Texte intégral
S. Paoli - L'Union européenne saura-t-elle débloquer le verrou de l'unanimité à vingt-cinq ? L'Allemagne refuse pour l'instant l'application d'une TVA réduite à la restauration dont le principe avait été pourtant accepté par le chancelier Schröder. Quant au projet de budget britannique pour l'Union, il est jugé inacceptable par la Commission : trop d'efforts étant demandés par Londres aux pays les plus pauvres de l'Union, trop d'avantages consentis aux riches. Lesquels feront les premiers pas ?... Ingérable à vingt-cinq ?
R - Non, pas ingérable. On gère l'Europe quand même depuis maintenant plusieurs mois à vingt-cinq. C'est vrai que c'est plus difficile que lorsque nous étions un peu moins nombreux, c'est vrai aussi que c'était pour ça que nous souhaitions que nous ayons une nouvelle Constitution, mais pas ingérable non !
Q - Mais par exemple, le cas concret, l'Allemagne, Monsieur Schröder dit : oui, pourquoi pas au principe d'une TVA abaissée sur la restauration. Il l'avait dit et cela ne marche pas.
R - Je suis là aussi pour expliquer ce qui se passe, à l'instant où nous parlons, parce que bien entendu, le dossier va continuer à évoluer, le Gouvernement est déterminé à poursuivre ses efforts et à aller de l'avant, afin d'obtenir et la réduction de TVA sur la restauration, mais aussi le maintien bien sûr dans le bâtiment. Il y avait un projet qui est un projet qu'a soutenu la France. Ce projet tendait à dire que pour les pays membres, eh bien chacun peut faire ce qu'il veut chez lui, à partir du moment où la TVA ne va pas rentrer en concurrence sur des secteurs compétitifs. C'est le cas évidemment des métiers tels que la restauration, tel que le bâtiment. Et donc on a demandé à la présidence britannique de faire cette proposition. Cette proposition a été négociée et a été, comme on dit, en jargon bruxellois, mise sur la table hier. C'est donc un paquet complet, c'est une avancée notable qui permettait aux Etats membres de faire ce qu'ils souhaitaient, chez eux, sur la TVA des métiers non concurrents intra européens. Il se trouve que cette liste - donc la liste des métiers concernés - est large et tout le monde a accepté ce paquet. L'Allemagne a indiqué qu'elle considérait que ce paquet était trop large par rapport à ses priorités. Il s'avère en particulier que le Gouvernement allemand a décidé d'augmenter chez lui le taux de TVA. Donc mon homologue allemand, Monsieur P. Steinbrück a demandé à ce que le paquet en l'état ne pouvant être accepté par l'Allemagne, parce qu'il était trop large, que celui-ci soit revu et rediscuté donc à la prochaine rencontre qui aura lieu le 15 décembre par les chefs d'Etat européens, mais en réduisant...
Q - Mais quand votre collègue dit, alors qu'il est opposé à l'extension de la liste, mais qu'il soutient la demande française, qu'est-ce qu'il faut comprendre là ?
R - Exactement, ce que je viens de dire, c'est-à-dire que si jamais on peut réduire cette liste, de façon à ce qu'il n'y ait pas trop de métiers qui mettraient éventuellement l'Allemagne en difficulté chez elle, eh bien l'Allemagne le soutiendra. Et effectivement les Allemands ont dit qu'ils soutiendraient la demande française sur la TVA restauration. Donc, il va falloir que la présidence britannique propose un paquet un peu dégradé, qui prendra bien entendu en compte les mesures françaises, mais qui sera moins large et c'est ce qui sera discuté donc le 15. Alors maintenant deux cas de figure : ou bien effectivement le 15, les chefs d'Etat - ce que nous souhaitons tous et nous allons nous battre pour ça - acceptent ce paquet dégradé qui prend en compte les deux mesures françaises, c'est-à-dire restauration et bâtiment, est accepté le 15, et dans ces conditions, tout est mis en route et il n'y a pas de problème ! Ou bien il y a encore des difficultés, car je rappelle, contrairement à ce que les uns et les autres pensent, il faut l'unanimité sur cette notion. Alors, ce que j'ai obtenu - et c'est très important et je vais être très précis ce matin - ce que j'ai obtenu de la part de mon homologue autrichien, car savez-vous, que le 1er janvier, c'est l'Autriche qui va...
