Déclaration de M. Marc-Philippe Daubresse, ministre délégué au logement et à la ville, sur la politique du logement, notamment les mesures en direction du parc immobilier privé, la délégation de la mise en œuvre des aides au logement aux collectivités territoriales et l'action des associations Habitat et Développement, Paris le 25 novembre 2004.

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Circonstance : 53ème assemblée générale de la Fédération Nationale Habitat et Développement, Paris le 25 novembre 2004

Texte intégral

Je me félicite de pouvoir clôturer vos travaux qui ont porté sur vos métiers du développement de l'habitat dans les territoires ruraux, sur la décentralisation et les politiques de l'habitat.
Vous le savez, le logement est une priorité forte du gouvernement. La mobilisation de tous les acteurs est nécessaire. Vous êtes des acteurs importants dans vos territoires d'intervention, en particulier pour le parc privé : conduite d'OPAH, maîtrise d'oeuvre, gestion locative, développement des territoires.
Un nouveau contexte d'intervention : un plan de cohésion sociale qui comporte un volet volontariste sur le logement ; la loi libertés et responsabilités qui modifie l'organisation des responsabilités.
Un mot sur la méthode de travail avant de présenter ce nouveau contexte. J'avais annoncé au printemps dernier une concertation avec les acteurs. Individuellement en recevant chacun d'entre eux pour entendre les difficultés qu'il rencontre et ses propositions. Collectivement dans le cadre du Conseil National de l'Habitat.
J'ai rencontré régulièrement ce Conseil, et ai débattu hier avec lui des axes de la future loi Habitat pour tous. Des assises nationales du logement se sont tenues sous son égide le 1er juillet dernier. Elles ont permis, en dépassant les clivages habituels, de partager un diagnostic sur la crise du logement et ses causes principales ; et d'identifier des pistes de solutions. De nouvelles assises seront organisées l'été prochain. Nous allons voir avec le CNH les sujets auxquels elles pourraient être consacrées, sachant qu'elles doivent être l'occasion de faire le point sur la situation du logement et l'impact des politiques conduites.
En outre, comme vous l'avez demandé avec d'autres organisations du monde rural, le CNH lance un groupe de travail " Habitat et Territoires " pour traiter de vos préoccupations. Votre délégué général, Michel PELENC, a accepté d'en être le rapporteur. Un certain nombre de questions, qui sont soulevées dans vos résolutions et demandent réflexion et concertation, seront à inscrire au programme de travail de ce groupe. 
Face aux risques d'implosion sociale, le gouvernement a fait le choix de placer la cohésion sociale comme un axe majeur de sa politique. La réponse du Plan de cohésion sociale : agir en même temps, sur les leviers, facteurs de la fracture sociale, que sont l'emploi, l'égalité des chances et le logement, avec des moyens exceptionnels sur cinq ans.
Nous assistons actuellement à une crise paradoxale du logement : on construit à un rythme élevé, mais il existe une forte demande insatisfaite, en particulier pour les ménages modestes. On a construit de manière très insuffisante depuis dix ans et il faut rattraper le retard accumulé. Les prix montent dans toutes les grandes agglomérations, le marché se fige, les populations modestes n'arrivent plus à se loger dans les quartiers anciens des villes, l'accession à la propriété est de plus en plus difficile.
La réponse du Plan de cohésion sociale est de doubler la production, autant dans le secteur privé que dans le secteur public.
- Pour les logements publics, passer de 50 à 100 000 par an hors démolition reconstruction
- Pour les logements privés, doubler le nombre de logements privés conventionnés, faire passer de 20 à 40 000 le nombre de logements vacants privés remis sur le marché
- Enfin, plus que doubler le nombre de primo - accédants aidés, en passant de 90 000 à 240 000 par an. (un PTZ amélioré, plus familial, plus social, ouvert dans l'ancien, et en aucun cas une disparition du PTZ comme certains l'avaient annoncé)
Je confirme également l'engagement financier fort de l'Etat à travers la loi de programmation qui est en cours d'examen au Parlement. Le budget 2005 met effectivement en œuvre ce qui est inscrit dans le projet de loi de programmation. Une augmentation de 8,3% globalement du budget logement par rapport à 2004, à périmètre constant.
Le parc locatif privé est un élément essentiel du volet logement du plan de cohésion sociale, au même titre que le parc public. Il joue un rôle social important et c'est tout particulièrement le cas du parc conventionné.
