Déclaration de M. Thierry Breton, ministre de l'économie, des finances et de l'industrie, sur les mesures prises pour favoriser la mise en place d'un marché sur-mesure pour les petites et moyennes entreprises appelé Alternext, Paris le 20 juin 2005.

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Circonstance : Création d'Alternext le 20 juin 2005

Texte intégral

Vous le savez, la priorité numéro un de ce gouvernement, c'est l'emploi. Et le principal gisement d'emploi en France est dans les PME.
Notre marge de progression est grande, l'on en juge par une comparaison : aux Etats-Unis, les entreprises entre 50 et 99 salariés représentent 20 % des entreprises, en France : 2 %.
Il y a de multiples raisons à cet écart. Mais la croissance insuffisante de nos PME s'explique en partie par une plus grande difficulté à lever des financements.
Nombreuses sont les PME à me faire part de leurs difficultés à trouver des financements ; et j'y suis très sensible, parce que ce sont des milliers de femmes et d'hommes dont l'emploi est en jeu, et aussi parce que, j'en sais quelque chose, la pression qui pèse sur un patron de PME est très forte.
C'est pourquoi je me félicite de la création d'Alternext, comme je félicite les entreprises qui ont fait le choix d'y avoir recours pour financer leur développement. Je veux faire en sorte que l'environnement de ce nouveau marché soit aussi favorable que possible à son développement. La loi que je présenterai demain à l'Assemblée comprendra plusieurs mesures en ce sens.
L'épargne des Français n'irrigue pas encore l'économie autant qu'elle pourrait le faire. Les liquidités et l'assurance-vie constituent la majeure partie de l'épargne des ménages français, les actions ne constituant que de l'ordre de 10 % de leur patrimoine financier. A titre de comparaison, dans les pays anglo-saxons notamment, les actions représentent de 20 à 50 % du patrimoine financier des ménages.
Certes, ce transfert de risque sur les ménages, surtout dans les pays anglo-saxons avec une part très importante des fonds de pension à contributions définies, constitue une source potentielle d'instabilité pour les ménages.
Mais nous sommes en France dans l'excès inverse. La faible part des actions dans l'épargne des ménages français pèse sur la compétitivité économique. Je vois deux problèmes principaux :
- cette orientation accroît le coût du capital des entreprises françaises. Cela serait l'une des explications à la différence marquée entre les PER américains (autour de 20 aujourd'hui) et français (en deçà de 14).
- et elle pénalise le pouvoir d'achat des ménages, étant donné que la faible part des actions dans le patrimoine financier des ménages a un impact très significatif sur le rendement de leur épargne.
Il est donc souhaitable que les Français se réconcilient avec les produits en actions. Pour ce faire, les pistes sont nombreuses, mais se rejoignent sur deux aspects :
- les épargnants doivent avoir confiance dans les marchés financiers,
- et ces marchés doivent leur proposent des opportunités d'investissements satisfaisantes. Sur ces deux aspects, le gouvernement a choisi d'épauler Alternext.
Le projet de loi pour la confiance et la modernisation de l'économie permettra à Alternext de se développer dans un cadre juridique taillé sur mesure. Ses exigences réglementaires sont adaptées au financement des PME. Elles offrent un environnement suffisamment protecteur et transparent pour constituer une opportunité d'investissement nouvelle et attractive aux yeux des investisseurs.
En effet, auparavant, les entreprises qui souhaitent faire " appel public à l'épargne " n'avaient le choix qu'entre deux solutions : soit la cotation sur un marché " réglementé " ; soit la levée de capitaux sans cotation ou sur le Marché libre. Dans le premier cas, l'entreprise doit se conformer à un haut niveau d'exigences réglementaires, particulièrement adapté pour des entreprises déjà importantes. Dans le second cas, le recours au Marché libre ne garantit souvent pas une bonne visibilité pour les entreprises. Le projet de loi permettra de créer des modes d'appel public à l'épargne intermédiaires pour des marchés de valeurs moyennes comme Alternext.
Sur le plan fiscal maintenant, votre marché est un marché bien né, et nous allons l'aider encore un peu plus, là où c'est encore possible.
S'agissant des investisseurs personnes physiques, le régime fiscal qui s'applique à Alternext est extrêmement favorable. En effet, j'indique très clairement que la réduction d'impôt dite " Madelin " est applicable à Alternext : je rappelle qu'elle accorde une réduction d'impôt sur le revenu à hauteur de 25 % des sommes apportées à la souscription au capital d'une PME non cotée sur un marché réglementé. Le plafond est très intéressant, il se monte à 40 000 euros pour un couple, 20 000 euros pour une personne seule.
Je vais proposer au Parlement de clarifier et d'étendre l'application de ce régime pour un marché comme Alternext.
En effet, en l'état actuel du texte, une PME qui serait détenue par des fonds d'investissement lors de son introduction en bourse ne pourrait pas bénéficier de cet avantage. Or je souhaite aider Alternext à être le marchepied des entreprises entre le non-coté et le marché réglementé, donc en particulier à être une sortie naturelle pour les fonds d'investissement. Nos PME y gagneront doublement, d'abord en bénéficiant de ce soutien lors de leur cotation, ensuite parce que les sommes ainsi libérées par les fonds d'investissement pourront être réinvesties pour en faire grandir d'autres. Je vais donc proposer de supprimer la contrainte qui empêche les entreprises détenues par des fonds d'investissement de bénéficier de cette réduction d'impôt.