Q - C'est l'Autriche qui prend la présidence !
R - C'est l'Autriche qui va prendre la présidence. Mon collègue autrichien, sur proposition de la France, a indiqué qu'au cas - encore une fois rien n'est certain - au cas où il n'y aurait pas d'accord le 15 sur l'ensemble du paquet qui sera proposé, il fait de ce combat son combat principal et donc il remettra en discussion, dès la première réunion, le 24 janvier, l'ensemble d'un paquet, de façon à ce que l'on trouve une solution et que l'on en sorte.
Q - Mais si on n'en trouve pas ?
R - On en trouvera une.
Q - Alors qu'est-ce qui se passe ?
R - On en trouvera une. Le tout c'est encore une fois d'avoir des éléments qui fassent qu'on ait le temps de le faire et puis qu'on puisse trouver un consensus, parce que c'est vrai qu'on est à vingt-cinq. On n'a jamais été aussi proche de l'unanimité S. Paoli. Jamais si proche ! Il y a effectivement encore le problème de l'Allemagne à traiter. Je souhaite de tout c?ur qu'on puisse le traiter le 15. Si tel n'est pas le cas, alors évidemment la TVA réduite à 5,5 dans le bâtiment sera maintenue le 1er janvier. Je souhaite le dire de façon la plus ferme et la plus claire, notamment à tous les entrepreneurs du bâtiment qui sont les premiers bénéficiaires, à juste titre, de cette mesure - et c'est une mesure très forte pour l'emploi et pour les consommateurs et pour les clients ? ils n'auront pas à changer leur taux de TVA le 1er janvier,
Q - Mais vous pouvez la maintenir pour combien de temps ?
R - Jusqu'à ce qu'on trouve un nouvel accord ! Prochaine réunion, le 24 janvier. Et donc entre temps, évidemment, ils ne changeront rien, ils feront comme avant et nous continuerons à nous battre pour obtenir la prorogation. Je signale que cela ne concerne pas que la France, cela concerne neuf pays. Il y a neuf pays qui aujourd'hui ont des taux réduits de TVA, notamment dans le bâtiment et qui évidemment ne laisseront jamais, accepter comme la France, que ceux-ci doivent remonter mécaniquement. Donc on est là-dessus un nombre important de pays, eh bien entendu le bon sens doit prévaloir. En tout cas, le commissaire européen en charge des questions de fiscalité a indiqué très clairement, qu'évidemment, il n'allait pas attaquer les Etats, le 1er janvier, si jamais ils ne remontaient pas les taux, puisque, évidemment, si jamais on n'a pas l'accord le 15 décembre, on continuera à discuter à partir du 24. Et tant qu'on n'aura pas trouvé de solution, évidemment, on va appliquer les taux.
Q - Et quand on entend par exemple le coup de colère des restaurateurs français - on entend d'ailleurs sur notre antenne, Monsieur Daguin dire ; ? eh bien il n'y a qu'à l'appliquer de façon unilatérale la baisse de la TVA en France ?- est-ce que c'est concevable, est-ce que c'est possible ? Cette règle de l'unanimité, il y a un moment donné où elle tombe comme la guillotine, elle s'applique.
R - Cela ne marche pas comme ça, si cela marchait comme ça, d'autres l'auraient fait.
Q - Donc, on risque tout de même de coincer là-dessus, même si vous dites qu'on est dans une négociation.
