Texte intégral
- EXTRAITS -
Q - Avez-vous été touché par les attentats ? On va commencer par cela et on va essayer de revoir pour, à la foi, comprendre et mettre en perspective ce qui s'est passé cet été et qui a beaucoup, beaucoup touché les Français parce qu'ils sortaient des vacances pour beaucoup d'entre-eux. Ils étaient encore en vacances et tout d'un coup le souvenir épouvantable de 86 et d'autres séries d'attentats leur reviennent.
Cela vous a touché ? Vous vous êtes rendu compte que, là, c'est vraiment la quintessence du pouvoir...
R - Plus que touché, Monsieur Durand, parce que, dans mon expérience politique, ce qui m'inspire le plus d'indignation et le plus de révolte, c'est bien cela. Dans le monde hyper médiatisé où nous sommes, on a parfois tendance à faire des terroristes sinon des héros du moins des sortes de personnages un peu mythiques. En fait, ce sont des salauds et des lâches. Il n'y a rien de plus lâche que de s'attaquer à des innocents dans le métro et dans la rue.
Vous m'avez demandé si j'étais frappé. Je suis descendu le 25 juillet dans le deuxième sous-sol du RER et j'ai vu les corps déchiquetés et les blessés qui souffraient sur les civières.
Et puis quelques jours après, j'ai reçu les familles des victimes et j'ai été confronté à la détresse, à ce fantastique sentiment d'impuissance et d'injustice que l'on ressent. C'est quelque chose qu'on n'oublie pas.
Q - Dans un instant, avec Catherine Jentile, on va revenir sur les pistes de l'enquête mais je voudrais qu'on série vraiment les problèmes.
La première chose à laquelle pensent les Français, c'est d'abord les problèmes de sécurité. Avez-vous l'intention, concrètement, de développer franchement dans ce pays des conditions de sécurité qui empêchent que ce type d'attentat se reproduise : lieux publics, magasins, écoles pour les gosses qui vont rentrer bientôt ?
R - Je n'ai pas l'intention, Monsieur Guillaume Durand, cela a été fait.
D'abord, je voudrais, on vient de le voir sur les images, rendre hommage aux gens formidables qui se sont portés immédiatement sur le terrain, les pompiers, la Police, le SAMU. Cela a été extraordinaire ce qu'ils ont fait. Immédiatement nous avons pris des mesures pour essayer de prévenir la répétition de ces attentats et d'assurer la sécurité de nos concitoyens.
Puisque vous voulez des faits, je vais vous en donner. Nous avons d'abord rétabli les contrôles aux frontières, y compris vis-à-vis des pays qui ont signé les accords de Schengen.
Ensuite, nous avons mis immédiatement en place 22 escadrons de gendarmerie mobile et de compagnie républicaine de sécurité pour renforcer les policiers qui étaient déjà sur le terrain, cela fait 2.000 hommes supplémentaires. On les a vus. Les Parisiens les ont vus. Les habitants des grandes villes les ont vus.
Nous avons, depuis le 26 juillet, contrôlé plus de 660.000 personnes et plus de 28.000 véhicules. Le ministre de l'Intérieur -je tiens d'ailleurs, lui aussi, à lui rendre hommage parce qu'il a été omniprésent dans cette affaire- a convoqué les patrons des grandes entreprises de transports : SNCF, compagnies aériennes, dirigeants des grands magasins, pour les alerter.
Q - Si, moi, je prends l'avion demain, si je vais acheter quelque chose dans un grand magasin, il y a une surveillance qui est non seulement visible...
R - Vous avez de fortes chances d'être amené, si vous avez un cartable, un attaché-case, à ce qu'on vous demande de l'ouvrir.
Hier, j'ai présidé une cellule de crise avec Jacques Toubon et Jean-Louis Debré. J'ai encore renforcé ce dispositif par de nouvelles compagnies de sécurité.
Q - Lesquelles ?
R - Et nous avons porté le chiffre de 22 à 31. J'ai pris également une décision qui est de permettre aux jeunes policiers auxiliaires, ce sont les jeunes du contingent qui font leur service dans la Police, de prolonger au-delà du temps normal leur présence, s'ils le souhaitent évidemment, sur la base du volontariat, pour continuer au titre du Service national leur mission et cela va nous permettre de dégager entre 500 et 800 personnes supplémentaires au service de la sécurité de leurs concitoyens.
Voilà toute une série de mesures que nous avons prises.
Je le dis tout de suite : "il n'y a pas de dispositif de sécurité, quelle que soit l'ardeur de ceux qui sont chargés de le mettre en oeuvre, qui soit parfaitement étanche". Mme Rubetski qui est la présidente d'une des associations de défense des victimes des attentats le disait elle- même : "on ne peut pas mettre un policier devant chaque corbeille à papiers", mis nous avons pris le maximum de précautions. Il faut surtout que l'ensemble des Français soient vigilants et qu'ils continuent à réagir comme ils ont réagi, c'est-à-dire avec sang-froid et avec ce sentiment de solidarité qui fait que la nation entière est mobilisée.
