Texte intégral
Des questions telles que le patrimoine me paraissent mieux prises en compte au Sénat
1/ Quelle est l'implication du Sénat dans la conservation et la mise en valeur du patrimoine ?
Le Sénat veille d'abord sur son propre patrimoine. La Haute Assemblée, qui occupe un des plus beaux Palais nationaux, a le souci, de le préserver pour les générations futures et de l'entretenir de manière exemplaire. Le Palais, avec le Jardin du Luxembourg, les deux Orangeries et le Musée du Luxembourg, constituent un ensemble architectural de première importance.
Le Sénat veille même sur une des plus belles et plus anciennes collections mondiales d'orchidées mais aussi sur un verger qui protège des espèces rares de pommes et de poires.
Le succès des journées du patrimoine au Sénat, qui ont accueilli cette année 22.000 visiteurs prouve que les Français mesurent bien la valeur de ce patrimoine.
Mais naturellement, c'est dans son rôle législatif que le Sénat intervient d'abord pour notre patrimoine.
2/ Comment se caractérise l'action du Sénat dans le domaine du patrimoine ?
Je voudrais tout d'abord remarquer, sans vouloir être discourtois à l'égard de l'Assemblée Nationale que des questions telles que le patrimoine me paraissent mieux prises en compte au Sénat. C'est sans doute la raison pour laquelle, les entretiens juridiques du patrimoine se déroulent depuis trois ans au Sénat.
Cela tient d'abord, raison contingente, à l'engagement personnel d'un certain nombre de sénateurs qui connaissent particulièrement bien ces questions et qui sont connus pour cela : Jean-Paul Hugot, qui est le père de la Fondation du Patrimoine, Philippe Richert, Philippe Nachbar, Yann Gaillard et quelques autres qui me pardonneront de ne pas les citer tous.
Cela tient au mode de travail de la Haute Assemblée qui lui permet mieux d'examiner des sujets de fond qui ne sont pas au coeur de l'affrontement droite gauche. Cela tient d'évidence au caractère territorial des questions de patrimoine, pour lequel le " Grand Conseil des communes de France " est évidemment plus proche des réalités.
3/ Existe -t-il des différences d'approche dans le domaine du patrimoine ?
Il existe un consensus pour défendre le patrimoine. Tous les partis se sont réjouis du vote d'une loi de programmation. Pour autant, il existe des différences, souvent idéologiques qui nuisent à la valorisation du patrimoine.
D'abord la fiscalité. Encore avons-nous échappé jusqu'à présent, grâce en partie au Sénat à l'imposition des oeuvres d'art au titre de l'impôt sur la fortune. Mais les problèmes ne sont pas pour autant résolus. Le rapport de Yann Gaillard sur le marché de l'Art a pointé les handicaps de la France. La fiscalité des plus-values, le droit de suite et la TVA empêchent Paris de redevenir la capitale du marché de l'Art qu'elle pourrait être. Tout ceci crée un climat de défiance chez les collectionneurs pour lesquels notre pays n'est plus attractif. C'est dire qu'il s'agit là d'un problème politique car c'est pour des raisons politiques que certains gouvernements craignent de prendre des mesures que l'intérêt public appelle.
Autre exemple : l'immobilier. Les propriétaires de biens et notamment de biens inscrits ou classés sont encore trop souvent considérés comme des privilégiés alors que leurs charges sont mal prises en compte. La fiscalité immobilière, régulièrement aggravée de gadgets comme la taxe sur les logements vacants, ne favorise pas le bon entretien du patrimoine par les propriétaires.
Dernier exemple : le budget de la Culture. On a vanté un peu trop vite l'effort budgétaire fait depuis vingt ans pour la Culture. La vérité oblige à dire que le patrimoine en a peu profité (cf. les lois programmes sur la patrimoine). Les grands travaux ont coûté cher. Ils pèsent considérablement sur le budget en fonctionnement. Le spectacle vivant, politiquement plus rentable a souvent été mieux servi sans évaluation précise des résultats. C'est ainsi que l'on découvre un beau jour que le Grand Palais ou Beaubourg menace ruine, que la flèche de telle Cathédrale penche dangereusement alors qu'une politique responsable du patrimoine aurait du prévenir de telles situations d'urgence.
4/Comment expliquez vous le manque de dialogue entre les intervenants du patrimoine ?
Au Sénat, ils se rencontrent et j'observe que le Secrétaire d'Etat à la décentralisation culturelle est un ancien sénateur. Pour le reste, il y a surtout des problèmes de culture. Entre Bercy, l'actuelle majorité et les collectionneurs, les propriétaires ou les conservateurs, il y a une incompréhension et une défiance naturelle.
Les intérêts divergent aussi parfois entre les maires, et certains gestionnaires dynamiques d'une part et d'autre part les conservateurs qui, pour certains, s'intéressent plus à l'aspect scientifique qu'à l'exploitation des richesses patrimoniales. Peut-être faudra-t-il envisager parfois de séparer le pouvoir de direction du pouvoir scientifique dans les institutions culturelles comme c'est le cas à l'hôpital. Ce sera peut-être la condition d'une gestion plus dynamique, avec une meilleure promotion et des horaires plus larges, de certains lieux de mémoire, gestion dynamique que les 35 heures ne vont d'ailleurs pas faciliter.