R - Non, je le répète : deux étapes nouvelles. Premièrement, la réunion du 15 et les Allemands ont indiqué qu'ils étaient prêts à faire des concessions et qui prendront en compte les demandes françaises, mais pas autant élargies que celles que les Anglais avait proposées. Et puis si pour des raisons encore nouvelles, il n'y avait pas d'accord le 15 - et je souhaite qu'il y en ait un - on renégocie dans le cadre de la nouvelle présidence. Voilà, c'est l'état des lieux. C'est vrai, vous avez raison, une Europe à vingt-cinq, sans Constitution, c'est plus difficile qu'une Europe à vingt-cinq avec Constitution !
Q - Alors chapitre 2, justement, le budget proposé à l'Union par la Grande-Bretagne, ? Inacceptable ? dit le président de la Commission Monsieur Barroso, c'est un budget pour une mini Europe dit-il. D'accord avec l'analyse ou pas d'abord ?
R - Je crois qu'au-delà des mots qu'a utilisés le président de la Commission, c'est vrai que c'est un recul très net par rapport à la proposition qu'avait été faite par J.-C. Juncker, qui était le président de l'Europe jusqu'au mois de juin et qui avait trouvé un quasi-consensus sur ce budget. Il faut quand même retenir les principes de ce budget européen. Les principes de ce budget européen, c'est tout d'abord, effectivement, de faire un effort important pour les nouveaux entrants car c'est notre intérêt à nous tous, Etats membres et en particulier Français, que les nouveaux Etats membres nous rejoignent rapidement et aient également chez eux une croissance importante, car ils sont aussi nos clients.
Q - Mais c'est à ceux-là que la Grande-Bretagne demande l'effort le plus important, à ceux qui ont le moins d'argent.
R - Eh oui. Et c'est là où précisément on n'est pas cohérent. La Grande-Bretagne demande à maintenir son chèque britannique, c'est-à-dire le fait que les autres pays quelque part la financent - c'était le cas il y a quinze ans, quand elle était encore un pays qui n'était pas ce qu'il est devenu aujourd'hui. On demande donc à revoir ce chèque britannique et par ailleurs à faire tous des efforts importants pour les nouveaux entrants. Alors la nouvelle proposition : aucune revue sur le chèque britannique et moins d'efforts pour les nouveaux entrants, ce n'est pas 'esprit de l'Europe. Par ailleurs, essayer de revenir sur la Politique agricole commune. Je voudrais revenir un instant sur la Politique agricole commune, parce qu'on entend un peu tout et n'importa quoi !
Q - Et même, L. Jospin vous interpellait là-dessus ce matin en disant : ? au fond c'est à la France, qui en profite le plus, de faire peut-être le plus d'effort pour changer les choses ?.
R - Il y a deux éléments fondamentaux pour l'avenir des nouvelles générations, de nos enfants, qui vont être très importants. D'abord il y a les problèmes d'énergie, je n'y reviens pas, on en a beaucoup parlé, on continuera à en parler pour la planète. Deuxièmement, il y a les problèmes alimentaires. Nous sommes sur une planète, 6 milliards d'habitants. Dans trente ans, on sera 9 milliards d'habitants, 50 % de population en plus. Les problèmes d'alimentation vont devenir des problèmes absolument fondamentaux. Les problèmes de sécurité alimentaire vont devenir des problèmes qui vont nous concerner tous. Aujourd'hui, on a la chance d'avoir en Europe, parce qu'on a investi beaucoup d'argent, une agriculture qui est l'une des meilleures agricultures du monde et l'une des plus sécurisées, qui supporte par ailleurs aujourd'hui la première industrie agroalimentaire du monde. Il y a un autre pays qui est comme nous, ce sont les Etats-Unis. Eux aussi, ils financent leur agriculture. Pourquoi précisément ces deux continents - l'Amérique du Nord d'un côté l'Europe de l'autre côté - sont les deux endroits de la planète qui ont l'agriculture la plus sécurisée ? Parce qu'on a fait des efforts ! Et alors, il y aurait des gens aujourd'hui qui diraient : "eh bien maintenant, il faut arrêter ces efforts ?" Mais qu'est-ce qu'on veut ? On veut être sur une planète à risques, ou est-ce qu'on veut être sur une planète qui progresse ? Donc l'Europe et les Etats- Unis ont un rôle à jouer, c'est du reste pour ça, vous le remarquerez on se rejoint l'Europe et les Etats-Unis sur la Politique agricole commune.