J'ai indiqué que nous avions prévu de doubler :
- D'une part le nombre de logements privés remis sur le marché. L'aide de l'ANAH sera majorée pour ces logements et ils seront exonérés de la Contribution sur les Revenus Locatifs pendant trois ans,
- D'autre part le nombre de logements privés à loyers conventionnés.
Les moyens financiers nécessaires sont inscrits dans la loi de programmation et ils sont plus importants que ceux consacrés au parc public. Ceci n'a pas assez été souligné.
En autorisations de programme le budget 2005 inscrit 70 Millions d'euros de moyens supplémentaires pour le parc privé (80 M pour le parc public). Le budget de l'ANAH augmente de 18% par rapport à celui de 2004. Et à partir de 2006 sont prévus par le projet de loi de programmation 140 Millions d'euros par an supplémentaires pour le parc privé, contre 120 M d'euros pour le parc public.
Le projet de loi qui a été voté au Sénat donne par ailleurs aux logements privés améliorés avec l'aide de l'ANAH conventionnés à l'APL et gérés par un organisme sans but lucratif agréé, une exonération de TFPB portée à 25 ans.
Vous soulignez qu'il ne faut pas oublier les propriétaires occupants modestes, dont les logements ont également souvent besoin d'être améliorés. C'est vrai et les aides de l'ANAH à ces propriétaires sont maintenues. Mais il faut bien traiter d'abord l'urgence, qui est la crise du logement, et mettre sur le marché de nouveaux logements locatifs à loyers maîtrisés. L'accroissement de l'effort financier de l'Etat est donc concentré sur ce créneau.
Les adhérents d'Habitat et Développement dans la mise en œuvre du plan de cohésion sociale ont un rôle essentiel à jouer pour l'atteinte des objectifs du volet logement du plan de cohésion sociale.
Je pense notamment à vos associations Habitat et Développement et vos SICA pour l'amélioration du parc et son conventionnement, vos SIRES pour la remise sur le marché des logements vacants.
Je compte donc sur vous pour la mise en œuvre du plan, qui ne peut être effective qu'avec la mobilisation de tous : vous-mêmes, l'ANAH, les services de l'Etat.
Comme vous le savez, l'amélioration de l'habitat rural fait l'objet de mesures spécifiques pour remédier à l'insalubrité ou à l'inadaptation du bâti et relancer le marché locatif. Le CIADT de septembre 2003 a décidé que 100 nouvelles opérations programmées d'amélioration de l'habitat en zone de revitalisation rurale (OPAH-RR) seraient créées dans les trois ans à venir. Ces OPAH se mettent progressivement en place grâce à votre action.
Il est aussi prévu que les personnes qui acquièrent un logement situé dans une zone de revitalisation rurale en vue de le louer dans le cadre du dispositif " Robien " bénéficient d'une majoration de la déduction forfaitaire de 6% à 40%. Cette mesure figure dans le projet de loi relatif au développement des territoires ruraux qui va être examiné en seconde lecture au Sénat.
Ce projet de loi inclut également une mesure portant sur les logements acquis et améliorés à l'aide d'une subvention de l'ANAH : les personnes physiques réalisant une telle opération, dans une zone de revitalisation rurale, pourront bénéficier d'une exonération de 15 ans de taxe foncière sur les propriétés bâties dès lors qu'elles concluent avec l'Etat une convention ouvrant droit, pour leurs locataires, à l'Aide Personnalisée au Logement.
Si ces dispositions vous paraissent devoir être complétées ou précisées, le groupe de travail du CNH devra examiner ce sujet et faire d'éventuelles propositions.
Vous avez également évoqué l'avenir des fonds structurels européens. Vous savez que
l'entrée des dix nouveaux pays dans l'Europe change la donne et que ceux-ci vont probablement bénéficier d'une bonne partie de ces fonds. Il faut pour autant examiner sur quels sujets essentiels il faut préserver pour nous de tels fonds.
La loi Libertés et Responsabilités locales, votée cet été a transféré la délégation de la mise en œuvre des aides à la pierre de l'Etat aux EPCI et aux départements, dans le cadre de conventions avec l'Etat.
L'objectif est la recherche d'une meilleure efficacité, d'une meilleure adéquation des politiques conduites avec les spécificités locales. Les conventions de délégation permettront l'adaptation, comme vous le souhaitez, de certaines règles, concernant notamment la liste des travaux subventionnables, les plafonds de travaux subventionnables et les plafonds de ressources.
La loi de programmation sur cinq ans donnera aux collectivités locales une meilleure visibilité sur les aides de l'Etat et leur permettra de s'engager.
