Déclaration de M. Marc-Philippe Daubresse, ministre délégué au logement et à la ville, sur les mesures destinées à accroître l'offre locative privée et favoriser l'accession à la propriété, et sur l'application de la réglementation de la profession d'agent immobilier (Loi Honguet) et des règles comptables spécifiques aux copropriétés (Loi SRU), Paris le 7 décembre 2004.

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Circonstance : Congrès de la Fédération Nationale de l'Immobilier (FNAIM) à Paris le 7 décembre 2004

Texte intégral

Monsieur le président,
Mesdames, Messieurs,
Je suis heureux d'être présent au congrès de la Fédération Nationale de l'Immobilier. Ma présence traduit l'intérêt que le gouvernement porte à tous les secteurs du logement et aux professions qui agissent dans ces secteurs :
- le parc locatif privé, ses cinq millions et demi de logements, et un rôle social indéniable,
- le parc public, avec un peu plus de quatre millions de logements
- l'accession à la propriété - la France a treize millions de propriétaires occupants
Trois secteurs quantitativement importants, qui sont également concernés par la crise du logement et qui partagent avec nous le diagnostic sur la situation. Une crise paradoxale car on n'a jamais construit autant de logements : 357 000 ces douze derniers mois. Une crise
- qui résulte de dix années d'insuffisance de construction,
- qui se traduit par une spirale à la hausse, fige la mobilité,
- qui concerne l'ensemble des secteurs, car l'accès à un logement locatif est problématique dans le parc public et dans le parc privé ; les ménages arrivent de plus en plus difficilement à accéder à la propriété,
- qui touche d'abord les plus modestes d'entre nous.
L'objectif du gouvernement est de résoudre cette crise, en agissant sur tous les leviers, afin d'augmenter très fortement l'offre économiquement accessible dans les cinq prochaines années.
C'est l'ambition du plan de cohésion sociale, et la loi de programmation qui comporte les mesures nécessaires est sur le point d'être votée par le Parlement.
La crise du logement se joue à quitte ou double et, nous, nous avons choisi de doubler : et pas seulement le logement social. Le logement social est une préoccupation légitime du gouvernement - car il y a une insuffisance évidente de logements sociaux - mais ce n'est pas la seule.
Donc, si nous doublons la production dans le parc public, nous doublons aussi :
1) le nombre de logements privés remis sur le marché (de 20 à 40 000 par an). L'aide de l'ANAH sera majorée pour ces logements et ils seront exonérés de la CRL pendant trois ans.
2) le nombre de logements privés à loyers conventionnés, et ainsi accessibles aux familles modestes.
Et les moyens nécessaires sont mis en place : dans le budget 2005 nous aurons 70 M Euros d'autorisations de programme supplémentaires pour le parc privé (80 pour la parc public) et en 2006 140 M Euros (120 pour le parc public).
Les propriétaires privés, ils me l'ont dit, sont prêts à travailler dans ce sens, et je ne doute pas que les professionnels de ce secteur les conseillent et les aident.
Sans doute faut-il répondre à la crainte d'impayés et mieux sécuriser les risques des bailleurs.
J'ai lancé au sein du Conseil National de l'Habitat, que je présidai alors, une réflexion sur ce thème. Ses propositions viennent de m'être présentées. Leur idée directrice est de mutualiser les risques locatifs de ceux qui louent leurs logements à des ménages modestes, locations que les assurances couvrent mal. Ceci pourrait se traduire par un fonds de garantie pour les logements conventionnés du parc privé, vers lesquels les produits de la contribution sur les revenus locatifs concernant ce parc seraient dirigés.
Mais le projet ne consistera pas à créer une couverture logement universelle, qui ressemblait, elle, à une sécurité sociale du logement, comme il en a été question sous le gouvernement précédent, ni à supprimer le dépôt de garantie.
