif par un volet dont la France avait demandé l'ajout dans l'accord de Luxembourg : la gestion de crise. Il est en effet indispensable qu'un filet de sécurité soit ajouté au dispositif qui est en cours de mise en oeuvre. Cette nécessité répond à la très grande imprévisibilité de l'activité agricole, et ce chaînon manquant devra être réparé.
Je suis donc très mobilisé pour qu'un système de gestion de crise soit adopté l'an prochain et nous continuons à faire pression sur la Commission pour qu'elle fasse des propositions précises sur ce volet dès le début de l'année 2005. Ces mécanismes devront bien entendu être encadrés et limités, et devront permettre de responsabiliser les agriculteurs eux-mêmes. A cet égard, nous travaillons, en parallèle, sur le complément privé et donc volontaire d'un tel dispositif, en étudiant les moyens de développer un système d'assurance récolte.
Tous les pays modernes doivent faire des réformes pour rester performants, je veux que la France soit gagnante dans cette compétition notamment dans la défense de ce modèle dans les enceintes internationales. Je me bornerai à constater que la réforme, de l'OMC, nous donne des marges de manoeuvre non négligeables dans la perspective de la conférence ministérielle de Hong-Kong, l'année prochaine. C'est en effet alors que les membres de l'organisation devront s'entendre sur les modalités (les chiffres, en clair) sur les divers volets de la négociation contenus dans l'accord cadre du 1er août dernier, qui n'énonce, vous le savez, que des grands principes.
La réforme de la PAC, améliore la position de négociation de l'Europe. Elle nous permettra de préserver notre modèle agricole, à l'horizon de dix ans. De surcroît la pression qui était portée sur nous par les pays en développement se reporte sur les États-Unis, qui n'ont pas réformé leur politique agricole et dont les moyens se sont même accrus au cours des dernières années.
Pour ce qui est de la " vocation exportatrice " de notre modèle agricole européen, au moment où se profile à l'OMC l'élimination progressive des restitutions à l'exportation, certains pensent qu'il faut voir dans la réforme de la PAC un tournant. Certains estiment même qu'il faudrait abandonner toute idée de produire et d'exporter des produits agricoles de base. Aux termes d'une nouvelle division internationale du travail, les pays en développement se consacreraient ainsi à la production de produits de base et nous, pays développés, à celle de produits transformés. Je crois qu'une telle vision est excessive et même peu souhaitable pour l'humanité.
Le marché intérieur représente 72 % de nos débouchés à l'export, notre marché doit rester le monde et il serait absurde de se recroqueviller. Nous prenons une part active dans les échanges internationaux des produits de base comme des produits transformés et nous continuerons à le faire.
Je ne crois pas qu'il faille opposer produits de base et produits transformés et sacrifier une catégorie à l'autre. Il y a naturellement un continuum entre ces activités complémentaires. Nous encourageons bien entendu, compte tenu de nos savoir-faire et de la qualité de notre alimentation en Europe, la production des produits transformés. Il s'agit d'un réservoir de valeur ajoutée qui permettra à nos entreprises agroalimentaires de dégager les marges dont elles ont besoin pour financer leur recherche et leur développement, qu'il soit économique ou commercial. Et nous savons combien grands sont les besoins de modernisation de nos industries agroalimentaires.
C'est précisément l'objet du lancement du plan national de développement des industries agro-alimentaires (PNDIA) auquel Nicolas FORISSIER consacre ses efforts. La faculté que nous avons en effet à exporter ces produits transformés est un élément essentiel du maintien d'une économie rurale vivante : c'est tout l'enjeu que représente d'ailleurs pour nous, Européens et Français en particulier, la question d'une reconnaissance de nos signes de qualité dans les discussions de l'OMC.
Quant à l'idée de laisser les pays en développement répondre à la demande mondiale de produits de base, je crois que le simple énoncé de la question suggère la sous-estimation de l'immensité des besoins alimentaires du monde d'aujourd'hui, sans parler des perspectives d'évolution de la population mondiale.