Q - Mais la menace plane-t-elle encore actuellement ? Parce qu'il y a des gens qui disent maintenant : "On est passé des attentats personnels à des bombes que tout le monde connaît malheureusement, la fameuse bouteille de butagaz". Puis il y a même des gens qui disent maintenant : "cela va être la voiture piégée comme à Beyrouth...
R - Ne créons pas des psychoses, personne n'en sait rien. Que la menace existe, oui. Qu'il faille être vigilant, oui. Que le gouvernement ait pris toutes les mesures de sécurité possibles et que nous soyons prêts à les renforcer si c'est nécessaire, oui. A partir de là, n'allons pas imaginer des scénarios pour créer la panique dans la population.
Q - Pardonnez-moi d'être indiscret : est-ce que les gens que vous soupçonnez car effectivement, l'Etat a tout de même des renseignements qui ne sont pas des renseignements qu'on donne sur un plateau de télévision, mais est-ce que ces gens-là sont surveillés aussi par les Services spéciaux ?
R - Bien entendu. Et quand j'ai dit, tout de suite après les attentats, :que nous avons réagi pour développer sur le terrain les moyens de sécurité, nous avons aussi mis tous les moyens pour l'enquête.
Q - Donc il s'est infiltré.
R - Jacques Toubon, le Garde des Sceaux... Ce n'est pas moi qui vais vous donner ce genre d'information...
Q - Vous pouvez me dire "oui", vous pouvez me dire "non".
R - Je ne suis fixé une règle, c'est de protéger, dans ce genre d'affaire, d'abord la sécurité des témoins et de ne pas contrarier le bon déroulement de l'enquête. Je trouve que, quelque légitime que soit la curiosité dans ce domaine, un responsable comme moi ne doit pas venir sur un plateau de télévision pour mettre à plat les développements de l'enquête.
Ce que je peux vous dire, c'est que cette enquête a progressé.
Q - On est à un tournant ?
R - Et que si notre juge d'instruction a lancé un mandat d'arrêt international et demandait l'extradition...
Q - De Dénèche.
R - Du suspect suédois, Dénèche, ce n'est pas sur la base de vagues impressions, c'est parce qu'il a des matériaux solides. Je souhaite, puisque nous sommes membres les uns et les autres, la Suède et la France, de l'Union européenne, pays amis, que nous ayons le sens de la solidarité dans cette affaire. Parce que c'est une lutte commune que nous devons mener contre le terrorisme.
Q - Nous allons revenir dans un instant sur le fond de cette affaire, les soupçons,
l'enquête. Mais tout d'abord une enquête de Catherine Jentile sur la nébuleuse du GIA, donc le Groupement Islamiste Armé.
Monsieur le Premier ministre, cette enquête de Catherine pose plusieurs questions. Je voudrais qu'on revoie ensemble un certain nombre d'images concernant par exemple, le Boeing Alger-Paris. Vous vous en souvenez, tout le monde s'en souvient, d'ailleurs ces images apparaissent. Avez-vous le sentiment, sans entrer dans le détail de l'enquête, que c'est à partir de cela que s'est déclenché le mouvement des bombes de cet été ? Au fond, est-ce une vengeance après la mort des quatre terroristes qui avaient pris cet appareil ?
R - Quand on est Premier ministre, c'est une des contraintes de la charge, on ne fait pas d'hypothèse. Le jour où je serai sûr de pouvoir dire telle ou telle chose, je vous le dirai.
Q - Le deuxième suspect dont on parle serait l'organisateur...
R - Il serait !... Moi, je ne parle pas au conditionnel, Monsieur Guillaume Durand. Je ne peux pas parler au conditionnel parce que je suis Premier ministre. Donc l'enquête se déroule, je respecte la compétence des magistrats qui font cette enquête et lorsque nous aurons des certitudes, nous le dirons.
Sur ce reportage, je voudrais insister sur un fait, il ne faut pas tout mélanger. Il y a l'Algérie et puis il y a la France. Ce qui se passe en Algérie, c'est l'affaire des Algériens. Il faut se sortir de notre tête que nous sommes responsables de ce qui se passe en Algérie. L'Algérie, ce n'est plus la France et nous n'avons pas à faire d'ingérence en Algérie. C'est aux Algériens de régler leurs problèmes.
Q - C'est peut-être ce qu'ils nous reprochent.
R - Non, ils nous reprochent le contraire. On vient de nous reprocher le contraire. On vient de nous reprocher de soutenir les militaires algériens. Nous ne soutenons pas les militaires algériens. Ce que nous souhaitons, nous, c'est qu'il y ait une Algérie démocratique et stable. C'est le discours que j'ai tenu quand j'étais ministre des Affaires étrangères...
Q - Démocratique et stable, il ne l'est plus du tout.
R - C'est ce que nous souhaitons. Je ne dis pas que c'est ce qui est.
Q - Mais c'est impossible en fait, vous le savez.
