Déclaration de M. François Loos, ministre délégué à l'industrie, sur la gestion durable des matières et des déchets radioactifs, à l'Assemblée nationale le 19 juin 2006.

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Circonstance : Projet de loi de programme sur la gestion des matières et déchets radioactifs à l'Assemblée nationale le 19 juin 2006

Texte intégral

Monsieur le président,
Monsieur le rapporteur,
Mesdames, Messieurs les députés,
Je suis très heureux de vous présenter une nouvelle fois, au nom du Gouvernement, le projet de loi de programme relatif à la gestion durable des matières et des déchets radioactifs, qui a été adopté en première lecture par votre Assemblée le 12 avril et par le Sénat le 31 mai dernier.
Je me propose de revenir sur les améliorations dont le projet de loi a bénéficié grâce à ces deux lectures. Et je commencerai par me réjouir de la qualité du dialogue que nous avons établi, d'une extrémité à l'autre de l'hémicycle, sans esprit partisan. En effet, comme l'a très joliment dit le Président OLLIER le 12 avril, nous parlons « d'un temps qui ne nous appartient pas » et ce temps nous impose de dépasser nos clivages politiques. Si nous avons pu le faire, je crois que c'est en grande partie grâce aux deux rapporteurs et je veux saluer ici le travail exceptionnel réalisé par le député BIRRAUX.
En premier lieu, le texte fixe un schéma de référence pour la gestion des déchets dans lequel les trois axes définis par la loi de 1991 apparaissent plus que jamais comme complémentaires.
La complémentarité des trois axes est inscrite aussi bien dans les programmes de recherches définis à l'article 1er que dans le plan national de gestion des matières et des déchets défini à l'article 4.
Des objectifs précis de mis en exploitation ont été fixés à l'article 1 pour tous les axes : 2020 pour l'axe 1, 2025 pour l'axe 2, 2015 pour l'axe 3.
Des fonctions précises leur ont été assignées à l'article 4 :
- l'axe 1 pour aller aussi loin qu'il est raisonnablement possible dans la réduction de la quantité et la nocivité des déchets ;
- l'axe 3 pour entreposer en surface dans des matrices robustes et stables les déchets en attente d'un stockage ;
- l'axe 2 enfin pour le stockage géologique réversible des déchets qui ne peuvent être stockés définitivement en surface.
En second lieu, le texte renforce les exigences de transparence et de démocratie qui s'imposeront au secteur des déchets radioactifs.
En particulier, la procédure d'autorisation d'un stockage géologique a été complétée à l'article 8 avec deux rendez-vous parlementaires :
- le premier à l'horizon 2015, pour fixer les conditions de réversibilité d'un stockage géologique avant qu'un décret ne puisse l'autoriser ;
- le second, pas avant 100 ans, pour autoriser la fermeture éventuelle de ce stockage.
Le rendez-vous parlementaire de 2015 aura été précédé d'une consultation des collectivités territoriales concernées, sur un périmètre que vous avez élargi, et d'un débat public, qui devra aborder l'ensemble des aspects qui intéressent les populations locales, la réversibilité naturellement mais aussi la sûreté ou encore les transports.
Mais ce n'est pas tout :
- l'indépendance de la commission nationale d'évaluation a été renforcée à l'article 6 avec notamment des clauses de déontologie ;
- la transparence sur le traitement et l'entreposage des déchets étrangers a été renforcée à l'article 5 et à l'article 10 ;
- la composition du Comité local d'information et de suivi a été élargie à l'article 12 et sa présidence confiée à un élu, national ou local.
En troisième lieu, les amendements ont permis d'améliorer le dispositif d'accompagnement économique.
A l'article 9, les groupements d'intérêt public ont vu leur mission élargie à la formation et à la valorisation des connaissances scientifiques et technologiques, qui doivent faire la fierté des départements concernés.
Dans le même temps, les taux planchers et plafonds, qui détermineront les fonds disponibles pour les actions d'accompagnement économique, ont été augmentés à l'article 15.
Ces fonds bénéficieront à l'ensemble des départements concernés et en particulier :
- aux communes situées à moins de 10 km de l'installation, qui bénéficieront de versements directs pouvant atteindre 20% des ressources collectées ;
- à une zone de proximité dont le périmètre sera plus large et défini par décret après avis des Conseils généraux, pour tenir compte des réalités économiques et sociales locales.