S'agissant des investisseurs institutionnels, là aussi, Alternext est heureusement née : en effet, plusieurs mesures ont été prises récemment par le gouvernement qui lui bénéficieront :
* les FCPI et FCPR : sur les 60 % et 50 % de ces fonds qui doivent être investis dans le non-coté (ils servent à ça), ils ont été autorisés à inclure une quotité de 20 % d'actions cotées de faible capitalisation, en plus de leur quotité libre
* A propos de FCPR, les assureurs se sont engagés en septembre dernier à investir 6 Md euros supplémentaires d'ici fin 2007 dans le non coté ou le coté non réglementé. Ça, c'est vous, et même une parcelle de 6 M d'euros, c'est une ressource énorme pour Alternext. Deuxième bonne nouvelle : on commence à avoir des chiffres sur la mise en place de ces 6 Md euros : d'après les premiers chiffres, les assureurs sont en ligne avec la réalisation de cet objectif, et la dynamique est positive. En effet, ils auraient levé de l'ordre du Md en deux trimestres. (c'est un scoop).
* L'impôt de bourse a été supprimé pour les capitalisations boursières inférieures à 150 M
Enfin et surtout, les plus values sur titres de participation seront progressivement exonérées : 15 % cette année, 8 % en 2006 et 0 % à compter de 2007. Pour saluer la création d'Alternext, j'ai décidé d'anticiper à la date de sa création l'exonération totale des plus-values sur titres de participation pour les valeurs mises sur le marché sur Alternext.
Ainsi, les règles de fonctionnement de ce marché sont adaptées aux contraintes des PME, et les investissements tant des particuliers que des institutionnels bénéficient d'un régime favorable ; par ailleurs, je me fie à l'expertise reconnue d'Euronext dans la conception et la tenue d'une plate-forme marché, je suis donc très confiant dans le succès de ce nouveau moyen de financement de nos PME, et suis sûr que vous saurez en faire la plate-forme de référence de la zone euro. Permettez-moi donc de vous féliciter à nuoveau, je suis très heureux de me trouver aujourd'hui parmi vous, de voir des PME qui connaissent une dynamique positive et trouvent des financements, de voir une plate-forme de négociation au service des entreprises et de l'économie, avec un modèle en lequel je crois. Bravo, et merci.
(Source http://www.minefi.gouv.fr, le 21 juin 2005)