Interview de M. Bernard Accoyer, président du groupe parlementaire UMP à l'Assemblée nationale, dans "Le Monde" du 21 juillet 2004, sur le projet sur la décentralisation inscrit à l'ordre du jour de la session extraordinaire du Parlement, et sur les débats sur le service minimum dans les services publics et l'aménagement des 35 heures.

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Média : Emission la politique de la France dans le monde - Le Monde

Texte intégral

Question : Était-il nécessaire d'inscrire le projet de loi sur la décentralisation à l'ordre du jour de la session extraordinaire ?
Bernard ACCOYER (Réponse) : La décentralisation, c'est la réforme de l'État. L'immobilisme n'a que trop duré. Cette réforme nous offrira des marges de manuvre, rapprochant, d'une part, ceux qui décident de ceux qui sont concernés par les décisions et permettant, d'autre part, à l'État de transférer certaines compétences non régaliennes.
Question : Ce texte avait suscité de vifs débats à l'UMP et, après les élections régionales, le Premier ministre était venu devant le groupe pour convaincre les députés de le voter en s'engageant à ce qu'il puisse être modifié en deuxième lecture. L'examen dans ces conditions se prête-t-il à une véritable discussion ?
Bernard ACCOYER (Réponse) : Depuis, le Sénat a apporté des améliorations qui correspondent à ce que souhaite la majorité du groupe. De son côté, l'opposition prend un malin plaisir à empêcher le bon fonctionnement de notre assemblée, pour des prétextes éminemment politiciens. Dans ces conditions, le groupe UMP est acquis à l'examen de ce texte et à son adoption. La légitimité de la majorité parlementaire, c'est-à-dire la légitimité gouvernementale, ne saurait être remise en cause par des élections intermédiaires.
Question : Vous êtes donc favorable à l'adoption en l'état ?
Bernard ACCOYER (Réponse) : Oui, parce que le texte a été très sérieusement amélioré par les sénateurs et qu'il avait déjà donné lieu à un gros travail à l'Assemblée en première lecture, où je rappelle qu'il y avait eu 65 heures de débat et 1619 amendements examinés.
Question : Dans les semaines qui ont précédé votre élection à la présidence du groupe UMP de l'Assemblée, on a entendu vos collègues réclamer plus de débat interne, d'être mieux écoutés par le gouvernement et que leurs amendements soient pris en compte. Or il leur est réclamé là, en quelque sorte, de taire leurs réserves, comme il leur a été demandé, lors du débat sur l'assurance-maladie, de renoncer à voter un amendement qu'ils avaient approuvé en commission sur le remboursement de la dette sociale.
Bernard ACCOYER (Réponse) : Nous avons, depuis quelques mois, considérablement augmenté la densité et l'efficacité de nos échanges avec le gouvernement. Regardez le jour de solidarité ou la préparation du texte sur l'assurance-maladie. Beaucoup de propositions du groupe UMP ont été acceptées par le gouvernement. Pour l'amendement d'Yves Bur sur la CRDS, le débat a eu lieu, il a occupé plusieurs rencontres, avec plusieurs ministres, et c'est en toute connaissance de cause que le gouvernement a conforté ses choix et que les députés ont décidé de se ranger à ses arguments.
Question : Vous dénoncez régulièrement la volonté d'obstruction de l'opposition. Souhaitez-vous une modification du règlement de l'Assemblée ?
Bernard ACCOYER (Réponse) : Je suis surtout préoccupé par la perte de confiance des Français dans leurs élus et, par conséquent, dans la démocratie. La multiplication des artifices de procédure n'est pas de nature à les réconcilier avec le travail parlementaire. Je suis favorable à ce qu'on réfléchisse à une évolution du règlement de l'Assemblée, notamment en direction d'un crédit-temps qui serait accordé à chaque groupe pour faire valoir ses arguments au cours de l'examen d'un texte. L'attitude consistant à élever, au Parlement, des " murs d'amendements " pour reprendre l'expression du président du groupe socialiste n'est pas conforme à la démocratie.
Question : Quelles propositions attendez-vous du gouvernement en matière de service minimum dans les services publics ?
Bernard ACCOYER (Réponse) : C'est sur notre initiative que le débat a été engagé et que le gouvernement a lancé une concertation. Le ministre des transports va formuler des propositions. S'il a réussi à trouver une solution négociée avec les syndicats pour organiser le service garanti, nous en serons satisfaits, que cela nécessite ou pas de légiférer, ce qui est probable. Sinon, le groupe UMP est favorable à une évolution de la législation pour qu'il n'y ait plus de prise d'otages de nos compatriotes.
Question : Sur les 35 heures ?
Bernard ACCOYER (Réponse) : La majorité a procédé à des aménagements et des assouplissements profonds des 35 heures. On ne peut pas revenir radicalement dessus, pour des raisons sociales, économiques et pratiques. Mais on peut aller nettement plus loin en termes d'aménagements et d'assouplissements. Je propose depuis longtemps un contrat de travail qui fasse 110 % ou 120 % des 35 heures, librement négocié. Peut-être la question se posera-t-elle de légiférer.
Question : Souhaitez-vous également légiférer pour modifier les modes de scrutin, et notamment supprimer les triangulaires au second tour des élections législatives, comme l'ont proposé plusieurs députés de l'UMP ?
Bernard ACCOYER (Réponse) : Le changement de mode de scrutin est une question toujours très sensible. Nous avons confié au président de la commission des lois et à un certain nombre de nos collègues le soin d'y travailler. De leurs réflexions nous tirerons les conclusions qui constitueront notre position.
(Source http://www.ump.assemblee-nationale.fr, le 22 juillet 2004)