R - Pourquoi ?... Il faut se fixer des buts dans la vie. Si on considère que c'est impossible, il n'y a qu'à baisser les bras. Moi, je ne suis pas homme à baiser les bras. Notre discours à nous, notre responsabilité à nous, c'est de dire : "il faut aller vers la démocratie et la stabilité -et donc vers des élections qui soient véritablement des élections".
Puis il y a ce qui se passe en France, alors, là, c'est note responsabilité. Et, cela, nous ne laisserons pas en France se développer des bases arrières du terrorisme.
Q - On en revient à la surveillance...
R - Bien sûr.
Q - On en revient à la surveillance, discrète ?
R - Discrète, efficace, bien entendu...
Q - Donc, vous avez des rapports sur votre bureau ?
R - Je ne peux pas le raconter ici, mais elle est efficace. Une surveillance qui là non plus ne mélange pas tout. Il ne faut pas commencer à laisser croire aux Françaises et aux Français que les 4 millions de Musulmans qui sont en France sont suspects.
Q - Ce n'est pas ce que dit Catherine...
R - Non, non, je ne dénonce personne. Je dis : "Il ne faut pas laisser croire cela". La très grande majorité, la quasi-totalité de la communauté musulmane respecte nos lois et nos règlements. Beaucoup sont Français, d'ailleurs, parmi ces Musulmans. Et donc nous luttons contre le terrorisme avec détermination avec beaucoup d'énergie mais ne mélangeons pas les choses. Je le répète.
Q - Cet alibi, vous y croyez ? Vous n'y croyez pas ? Vous êtes certain qu'il est responsable de l'affaire du boulevard Saint-Michel. Mais surtout, sur le plan diplomatique, avez-vous l'impression que les Suédois, par rapport à la demande que vous formulez, sont en train de gagner du temps pour l'extrader ailleurs et donc, dans ces conditions, rendre l'enquête totalement impossible car on ne le saura jamais ? Vous le savez.
R - Le gouvernement français a désigné un juge d'instruction. C'est le juge qui mène l'enquête, ce n'est pas moi. Le juge d'instruction a accès aux pièces du dossier. Il a été en Suède, vous le savez. Il a estimé qu'il avait suffisamment de présomptions ou d'éléments pour lancer un mandat d'arrêt international et demander l'extradition de Dénèche. Donc, je fais tout à fait confiance à sa sagacité et à son jugement.
Ce que je souhaite, et je n'irai pas au-delà bien entendu ce soir, c'est que les autorités suédoises, puisque la Suède est un pays ami, membre de l'Union européenne qui partage nos valeurs, qui lutte comme nous contre le terrorisme, puisse dans cette affaire faire preuve de solidarité.
Q - Si je vous comprends bien, vous êtes persuadé qu'il a fabriqué cet alibi à postériori ?
R - Là vous lisez non pas dans mes pensées. .-
Q - Mais dans vos yeux.
R .- Mais même très au-delà de mes pensées. Non, je n'ai pas dit cela, Monsieur Durand.
Je n'ai pas dit cela.
Q - Pour terminer cette affaire de terrorisme et qu'on revienne aux affaires politiques et aux affaires qui concernent les Français, -celle là les concerne mais il y a beaucoup d'autres affaires qui les concernent - , je voudrais savoir, sur le fond, pensez-vous que nous sommes actuellement victimes du GIA ? Ou pensez-vous, qu'éventuellement nous sommes victimes du Service secret algérien qui manipulerait une sorte de tension en France pour qu'on se rapproche des autorités militaires algériennes ?
R.- Je vais vous décevoir, mais je continue à vous décevoir, je ne fais pas d'hypothèses, ce n'est pas mon rôle.
Q - On est obligé de les faire.
R - Les enquêteurs font des hypothèses, ils les auront vérifiées, alors, à ce moment-là, nous le dirons.
Mais ce que je peux vous dire, c'est que le déroulement actuel de l'enquête qui a été immédiatement diligentée après l'attentat du métro Saint-Michel aboutit à la piste qui est la plus vraisemblable qui est celle de l'Islamisme. Cela est un fait, il est déjà connu. Au-delà, il faut maintenant que l'enquête progresse.
Q - Dernier mot sur la sécurité : êtes-vous inquiet tout de même ?
R - Bien sûr, je suis inquiet et mon rôle, c'est d'être vigilant. Je vous ai dit toutes les mesures que nous avions prises. Ce ne sont pas des paroles en l'air. Ce sort des milliers de policiers qui sont sur le terrain et les Français les voient. Ils réagissent d'ailleurs très positivement. Quand à la sortie des trains, on leur demande de se prêter à des contrôles, les Français le comprennent. Eh bien nous allons maintenir ce dispositif et nous demandons, je demande, ce soir, à tous les Français, de faire preuve de cet esprit de solidarité qui est nécessaire face à un tel défi parce qu'il faut être vigilant à tout instant.
Q - Monsieur le Premier ministre, on va rejoindre le Général Véricel qui est chargé des essais nucléaires sur place. Bien évidemment j'ai des questions à poser et la première que j'aimerais vous poser, c'est ce premier essai, c'est pour quand ?
