Texte intégral
Mesdames et Messieurs,
Chers amis,
Les agences nationales pour l'emploi, les missions locales, réunies avec un seul et même objectif : livrer cette grande bataille pour l'emploi, dont notre pays a besoin et que nos concitoyens attendent. Et, en même temps, je ne peux pas m'empêcher d'être un peu gêné et embarrassé devant vous cet après-midi, parce que, dans toute bataille, il y a bien sûr une feuille de route. Cette feuille de route, je l'ai énoncée à l'Assemblée nationale, je l'ai énoncée devant la représentation nationale, c'est bien sûr une bataille pour tous nos concitoyens qui sont confrontés à un moment ou à un autre à la difficulté, à la perte d'emploi, à la recherche d'un emploi et qui ont du mal à y parvenir. Et pour tous ceux-là, vous êtes l'espoir, le point de passage obligé, ceux qui pourront, peut-être, débloquer un certain nombre de mécanismes, faciliter un certain nombre de choses. Alors, j'ai engagé cette grande bataille pour l'emploi et puis, je suis revenu vous dire qu'il était nécessaire de s'attaquer plus particulièrement à la situation des plus jeunes, ceux qui veulent mettre un pied sur le marché de l'emploi et qui n'y arrivent pas, parce que les exigences de qualification, de diplôme, d'expérience ne sont jamais suffisants pour ceux-là même qui voudraient les employer. Et puis, je vous ai dit aussi, au fil des mois, qu'il fallait faire un effort spécifique pour les seniors, pour ceux qui, à un moment donné voyaient le sol se dérober sous leurs pieds et qui avaient le sentiment qu'il n'y avait pas de place pour eux alors même que d'autres pays les recrutent beaucoup plus longtemps. Et c'est vrai qu'il y a un effort spécifique à faire dans notre pays.
Et aujourd'hui, je reviens devant vous pour vous dire qu'il y a un nouveau défi qu'il faut relever, qui concerne plus particulièrement les plus jeunes dans les quartiers, dans les banlieues, tous ceux-là qui rencontrent eux aussi un certain nombre de difficultés spécifiques liées en particulier aux discriminations. J'ai bien le sentiment que la feuille de route s'alourdit et qu'il n'est pas facile de démêler les priorités, et qu'il n'est pas facile peut-être aussi de garder espoir et confiance tant la charge qui pèse sur vos épaules est lourde, tant l'attente qui existe dans notre pays est grande.
Et pourtant, je veux vous le dire aujourd'hui solennellement, les efforts que vous avez faits donnent des résultats. Ils donnent des résultats : c'est un élément très important qui doit bien marquer le chemin qui est le nôtre. Vous avez tous répondu "présent", vous avez été au rendez-vous, votre mobilisation a été exceptionnelle et vous avez mené un travail remarquable. Je pense en particulier à la grande opération que vous avez engagée : 57 000 jeunes chômeurs de longue durée qui ont été reçus au fil des derniers mois ; vous les avez tous conviés dans les agences, vous les avez longuement écoutés, vous vous êtes efforcés de leur proposer, à chaque fois, une solution qui répondait à leur situation. Et je peux vous dire que cette mobilisation n'a pas été une mobilisation vaine, loin de là, puisque, grâce à vos efforts, vous avez pu donner à beaucoup de ces jeunes une perspective d'avenir et, pour eux tous, je veux vous dire ici "merci".