Q - Donc on ne touchera pas à la PAC ?
R - Mais c'est vital, c'est vital. J'entends dire "les modernes et les anciens". Moi je pense que ceux qui critiquent aujourd'hui la Politique agricole, c'est peut-être eux les anciens. Les vrais modernes ils regardent devant.
Q - Restons un instant sur le chapitre de la critique, parce qu'elle est très vive. L. Jospin trouve que votre politique économique est incohérente, que les résultats sont médiocres, que vous êtes confronté à une crise de confiance, que vous n'avez pas su créer la confiance etc. Il est dans son rôle d'ex grand patron de l'opposition ? Comment vous percevez la critique ? Et notamment l'argument de la PAC, où il dit que c'est à la France de donner le la.
R - Je réponds sur la PAC : regardons devant, regardons devant, que tout le monde regarde devant et arrête de regarder l'avenir et de se comparer. On veut se comparer ? Moi je veux bien. Cela fait six mois qu'on est au Gouvernement avec D. de Villepin. Qu'est-ce qui s'est passé depuis six mois ? Quelques chiffres. Pour la première fois depuis de nombreuses années, le chômage baisse de façon continue, c'est une réalité. Pas assez, S. Paoli, peut-être, mais la tendance est là. Regardons d'autres chiffres : pour la première fois, la croissance au troisième trimestre est la plus élevée de tous les grands pays européens. Alors je ne sais pas ce qu'il regarde Monsieur Jospin, mais il faut regarder la France, il faut aussi se comparer. Pourquoi aujourd'hui la France performe mieux que ses voisins européens ? Peut-être, peut-être parce que nous avons pris des mesures courageuses, peut-être parce que nous appliquons avec détermination. Dans l'intérêt de quoi ? Dans l'intérêt de l'emploi, dans l'intérêt évidemment des Français et dans l'intérêt de notre prospérité, évidemment.
Q - Et vous arrivez à tenir le déficit de l'Etat qui continue quand même de se creuser ?
R - Oui !
Q - Mais quand ?
R - Bien entendu, mais dès cette année, nous avons pris l'engagement qu'on serait à 3 %, on sera à 3 %. C'était très difficile, la tendance était bien au-delà, eh bien nous avons pris des mesures courageuses, difficiles pour le faire. Bien sûr, c'est l'engagement de la France et ça, cela ne se négocie pas.
Q - Une dernière question, Monsieur le ministre, est-ce que c'est vrai que l'année prochaine, la déclaration d'impôt pré-remplie sera généralisée ? Il y a une expérience qui a été menée, mais est-ce que tout le monde va en bénéficier maintenant ?
R - Eh bien oui, je vous l'annonce, puisque avec J.-F. Copé, nous avons décidé que l'année prochaine, tous les Français allaient recevoir leur déclaration d'impôt pré-remplie. Vous savez, quand vous faites votre déclaration, vous mettez vos salaires et donc vous devez reprendre vos fiches de paye, faire l'addition, mettre le salaire total. Eh bien par ailleurs, il faut savoir que les employeurs envoient systématiquement également la copie à l'Administration fiscale. Donc, nous on stocke ces données, ce qui fait, que, puisqu'on a ces données sur ordinateur, on a décidé lorsqu'on vous enverra votre déclaration d'impôt dès l'année prochaine, de mettre le montant que vous avez perçu et qui a été déclaré par vos employeurs. C'est un véritable progrès. Avec J.-F. Copé, on a souhaité précisément moderniser, de façon à ce qu'il soit beaucoup plus aisé de remplir sa déclaration d'impôt. Vous n'aurez plus qu'à vérifier que les chiffres que nous avons indiqués sont bien ceux que vous avez. Cela va être un gain de temps et beaucoup plus de facilité. C'est la réforme en marche.