R - Je ne peux pas y répondre, vous le savez bien, il y a des secrets d'Etat, pour des
raisons de sécurité tout simplement.
Q - C'est bientôt.
R - On a dit à partir du ler septembre. Je voudrais d'abord dire deux ou trois petites choses, si vous me permettez. Tout à l'heure, on disait que, dans ce Gouvernement, il manquait de fortes personnalités, eh bien en voilà une. Il faut du courage pour faire cela, d'autant que Jean-Jacques de Peretti n'est pas un plongeur professionnel. Il l'a fait avec beaucoup de panache et je tiens à le saluer.
Deuxièmement, nous avons joué dans cette affaire, et vous le savez bien et vous allez continuer d'ailleurs tout à l'heure, la carte de la transparence. Cela a eu au moins un mérite, c'est que, aujourd'hui, il y a une idée qui a le cou tordu si je puis dire, c'est que les essais pourraient être dangereux. Tout le monde sait bien, parce que tout le monde l'a dit, que ces essais ne présentent aucun danger.
Q - Cela, vous nous le garantissez sur l'honneur et sur les experts qui se sont prononcés sur cette affaire-là ? Parce que vous savez qu'il y a beaucoup d'émotion.
R - Ce n'est pas moi qui le garantis, ce sont nos experts, y compris des scientifiques australiens. Je vais vous lire quelque chose si vous me donnez 30 secondes...
Q - ... Vous pouvez.
R - C'est un extrait de la dépêche de Tahiti du 26 août 1995 et on y cite la propagande que les associations écologistes distribuent à ceux qui vont s'embarquer sur les bateaux qui vont vers Mururoa. Je vous lis une phrase : "L'exposition aux radiations que vous pourriez recevoir lors de votre séjour à Mururoa sera inférieure à celle que vous auriez subie en restant en Nouvelle-Zélande."
Ce sont les associations écologiques qui disent cela. Donc, le problème n'est pas là, ces essais ne présentent aucun danger et on vient d'en voir la démonstration.
Q - Je voudrais qu'on revienne parce qu'il y a des points importants dans cette affaire- là. On a dit : "Essais indispensables". François Mitterrand, il y a quelques années, consultant pratiquement les mêmes experts, a pris la décision d'arrêter les essais nucléaires. Puisque ce sont les mêmes experts, au fond n'est-ce qu'une décision politique la reprise ou est-elle vraiment, de votre point de vue, une nécessité militaire profonde pour la sécurité des Français qui vous regardent, qui nous regardent ?
R - C'est une nécessité pour la sécurité des Français. Je voudrais simplement rappeler aux Français que si nous avons eu la paix en Europe pendant 50 ans, nous le devons, en grande partie, à la dissuasion. L'avenir n'est pas à la stabilité en Europe et dans le monde autour de nous, les menaces subsistent, elles ont changé naturellement depuis 1989.
Q - Elles ne sont plus l'Est, ni l'Union soviétique...
R - ... Non, mais il y a d'autres menaces. Il y a encore beaucoup de têtes nucléaires dans un certain nombre de pays de l'ancienne Union soviétique et il y a d'autres pays qui se dotent, hélas, d'armes parfois de destruction massive.
Ces armes n'ont pas, je voudrais le rappeler, mais je crois que les Français le savent bien, pour objectif de servir. La dissuasion nucléaire a précisément pour définition même de ne pas servir puisqu'elle dissuade. Et notre responsabilité à nous, dirigeants de ce pays, c'est de vérifier, c'est cela qui est en cause dans ces essais, que dans 15 ou 20 ans notre dissuasion restera encore crédible. C'est pour cela que nous faisons ces essais qui seront les derniers.
Q - Ce qui veut dire que le prédécesseur de Jacques Chirac, à savoir François Mitterrand, a eu tort de votre point de vue de les interrompre...
R - ... Bien sûr ! Mais nous l'avons dit en 1992 lorsqu'il l'a fait. Nous avons considéré que cette décision était prématurée. Les essais que nous allons faire maintenant étaient programmés à cette époque-là. On les a interrompus trop tôt. Trop tôt, pourquoi ? Parce que nous allons avoir, grâce en partie à ces essais, le Général l'indiquait tout à l'heure, la possibilité de nous passer définitivement des essais et de vérifier la fiabilité de nos armes en laboratoire. Nous allons en particulier près de Bordeaux construire un laser de puissance qui va nous permettre à l'avenir de vérifier que nos armes sont toujours adaptées à leur mission en ne faisant plus d'essais.
Q - Pourquoi les experts avaient-ils recommandé à François Mitterrand d'arrêter ?