Dans notre action, il faut savoir qu'au-delà de ces résultats que nous voyons commencer à s'affirmer, il y a une autre bonne nouvelle, dont on ne parle pas assez, qui est bien l'amélioration globale, l'amélioration générale de la situation économique dans notre pays, qui devrait modifier assez substantiellement le contexte général dans lequel vous allez travailler au cours des prochains mois. En effet, toutes les composantes de la croissance sont bien orientées. La croissance est repartie au troisième trimestre avec un chiffre de 0,7 % ; nous ferons donc plus des 1,5 % de croissance cette année ; nous avons, en Europe, le taux de croissance pour le troisième trimestre le plus élevé, plus élevé que les Anglais, plus élevé que tous nos voisins. Cela aussi n'est pas suffisamment dit et cela montre que nous allons pouvoir obtenir davantage de résultats sur le front de l'emploi. L'investissement des entreprises est dynamique ; il devrait progresser de plus de 3 % en 2005 ; les exportations : alors que l'on a beaucoup dit les difficultés de notre commerce extérieur - et c'est vrai que nous avons connu un cap difficile -, les exportations rebondissent et le commerce extérieur, dans son ensemble, contribue enfin, de nouveau à soutenir la croissance. Et cela aussi, c'est une très bonne nouvelle. La consommation, qui est aussi un grand indicateur, est vigoureuse, avec une tendance annuelle de 4 %, de septembre 2004 à septembre 2005. Donc, là aussi, les consommateurs sont au rendez-vous. La création d'entreprises, autre indicateur essentiel, est très dynamique, avec près de 20 000 créations de nouvelles entreprises par mois. C'est-à-dire que sur la base des douze derniers mois, nous serons au-delà des 220 000 créations d'entreprises ; nous battons des records dans le domaine de la création d'entreprises, et chacun sait que, quand il n'y a pas d'espoir, quand il n'y a pas d'optimisme, on ne crée pas d'entreprise. Eh bien là, c'est tout le contraire qui se produit. Enfin, la construction atteint des records historiques. Nous avons la perspective d'un enchaînement vertueux entre croissance et emploi qui s'enclenche dans notre pays. Le chômage a baissé de plus de 100 000 depuis quatre mois ; nous avons créé près de 70 000 contrats "nouvelles embauches" depuis le mois d'août. Je ne veux pas vous peindre la vie en rose, vous êtes trop près des réalités, vous connaissez trop les difficultés du quotidien, mais toutes ces indications sont des indications d'optimisme et, comme le laboureur, le semeur, quand nous regardons le ciel, nous sommes obligés de constater qu'il y a suffisamment d'éléments d'éclaircie pour nous encourager à agir. Et c'est bien le seul élément de la mobilisation qui compte : nous avons un contexte global qui devrait faciliter et encourager l'action au cours des prochains mois.
Ces dernières semaines, notre pays a connu de graves accès de violence et pour répondre aux inquiétudes et aux attentes de nos concitoyens, le Gouvernement a agi, vous le savez, dans deux directions. Bien sûr, la fermeté, le retour à l'ordre public. C'est l'une des premières missions de l'État : garantir la sécurité de tous les Français. Au-delà des autorisations de couvre-feu, nous avons fait appel aux réservistes de la Police et de la Gendarmerie, nous avons mobilisé les magistrats, pour bien marquer cette exigence de sécurité de tous nos concitoyens. Mais nous avons voulu - et c'est indispensable : pas de fermeté efficace qui ne s'accompagne d'une exigence de respect et d'une exigence de justice, pas de solution durable qui ne s'accompagne d'une véritable prise en compte des problèmes de fond auxquels se heurtent les quartiers et les banlieues et nous voulons donc apporter des réponses concrètes aux habitants des quartiers sensibles. Nous voulons en faire des territoires comme les autres ; pas de territoire à deux vitesses. Pour que personne ne reste au bord du chemin, pour que chacun ait les mêmes chances, nous avons pris des mesures en faveur de l'emploi, en faveur du logement, en faveur de l'urbanisme, en faveur de l'éducation, en faveur des discriminations.
Mais l'emploi des jeunes, c'est une priorité dans notre action pour notre pays. Dans les zones urbaines sensibles, les jeunes rencontrent, nous le savons, plus de difficultés qu'ailleurs - 40 % souvent de chômage des jeunes dans ces quartiers, c'est inacceptable - et, de surcroît, au-delà du problème du chômage, il y a le problème des discriminations qui se surajoute. Et pourtant, leur talent constitue un atout pour notre pays, leur énergie, et nous devons aujourd'hui leur offrir de nouvelles perspectives d'avenir.
