Déclaration de Mme Nelly Olin, ministre de l'écologie et du développement durable, sur le réchauffement climatique, l'épuisement des ressources naturelles, la préservation de la biodiversité de la planète et sur l'importance du secteur du bâtiment et de la construction pour le développement durable, Valence le 13 octobre 2006.

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Circonstance : Remise des Trophées de la construction durable (ECO-LOGIS) de la Drôme, le 13 octobre 2006

Texte intégral

Messieurs les Présidents, [M. Jean-Marie BUSSEUIL, M. Jean-François BERNARDIN]
Mesdames et Messieurs,
Le développement durable est désormais, nous le savons tous, un enjeu stratégique pour les entreprises.
Je vous félicite d'avoir mis ce thème à l'ordre du jour de vos 8èmes rencontres nationales environnement et développement durable des Chambres de Commerce et d'Industrie.
Comme vous le montrez bien dans votre programme, « les entreprises doivent faire face à de profondes mutations : la délocalisation des clients, la concurrence exacerbée des pays émergents, la hausse du prix des matières premières... Face à cette situation, beaucoup de chefs d'entreprises considèrent le développement durable comme un concept novateur mais peu réaliste car associé à un coût supplémentaire difficilement absorbable dans la conjoncture actuelle. »
Je pense que le but d'une rencontre comme celle d'aujourd'hui, est bien de montrer que le développement durable n'est pas pour les entreprises une charge supplémentaire, mais au contraire une formidable opportunité de se transformer et de trouver un modèle économique qui soit vraiment adapté aux décennies à venir.
Comme vous le soulignez, les entreprises d'aujourd'hui sont confrontées à une réalité nouvelle : celle de la mondialisation. Je crois qu'aujourd'hui plus personne ne peut refuser la mondialisation, il faut au contraire s'y adapter et tirer profit de cette évolution pour relever les défis et aborder les années à venir avec motivation. Mais il est important aussi que la mondialisation se fasse avec des règles du jeu qui favorisent l'écologie et qui ne nuisent pas à l'avenir de la planète. C'est la responsabilité des pouvoirs publics de faire évoluer les règles du jeu et d'éviter le dumping social et environnemental.
Comme l'a parfaitement rappelé le Premier ministre lors de sa conférence de presse du 4 octobre dernier, nous avons face à nous trois enjeux majeurs au niveau international :
Le premier, c'est le changement climatique. Le réchauffement de la planète est une réalité désormais incontestée. Il est observable et les scientifiques montrent que nous devons réagir vigoureusement, et réduire par 4 nos émissions de gaz à effet de serre à horizon 2050.
Le deuxième enjeu, c'est l'épuisement des ressources naturelles : les énergies fossiles, comme le pétrole, mais aussi les ressources en eau.
Enfin, le troisième enjeu, c'est la préservation de la biodiversité de la planète, qui est gravement menacée.
Le Président de la République à pris plusieurs initiatives pour renforcer les régulations sociales et environnementales au niveau mondial. Ces régulations devraient bien entendu être mises en place dans le cadre des institutions multilatérales, avec au premier plan les organisations des Nations Unies. C'est pourquoi la France propose par exemple la création d'une Organisation des Nations Unies pour l'Environnement (ONUE).
Comme le stipule la charte de l'environnement il s'agit de concilier la protection et la valorisation de l'environnement, le développement économique et le progrès social.
Le Premier Ministre a proposé aux Français, la semaine dernière, un Pacte national pour l'environnement. Ce pacte rassemblera tous les acteurs : citoyens, entreprises, collectivités locales, et l'Etat bien sûr. Il permettra à chacun de jouer un rôle en faveur de la protection de l'environnement. Car dans ce domaine, il ne s'agit pas de stigmatiser les uns ou les autres. C'est dans la cohésion et la volonté générale que nous pourrons avancer. Ce pacte signifie un dialogue accru, des relations nouvelles dans le marché ou sur le territoire, et une responsabilité sociétale de chacun des acteurs.
Au coeur de ce Pacte national pour l'environnement, Dominique de VILLEPIN a annoncé la création d'un livret de développement durable. Il permettra aux Français qui veulent investir pour rendre leur logement plus économe en énergie, d'avoir accès à des moyens de financement plus simples et plus efficaces. Au 1er janvier 2007, le plafond des CODEVI sera porté de 4600 à 6000 euros. L'argent disponible, soit environ 10 milliards d'euros, sera immédiatement mobilisable pour des prêts écologiques.