Q - T. Breton, ministre de l'Economie, des Finances et de l'Industrie. Malheureusement, vous avez un emploi du temps trop chargé pour rester et répondre aux questions de nos auditeurs, c'est dommage !
R - C'est le Conseil des Ministres.
Premier ministre, Service d'information du Gouvernement, le 14 décembre 2005
R - Non, pas ingérable. On gère l'Europe quand même depuis maintenant plusieurs mois à vingt-cinq. C'est vrai que c'est plus difficile que lorsque nous étions un peu moins nombreux, c'est vrai aussi que c'était pour ça que nous souhaitions que nous ayons une nouvelle Constitution, mais pas ingérable non !
Q - Mais par exemple, le cas concret, l'Allemagne, Monsieur Schröder dit : oui, pourquoi pas au principe d'une TVA abaissée sur la restauration. Il l'avait dit et cela ne marche pas.
R - Je suis là aussi pour expliquer ce qui se passe, à l'instant où nous parlons, parce que bien entendu, le dossier va continuer à évoluer, le Gouvernement est déterminé à poursuivre ses efforts et à aller de l'avant, afin d'obtenir et la réduction de TVA sur la restauration, mais aussi le maintien bien sûr dans le bâtiment. Il y avait un projet qui est un projet qu'a soutenu la France. Ce projet tendait à dire que pour les pays membres, eh bien chacun peut faire ce qu'il veut chez lui, à partir du moment où la TVA ne va pas rentrer en concurrence sur des secteurs compétitifs. C'est le cas évidemment des métiers tels que la restauration, tel que le bâtiment. Et donc on a demandé à la présidence britannique de faire cette proposition. Cette proposition a été négociée et a été, comme on dit, en jargon bruxellois, mise sur la table hier. C'est donc un paquet complet, c'est une avancée notable qui permettait aux Etats membres de faire ce qu'ils souhaitaient, chez eux, sur la TVA des métiers non concurrents intra européens. Il se trouve que cette liste - donc la liste des métiers concernés - est large et tout le monde a accepté ce paquet. L'Allemagne a indiqué qu'elle considérait que ce paquet était trop large par rapport à ses priorités. Il s'avère en particulier que le Gouvernement allemand a décidé d'augmenter chez lui le taux de TVA. Donc mon homologue allemand, Monsieur P. Steinbrück a demandé à ce que le paquet en l'état ne pouvant être accepté par l'Allemagne, parce qu'il était trop large, que celui-ci soit revu et rediscuté donc à la prochaine rencontre qui aura lieu le 15 décembre par les chefs d'Etat européens, mais en réduisant...
Q - Mais quand votre collègue dit, alors qu'il est opposé à l'extension de la liste, mais qu'il soutient la demande française, qu'est-ce qu'il faut comprendre là ?
R - Exactement, ce que je viens de dire, c'est-à-dire que si jamais on peut réduire cette liste, de façon à ce qu'il n'y ait pas trop de métiers qui mettraient éventuellement l'Allemagne en difficulté chez elle, eh bien l'Allemagne le soutiendra. Et effectivement les Allemands ont dit qu'ils soutiendraient la demande française sur la TVA restauration. Donc, il va falloir que la présidence britannique propose un paquet un peu dégradé, qui prendra bien entendu en compte les mesures françaises, mais qui sera moins large et c'est ce qui sera discuté donc le 15. Alors maintenant deux cas de figure : ou bien effectivement le 15, les chefs d'Etat - ce que nous souhaitons tous et nous allons nous battre pour ça - acceptent ce paquet dégradé qui prend en compte les deux mesures françaises, c'est-à-dire restauration et bâtiment, est accepté le 15, et dans ces conditions, tout est mis en route et il n'y a pas de problème ! Ou bien il y a encore des difficultés, car je rappelle, contrairement à ce que les uns et les autres pensent, il faut l'unanimité sur cette notion. Alors, ce que j'ai obtenu - et c'est très important et je vais être très précis ce matin - ce que j'ai obtenu de la part de mon homologue autrichien, car savez-vous, que le 1er janvier, c'est l'Autriche qui va...