R.- Je ne suis pas sûr que les experts aient recommandé à François Mitterrand d'arrêter puisque je voyais récemment les déclarations de M. Attali qui expliquait que le mérite de François Mitterrand, à l'époque, avait été de ne pas s'appuyer sur l'avis des experts.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 24 septembre 2002)
Q - Avez-vous été touché par les attentats ? On va commencer par cela et on va essayer de revoir pour, à la foi, comprendre et mettre en perspective ce qui s'est passé cet été et qui a beaucoup, beaucoup touché les Français parce qu'ils sortaient des vacances pour beaucoup d'entre-eux. Ils étaient encore en vacances et tout d'un coup le souvenir épouvantable de 86 et d'autres séries d'attentats leur reviennent.
Cela vous a touché ? Vous vous êtes rendu compte que, là, c'est vraiment la quintessence du pouvoir...
R - Plus que touché, Monsieur Durand, parce que, dans mon expérience politique, ce qui m'inspire le plus d'indignation et le plus de révolte, c'est bien cela. Dans le monde hyper médiatisé où nous sommes, on a parfois tendance à faire des terroristes sinon des héros du moins des sortes de personnages un peu mythiques. En fait, ce sont des salauds et des lâches. Il n'y a rien de plus lâche que de s'attaquer à des innocents dans le métro et dans la rue.
Vous m'avez demandé si j'étais frappé. Je suis descendu le 25 juillet dans le deuxième sous-sol du RER et j'ai vu les corps déchiquetés et les blessés qui souffraient sur les civières.
Et puis quelques jours après, j'ai reçu les familles des victimes et j'ai été confronté à la détresse, à ce fantastique sentiment d'impuissance et d'injustice que l'on ressent. C'est quelque chose qu'on n'oublie pas.
Q - Dans un instant, avec Catherine Jentile, on va revenir sur les pistes de l'enquête mais je voudrais qu'on série vraiment les problèmes.
La première chose à laquelle pensent les Français, c'est d'abord les problèmes de sécurité. Avez-vous l'intention, concrètement, de développer franchement dans ce pays des conditions de sécurité qui empêchent que ce type d'attentat se reproduise : lieux publics, magasins, écoles pour les gosses qui vont rentrer bientôt ?
R - Je n'ai pas l'intention, Monsieur Guillaume Durand, cela a été fait.
D'abord, je voudrais, on vient de le voir sur les images, rendre hommage aux gens formidables qui se sont portés immédiatement sur le terrain, les pompiers, la Police, le SAMU. Cela a été extraordinaire ce qu'ils ont fait. Immédiatement nous avons pris des mesures pour essayer de prévenir la répétition de ces attentats et d'assurer la sécurité de nos concitoyens.
Puisque vous voulez des faits, je vais vous en donner. Nous avons d'abord rétabli les contrôles aux frontières, y compris vis-à-vis des pays qui ont signé les accords de Schengen.
Ensuite, nous avons mis immédiatement en place 22 escadrons de gendarmerie mobile et de compagnie républicaine de sécurité pour renforcer les policiers qui étaient déjà sur le terrain, cela fait 2.000 hommes supplémentaires. On les a vus. Les Parisiens les ont vus. Les habitants des grandes villes les ont vus.
Nous avons, depuis le 26 juillet, contrôlé plus de 660.000 personnes et plus de 28.000 véhicules. Le ministre de l'Intérieur -je tiens d'ailleurs, lui aussi, à lui rendre hommage parce qu'il a été omniprésent dans cette affaire- a convoqué les patrons des grandes entreprises de transports : SNCF, compagnies aériennes, dirigeants des grands magasins, pour les alerter.
Q - Si, moi, je prends l'avion demain, si je vais acheter quelque chose dans un grand magasin, il y a une surveillance qui est non seulement visible...
R - Vous avez de fortes chances d'être amené, si vous avez un cartable, un attaché-case, à ce qu'on vous demande de l'ouvrir.
Hier, j'ai présidé une cellule de crise avec Jacques Toubon et Jean-Louis Debré. J'ai encore renforcé ce dispositif par de nouvelles compagnies de sécurité.
Q - Lesquelles ?
R - Et nous avons porté le chiffre de 22 à 31. J'ai pris également une décision qui est de permettre aux jeunes policiers auxiliaires, ce sont les jeunes du contingent qui font leur service dans la Police, de prolonger au-delà du temps normal leur présence, s'ils le souhaitent évidemment, sur la base du volontariat, pour continuer au titre du Service national leur mission et cela va nous permettre de dégager entre 500 et 800 personnes supplémentaires au service de la sécurité de leurs concitoyens.
Voilà toute une série de mesures que nous avons prises.
Je le dis tout de suite : "il n'y a pas de dispositif de sécurité, quelle que soit l'ardeur de ceux qui sont chargés de le mettre en oeuvre, qui soit parfaitement étanche". Mme Rubetski qui est la présidente d'une des associations de défense des victimes des attentats le disait elle- même : "on ne peut pas mettre un policier devant chaque corbeille à papiers", mis nous avons pris le maximum de précautions. Il faut surtout que l'ensemble des Français soient vigilants et qu'ils continuent à réagir comme ils ont réagi, c'est-à-dire avec sang-froid et avec ce sentiment de solidarité qui fait que la nation entière est mobilisée.