Pour cela, j'ai souhaité qu'un accueil personnalisé soit réservé à chacun d'entre eux. Nous sommes là, véritablement, au carrefour de l'exigence nouvelle de notre République. Pendant des siècles, la République a exprimé un certain nombre de principes généraux que nous nous sommes efforcés, plus ou moins facilement, de faire vivre. Ces principes, vous les connaissez : c'est la liberté pour tous ; c'est l'égalité pour tous, et notamment l'égalité des chances ; c'est la fraternité, la solidarité ; c'est la laïcité ; des principes universalistes devant s'appliquer à chacun de nos concitoyens, chaque citoyen valant, de ce fait, méritant que l'on se batte pour lui, pour que se droits puissent lui être garantis. Or nous découvrons, dans nos sociétés modernes, qu'au-delà de l'énoncé et de la défense de ces principes, il y a, bien sûr, des circonstances particulières, des situations particulières pour chaque citoyen, pour chaque individu, qui méritent que l'on rentre davantage dans le détail des choses, que l'on se soucie bien davantage de l'application et de l'applicabilité de ces principes. Ce qui explique aussi qu'un accueil personnalisé, qu'un accompagnement personnalisé, et qu'au-delà du "tous", on mette l'accent sur le "chacun", quelles sont les difficultés que tel ou tel rencontre, plus spécifiques, plus particulières... Ce n'est pas pareil, effectivement, aujourd'hui, de chercher un emploi dans notre pays, selon la couleur de sa peau. Et cela, nous devons le prendre en compte. Le principe universaliste s'applique, il ne s'agit pas de le renier, mais nous devons prendre en compte ces difficultés particulières pour apporter des réponses spécifiques, sans nous voiler la face. Donc, accueil spécifique pour chacun d'entre eux. Dans les trois mois qui viennent, les jeunes se verront proposer un entretien approfondi, et dans les trois mois qui suivent cet entretien, ils bénéficieront d'un accompagnement individuel afin de les aider à trouver une solution. L'autre stratégie aurait été de prévoir des solutions clés en main pour telle et telle catégorie de la population. On aurait pu dire, comme certains pays ont été tentés de le faire ou l'ont fait, "eh bien, pour toute personne issue de telle minorité, tel et tel avantage sera octroyé, tel et tel poste sera réservé" ; c'est, vous le savez, toute la stratégie de la discrimination positive ; c'est ce qui, en général, conduit à une vison communautariste de la société. Ce n'est pas la vision universaliste de la République, ce n'est pas notre vision de la République.
L'ANPE et le conseil national des missions locales se sont pleinement mobilisés pour préparer une mise en ?uvre rapide de ce dispositif. Je tiens à les en remercier chaleureusement : le service public de l'emploi a montré une fois encore qu'il était prêt à relever les défis de notre pays. Pour redonner espoir aux jeunes en difficulté nous devons unir nos efforts, tant la tâche est importante et immense, et votre mobilisation est indispensable. Vous incarnez la République et vous êtes parfois les derniers services publics dans les zones sensibles. Vous vous engagez au quotidien pour aller à la rencontre de ces jeunes. Vous serez donc en première ligne dans cette opération, et j'ai bien conscience de la difficulté, de la lourdeur de la tâche, et je tiens à saluer votre travail, et je veux vous dire que le Gouvernement sera en toutes circonstances à vos cotés.
Pour aider les jeunes des banlieues à trouver leur place dans la société, les élus locaux ont, bien sûr, tout leur rôle à jouer. Ils sont eux aussi en première ligne, qu'il s'agisse des maires qui coordonnent les initiatives, des départements dont la responsabilité est décisive en matière d'insertion sociale, ou des régions, notamment à travers leur rôle dans le domaine de la formation professionnelle. Vous pouvez également compter sur les associations qui travaillent sans relâche au service des habitants des quartiers sensibles. Les entreprises, enfin, sont en train d'effectuer un important travail sur elles-mêmes et se mobilisent en faveur de l'égalité des chances ; je salue leur engagement en faveur de l'apprentissage ; je pense aussi à la Charte de la diversité : elle a déjà été signée par près de trois cents entreprises et je souhaite qu'elles soient de plus en plus nombreuses à adopter et à rentrer dans cette démarche. Pour relever ce défi, vous disposez d'un certain nombre d'outils efficaces : les différents contrats de travail, qui sont un élément clé de la politique d'insertion des jeunes en difficulté, je pense au contrat "jeunes en entreprise" qui doit être particulièrement mobilisé, et au contrat "nouvelles embauches" pour les très petites entreprises, qui sont souvent très présentes dans les quartiers ; je pense aussi au contrat en alternance, à savoir l'apprentissage, les contrats de professionnalisation, ou encore le pacte dans les fonctions publiques ; je pense enfin aux contrats aidés, et notamment au contrat d'accompagnement vers l'emploi et au contrat d'avenir - 20 000 d'entre eux seront réservés spécifiquement au bénéfice des jeunes des quartiers. Les formations et les stages en entreprise apporteront également des solutions, que ce soit à travers le système éducatif classique, à travers les ateliers pédagogiques personnalisés, ou à travers les programmes de formation professionnelle établis par les régions. Je souhaite aussi encourager la formule du volontariat, notamment dans les centres Défense deuxième chance, dont le développement sera accéléré tout au long des deux années qui viennent, notamment dans le cadre du nouveau service civil volontaire. Nous devons enfin favoriser l'insertion des jeunes diplômés, car il y a bien un problème spécifique, pour, ces diplômés. Il est inacceptable que, dans notre pays, des jeunes dont le niveau de formation devrait leur permettre d'accéder à l'emploi, en soient écartés en raison de leur milieu d'origine. Notre pays doit, mieux reconnaître le talent des cités. En accédant à l'emploi, ces jeunes montrent une image positive des zones urbaines sensibles, ils montrent que c'est possible ; en accédant à des emplois de qualité, ils seront un modèle pour les autres jeunes de ces quartiers, ils créeront des dynamiques positives dans leur entourage. Pour que ces demandeurs puissent obtenir au plus vite des entretiens d'embauche dans les entreprises, l'ANPE est en train de préparer un dispositif national. Cela nécessite un engagement fort des entreprises, et notamment de celles qui ont signé la Charte de la diversité, ou celle de l'apprentissage. A elles de manifester aujourd'hui leur engagement citoyen. Je sais que je peux compter sur elles.