J'ajoute que par son poids économique le secteur agricole et agroalimentaire français et européen ne peut pas être négligé dans la stratégie d'amélioration de sa compétitivité que l'Union européenne a lancée avec l'Agenda de Lisbonne. A y bien réfléchir, même si la compétitivité n'est pas son objectif immédiat ou prioritaire, la réforme de la PAC pourrait bien être un atout supplémentaire pour l'Europe et notre pays.
Enfin, parmi les autres pistes qui doivent être explorées, pour que l'agriculture reste économiquement forte et écologiquement responsable, le dossier biocarburant est le plus emblématique mais il n'est pas le seul. D'autres productions se substituant au carbone fossile devront être promues. Ces nouveaux débouchés permettront de donner à la France, non seulement de nouveaux débouchés, la possibilité de maintenir sa place en tête dans ce combat.
Nos efforts, avec Nicolas FORISSIER, ont pour but d'accroître la compétitivité de ce secteur essentiel de notre économie, essentiel par le nombre des entreprises (plus de 10.000, souvent de petite taille) et par le poids du chiffre d'affaires (15 % de l'ensemble de l'industrie française, soit près de 140 milliards d'euros). Il s'agit de surcroît, ne l'oublions pas, d'un secteur créateur net d'emplois (+4 % par an depuis 10 ans). Enfin, même si les trois quarts (72 %) de nos exportations sont destinées au marché européen, il faut souligner la très forte contribution de ce secteur à la balance commerciale de notre pays (8.5 milliards d'euros en 2002, soit 12 % de l'excédent total).
Dernier élément et non des moindres : aurons-nous encore les moyens de mettre en oeuvre la politique ambitieuse que nous voulons continuer de mener en faveur de l'agriculture européenne ? A la veille de la renégociation l'an prochain des lignes directrices agricoles, je veux rassurer certains d'entre vous, peut-être, en disant que le budget de la PAC est "sécurisé".
Pour autant, les discussions plus globales sur le budget 2007-2013 de l'Union européenne sont en cours et ce n'est qu'à la fin de l'année 2005 ou plus probablement au début de l'année 2006 que nous devrons fixer définitivement les montants propres à chaque rubrique. Néanmoins, comme vous le savez, le Conseil européen des chefs d'État et de Gouvernement qui s'est tenu à Bruxelles en octobre 2002 a fixé les plafonds budgétaires pour le financement des dépenses du premier pilier de la PAC jusqu'en 2013. Nous n'avons donc pas de craintes à avoir à cet égard puisque la route est tracée, si je puis dire, même si des arbitrages devront être faits au cours des débats.
La situation de l'Europe, notamment avec l'élargissement à 25 membres et bientôt à 28, doit être considérée comme une opportunité, malgré les niveaux disparates constatés et les intérêts divergents exprimés pour que l'agriculture française affirme sa position spécifique dans l'ensemble européen.
C'est un des points que j'ai abordé avec mon homologue allemand Mme Renaté KÜNAST que j'ai rencontrée avant hier. Je compte également l'évoquer avec le ministre espagnol de l'agriculture la semaine prochaine, avant de travailler prochainement à Bruxelles avec les Commissaires concernés par les questions agricoles et naturellement le président de la Commission.
Je mesure que chacune de ces pistes mérite de plus longs développements. Les résultats des travaux qui seront menés à ce titre, je serai très heureux de pouvoir prochainement vous les présenter.
Je vous remercie.
(Source http://www.agriculture.gouv.fr, le 9 décembre 2004)
Mesdames et Messieurs les Présidents,
Mesdames et Messieurs,
Vous venez de débattre sur le devenir de l'agriculture française et européenne à l'aube du XXIe siècle.
Permettez-moi de vous dire en quelques mots ma vision de la politique agricole européenne.