Les textes d'application de cette loi ont été mis au point et vont être prochainement diffusés. Quelques intercommunalités sont prêtes à passer une convention de délégation dès le début 2005. Mais beaucoup prendront un temps de préparation plus important et demanderont la délégation pour le début 2006.
Les conventions de délégation concernent les aides à la pierre de l'Etat pour les logements publics et les logements privés. Le Préfet de région recevra une enveloppe pour le parc public et une pour l'ANAH.
Il négociera à partir de là les conventions de délégation qui distingueront les deux natures de crédit.. Il faudra aussi veiller à ce que les crédits d'ingénierie nécessaires à la production de logements privés sont bien prévus. 
Je partage avec vous le point de vue sur le fait que l'Etat doit exercer pleinement son rôle dans ces conventions de délégation. Il est le garant du droit au logement et de la mixité sociale.
C'est pourquoi la loi Libertés et Responsabilités locales prévoit que l'élaboration et la mise en œuvre du PDALPD seraient assurées par le département et par l'Etat, qui doit rester présent sur ces enjeux essentiels à la cohésion sociale.
De la même manière, l'Etat ne doit déléguer son contingent préfectoral que s'il a l'assurance que le logement des ménages défavorisés est au moins aussi bien assuré par cette voie. Il ne doit pas hésiter à le reprendre si les engagements pris dans la convention de délégation du contingent ne sont pas tenus.
Quant aux FSL, ils sont bien transférés aux départements. Comme le prévoit la constitution l'Etat donnera une compensation financière équivalente aux dépenses qu'il consacrait auparavant aux compétences transférées. Cette compensation prendra donc bien en compte les aides qu'il apportait à la médiation locative.
La loi donne par ailleurs au Comité Régional de l'Habitat un rôle de mise en cohérence des politiques locales et il donne au Préfet de région son avis sur la répartition des crédits publics. Il est bien sûr important que vous y siégiez. Le décret qui va paraître prévoit un collège du CRH constitué de professionnels du logement, et dans ce collège " notamment les organismes intervenant dans l'amélioration de l'habitat ". Votre place est donc naturelle au sein de ces Comités.
Vous demandez une refonte globale du dispositif de production à loyers maîtrisés. Et en effet le conventionnement du parc privé doit être modernisé.
Le groupe de travail du CNH consacré à ce thème a présenté hier ses conclusions et ses propositions.
Cette modernisation comprend plusieurs aspects :
- une simplification, qui donne à l'ANAH un rôle central dans les conventions. Ceci peut être fait rapidement par ordonnance,
- une actualisation des niveaux de loyers, qui rende plus attractif le conventionnement en donnant aux propriétaires une rentabilité suffisante qui reste en même temps compatible avec la finalité sociale des logements : les propositions du CNH seront utilisées pour préciser cette nécessaire modification, qui doit pouvoir intervenir par voie réglementaire,
- une extension du conventionnement du parc privé à caractère social aux cas de logements ne faisant pas l'objet de travaux. Ce point est à examiner dans le cadre de la préparation de la loi Habitat pour tous.
Il nous fait continuer à travailler ensemble pour mettre au point ce nouveau dispositif.
Un autre volet annoncé pour la politique du logement : le calendrier. Le projet de loi sera présenté au conseil des ministres au premier trimestre 2005, puis examiné par le Parlement au premier semestre.
Des mesures sont notamment prévues sur :
- l'accession à la propriété,
- la modernisation du secteur Hlm,
- le droit au logement, pour améliorer l'effectivité du droit : rôle des commissions de médiation, comme lieu de recours administratif,
- l'amélioration de l'efficacité des mesures de l'article de l'article 55 de la loi SRU,
- l'urbanisme et le foncier.
Des meures concerneront également le parc privé. Je suis donc prêt à examiner des mesures sur le conventionnement du parc privé, comme je l'ai indiqué.
Un débat a eu lieu hier avec le CNH sur les axes de cette loi et il va se poursuivre jusqu'à la fin de l'année. Je vous invite à nous faire part de vos réactions sur nos projets.
Il est souhaitable qu'un mobilisation en faveur lu logement ait aussi lieu dans les DOM. Outre ce qui peut être fait à travers la Ligne Budgétaire Unique spécifique à ces départements, il convient que les Prêts Locatifs Sociaux (PLS) puissent être mis en œuvre dans les DOM. En outre le projet de loi cohésion sociale prévoit d'étendre aux DOM la mesure de prolongement d'exonération de TFPB à 25 ans pour les logements sociaux du plan de cohésion sociale.
Je vous remercie de votre attention.
(Source http://www.logement.gouv.fr, le 28 décembre 2004)