Déclaration de Mme Nelly Olin, ministre de l'écologie et du développement durable, sur la mise en oeuvre de la directive cadre européenne sur l'eau et sur le projet de loi sur l'eau et les milieux aquatiques, dans l'Oise le 16 décembre 2005.

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Circonstance : Journée organisée par l'Union des maires de l'Oise sur le thème Eau et assainissement, le 16 décembre 2005

Texte intégral

Monsieur le Préfet ;
Monsieur le Sénateur ;
Mesdames et messieurs les Maires ;
Mesdames et messieurs les Présidents ;
Mesdames, Messieurs ;
C?est avec beaucoup de plaisir que je suis parmi vous à l?occasion de cette journée organisée par l?Union des maires de l?Oise et qui est consacrée à l?eau et à l?assainissement. Je tiens à saluer cette initiative, qui me paraît particulièrement bien venue dans le contexte de mise en ?uvre de la directive cadre, de réforme de la politique de l?eau et de préparation des 9ème programmes des agences de l?eau.
C?est donc autour de cette approche à la fois européenne et nationale que je ferai porter mes propos.
Comme vous le savez, la politique de l?eau est fortement encadrée au niveau européen. Cela ne va pas sans contraintes. Mais il s?agit d?un puissant moteur pour mettre en ?uvre une politique de l?eau exigeante. Où en serions-nous sans ces engagements collectifs que nous avons pris au niveau européen ?
Il en va de notre crédibilité de les respecter. Sur ce point, le projet de loi portant transposition des dernières directives environnementales a été adopté il y a déjà quelques semaines.
La France a donc maintenant totalement transposé au niveau législatif les directives en matière d?environnement.
S?agissant de la politique de l?eau, notre objectif est clair et mobilisateur : atteindre le bon état écologique des masses d?eau en 2015.
Cet objectif représente une véritable exigence de résultats. Il s?inscrit dans une politique de développement durable : plutôt prévenir et préserver un milieu naturel en bon état, que guérir et supporter des coûts de traitement de l?eau de plus en plus onéreux. Il doit guider notre action dans la mise en ?uvre de la politique de l?eau.
Ceci doit nous inviter à réfléchir sur notre stratégie et nos moyens d?actions à moyen et à long terme.
Nous devons faire preuve d?imagination et d?audace et saisir l?opportunité offerte par la loi sur l?eau, la révision des SDAGE et la préparation des 9ème programmes des agences de l?eau pour mettre en place une stratégie claire et partagée.
Les états des lieux ont été réalisés début 2005 dans les bassins. A l?issue, une importante consultation du public sur les enjeux de la gestion de l?eau s?est déroulée du 2 mai au 2 novembre 2005. Elle a montré les attentes fortes de nos concitoyens sur cette question de l?eau, en particulier sur le bassin Seine-Normandie.
La mise en ?uvre de la directive cadre sur l?eau entre maintenant dans une phase encore plus active, avec la définition du plan de gestion et des actions à entreprendre.
Les comités de bassin préparent pour fin 2006 un avant-projet de révision des Schémas Directeur d?Aménagement et de Gestion des Eaux, les SDAGE, pour y intégrer les objectifs de la directive cadre.
Certes, des dérogations en matière de délais ou d?objectifs pourront être prévues lorsque le coût pour atteindre le bon état écologique des eaux serait démesuré. Mais celles-ci devront être justifiées par des études économiques détaillées.
Les SDAGE devront également rendre compte de la contribution des acteurs en fonction de leur impact sur les ressources en eau, tout en tenant compte des conséquences sociales, environnementales et économiques.
Soumis à la consultation du public fin 2007, les projets de SDAGE seront adoptés par les Comités de bassin fin 2008 avant approbation par les préfets coordonnateurs de bassin.
Un programme de mesures incitatives et réglementaires sera élaboré en parallèle. Au niveau incitatif, les 9ème programmes d?intervention des agences de l?eau en seront bien sûr un élément essentiel, avec quatre axes majeurs :
Renforcer la collaboration entre tous les acteurs pour s?adapter aux réalités du terrain ;
Assurer une synergie entre l?action financière et l?action réglementaire ;
Renforcer l?efficacité des interventions, en ayant recours à l?analyse économique et à l?évaluation environnementale ;
Développer l?ingénierie financière de façon à accroître l?efficacité d?intervention sans augmenter le prix de l?eau.