Faut-il rappeler au préalable, l'importance du développement agricole dans les institutions européennes des quarante dernières années. La France a bénéficié de la PAC dans des proportions qui peuvent nourrir des discussions, mais un constat positif s'impose.
Et c'est pour maintenir ces acquis, dans le prolongement des réformes adoptées en 1992, que le compromis du Luxembourg de juin 2003 a été adopté à juste raison.
Aujourd'hui, face aux inquiétudes des producteurs, devant les hésitations sur la réforme, il nous faut, dans la mise en oeuvre de ce nouveau dispositif, inventer une nouvelle politique agricole, ma volonté sera donc de mettre en oeuvre une PAC à visage humain.
Je serai attentif non seulement aux résultats, mais aussi aux méthodes de contrôle notamment, en veillant particulièrement à lutter contre la complexité, et cela avec la volonté de reconnaître qu'au centre du dispositif se trouve l'agriculteur qui doit se reconnaître et être reconnu à sa juste place, et cette reconnaissance pourrait prendre la forme d'une charte fixant les règles et surtout les faisant connaître.
Pour atteindre cet objectif et devant l'inadaptation des réponses apportées à ce jour par la Commission européenne, nous devons apporter des idées, des propositions nouvelles, comme par exemple dans la gestion des crises, et ouvrir de nouvelles pistes pour l'agriculture de demain.
Ces pistes, je vais les tracer en m'efforçant de veiller à maintenir un système accessible et performant.
Je pense que la grande spécificité des activités agricoles justifie pleinement l'intervention publique. Outre les questions évidentes d'autosuffisance alimentaire, les impératifs de santé publique, d'aménagement du territoire, de développement rural, sont autant de raisons pour la France et l'Union européenne de mener une politique agricole à la fois active et raisonnée.
C'est cette double vocation : nourrir l'humanité et occuper et entretenir l'espace, qui justifie à mon sens que l'on ne puisse s'en remettre uniquement au fonctionnement du marché, dont les limites sont bien connues.
Dans cette mesure, la PAC reste nécessaire, mais elle doit être adaptée aux besoins et aux contraintes du temps présent. L'adoption du découplage partiel et le renforcement des politiques de développement rural, mesures prises pour rendre notre agriculture plus efficiente, en sont les premiers moyens. Leurs bonnes applications sera une de mes priorités.
Certains pourraient voir là le signe que la réforme change radicalement la donne, c'est-à-dire rende impossible le maintien d'un modèle agricole dont l'Europe tire argument dans les négociations internationales à l'OMC. Et bien je pense qu'il n'en est rien et que le découplage, notamment, nous permettra au contraire de sécuriser les aspects les plus positifs de la PAC dans la décennie à venir, même si, indiscutablement ses conditions de fonctionnement et ses objectifs ont évolué.
Oui nous voulons maintenir notre modèle sur le plan interne et nous sommes en mesure de le faire parce que nous avons évité la réforme radicale du découplage total que souhaitait la Commission européenne. De fait, l'adaptation de l'offre à la demande se trouvera plus que par le passé au coeur de la démarche de production. Mais le découplage partiel que nous avons obtenu nous permettra de continuer à avoir des leviers sur l'orientation de cette production. Ma démarche sera connue et lisible. Par exemple, les agriculteurs vont recevoir dans les tout prochains jours un document détaillé sur la nouvelle politique agricole portant sur la conditionnalité 2005. Je tiens à ce que l'application qui en sera faite par mes services en 2005, dans le respect des engagements pris à Bruxelles soit pédagogique, pragmatique et attentive à la réalité du terrain.
C'est d'ailleurs l'une des raisons pour lesquelles nous avions craint un découplage total, qui nous semblait comporter des risques significatifs de ce point de vue. Le découplage que nous avons adopté est, vous le remarquerez, d'autant moins fort que les secteurs de production sont fragiles. Là où nous avons pu accepter un taux de 25 % de découplage dans les grandes cultures, nous avons maintenu un couplage beaucoup plus fort (50 % en moyenne) pour ce qui est du secteur animal, avec, dans certains cas, le maintien d'un couplage total (cas de la prime à la vache allaitante, par exemple).