Q - Mais la menace plane-t-elle encore actuellement ? Parce qu'il y a des gens qui disent maintenant : "On est passé des attentats personnels à des bombes que tout le monde connaît malheureusement, la fameuse bouteille de butagaz". Puis il y a même des gens qui disent maintenant : "cela va être la voiture piégée comme à Beyrouth...
R - Ne créons pas des psychoses, personne n'en sait rien. Que la menace existe, oui. Qu'il faille être vigilant, oui. Que le gouvernement ait pris toutes les mesures de sécurité possibles et que nous soyons prêts à les renforcer si c'est nécessaire, oui. A partir de là, n'allons pas imaginer des scénarios pour créer la panique dans la population.
Q - Pardonnez-moi d'être indiscret : est-ce que les gens que vous soupçonnez car effectivement, l'Etat a tout de même des renseignements qui ne sont pas des renseignements qu'on donne sur un plateau de télévision, mais est-ce que ces gens-là sont surveillés aussi par les Services spéciaux ?
R - Bien entendu. Et quand j'ai dit, tout de suite après les attentats, :que nous avons réagi pour développer sur le terrain les moyens de sécurité, nous avons aussi mis tous les moyens pour l'enquête.
Q - Donc il s'est infiltré.
R - Jacques Toubon, le Garde des Sceaux... Ce n'est pas moi qui vais vous donner ce genre d'information...
Q - Vous pouvez me dire "oui", vous pouvez me dire "non".
R - Je ne suis fixé une règle, c'est de protéger, dans ce genre d'affaire, d'abord la sécurité des témoins et de ne pas contrarier le bon déroulement de l'enquête. Je trouve que, quelque légitime que soit la curiosité dans ce domaine, un responsable comme moi ne doit pas venir sur un plateau de télévision pour mettre à plat les développements de l'enquête.
Ce que je peux vous dire, c'est que cette enquête a progressé.
Q - On est à un tournant ?
R - Et que si notre juge d'instruction a lancé un mandat d'arrêt international et demandait l'extradition...
Q - De Dénèche.
R - Du suspect suédois, Dénèche, ce n'est pas sur la base de vagues impressions, c'est parce qu'il a des matériaux solides. Je souhaite, puisque nous sommes membres les uns et les autres, la Suède et la France, de l'Union européenne, pays amis, que nous ayons le sens de la solidarité dans cette affaire. Parce que c'est une lutte commune que nous devons mener contre le terrorisme.
Q - Nous allons revenir dans un instant sur le fond de cette affaire, les soupçons,
l'enquête. Mais tout d'abord une enquête de Catherine Jentile sur la nébuleuse du GIA, donc le Groupement Islamiste Armé.
Monsieur le Premier ministre, cette enquête de Catherine pose plusieurs questions. Je voudrais qu'on revoie ensemble un certain nombre d'images concernant par exemple, le Boeing Alger-Paris. Vous vous en souvenez, tout le monde s'en souvient, d'ailleurs ces images apparaissent. Avez-vous le sentiment, sans entrer dans le détail de l'enquête, que c'est à partir de cela que s'est déclenché le mouvement des bombes de cet été ? Au fond, est-ce une vengeance après la mort des quatre terroristes qui avaient pris cet appareil ?
R - Quand on est Premier ministre, c'est une des contraintes de la charge, on ne fait pas d'hypothèse. Le jour où je serai sûr de pouvoir dire telle ou telle chose, je vous le dirai.
Q - Le deuxième suspect dont on parle serait l'organisateur...
R - Il serait !... Moi, je ne parle pas au conditionnel, Monsieur Guillaume Durand. Je ne peux pas parler au conditionnel parce que je suis Premier ministre. Donc l'enquête se déroule, je respecte la compétence des magistrats qui font cette enquête et lorsque nous aurons des certitudes, nous le dirons.
Sur ce reportage, je voudrais insister sur un fait, il ne faut pas tout mélanger. Il y a l'Algérie et puis il y a la France. Ce qui se passe en Algérie, c'est l'affaire des Algériens. Il faut se sortir de notre tête que nous sommes responsables de ce qui se passe en Algérie. L'Algérie, ce n'est plus la France et nous n'avons pas à faire d'ingérence en Algérie. C'est aux Algériens de régler leurs problèmes.
Q - C'est peut-être ce qu'ils nous reprochent.
R - Non, ils nous reprochent le contraire. On vient de nous reprocher le contraire. On vient de nous reprocher de soutenir les militaires algériens. Nous ne soutenons pas les militaires algériens. Ce que nous souhaitons, nous, c'est qu'il y ait une Algérie démocratique et stable. C'est le discours que j'ai tenu quand j'étais ministre des Affaires étrangères...
Q - Démocratique et stable, il ne l'est plus du tout.
R - C'est ce que nous souhaitons. Je ne dis pas que c'est ce qui est.
Q - Mais c'est impossible en fait, vous le savez.