Mesdames et messieurs, votre mission est fondamentale, la cohésion sociale de notre pays en dépend. Sachez que nous sommes tous mobilisés à vos cotés pour soutenir votre action et relever ce défi. Je l'ai dit au début, c'est vrai que la charge qui vous est confiée est extrêmement lourde ; c'est vrai que l'attente est extrêmement grande, mais, dans un tel défi, c'est bien toute la Nation qui doit se rassembler. Et nous voyons, mois après mois, dans les tensions qui s'expriment au sein de la société française, qu'il y a à la fois l'envie que les choses se dénouent, l'envie que bien des problèmes puissent trouver leur solution et, en même temps, un sentiment de frustration et parfois de colère.
Il y a une course de vitesse qui est engagée, entre notre capacité à apporter des réponses au quotidien, et ce sentiment d'impuissance, et parfois même d'impuissance publique qui s'exprime. Et c'est bien là où la mobilisation qui est engagée sur la bataille pour l'emploi est une mobilisation essentielle pour témoigner de la capacité de notre pays à régler ses propres problèmes. Nous avons pris du retard au cours des dernières années, et le chemin qui a été parcouru au cours des derniers mois constitue, pour nous tous, un encouragement. Nous avons réussi à passer en dessous de la barre des 10% du nombre de demandeurs d'emploi, mais ce n'est pas encore suffisant et ce n'est pas encore assez rapide. Nous devons accroître ce rythme, montrer que cela est possible. Vous le savez, au contact des réalités, au contact de tous ceux qui rencontrent des difficultés et qui souffrent, cela est possible. Et cette conviction, plus elle sera partagée par nos compatriotes, plus la vitesse du changement, plus l'accélération de la prise de conscience sera grande. C'est dire à quel point la partie qui s'ouvre aujourd'hui est essentielle pour notre pays, essentielle pour nos concitoyens. Elle est aussi essentielle pour la démocratie. La démocratie, c'est la capacité d'un peuple à se mobiliser et à trouver des réponses aux problèmes qui se posent. Eh bien, dans notre démocratie, la bataille de l'emploi est aujourd'hui la clé, le rendez-vous essentiel que nous avons, comme citoyens, comme grands acteurs de la démocratie. Et vous êtes au premier rang, aux avant-postes de ce combat. C'est dire à quel point le combat que nous menons ensemble est un combat qui dépasse tous les clivages partisans. Il s'agit bien de savoir quel est l'avenir que notre pays veut construire, quelle place il veut donner et réserver à chacun, quelle générosité, quel prix il est prêt à payer pour que cette place permette à chacun d'exprimer sa capacité, son talent, comment faire pour que, ne laissant personne au bord du chemin, chacun ait sa place, chacun ait sa chance. Vous le savez, depuis des mois, nous essayons de mener à la fois une grande détermination, en définissant de nouveaux instruments, de nouveaux outils qui vous permettent de mieux agir. Et en même temps, à coté de cette détermination il y a beaucoup de pragmatisme. C'est dire que toutes les difficultés que vous ressentez au quotidien, tous les obstacles que vous ressentez au quotidien, eh bien, il nous appartient d'essayer de mieux les lever, avec pragmatisme, en tirant les leçons de l'expérience. Et c'est bien sur ces deux jambes, à la fois la détermination et la conviction, et en même temps, le pragmatisme, que nous devons continuer à avancer. Et semaine après semaine, mois après mois nous tirerons les leçons de la difficulté. Il n'y a qu'une seule chose que nous ne puissions pas faire, c'est de baisser les bras. Aucun d'entre nous ne peut dire" ce n'est pas possible, nous n'y arriverons pas". L'enjeu est trop grand ; nous sommes à la croisée des chemins pour notre pays ; nous voulons vivre dans une démocratie qui témoigne de la capacité de sursaut et de mobilisation de chacun d'entre nous, au service de tous les Français. Et c'est bien cette preuve qu'ensemble nous allons donner, et pour tout cela, je veux vous dire "merci".(Source http://www.premier-ministre.gouv.fr, le 23 novembre 2005