Une autre priorité importante est de compléter le dispositif par un volet dont la France avait demandé l'ajout dans l'accord de Luxembourg : la gestion de crise. Il est en effet indispensable qu'un filet de sécurité soit ajouté au dispositif qui est en cours de mise en oeuvre. Cette nécessité répond à la très grande imprévisibilité de l'activité agricole, et ce chaînon manquant devra être réparé.
Je suis donc très mobilisé pour qu'un système de gestion de crise soit adopté l'an prochain et nous continuons à faire pression sur la Commission pour qu'elle fasse des propositions précises sur ce volet dès le début de l'année 2005. Ces mécanismes devront bien entendu être encadrés et limités, et devront permettre de responsabiliser les agriculteurs eux-mêmes. A cet égard, nous travaillons, en parallèle, sur le complément privé et donc volontaire d'un tel dispositif, en étudiant les moyens de développer un système d'assurance récolte.
Tous les pays modernes doivent faire des réformes pour rester performants, je veux que la France soit gagnante dans cette compétition notamment dans la défense de ce modèle dans les enceintes internationales. Je me bornerai à constater que la réforme, de l'OMC, nous donne des marges de manoeuvre non négligeables dans la perspective de la conférence ministérielle de Hong-Kong, l'année prochaine. C'est en effet alors que les membres de l'organisation devront s'entendre sur les modalités (les chiffres, en clair) sur les divers volets de la négociation contenus dans l'accord cadre du 1er août dernier, qui n'énonce, vous le savez, que des grands principes.
La réforme de la PAC, améliore la position de négociation de l'Europe. Elle nous permettra de préserver notre modèle agricole, à l'horizon de dix ans. De surcroît la pression qui était portée sur nous par les pays en développement se reporte sur les États-Unis, qui n'ont pas réformé leur politique agricole et dont les moyens se sont même accrus au cours des dernières années.
Pour ce qui est de la " vocation exportatrice " de notre modèle agricole européen, au moment où se profile à l'OMC l'élimination progressive des restitutions à l'exportation, certains pensent qu'il faut voir dans la réforme de la PAC un tournant. Certains estiment même qu'il faudrait abandonner toute idée de produire et d'exporter des produits agricoles de base. Aux termes d'une nouvelle division internationale du travail, les pays en développement se consacreraient ainsi à la production de produits de base et nous, pays développés, à celle de produits transformés. Je crois qu'une telle vision est excessive et même peu souhaitable pour l'humanité.
Le marché intérieur représente 72 % de nos débouchés à l'export, notre marché doit rester le monde et il serait absurde de se recroqueviller. Nous prenons une part active dans les échanges internationaux des produits de base comme des produits transformés et nous continuerons à le faire.
Je ne crois pas qu'il faille opposer produits de base et produits transformés et sacrifier une catégorie à l'autre. Il y a naturellement un continuum entre ces activités complémentaires. Nous encourageons bien entendu, compte tenu de nos savoir-faire et de la qualité de notre alimentation en Europe, la production des produits transformés. Il s'agit d'un réservoir de valeur ajoutée qui permettra à nos entreprises agroalimentaires de dégager les marges dont elles ont besoin pour financer leur recherche et leur développement, qu'il soit économique ou commercial. Et nous savons combien grands sont les besoins de modernisation de nos industries agroalimentaires.
C'est précisément l'objet du lancement du plan national de développement des industries agro-alimentaires (PNDIA) auquel Nicolas FORISSIER consacre ses efforts. La faculté que nous avons en effet à exporter ces produits transformés est un élément essentiel du maintien d'une économie rurale vivante : c'est tout l'enjeu que représente d'ailleurs pour nous, Européens et Français en particulier, la question d'une reconnaissance de nos signes de qualité dans les discussions de l'OMC.