Je veux aussi rappeler qu'il ne saurait être question de mettre fin aux expulsions dans le parc privé. Les mesures de prévention des expulsions qui ont été annoncées pour locataires de bonne foi ne concernent que le parc public. Elles ne peuvent être appliquées au parc privé, ceci au nom du respect du droit de propriété. L'expulsion doit rester un recours ultime, mais on ne peut pas exclure d'avoir à y recourir.
Vous avez aussi signalé les difficultés que rencontre l'investissement locatif Robien dans l'ancien, à cause d'une définition floue de la notion de décence des parties communes. Vous avez raison et j'ai demandé à mes services comment ce point pourrait être éclairci.
Par ailleurs nous avons complété le dispositif, dans le cadre de la loi Cohésion sociale, par une incitation à l'investissement locatif très social, qui combine les dispositions du " Robien " avec une déduction forfaitaire de 40%.
L'accession est un élément essentiel de la politique du logement. Accéder à la propriété est une aspiration forte de français. En même temps l'accession favorise les parcours résidentiels et libère des logements locatifs sociaux qui sont en nombre insuffisant.
Les assises du logement ont mis en évidence que le prêt à taux zéro, dispositif lisible et efficace au départ, avait perdu de sa force au fil du temps, qu'il ne concernait pratiquement plus l'acquisition dans l'ancien, que les primo accédants réalisaient plus difficilement leur projet.
Nous mettons donc en place un " PTZ plus " qui améliore sensiblement le dispositif existant :
- il aura la même carrosserie : un prêt qui puisse toujours être utilisé comme quasi apport personnel par les accédants modestes et qui abaisse sensiblement leur taux d'effort.
- le moteur en sera plus puissant : le nombre de primo accédants ainsi aidés passera de 100 000 à plus de 200 000,
- pour permettre aux établissements de crédit de faire ce prêt, l'aide doit passer par ces établissements et sera utilisé à cette fin un autre carburant : non plus un carburant budgétaire, mais un crédit d'impôt sur les sociétés.
L'aide apportée sera supérieure pour les ménages ayant les revenus les plus modestes et pour les familles avec au moins deux enfants, car le montant de l'aide progressera fortement avec la taille de la famille
Enfin ce nouveau PTZ sera ouvert à l'habitat ancien, favorisant ainsi la mobilité dans le parc, ce que vous souhaitiez fortement. C'est souvent dans l'habitat existant que les primo accédants peuvent acheter un logement qui soit situé dans la ville.
Nous avons accepté la proposition des parlementaires, inquiets des risques inflationnistes de l'ouverture du PTZ à l'ancien sans travaux, d'avoir pour le prix de l'ancien une décote sur le prix du neuf. Cela n'a rien d'infamant pour l'ancien, qui dans la pratique est bien vendu à un prix inférieur à celui du neuf, toutes choses égales par ailleurs. Et il nous a paru préférable de retenir cette décote plutôt que d'accepter une quotité de travaux, qui aurait fortement réduit le nombre de bénéficiaires du PTZ.
Ces différentes mesures sur l'augmentation de l'offre locative économiquement accessible et l'accession me semblent donc respecter votre souhait d'équilibre entre logements neufs et logements anciens.
Nous partageons ces deux objectifs et le gouvernement ne reste pas inactif dans ce domaine.
Concernant les charges locatives, j'ai demandé à la présidente de la Commission Nationale de Concertation de consulter l'ensemble des partenaires ce qu'elle a fait. Je viens de recevoir ses conclusions, que je suis en train d'examiner.
D'ores et déjà dans la loi de programmation pour la cohésion sociale, nous avons réduit à cinq ans le délai de prescription, qui était de trente ans. Nous permettons aussi de déroger à la réglementation sur la récupération des charges, par accords collectifs entre bailleur et locataires. Ces dérogations doivent concerner la sécurité et le développement durable.
J'en viens maintenant aux réformes qui ont été initiées par le précédent gouvernement et que nous veillons à mettre en oeuvre.
La réforme de la loi Hoguet en premier lieu. L'ordonnance modifiant cette loi a été publiée le 1er juillet dernier. Son décret d'application a fait l'objet de discussions avec vous comme avec les autres partenaires concernés et il devrait pouvoir être publié prochainement.