Q - C'est l'Autriche qui prend la présidence !
R - C'est l'Autriche qui va prendre la présidence. Mon collègue autrichien, sur proposition de la France, a indiqué qu'au cas - encore une fois rien n'est certain - au cas où il n'y aurait pas d'accord le 15 sur l'ensemble du paquet qui sera proposé, il fait de ce combat son combat principal et donc il remettra en discussion, dès la première réunion, le 24 janvier, l'ensemble d'un paquet, de façon à ce que l'on trouve une solution et que l'on en sorte.
Q - Mais si on n'en trouve pas ?
R - On en trouvera une.
Q - Alors qu'est-ce qui se passe ?
R - On en trouvera une. Le tout c'est encore une fois d'avoir des éléments qui fassent qu'on ait le temps de le faire et puis qu'on puisse trouver un consensus, parce que c'est vrai qu'on est à vingt-cinq. On n'a jamais été aussi proche de l'unanimité S. Paoli. Jamais si proche ! Il y a effectivement encore le problème de l'Allemagne à traiter. Je souhaite de tout c?ur qu'on puisse le traiter le 15. Si tel n'est pas le cas, alors évidemment la TVA réduite à 5,5 dans le bâtiment sera maintenue le 1er janvier. Je souhaite le dire de façon la plus ferme et la plus claire, notamment à tous les entrepreneurs du bâtiment qui sont les premiers bénéficiaires, à juste titre, de cette mesure - et c'est une mesure très forte pour l'emploi et pour les consommateurs et pour les clients ? ils n'auront pas à changer leur taux de TVA le 1er janvier,
Q - Mais vous pouvez la maintenir pour combien de temps ?
R - Jusqu'à ce qu'on trouve un nouvel accord ! Prochaine réunion, le 24 janvier. Et donc entre temps, évidemment, ils ne changeront rien, ils feront comme avant et nous continuerons à nous battre pour obtenir la prorogation. Je signale que cela ne concerne pas que la France, cela concerne neuf pays. Il y a neuf pays qui aujourd'hui ont des taux réduits de TVA, notamment dans le bâtiment et qui évidemment ne laisseront jamais, accepter comme la France, que ceux-ci doivent remonter mécaniquement. Donc on est là-dessus un nombre important de pays, eh bien entendu le bon sens doit prévaloir. En tout cas, le commissaire européen en charge des questions de fiscalité a indiqué très clairement, qu'évidemment, il n'allait pas attaquer les Etats, le 1er janvier, si jamais ils ne remontaient pas les taux, puisque, évidemment, si jamais on n'a pas l'accord le 15 décembre, on continuera à discuter à partir du 24. Et tant qu'on n'aura pas trouvé de solution, évidemment, on va appliquer les taux.
Q - Et quand on entend par exemple le coup de colère des restaurateurs français - on entend d'ailleurs sur notre antenne, Monsieur Daguin dire ; ? eh bien il n'y a qu'à l'appliquer de façon unilatérale la baisse de la TVA en France ?- est-ce que c'est concevable, est-ce que c'est possible ? Cette règle de l'unanimité, il y a un moment donné où elle tombe comme la guillotine, elle s'applique.
R - Cela ne marche pas comme ça, si cela marchait comme ça, d'autres l'auraient fait.
Q - Donc, on risque tout de même de coincer là-dessus, même si vous dites qu'on est dans une négociation.
R - Non, je le répète : deux étapes nouvelles. Premièrement, la réunion du 15 et les Allemands ont indiqué qu'ils étaient prêts à faire des concessions et qui prendront en compte les demandes françaises, mais pas autant élargies que celles que les Anglais avait proposées. Et puis si pour des raisons encore nouvelles, il n'y avait pas d'accord le 15 - et je souhaite qu'il y en ait un - on renégocie dans le cadre de la nouvelle présidence. Voilà, c'est l'état des lieux. C'est vrai, vous avez raison, une Europe à vingt-cinq, sans Constitution, c'est plus difficile qu'une Europe à vingt-cinq avec Constitution !