Quant à l'idée de laisser les pays en développement répondre à la demande mondiale de produits de base, je crois que le simple énoncé de la question suggère la sous-estimation de l'immensité des besoins alimentaires du monde d'aujourd'hui, sans parler des perspectives d'évolution de la population mondiale.
J'ajoute que par son poids économique le secteur agricole et agroalimentaire français et européen ne peut pas être négligé dans la stratégie d'amélioration de sa compétitivité que l'Union européenne a lancée avec l'Agenda de Lisbonne. A y bien réfléchir, même si la compétitivité n'est pas son objectif immédiat ou prioritaire, la réforme de la PAC pourrait bien être un atout supplémentaire pour l'Europe et notre pays.
Enfin, parmi les autres pistes qui doivent être explorées, pour que l'agriculture reste économiquement forte et écologiquement responsable, le dossier biocarburant est le plus emblématique mais il n'est pas le seul. D'autres productions se substituant au carbone fossile devront être promues. Ces nouveaux débouchés permettront de donner à la France, non seulement de nouveaux débouchés, la possibilité de maintenir sa place en tête dans ce combat.
Nos efforts, avec Nicolas FORISSIER, ont pour but d'accroître la compétitivité de ce secteur essentiel de notre économie, essentiel par le nombre des entreprises (plus de 10.000, souvent de petite taille) et par le poids du chiffre d'affaires (15 % de l'ensemble de l'industrie française, soit près de 140 milliards d'euros). Il s'agit de surcroît, ne l'oublions pas, d'un secteur créateur net d'emplois (+4 % par an depuis 10 ans). Enfin, même si les trois quarts (72 %) de nos exportations sont destinées au marché européen, il faut souligner la très forte contribution de ce secteur à la balance commerciale de notre pays (8.5 milliards d'euros en 2002, soit 12 % de l'excédent total).
Dernier élément et non des moindres : aurons-nous encore les moyens de mettre en oeuvre la politique ambitieuse que nous voulons continuer de mener en faveur de l'agriculture européenne ? A la veille de la renégociation l'an prochain des lignes directrices agricoles, je veux rassurer certains d'entre vous, peut-être, en disant que le budget de la PAC est "sécurisé".
Pour autant, les discussions plus globales sur le budget 2007-2013 de l'Union européenne sont en cours et ce n'est qu'à la fin de l'année 2005 ou plus probablement au début de l'année 2006 que nous devrons fixer définitivement les montants propres à chaque rubrique. Néanmoins, comme vous le savez, le Conseil européen des chefs d'État et de Gouvernement qui s'est tenu à Bruxelles en octobre 2002 a fixé les plafonds budgétaires pour le financement des dépenses du premier pilier de la PAC jusqu'en 2013. Nous n'avons donc pas de craintes à avoir à cet égard puisque la route est tracée, si je puis dire, même si des arbitrages devront être faits au cours des débats.
La situation de l'Europe, notamment avec l'élargissement à 25 membres et bientôt à 28, doit être considérée comme une opportunité, malgré les niveaux disparates constatés et les intérêts divergents exprimés pour que l'agriculture française affirme sa position spécifique dans l'ensemble européen.
C'est un des points que j'ai abordé avec mon homologue allemand Mme Renaté KÜNAST que j'ai rencontrée avant hier. Je compte également l'évoquer avec le ministre espagnol de l'agriculture la semaine prochaine, avant de travailler prochainement à Bruxelles avec les Commissaires concernés par les questions agricoles et naturellement le président de la Commission.
Je mesure que chacune de ces pistes mérite de plus longs développements. Les résultats des travaux qui seront menés à ce titre, je serai très heureux de pouvoir prochainement vous les présenter.
Je vous remercie.
(Source http://www.agriculture.gouv.fr, le 9 décembre 2004)