(Source http://www.senat.fr, le 27 novembre 2000)
1/ Quelle est l'implication du Sénat dans la conservation et la mise en valeur du patrimoine ?
Le Sénat veille d'abord sur son propre patrimoine. La Haute Assemblée, qui occupe un des plus beaux Palais nationaux, a le souci, de le préserver pour les générations futures et de l'entretenir de manière exemplaire. Le Palais, avec le Jardin du Luxembourg, les deux Orangeries et le Musée du Luxembourg, constituent un ensemble architectural de première importance.
Le Sénat veille même sur une des plus belles et plus anciennes collections mondiales d'orchidées mais aussi sur un verger qui protège des espèces rares de pommes et de poires.
Le succès des journées du patrimoine au Sénat, qui ont accueilli cette année 22.000 visiteurs prouve que les Français mesurent bien la valeur de ce patrimoine.
Mais naturellement, c'est dans son rôle législatif que le Sénat intervient d'abord pour notre patrimoine.
2/ Comment se caractérise l'action du Sénat dans le domaine du patrimoine ?
Je voudrais tout d'abord remarquer, sans vouloir être discourtois à l'égard de l'Assemblée Nationale que des questions telles que le patrimoine me paraissent mieux prises en compte au Sénat. C'est sans doute la raison pour laquelle, les entretiens juridiques du patrimoine se déroulent depuis trois ans au Sénat.
Cela tient d'abord, raison contingente, à l'engagement personnel d'un certain nombre de sénateurs qui connaissent particulièrement bien ces questions et qui sont connus pour cela : Jean-Paul Hugot, qui est le père de la Fondation du Patrimoine, Philippe Richert, Philippe Nachbar, Yann Gaillard et quelques autres qui me pardonneront de ne pas les citer tous.
Cela tient au mode de travail de la Haute Assemblée qui lui permet mieux d'examiner des sujets de fond qui ne sont pas au coeur de l'affrontement droite gauche. Cela tient d'évidence au caractère territorial des questions de patrimoine, pour lequel le " Grand Conseil des communes de France " est évidemment plus proche des réalités.
3/ Existe -t-il des différences d'approche dans le domaine du patrimoine ?
Il existe un consensus pour défendre le patrimoine. Tous les partis se sont réjouis du vote d'une loi de programmation. Pour autant, il existe des différences, souvent idéologiques qui nuisent à la valorisation du patrimoine.
D'abord la fiscalité. Encore avons-nous échappé jusqu'à présent, grâce en partie au Sénat à l'imposition des oeuvres d'art au titre de l'impôt sur la fortune. Mais les problèmes ne sont pas pour autant résolus. Le rapport de Yann Gaillard sur le marché de l'Art a pointé les handicaps de la France. La fiscalité des plus-values, le droit de suite et la TVA empêchent Paris de redevenir la capitale du marché de l'Art qu'elle pourrait être. Tout ceci crée un climat de défiance chez les collectionneurs pour lesquels notre pays n'est plus attractif. C'est dire qu'il s'agit là d'un problème politique car c'est pour des raisons politiques que certains gouvernements craignent de prendre des mesures que l'intérêt public appelle.
Autre exemple : l'immobilier. Les propriétaires de biens et notamment de biens inscrits ou classés sont encore trop souvent considérés comme des privilégiés alors que leurs charges sont mal prises en compte. La fiscalité immobilière, régulièrement aggravée de gadgets comme la taxe sur les logements vacants, ne favorise pas le bon entretien du patrimoine par les propriétaires.
Dernier exemple : le budget de la Culture. On a vanté un peu trop vite l'effort budgétaire fait depuis vingt ans pour la Culture. La vérité oblige à dire que le patrimoine en a peu profité (cf. les lois programmes sur la patrimoine). Les grands travaux ont coûté cher. Ils pèsent considérablement sur le budget en fonctionnement. Le spectacle vivant, politiquement plus rentable a souvent été mieux servi sans évaluation précise des résultats. C'est ainsi que l'on découvre un beau jour que le Grand Palais ou Beaubourg menace ruine, que la flèche de telle Cathédrale penche dangereusement alors qu'une politique responsable du patrimoine aurait du prévenir de telles situations d'urgence.
4/Comment expliquez vous le manque de dialogue entre les intervenants du patrimoine ?
Au Sénat, ils se rencontrent et j'observe que le Secrétaire d'Etat à la décentralisation culturelle est un ancien sénateur. Pour le reste, il y a surtout des problèmes de culture. Entre Bercy, l'actuelle majorité et les collectionneurs, les propriétaires ou les conservateurs, il y a une incompréhension et une défiance naturelle.
Les intérêts divergent aussi parfois entre les maires, et certains gestionnaires dynamiques d'une part et d'autre part les conservateurs qui, pour certains, s'intéressent plus à l'aspect scientifique qu'à l'exploitation des richesses patrimoniales. Peut-être faudra-t-il envisager parfois de séparer le pouvoir de direction du pouvoir scientifique dans les institutions culturelles comme c'est le cas à l'hôpital. Ce sera peut-être la condition d'une gestion plus dynamique, avec une meilleure promotion et des horaires plus larges, de certains lieux de mémoire, gestion dynamique que les 35 heures ne vont d'ailleurs pas faciliter.
(Source http://www.senat.fr, le 27 novembre 2000)