Interview de M. Christian Poncelet, président du Sénat, dans "Territoriales" de février-mars 2001, sur le rôle de la fonction publique territoriale pour relancer la décentralisation et sur la modernisation de son statut.

Prononcé le 1er février 2001

Intervenant(s) : 

Média : Territoriales

Texte intégral

Sans modernisation du statut, point d'acte II de la décentralisation !
1°) Le 13 décembre dernier, vous avez réuni au Sénat les principaux acteurs de la fonction publique territoriale. Quels enseignements tirez-vous de leurs échanges et souhaitez-vous créer un grand rendez-vous annuel dans la " grande maison des collectivités territoriales " qu'est le Sénat ?
Le colloque que j'ai organisé, le 13 décembre dernier au Sénat, en partenariat avec le CNFPT et les principales organisations de cadres territoriaux s'inscrit au coeur de mon action en faveur d'une véritable relance de la décentralisation. Il faut bien le reconnaître, la fonction publique territoriale demeure le " parent pauvre " de la décentralisation et la réflexion sur son avenir trop souvent une affaire d'experts.
Au cours de cette journée, j'ai été frappé à la fois par le besoin d'expression des différents acteurs et par la liberté de leur ton. Il est vrai que les occasions de confronter sereinement nos opinions et de partager nos expériences sont beaucoup trop rares.
Aussi, ai-je décidé de réunir régulièrement les responsables du CNFPT et les représentants des associations de fonctionnaires territoriaux afin de constituer une cellule de réflexion informelle.
2°) Pensez-vous que la fonction publique territoriale soit suffisamment préparée pour accompagner l'acte II de la décentralisation ?
Sans la détermination, l'expertise, la loyauté et l'éthique des quelques 1,6 million de " territoriaux ", rien n'aurait été possible. Je veux, à nouveau, rendre un hommage mérité à ces hommes et ces femmes qui font battre au quotidien le coeur de la décentralisation. Les territoriaux constituent un relais essentiel permettant au " champ politique " d'entrer dans le " champ du possible ".
Le renouvellement démographique exceptionnel auquel va faire face la fonction publique territoriale dans les vingt prochaines années justifie pleinement l'engagement d'une réflexion stratégique sur les missions et une gestion visionnaire des emplois et des métiers. Il s'agit là d'une occasion unique. Vous savez, notre sort est lié. Sans modernisation du statut, point d'acte II de la décentralisation !
3°) La France, pratiquement le seul pays en Europe, a opté pour une fonction publique de carrière. Quels avantages et inconvénients y voyez-vous ?
" La territoriale " s'inscrit pleinement dans notre modèle de service public à la française.
La structuration empirique du statut a jusqu'à présent permis de répondre aux défis de la gestion locale.
Néanmoins, je crois qu'il est temps d'en faire un " véritable outil de gestion opérationnel " adaptable et réactif aux nouvelles exigences du management public.
C'est pourquoi, je plaide pour une plus grande ouverture et une mobilité renforcée. Les frontières entre le secteur public et le secteur privé sont encore trop étanches. De même, les formations, initiale et continue, doivent être adaptées en permanence pour faire face aux nouveaux métiers, l'évaluation ne peut durablement se contenter d'être un exercice convenu et les rémunérations devraient davantage tenir compte des performances individuelles.
A défaut, la fonction publique territoriale pâtirait d'un déficit d'attractivité qui pourrait finalement s'avérer préjudiciable au service public local.
(Source http://www.senat.fr, le 28 mars 2001)