Q - Alors chapitre 2, justement, le budget proposé à l'Union par la Grande-Bretagne, ? Inacceptable ? dit le président de la Commission Monsieur Barroso, c'est un budget pour une mini Europe dit-il. D'accord avec l'analyse ou pas d'abord ?
R - Je crois qu'au-delà des mots qu'a utilisés le président de la Commission, c'est vrai que c'est un recul très net par rapport à la proposition qu'avait été faite par J.-C. Juncker, qui était le président de l'Europe jusqu'au mois de juin et qui avait trouvé un quasi-consensus sur ce budget. Il faut quand même retenir les principes de ce budget européen. Les principes de ce budget européen, c'est tout d'abord, effectivement, de faire un effort important pour les nouveaux entrants car c'est notre intérêt à nous tous, Etats membres et en particulier Français, que les nouveaux Etats membres nous rejoignent rapidement et aient également chez eux une croissance importante, car ils sont aussi nos clients.
Q - Mais c'est à ceux-là que la Grande-Bretagne demande l'effort le plus important, à ceux qui ont le moins d'argent.
R - Eh oui. Et c'est là où précisément on n'est pas cohérent. La Grande-Bretagne demande à maintenir son chèque britannique, c'est-à-dire le fait que les autres pays quelque part la financent - c'était le cas il y a quinze ans, quand elle était encore un pays qui n'était pas ce qu'il est devenu aujourd'hui. On demande donc à revoir ce chèque britannique et par ailleurs à faire tous des efforts importants pour les nouveaux entrants. Alors la nouvelle proposition : aucune revue sur le chèque britannique et moins d'efforts pour les nouveaux entrants, ce n'est pas 'esprit de l'Europe. Par ailleurs, essayer de revenir sur la Politique agricole commune. Je voudrais revenir un instant sur la Politique agricole commune, parce qu'on entend un peu tout et n'importa quoi !
Q - Et même, L. Jospin vous interpellait là-dessus ce matin en disant : ? au fond c'est à la France, qui en profite le plus, de faire peut-être le plus d'effort pour changer les choses ?.
R - Il y a deux éléments fondamentaux pour l'avenir des nouvelles générations, de nos enfants, qui vont être très importants. D'abord il y a les problèmes d'énergie, je n'y reviens pas, on en a beaucoup parlé, on continuera à en parler pour la planète. Deuxièmement, il y a les problèmes alimentaires. Nous sommes sur une planète, 6 milliards d'habitants. Dans trente ans, on sera 9 milliards d'habitants, 50 % de population en plus. Les problèmes d'alimentation vont devenir des problèmes absolument fondamentaux. Les problèmes de sécurité alimentaire vont devenir des problèmes qui vont nous concerner tous. Aujourd'hui, on a la chance d'avoir en Europe, parce qu'on a investi beaucoup d'argent, une agriculture qui est l'une des meilleures agricultures du monde et l'une des plus sécurisées, qui supporte par ailleurs aujourd'hui la première industrie agroalimentaire du monde. Il y a un autre pays qui est comme nous, ce sont les Etats-Unis. Eux aussi, ils financent leur agriculture. Pourquoi précisément ces deux continents - l'Amérique du Nord d'un côté l'Europe de l'autre côté - sont les deux endroits de la planète qui ont l'agriculture la plus sécurisée ? Parce qu'on a fait des efforts ! Et alors, il y aurait des gens aujourd'hui qui diraient : "eh bien maintenant, il faut arrêter ces efforts ?" Mais qu'est-ce qu'on veut ? On veut être sur une planète à risques, ou est-ce qu'on veut être sur une planète qui progresse ? Donc l'Europe et les Etats- Unis ont un rôle à jouer, c'est du reste pour ça, vous le remarquerez on se rejoint l'Europe et les Etats-Unis sur la Politique agricole commune.
Q - Donc on ne touchera pas à la PAC ?