R - Pourquoi ?... Il faut se fixer des buts dans la vie. Si on considère que c'est impossible, il n'y a qu'à baisser les bras. Moi, je ne suis pas homme à baiser les bras. Notre discours à nous, notre responsabilité à nous, c'est de dire : "il faut aller vers la démocratie et la stabilité -et donc vers des élections qui soient véritablement des élections".
Puis il y a ce qui se passe en France, alors, là, c'est note responsabilité. Et, cela, nous ne laisserons pas en France se développer des bases arrières du terrorisme.
Q - On en revient à la surveillance...
R - Bien sûr.
Q - On en revient à la surveillance, discrète ?
R - Discrète, efficace, bien entendu...
Q - Donc, vous avez des rapports sur votre bureau ?
R - Je ne peux pas le raconter ici, mais elle est efficace. Une surveillance qui là non plus ne mélange pas tout. Il ne faut pas commencer à laisser croire aux Françaises et aux Français que les 4 millions de Musulmans qui sont en France sont suspects.
Q - Ce n'est pas ce que dit Catherine...
R - Non, non, je ne dénonce personne. Je dis : "Il ne faut pas laisser croire cela". La très grande majorité, la quasi-totalité de la communauté musulmane respecte nos lois et nos règlements. Beaucoup sont Français, d'ailleurs, parmi ces Musulmans. Et donc nous luttons contre le terrorisme avec détermination avec beaucoup d'énergie mais ne mélangeons pas les choses. Je le répète.
Q - Cet alibi, vous y croyez ? Vous n'y croyez pas ? Vous êtes certain qu'il est responsable de l'affaire du boulevard Saint-Michel. Mais surtout, sur le plan diplomatique, avez-vous l'impression que les Suédois, par rapport à la demande que vous formulez, sont en train de gagner du temps pour l'extrader ailleurs et donc, dans ces conditions, rendre l'enquête totalement impossible car on ne le saura jamais ? Vous le savez.
R - Le gouvernement français a désigné un juge d'instruction. C'est le juge qui mène l'enquête, ce n'est pas moi. Le juge d'instruction a accès aux pièces du dossier. Il a été en Suède, vous le savez. Il a estimé qu'il avait suffisamment de présomptions ou d'éléments pour lancer un mandat d'arrêt international et demander l'extradition de Dénèche. Donc, je fais tout à fait confiance à sa sagacité et à son jugement.
Ce que je souhaite, et je n'irai pas au-delà bien entendu ce soir, c'est que les autorités suédoises, puisque la Suède est un pays ami, membre de l'Union européenne qui partage nos valeurs, qui lutte comme nous contre le terrorisme, puisse dans cette affaire faire preuve de solidarité.
Q - Si je vous comprends bien, vous êtes persuadé qu'il a fabriqué cet alibi à postériori ?
R - Là vous lisez non pas dans mes pensées. .-
Q - Mais dans vos yeux.
R .- Mais même très au-delà de mes pensées. Non, je n'ai pas dit cela, Monsieur Durand.
Je n'ai pas dit cela.
Q - Pour terminer cette affaire de terrorisme et qu'on revienne aux affaires politiques et aux affaires qui concernent les Français, -celle là les concerne mais il y a beaucoup d'autres affaires qui les concernent - , je voudrais savoir, sur le fond, pensez-vous que nous sommes actuellement victimes du GIA ? Ou pensez-vous, qu'éventuellement nous sommes victimes du Service secret algérien qui manipulerait une sorte de tension en France pour qu'on se rapproche des autorités militaires algériennes ?
R.- Je vais vous décevoir, mais je continue à vous décevoir, je ne fais pas d'hypothèses, ce n'est pas mon rôle.
Q - On est obligé de les faire.
R - Les enquêteurs font des hypothèses, ils les auront vérifiées, alors, à ce moment-là, nous le dirons.
Mais ce que je peux vous dire, c'est que le déroulement actuel de l'enquête qui a été immédiatement diligentée après l'attentat du métro Saint-Michel aboutit à la piste qui est la plus vraisemblable qui est celle de l'Islamisme. Cela est un fait, il est déjà connu. Au-delà, il faut maintenant que l'enquête progresse.
Q - Dernier mot sur la sécurité : êtes-vous inquiet tout de même ?
R - Bien sûr, je suis inquiet et mon rôle, c'est d'être vigilant. Je vous ai dit toutes les mesures que nous avions prises. Ce ne sont pas des paroles en l'air. Ce sort des milliers de policiers qui sont sur le terrain et les Français les voient. Ils réagissent d'ailleurs très positivement. Quand à la sortie des trains, on leur demande de se prêter à des contrôles, les Français le comprennent. Eh bien nous allons maintenir ce dispositif et nous demandons, je demande, ce soir, à tous les Français, de faire preuve de cet esprit de solidarité qui est nécessaire face à un tel défi parce qu'il faut être vigilant à tout instant.
Q - Monsieur le Premier ministre, on va rejoindre le Général Véricel qui est chargé des essais nucléaires sur place. Bien évidemment j'ai des questions à poser et la première que j'aimerais vous poser, c'est ce premier essai, c'est pour quand ?