Chers amis,
Les agences nationales pour l'emploi, les missions locales, réunies avec un seul et même objectif : livrer cette grande bataille pour l'emploi, dont notre pays a besoin et que nos concitoyens attendent. Et, en même temps, je ne peux pas m'empêcher d'être un peu gêné et embarrassé devant vous cet après-midi, parce que, dans toute bataille, il y a bien sûr une feuille de route. Cette feuille de route, je l'ai énoncée à l'Assemblée nationale, je l'ai énoncée devant la représentation nationale, c'est bien sûr une bataille pour tous nos concitoyens qui sont confrontés à un moment ou à un autre à la difficulté, à la perte d'emploi, à la recherche d'un emploi et qui ont du mal à y parvenir. Et pour tous ceux-là, vous êtes l'espoir, le point de passage obligé, ceux qui pourront, peut-être, débloquer un certain nombre de mécanismes, faciliter un certain nombre de choses. Alors, j'ai engagé cette grande bataille pour l'emploi et puis, je suis revenu vous dire qu'il était nécessaire de s'attaquer plus particulièrement à la situation des plus jeunes, ceux qui veulent mettre un pied sur le marché de l'emploi et qui n'y arrivent pas, parce que les exigences de qualification, de diplôme, d'expérience ne sont jamais suffisants pour ceux-là même qui voudraient les employer. Et puis, je vous ai dit aussi, au fil des mois, qu'il fallait faire un effort spécifique pour les seniors, pour ceux qui, à un moment donné voyaient le sol se dérober sous leurs pieds et qui avaient le sentiment qu'il n'y avait pas de place pour eux alors même que d'autres pays les recrutent beaucoup plus longtemps. Et c'est vrai qu'il y a un effort spécifique à faire dans notre pays.
Et aujourd'hui, je reviens devant vous pour vous dire qu'il y a un nouveau défi qu'il faut relever, qui concerne plus particulièrement les plus jeunes dans les quartiers, dans les banlieues, tous ceux-là qui rencontrent eux aussi un certain nombre de difficultés spécifiques liées en particulier aux discriminations. J'ai bien le sentiment que la feuille de route s'alourdit et qu'il n'est pas facile de démêler les priorités, et qu'il n'est pas facile peut-être aussi de garder espoir et confiance tant la charge qui pèse sur vos épaules est lourde, tant l'attente qui existe dans notre pays est grande.
Et pourtant, je veux vous le dire aujourd'hui solennellement, les efforts que vous avez faits donnent des résultats. Ils donnent des résultats : c'est un élément très important qui doit bien marquer le chemin qui est le nôtre. Vous avez tous répondu "présent", vous avez été au rendez-vous, votre mobilisation a été exceptionnelle et vous avez mené un travail remarquable. Je pense en particulier à la grande opération que vous avez engagée : 57 000 jeunes chômeurs de longue durée qui ont été reçus au fil des derniers mois ; vous les avez tous conviés dans les agences, vous les avez longuement écoutés, vous vous êtes efforcés de leur proposer, à chaque fois, une solution qui répondait à leur situation. Et je peux vous dire que cette mobilisation n'a pas été une mobilisation vaine, loin de là, puisque, grâce à vos efforts, vous avez pu donner à beaucoup de ces jeunes une perspective d'avenir et, pour eux tous, je veux vous dire ici "merci".