Je suis très attachée à ce que l?élaboration de ces programmes se fasse dans un esprit de grande concertation avec les acteurs de terrains, comme vous avez pu le faire lors de la réunion de la Commission géographique de l?Oise la semaine dernière. Je sais que les débats y ont été nourris et constructifs avec une importante participation des élus afin de faire remonter des propositions concrètes au Comité de bassin.
L?objectif global de la directive cadre sur l?eau ne doit pas nous faire oublier que d?autres directives doivent être mises en ?uvre, comme la directive relative à la lutte contre la pollution par les nitrates d?origine agricole, la directive « eaux résiduaires urbaines », ou encore la directive « eaux de baignades ».
Ces directives conditionneront largement les interventions financières des agences pour les premières années du 9ème programme. En effet, dans les domaines qu?elles encadrent nous devons respecter les objectifs communautaires que nous nous sommes fixés, et la France doit accomplir des progrès importants pour rattraper le retard qu?elle a accumulé dans un certain nombre de cas.
L?état des lieux réalisé début 2005 dans les bassins montre que sans inflexion de notre politique, l?objectif de bon état des eaux en 2015 ne serait garanti que sur environ la moitié des masses d?eaux.
Dans le département de l?Oise ce serait 60% des masses d?eau superficielles et 70% des masses d?eau souterraines qui pourraient ne pas atteindre le bon état.
Dans ce contexte, j?entends bien mener à son terme le projet de loi sur l?eau et les milieux aquatiques.
Celui-ci a déjà été adopté par le Sénat en première lecture le 14 avril dernier, et sera examiné devant l?Assemblée nationale en avril prochain. Je souhaite qu?il soit adopté définitivement d?ici l?été 2006.
J?y suis particulièrement attachée car cette loi est nécessaire et attendue depuis bien longtemps. Elle créera les conditions permettant d?atteindre le bon état des eaux en 2015, et apportera des solutions concrètes aux élus. 4 aspects me semblent particulièrement importants :
1/ Le projet de loi permet de sécuriser les moyens financiers consacrés à l?eau. Il rend le dispositif des agences de l?eau compatible avec le droit constitutionnel en prévoyant la définition législative des assiettes des redevances et des fourchettes de taux. Il permettra leur évolution et leur adaptation aux nouveaux défis à surmonter. Ceci permettra de continuer à prélever environ 2 milliards d?euros de redevances par an à partir de 2007, qui servent intégralement à financer la politique de l?eau.
Il s?agit également d?assurer une meilleure solidarité avec les communes rurales. La loi apportera une garantie en la matière. Le texte actuel prévoit que les contributions versées par les agences au titre de la solidarité envers les communes rurales ne pourront être inférieures à 150 M? par an. Ceci permettra de retrouver le niveau atteint par le FNDAE avant la suppression de la contribution du PMU.
D?autres ressources sont également prévues avec la possibilité qui sera offerte aux communes de créer une taxe sur le pluvial ou la création de fonds départementaux.
2/ Le projet de loi donnera aux maires de nouveaux outils pour mieux protéger leurs ressources en eau potable, à la fois en quantité, comme nous y incitent la succession des sécheresses, et en qualité, avec le renforcement de la lutte contre les pollutions diffuses. Le projet de loi instaure une redevance sur les produits phytosanitaires dont le produit sera affecté aux agences de l?eau. Il permettra également de développer une approche à l?échelle des aires d?alimentation des captages d?eau potable.
En matière d?assainissement, il s?agit de répondre à des points précis pour faciliter votre action quotidienne. La création d?un fonds de garantie pour les boues de station d?épuration sécurisera leur épandage.
Il permettra de répondre à l?attente des agriculteurs qui contribuent dans ce domaine au recyclage de nos déchets. Je tiens d?ailleurs à saluer cet engagement citoyen.
La loi permettra de faciliter également la mise en ?uvre des services publics d?assainissement non collectif, notamment le financement de leur démarrage. Elle permettra également aux communes qui le souhaitent d?offrir une prestation complète incluant au-delà du contrôle, l?entretien et la réhabilitation pour assurer à nos concitoyens un service correspondant mieux à leurs attentes.
Il me semble en effet très important d?apporter des solutions concrètes qui permettent à l?assainissement non collectif de se développer.