Je tiens à souligner que ce projet de décret, s'il présente semble-t-il à vos yeux des imperfections, comporte des mesures de modernisation qui étaient attendues par les professions : par exemple validité de la carte professionnelle portée à dix ans, possibilité de tenue informatique des registres, paiement par carte bancaire
En ce qui concerne les conditions d'exercice des agents de voyage, je vous précise que l'ordonnance réformant la loi de 1992 sur les activités touristiques, qui sera prise en application de la loi PLH2, harmonisera leurs conditions d'activité avec celles des agents immobiliers. Ces agents ne bénéficieront donc pas de conditions plus souples que les vôtres quand ce texte sera paru.
Vous déplorez l'augmentation de la garantie qui doit être instaurée : il y avait là débat entre les différents professions de l'immobilier. Des exemples récents de défaillances ont montré que les garanties actuelles pouvaient se montrer insuffisantes pour bien protéger le consommateur.
Dernier point sur ce point de la réglementation de la profession : Le transit de vos honoraires par le compte spécial de l'article 55 du décret de 1972, après la signature de l'acte authentique. Je comprends votre demande, qui demande un examen attentif en liaison avec le ministre de la Justice.
Autre thème de règles pour la profession. Les textes d'application de la loi Solidarité et Renouvellement Urbain ensuite. Celle-ci a institué des règles comptables spécifiques aux copropriétés. Vous savez que si le décret correspondant n'a pas encore été publié, c'est que le gouvernement a souhaité qu'un groupe d'experts, réunissant professionnels de la gestion immobilière et représentants des copropriétés, fasse de nouvelles propositions, après un premier projet de décret qui appelait des critiques.
Je suis en mesure de vous préciser sur ce point aujourd'hui :
- que la date d'application des nouvelles dispositions comptables, issues de la loi SRU et de son décret d'application, est repoussée au 1er janvier 2006, par la loi sur la cohésion sociale. Ce report vous donne le temps nécessaire à la mise en place des nouveaux outils.
que le contenu du décret vient d'être précisé sur les points qui restaient à régler et que ce décret va donc pouvoir être rapidement publié. Il suivra pour une bonne part les propositions du groupe d'experts. En particulier le décret n'imposera pas la tenue de quatre sous comptes pour chaque copropriétaire.
Vous demandez aussi que le délai de rétractation, instauré par la loi SRU pour sécuriser les acheteurs d'un bien immobilier, puisse courir dès la remise de l'acte contre émargement, et non plus à partir de la réception du courrier. Je suis prêt à proposer un examen interministériel de cette question, qui ne met pas actuellement les différents acteurs à égalité.
Vous m'avez enfin interrogé sur le projet de réforme des baux commerciaux, sur la quelle un rapport a été rendu au Garde des Sceaux avant l'été dernier. Le gouvernement procède en ce moment aux consultations qui paraissent nécessaires, avant que ne soit arrêté un texte qui doit traiter d'un sujet complexe. Je comprends vos préoccupations : il est nécessaire de moderniser un réglementation aussi ancienne. Mais mon collègue de la justice a aussi les siennes.
Il nous faut consolider cette nouvelle politique du logement et nous déposerons à cette fin au printemps 2005 un projet de loi " Habitat pour tous ". J'en discute en ce moment avec les partenaires et j'en ai présenté les axes principaux au Conseil National de l'Habitat.
Je suis prêt à examiner notamment avec vous dans ce cadre, comment on peut mettre fin aux dispositions de la loi de 1948, statut qui est devenu obsolète et ne permet pas aux propriétaires de rénover leurs logements, et le faire sans pénaliser les ménages modestes ou âgés, par l'intermédiaire de mesures transitoires comme vous le proposez.
Le projet comportera également des mesures sur :
- le droit au logement
- l'urbanisme et le foncier, pour permettre aux maires de privilégier la construction de logements
- l'acquisition de leur logement par les locataires HLM.
(Source http://www.logement.gouv.fr, le 8 décembre 2004)