Dans notre action, il faut savoir qu'au-delà de ces résultats que nous voyons commencer à s'affirmer, il y a une autre bonne nouvelle, dont on ne parle pas assez, qui est bien l'amélioration globale, l'amélioration générale de la situation économique dans notre pays, qui devrait modifier assez substantiellement le contexte général dans lequel vous allez travailler au cours des prochains mois. En effet, toutes les composantes de la croissance sont bien orientées. La croissance est repartie au troisième trimestre avec un chiffre de 0,7 % ; nous ferons donc plus des 1,5 % de croissance cette année ; nous avons, en Europe, le taux de croissance pour le troisième trimestre le plus élevé, plus élevé que les Anglais, plus élevé que tous nos voisins. Cela aussi n'est pas suffisamment dit et cela montre que nous allons pouvoir obtenir davantage de résultats sur le front de l'emploi. L'investissement des entreprises est dynamique ; il devrait progresser de plus de 3 % en 2005 ; les exportations : alors que l'on a beaucoup dit les difficultés de notre commerce extérieur - et c'est vrai que nous avons connu un cap difficile -, les exportations rebondissent et le commerce extérieur, dans son ensemble, contribue enfin, de nouveau à soutenir la croissance. Et cela aussi, c'est une très bonne nouvelle. La consommation, qui est aussi un grand indicateur, est vigoureuse, avec une tendance annuelle de 4 %, de septembre 2004 à septembre 2005. Donc, là aussi, les consommateurs sont au rendez-vous. La création d'entreprises, autre indicateur essentiel, est très dynamique, avec près de 20 000 créations de nouvelles entreprises par mois. C'est-à-dire que sur la base des douze derniers mois, nous serons au-delà des 220 000 créations d'entreprises ; nous battons des records dans le domaine de la création d'entreprises, et chacun sait que, quand il n'y a pas d'espoir, quand il n'y a pas d'optimisme, on ne crée pas d'entreprise. Eh bien là, c'est tout le contraire qui se produit. Enfin, la construction atteint des records historiques. Nous avons la perspective d'un enchaînement vertueux entre croissance et emploi qui s'enclenche dans notre pays. Le chômage a baissé de plus de 100 000 depuis quatre mois ; nous avons créé près de 70 000 contrats "nouvelles embauches" depuis le mois d'août. Je ne veux pas vous peindre la vie en rose, vous êtes trop près des réalités, vous connaissez trop les difficultés du quotidien, mais toutes ces indications sont des indications d'optimisme et, comme le laboureur, le semeur, quand nous regardons le ciel, nous sommes obligés de constater qu'il y a suffisamment d'éléments d'éclaircie pour nous encourager à agir. Et c'est bien le seul élément de la mobilisation qui compte : nous avons un contexte global qui devrait faciliter et encourager l'action au cours des prochains mois.
Ces dernières semaines, notre pays a connu de graves accès de violence et pour répondre aux inquiétudes et aux attentes de nos concitoyens, le Gouvernement a agi, vous le savez, dans deux directions. Bien sûr, la fermeté, le retour à l'ordre public. C'est l'une des premières missions de l'État : garantir la sécurité de tous les Français. Au-delà des autorisations de couvre-feu, nous avons fait appel aux réservistes de la Police et de la Gendarmerie, nous avons mobilisé les magistrats, pour bien marquer cette exigence de sécurité de tous nos concitoyens. Mais nous avons voulu - et c'est indispensable : pas de fermeté efficace qui ne s'accompagne d'une exigence de respect et d'une exigence de justice, pas de solution durable qui ne s'accompagne d'une véritable prise en compte des problèmes de fond auxquels se heurtent les quartiers et les banlieues et nous voulons donc apporter des réponses concrètes aux habitants des quartiers sensibles. Nous voulons en faire des territoires comme les autres ; pas de territoire à deux vitesses. Pour que personne ne reste au bord du chemin, pour que chacun ait les mêmes chances, nous avons pris des mesures en faveur de l'emploi, en faveur du logement, en faveur de l'urbanisme, en faveur de l'éducation, en faveur des discriminations.
Mais l'emploi des jeunes, c'est une priorité dans notre action pour notre pays. Dans les zones urbaines sensibles, les jeunes rencontrent, nous le savons, plus de difficultés qu'ailleurs - 40 % souvent de chômage des jeunes dans ces quartiers, c'est inacceptable - et, de surcroît, au-delà du problème du chômage, il y a le problème des discriminations qui se surajoute. Et pourtant, leur talent constitue un atout pour notre pays, leur énergie, et nous devons aujourd'hui leur offrir de nouvelles perspectives d'avenir.
Pour cela, j'ai souhaité qu'un accueil personnalisé soit réservé à chacun d'entre eux. Nous sommes là, véritablement, au carrefour de l'exigence nouvelle de notre République. Pendant des siècles, la République a exprimé un certain nombre de principes généraux que nous nous sommes efforcés, plus ou moins facilement, de faire vivre. Ces principes, vous les connaissez : c'est la liberté pour tous ; c'est l'égalité pour tous, et notamment l'égalité des chances ; c'est la fraternité, la solidarité ; c'est la laïcité ; des principes universalistes devant s'appliquer à chacun de nos concitoyens, chaque citoyen valant, de ce fait, méritant que l'on se batte pour lui, pour que se droits puissent lui être garantis. Or nous découvrons, dans nos sociétés modernes, qu'au-delà de l'énoncé et de la défense de ces principes, il y a, bien sûr, des circonstances particulières, des situations particulières pour chaque citoyen, pour chaque individu, qui méritent que l'on rentre davantage dans le détail des choses, que l'on se soucie bien davantage de l'application et de l'applicabilité de ces principes. Ce qui explique aussi qu'un accueil personnalisé, qu'un accompagnement personnalisé, et qu'au-delà du "tous", on mette l'accent sur le "chacun", quelles sont les difficultés que tel ou tel rencontre, plus spécifiques, plus particulières... Ce n'est pas pareil, effectivement, aujourd'hui, de chercher un emploi dans notre pays, selon la couleur de sa peau. Et cela, nous devons le prendre en compte. Le principe universaliste s'applique, il ne s'agit pas de le renier, mais nous devons prendre en compte ces difficultés particulières pour apporter des réponses spécifiques, sans nous voiler la face. Donc, accueil spécifique pour chacun d'entre eux. Dans les trois mois qui viennent, les jeunes se verront proposer un entretien approfondi, et dans les trois mois qui suivent cet entretien, ils bénéficieront d'un accompagnement individuel afin de les aider à trouver une solution. L'autre stratégie aurait été de prévoir des solutions clés en main pour telle et telle catégorie de la population. On aurait pu dire, comme certains pays ont été tentés de le faire ou l'ont fait, "eh bien, pour toute personne issue de telle minorité, tel et tel avantage sera octroyé, tel et tel poste sera réservé" ; c'est, vous le savez, toute la stratégie de la discrimination positive ; c'est ce qui, en général, conduit à une vison communautariste de la société. Ce n'est pas la vision universaliste de la République, ce n'est pas notre vision de la République.