Je prends l'engagement que des concertations locales auront lieu pour trouver un juste équilibre entre les différentes zones :
- la zone des 10 km, où on trouve les communes qui accueillent le laboratoire lui-même et qui hébergeront certainement une partie de ses salariés ;
- ensuite, j'ai bien entendu le message des parlementaires locaux, les bassins d'emplois proches qui doivent être vivants et soutenus. Je pense notamment aux bassins de Saint-Dizier, Bar-le-Duc, Joinville ou Ligny.
- enfin, les départements eux-mêmes, sans qui le laboratoire n'aurait jamais pu s'implanter et qui auront un rôle non moins important à jouer pour le centre de stockage.
Mais plus encore que les fonds collectés par la taxe, c'est l'engagement des grandes entreprises du secteur, EDF, AREVA et CEA, à développer elles-mêmes de l'activité sur ces territoires, qui me paraît essentiel. Depuis 2005, elles ont commencé à le faire. Les choses bougent. Et les ministres de l'énergie successifs devront veiller à ce que cela continue dans la durée !
En dernier lieu, le financement du démantèlement et de la gestion des déchets radioactifs a été encore sécurisé.
A l'article 10, l'Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs s'est vue confier la mission de proposer une évaluation des coûts afférents à la gestion des déchets de haute activité et de moyenne activité à vie longue, arrêtée par le ministre chargé de l'énergie.
A l'article 11 ter, le financement de la recherche sur l'axe 1 a été précisé et à l'article 11 bis un fonds a été institué pour recueillir les sommes nécessaires à la construction et à l'exploitation des installations de gestion. Ce fonds pourrait recevoir aussi les actifs des exploitants défaillants
A l'article 14, une Commission nationale d'évaluation financière placée sous l'égide du Parlement a été créée sur proposition de votre rapporteur pour s'assurer de la pertinence et du sérieux des contrôles mis en oeuvre par l'autorité administrative.
Le dispositif auquel nous avons abouti avec ces différents amendements permet de sécuriser les fonds nécessaires tout en évitant de transférer la responsabilité des déchets et donc les risques financiers à l'Etat. Des discussions qui ont eu lieu au Sénat, il ressortait d'ailleurs que les dangers du transfert de responsabilité ont été identifiés par tous les groupes. Je m'en réjouis.
En conclusion, il me semble que grâce aux amendements qui ont été proposés et adoptés dans cette Assemblée et au Sénat, nous avons construit un équilibre très satisfaisant, sur tous les aspects :
- les articles 1 et 4 définissent le schéma de référence français pour la gestion des déchets radioactifs et fixe les objectifs calendaires pour le mettre en oeuvre selon des procédures on ne peut plus transparentes et démocratiques, assurées par les articles 6 à 8 et 12 ;
- les articles 3 et 5 marquent l'importance de la réversibilité du stockage géologique comme du retour des déchets issus après traitement des combustibles usés étrangers, deux exigences morales auxquelles nos concitoyens sont très attachés ;
- les articles 9 et 15 marquent la reconnaissance de la Nation à l'égard des territoires qui ont accepté de s'engager sur cet enjeu national en pérennisant, élargissant et améliorant les mesures d'accompagnent économique du laboratoire et plus tard du stockage ;
- enfin les articles 10, 11 et 14 permettent de laisser la charge du financement aux producteurs de déchets tout en confirmant le rôle essentiel que l'établissement public ANDRA, donc l'Etat, doit jouer sur le très long terme pour la gestion de ces déchets.
Nos concitoyens nous regardent, et je pense en particulier à nos concitoyens meusiens et haut marnais. Nos partenaires étrangers nous observent. Les générations futures nous jugerons aussi. Tous attendent que nous fassions les bons choix pour assurer la mise en sécurité définitive des déchets que nous avons produits.
Les choix qui vous sont proposés ne sont ni de gauche ni de droite. Tous les partis politiques ici représentés ont contribué, par leurs amendements, à les bâtir. Toutes les majorités auront à les mettre en oeuvre. Ces choix ils vous appartiennent, à vous et à vous seuls, mesdames et messieurs les députés. Pour ma part, je souhaite naturellement que ce texte soit voté et qu'il soit voté par une majorité aussi large que possible comme ce fut le cas de la loi BATAILLE.
Monsieur le Président, Monsieur le Rapporteur, Mesdames et Messieurs les députés, je vous remercie de votre attention.
Source http://www.industrie.gouv.fr, le 21 juin 2006