R - Mais c'est vital, c'est vital. J'entends dire "les modernes et les anciens". Moi je pense que ceux qui critiquent aujourd'hui la Politique agricole, c'est peut-être eux les anciens. Les vrais modernes ils regardent devant.
Q - Restons un instant sur le chapitre de la critique, parce qu'elle est très vive. L. Jospin trouve que votre politique économique est incohérente, que les résultats sont médiocres, que vous êtes confronté à une crise de confiance, que vous n'avez pas su créer la confiance etc. Il est dans son rôle d'ex grand patron de l'opposition ? Comment vous percevez la critique ? Et notamment l'argument de la PAC, où il dit que c'est à la France de donner le la.
R - Je réponds sur la PAC : regardons devant, regardons devant, que tout le monde regarde devant et arrête de regarder l'avenir et de se comparer. On veut se comparer ? Moi je veux bien. Cela fait six mois qu'on est au Gouvernement avec D. de Villepin. Qu'est-ce qui s'est passé depuis six mois ? Quelques chiffres. Pour la première fois depuis de nombreuses années, le chômage baisse de façon continue, c'est une réalité. Pas assez, S. Paoli, peut-être, mais la tendance est là. Regardons d'autres chiffres : pour la première fois, la croissance au troisième trimestre est la plus élevée de tous les grands pays européens. Alors je ne sais pas ce qu'il regarde Monsieur Jospin, mais il faut regarder la France, il faut aussi se comparer. Pourquoi aujourd'hui la France performe mieux que ses voisins européens ? Peut-être, peut-être parce que nous avons pris des mesures courageuses, peut-être parce que nous appliquons avec détermination. Dans l'intérêt de quoi ? Dans l'intérêt de l'emploi, dans l'intérêt évidemment des Français et dans l'intérêt de notre prospérité, évidemment.
Q - Et vous arrivez à tenir le déficit de l'Etat qui continue quand même de se creuser ?
R - Oui !
Q - Mais quand ?
R - Bien entendu, mais dès cette année, nous avons pris l'engagement qu'on serait à 3 %, on sera à 3 %. C'était très difficile, la tendance était bien au-delà, eh bien nous avons pris des mesures courageuses, difficiles pour le faire. Bien sûr, c'est l'engagement de la France et ça, cela ne se négocie pas.
Q - Une dernière question, Monsieur le ministre, est-ce que c'est vrai que l'année prochaine, la déclaration d'impôt pré-remplie sera généralisée ? Il y a une expérience qui a été menée, mais est-ce que tout le monde va en bénéficier maintenant ?
R - Eh bien oui, je vous l'annonce, puisque avec J.-F. Copé, nous avons décidé que l'année prochaine, tous les Français allaient recevoir leur déclaration d'impôt pré-remplie. Vous savez, quand vous faites votre déclaration, vous mettez vos salaires et donc vous devez reprendre vos fiches de paye, faire l'addition, mettre le salaire total. Eh bien par ailleurs, il faut savoir que les employeurs envoient systématiquement également la copie à l'Administration fiscale. Donc, nous on stocke ces données, ce qui fait, que, puisqu'on a ces données sur ordinateur, on a décidé lorsqu'on vous enverra votre déclaration d'impôt dès l'année prochaine, de mettre le montant que vous avez perçu et qui a été déclaré par vos employeurs. C'est un véritable progrès. Avec J.-F. Copé, on a souhaité précisément moderniser, de façon à ce qu'il soit beaucoup plus aisé de remplir sa déclaration d'impôt. Vous n'aurez plus qu'à vérifier que les chiffres que nous avons indiqués sont bien ceux que vous avez. Cela va être un gain de temps et beaucoup plus de facilité. C'est la réforme en marche.
Q - T. Breton, ministre de l'Economie, des Finances et de l'Industrie. Malheureusement, vous avez un emploi du temps trop chargé pour rester et répondre aux questions de nos auditeurs, c'est dommage !
R - C'est le Conseil des Ministres.
Premier ministre, Service d'information du Gouvernement, le 14 décembre 2005