L'ANPE et le conseil national des missions locales se sont pleinement mobilisés pour préparer une mise en ?uvre rapide de ce dispositif. Je tiens à les en remercier chaleureusement : le service public de l'emploi a montré une fois encore qu'il était prêt à relever les défis de notre pays. Pour redonner espoir aux jeunes en difficulté nous devons unir nos efforts, tant la tâche est importante et immense, et votre mobilisation est indispensable. Vous incarnez la République et vous êtes parfois les derniers services publics dans les zones sensibles. Vous vous engagez au quotidien pour aller à la rencontre de ces jeunes. Vous serez donc en première ligne dans cette opération, et j'ai bien conscience de la difficulté, de la lourdeur de la tâche, et je tiens à saluer votre travail, et je veux vous dire que le Gouvernement sera en toutes circonstances à vos cotés.
Pour aider les jeunes des banlieues à trouver leur place dans la société, les élus locaux ont, bien sûr, tout leur rôle à jouer. Ils sont eux aussi en première ligne, qu'il s'agisse des maires qui coordonnent les initiatives, des départements dont la responsabilité est décisive en matière d'insertion sociale, ou des régions, notamment à travers leur rôle dans le domaine de la formation professionnelle. Vous pouvez également compter sur les associations qui travaillent sans relâche au service des habitants des quartiers sensibles. Les entreprises, enfin, sont en train d'effectuer un important travail sur elles-mêmes et se mobilisent en faveur de l'égalité des chances ; je salue leur engagement en faveur de l'apprentissage ; je pense aussi à la Charte de la diversité : elle a déjà été signée par près de trois cents entreprises et je souhaite qu'elles soient de plus en plus nombreuses à adopter et à rentrer dans cette démarche. Pour relever ce défi, vous disposez d'un certain nombre d'outils efficaces : les différents contrats de travail, qui sont un élément clé de la politique d'insertion des jeunes en difficulté, je pense au contrat "jeunes en entreprise" qui doit être particulièrement mobilisé, et au contrat "nouvelles embauches" pour les très petites entreprises, qui sont souvent très présentes dans les quartiers ; je pense aussi au contrat en alternance, à savoir l'apprentissage, les contrats de professionnalisation, ou encore le pacte dans les fonctions publiques ; je pense enfin aux contrats aidés, et notamment au contrat d'accompagnement vers l'emploi et au contrat d'avenir - 20 000 d'entre eux seront réservés spécifiquement au bénéfice des jeunes des quartiers. Les formations et les stages en entreprise apporteront également des solutions, que ce soit à travers le système éducatif classique, à travers les ateliers pédagogiques personnalisés, ou à travers les programmes de formation professionnelle établis par les régions. Je souhaite aussi encourager la formule du volontariat, notamment dans les centres Défense deuxième chance, dont le développement sera accéléré tout au long des deux années qui viennent, notamment dans le cadre du nouveau service civil volontaire. Nous devons enfin favoriser l'insertion des jeunes diplômés, car il y a bien un problème spécifique, pour, ces diplômés. Il est inacceptable que, dans notre pays, des jeunes dont le niveau de formation devrait leur permettre d'accéder à l'emploi, en soient écartés en raison de leur milieu d'origine. Notre pays doit, mieux reconnaître le talent des cités. En accédant à l'emploi, ces jeunes montrent une image positive des zones urbaines sensibles, ils montrent que c'est possible ; en accédant à des emplois de qualité, ils seront un modèle pour les autres jeunes de ces quartiers, ils créeront des dynamiques positives dans leur entourage. Pour que ces demandeurs puissent obtenir au plus vite des entretiens d'embauche dans les entreprises, l'ANPE est en train de préparer un dispositif national. Cela nécessite un engagement fort des entreprises, et notamment de celles qui ont signé la Charte de la diversité, ou celle de l'apprentissage. A elles de manifester aujourd'hui leur engagement citoyen. Je sais que je peux compter sur elles.