Il s?agit là d?une solution qu?il ne faut pas négliger, particulièrement en milieu rural. Votre département compte des réalisations importantes dans ce domaine, notamment dans la communauté de communes de la Picardie Verte qui présentera son expérience cette après-midi.
Je sais également votre inquiétude à l?approche de l?échéance du 31 décembre 2005 pour la mise en ?uvre des Services publics de l?assainissement non collectif. Cette question de délais pourra être abordée dans le cadre du débat du projet de loi sur l?eau.
Le projet de loi donne également de nouveaux outils pour gérer les services publics de l?eau et de l?assainissement dans une plus grande transparence.
Enfin, il renforce la gestion locale et partagée de la ressource en eau à travers les SAGE dont la portée juridique est renforcée. Les élus de l?Oise font preuve d?un remarquable dynamisme dans ce domaine : le SAGE de l?Automne a été approuvé, celui de la Nonette est validé par le Comité de bassin, tandis que le SAGE Oise Aronde progresse rapidement. Je pense que vous apprécierez donc à sa juste valeur cette mesure, qui donnera davantage de poids à votre démarche.
3/ Le projet de loi renforce la préservation des milieux aquatiques, pour atteindre le bon état écologique en 2015.
Les procédures d?entretien des rivières sont rénovées et les débits minimums qui devront être laissés dans les cours d?eau par les ouvrages hydrauliques sont précisés. Le texte issu du Sénat réalise un bon équilibre entre préservation des équilibres écologiques et développement des énergies renouvelables, dont l?hydroélectricité.
4/ Au plan institutionnel, le projet de loi renforce le rôle des comités de bassin, en s?appuyant davantage sur les commissions territoriales pour les grands bassins. Il intègre le Conseil Supérieur de la Pêche à un office national de l?eau et des milieux aquatiques, l?ONEMA, chargé du système d?information sur l?eau, de la surveillance, des études et de l?expertise.
Avant de terminer mes propos, je voudrais évoquer avec vous les questions de sécheresse et d?inondation.
Nous avons pu gérer la situation de l?été dernier grâce à un effort d?anticipation et de suivi en temps réel. Les impacts ont été importants au niveau national, et dans le département de l?Oise la vallée de l?Aronde a particulièrement souffert.
De telles sécheresses risquent de se reproduire plus fréquemment avec la modification du climat. C?est pourquoi j?ai lancé le 26 octobre dernier un plan pour réduire structurellement notre vulnérabilité à la sécheresse.
Cet automne et ce début d?hiver sont d?ailleurs particulièrement secs.
Si des pluies suffisantes n?arrivent pas d?ici le printemps, je redoute une situation très difficile pour l?été à venir. Il est donc important que chacun prenne en compte ces éléments, qui ne sont cependant que provisoires, pour prévoir d?adapter ses usages de l?eau en conséquence. Je tiens d?ailleurs à saluer les réflexions que vous conduisez en matière de gestion quantitative dans le cadre des SAGE, ainsi que la définition de schémas directeurs d?alimentation en eau potable, notamment dans les communautés de communes du plateau picard, du des deux sources, et du pays valois.
En matière d?inondation, la réforme des services d?annonce et de prévision des crues sera totalement opérationnelle en juillet 2006. Votre département a connu des épisodes particulièrement difficiles en matière d?inondation. L?entente Oise-Aisne conduit un programme exemplaire en matière de prévention des inondations associant des actions de rétention amont et d?information du public. Les travaux de mise en place d?ouvrages de ralentissement
dynamique sont engagés, notamment ceux de Longueil Sainte-Marie, ce qui est très satisfaisant. Je vous confirme mon soutien à la mise en ?uvre de ce programme d?action.
Comme vous le constatez, ces projets sont très ambitieux. Si le cap est fixé au plan européen et national, l?action concrète doit se faire au niveau local, au plus près du terrain. C?est pourquoi je souhaite vivement que le projet de loi soit adopté cette année pour renforcer la capacité d?action dont nous disposons.
Aussi, j?ai besoin de votre mobilisation à tous, en particulier à vous les maires et les élus locaux, pour décliner cette stratégie sur les territoires. Les actions de reconquête de la qualité de l?eau nécessitent du temps, or 2015 c?est déjà demain. Il nous faut donc agir très vite. Je vous remercie.