R - Je ne peux pas y répondre, vous le savez bien, il y a des secrets d'Etat, pour des
raisons de sécurité tout simplement.
Q - C'est bientôt.
R - On a dit à partir du ler septembre. Je voudrais d'abord dire deux ou trois petites choses, si vous me permettez. Tout à l'heure, on disait que, dans ce Gouvernement, il manquait de fortes personnalités, eh bien en voilà une. Il faut du courage pour faire cela, d'autant que Jean-Jacques de Peretti n'est pas un plongeur professionnel. Il l'a fait avec beaucoup de panache et je tiens à le saluer.
Deuxièmement, nous avons joué dans cette affaire, et vous le savez bien et vous allez continuer d'ailleurs tout à l'heure, la carte de la transparence. Cela a eu au moins un mérite, c'est que, aujourd'hui, il y a une idée qui a le cou tordu si je puis dire, c'est que les essais pourraient être dangereux. Tout le monde sait bien, parce que tout le monde l'a dit, que ces essais ne présentent aucun danger.
Q - Cela, vous nous le garantissez sur l'honneur et sur les experts qui se sont prononcés sur cette affaire-là ? Parce que vous savez qu'il y a beaucoup d'émotion.
R - Ce n'est pas moi qui le garantis, ce sont nos experts, y compris des scientifiques australiens. Je vais vous lire quelque chose si vous me donnez 30 secondes...
Q - ... Vous pouvez.
R - C'est un extrait de la dépêche de Tahiti du 26 août 1995 et on y cite la propagande que les associations écologistes distribuent à ceux qui vont s'embarquer sur les bateaux qui vont vers Mururoa. Je vous lis une phrase : "L'exposition aux radiations que vous pourriez recevoir lors de votre séjour à Mururoa sera inférieure à celle que vous auriez subie en restant en Nouvelle-Zélande."
Ce sont les associations écologiques qui disent cela. Donc, le problème n'est pas là, ces essais ne présentent aucun danger et on vient d'en voir la démonstration.
Q - Je voudrais qu'on revienne parce qu'il y a des points importants dans cette affaire- là. On a dit : "Essais indispensables". François Mitterrand, il y a quelques années, consultant pratiquement les mêmes experts, a pris la décision d'arrêter les essais nucléaires. Puisque ce sont les mêmes experts, au fond n'est-ce qu'une décision politique la reprise ou est-elle vraiment, de votre point de vue, une nécessité militaire profonde pour la sécurité des Français qui vous regardent, qui nous regardent ?
R - C'est une nécessité pour la sécurité des Français. Je voudrais simplement rappeler aux Français que si nous avons eu la paix en Europe pendant 50 ans, nous le devons, en grande partie, à la dissuasion. L'avenir n'est pas à la stabilité en Europe et dans le monde autour de nous, les menaces subsistent, elles ont changé naturellement depuis 1989.
Q - Elles ne sont plus l'Est, ni l'Union soviétique...
R - ... Non, mais il y a d'autres menaces. Il y a encore beaucoup de têtes nucléaires dans un certain nombre de pays de l'ancienne Union soviétique et il y a d'autres pays qui se dotent, hélas, d'armes parfois de destruction massive.
Ces armes n'ont pas, je voudrais le rappeler, mais je crois que les Français le savent bien, pour objectif de servir. La dissuasion nucléaire a précisément pour définition même de ne pas servir puisqu'elle dissuade. Et notre responsabilité à nous, dirigeants de ce pays, c'est de vérifier, c'est cela qui est en cause dans ces essais, que dans 15 ou 20 ans notre dissuasion restera encore crédible. C'est pour cela que nous faisons ces essais qui seront les derniers.
Q - Ce qui veut dire que le prédécesseur de Jacques Chirac, à savoir François Mitterrand, a eu tort de votre point de vue de les interrompre...
R - ... Bien sûr ! Mais nous l'avons dit en 1992 lorsqu'il l'a fait. Nous avons considéré que cette décision était prématurée. Les essais que nous allons faire maintenant étaient programmés à cette époque-là. On les a interrompus trop tôt. Trop tôt, pourquoi ? Parce que nous allons avoir, grâce en partie à ces essais, le Général l'indiquait tout à l'heure, la possibilité de nous passer définitivement des essais et de vérifier la fiabilité de nos armes en laboratoire. Nous allons en particulier près de Bordeaux construire un laser de puissance qui va nous permettre à l'avenir de vérifier que nos armes sont toujours adaptées à leur mission en ne faisant plus d'essais.
Q - Pourquoi les experts avaient-ils recommandé à François Mitterrand d'arrêter ?
R.- Je ne suis pas sûr que les experts aient recommandé à François Mitterrand d'arrêter puisque je voyais récemment les déclarations de M. Attali qui expliquait que le mérite de François Mitterrand, à l'époque, avait été de ne pas s'appuyer sur l'avis des experts.
(Source http://www.diplomatie.gouv.fr, le 24 septembre 2002)