Mesdames et messieurs, votre mission est fondamentale, la cohésion sociale de notre pays en dépend. Sachez que nous sommes tous mobilisés à vos cotés pour soutenir votre action et relever ce défi. Je l'ai dit au début, c'est vrai que la charge qui vous est confiée est extrêmement lourde ; c'est vrai que l'attente est extrêmement grande, mais, dans un tel défi, c'est bien toute la Nation qui doit se rassembler. Et nous voyons, mois après mois, dans les tensions qui s'expriment au sein de la société française, qu'il y a à la fois l'envie que les choses se dénouent, l'envie que bien des problèmes puissent trouver leur solution et, en même temps, un sentiment de frustration et parfois de colère.
Il y a une course de vitesse qui est engagée, entre notre capacité à apporter des réponses au quotidien, et ce sentiment d'impuissance, et parfois même d'impuissance publique qui s'exprime. Et c'est bien là où la mobilisation qui est engagée sur la bataille pour l'emploi est une mobilisation essentielle pour témoigner de la capacité de notre pays à régler ses propres problèmes. Nous avons pris du retard au cours des dernières années, et le chemin qui a été parcouru au cours des derniers mois constitue, pour nous tous, un encouragement. Nous avons réussi à passer en dessous de la barre des 10% du nombre de demandeurs d'emploi, mais ce n'est pas encore suffisant et ce n'est pas encore assez rapide. Nous devons accroître ce rythme, montrer que cela est possible. Vous le savez, au contact des réalités, au contact de tous ceux qui rencontrent des difficultés et qui souffrent, cela est possible. Et cette conviction, plus elle sera partagée par nos compatriotes, plus la vitesse du changement, plus l'accélération de la prise de conscience sera grande. C'est dire à quel point la partie qui s'ouvre aujourd'hui est essentielle pour notre pays, essentielle pour nos concitoyens. Elle est aussi essentielle pour la démocratie. La démocratie, c'est la capacité d'un peuple à se mobiliser et à trouver des réponses aux problèmes qui se posent. Eh bien, dans notre démocratie, la bataille de l'emploi est aujourd'hui la clé, le rendez-vous essentiel que nous avons, comme citoyens, comme grands acteurs de la démocratie. Et vous êtes au premier rang, aux avant-postes de ce combat. C'est dire à quel point le combat que nous menons ensemble est un combat qui dépasse tous les clivages partisans. Il s'agit bien de savoir quel est l'avenir que notre pays veut construire, quelle place il veut donner et réserver à chacun, quelle générosité, quel prix il est prêt à payer pour que cette place permette à chacun d'exprimer sa capacité, son talent, comment faire pour que, ne laissant personne au bord du chemin, chacun ait sa place, chacun ait sa chance. Vous le savez, depuis des mois, nous essayons de mener à la fois une grande détermination, en définissant de nouveaux instruments, de nouveaux outils qui vous permettent de mieux agir. Et en même temps, à coté de cette détermination il y a beaucoup de pragmatisme. C'est dire que toutes les difficultés que vous ressentez au quotidien, tous les obstacles que vous ressentez au quotidien, eh bien, il nous appartient d'essayer de mieux les lever, avec pragmatisme, en tirant les leçons de l'expérience. Et c'est bien sur ces deux jambes, à la fois la détermination et la conviction, et en même temps, le pragmatisme, que nous devons continuer à avancer. Et semaine après semaine, mois après mois nous tirerons les leçons de la difficulté. Il n'y a qu'une seule chose que nous ne puissions pas faire, c'est de baisser les bras. Aucun d'entre nous ne peut dire" ce n'est pas possible, nous n'y arriverons pas". L'enjeu est trop grand ; nous sommes à la croisée des chemins pour notre pays ; nous voulons vivre dans une démocratie qui témoigne de la capacité de sursaut et de mobilisation de chacun d'entre nous, au service de tous les Français. Et c'est bien cette preuve qu'ensemble nous allons donner, et pour tout cela, je veux vous dire "merci".(Source http://www.premier-ministre.gouv.fr, le 23 novembre 2005