En ce qui concerne l'habitat, nous encouragerons les constructions de logements sociaux qui consomment peu d'énergie. Notre objectif, c'est de multiplier par quatre la part de HLM atteignant la norme de très haute performance énergétique. A la demande du gouvernement, la Caisse des dépôts et consignations mettra en place, dans les tout prochains jours, un prêt à 2,45 % pour aider les sociétés de HLM à atteindre cet objectif.
Ces diverses mesures vont doper le marché des technologies nouvelles et économes dans la construction et auront bien évidemment des répercussions positives en terme d'emploi.
Il nous faut, aussi, encourager le changement des modes de consommation, pour que ce soient les produits écologiques et plus économes en énergie qui deviennent la norme. Les labels écologiques, que nous sommes en train de généraliser, avec notamment la nouvelle étiquette-énergie pour les voitures et pour les logements, vont permettre à chaque Français d'avoir l'information sur l'impact environnemental des produits et des biens qu'ils achètent, et donc de consommer en toute connaissance de cause.
Le développement des produits écologiques passe aussi par la commande publique. Le nouveau code des marchés publics qui est entré en vigueur le 1er septembre dernier va permettre à l'Etat, aux pouvoirs publics et aux collectivités locales de favoriser ces produits respectueux de l'environnement. La version précédente du code des marchés publics avait déjà permis d'introduire des critères environnementaux. La réforme introduit de façon plus fondamentale la notion de développement durable, et en fait même une certaine obligation dès la définition des besoins. La prise en compte des impacts environnementaux et sociaux est un préalable dès la définition des besoins.
Concrètement, l'acheteur public pourra faire référence à un écolabel pour le choix d'un produit, ou demander l'embauche de jeunes en CDD à réinsérer. On peut aussi imaginer l'obligation, pour un marché de nettoyage, d'utiliser des produits non nocifs. Quant à la sélection de l'entreprise ou du fournisseur, des références environnementales pourront être demandées, telle que la certification européenne EMAS, qui va plus loin encore que l'ISO 14001.
Ce nouveau code, qui applique la Charte de l'environnement, est donc un véritable instrument pour le développement des écoproduits. Et je pense que cela peut être important notamment dans le secteur du bâtiment et des travaux publics, puisque je rappellerai que les achats publics concernent plusieurs dizaines de milliers d'acheteurs, et pèsent 15 % du PNB, et plus encore pour le BTP. Il y a donc de formidables gisements de créations d'emplois qui sont possibles dans ces nouvelles technologies de l'environnement.
Monsieur le Président, vous avez situé cette réunion sous le signe de l'innovation et l'intégration de l'environnement dans les comportements des entreprises.
Vous m'avez conviée à la remise des trophées de la construction durable de la Drôme. Je souhaite saluer ici vos efforts dans ce domaine important, auquel je suis particulièrement attachée.
Le secteur du bâtiment et de la construction est en effet un secteur clé pour le développement durable et en particulier en matière de lutte contre le changement climatique. Il contribue à 5 à 10 % des emplois et 5 à 15 % du PIB. Les infrastructures liées au logement : les communications, l'eau et l'assainissement, contribuent aux interactions sociales et au développement économique au niveau local.
Selon le PNUE, au niveau mondial, les bâtiments sont responsables jusqu'à de 40 % de toute l'utilisation d'énergie dans la société, de ce fait également contribuant aux émissions significatives de CO2. 30 à 40 % des déchets viennent du secteur du bâtiment et de la construction, et plus de 20 % des ressources d'eau douce sont consommées par ce secteur. De plus la qualité de l'air intérieur montre une relation entre l'environnement et la santé publique. C'est dire toute l'importance d'agir dans ce secteur.
Comme le note le récent rapport du groupe Facteur 4, qui nous a été remis, à François Loos et à moi-même, lundi dernier par Christian de Boissieu, nous devons conforter la présence française et sa compétitivité dans le domaine des produits et des équipements très performants écologiquement dans le bâtiment.
J'ai rappelé les mesures nouvelles lancées par le Premier Ministre dans le cadre du Pacte national pour l'environnement. Ces mesures s'ajoutent à un effort fiscal déjà très renforcé depuis deux ans par le Gouvernement.
Dans le domaine des énergies renouvelables et des économies d'énergie, c'est près d'un milliard d'euros qui a été consenti en France en 2005 en réductions fiscales pour l'environnement avec notamment le crédit d'impôt pour le développement durable ou encore les Charges de service public d'électricité qui permettent de développer les sources d'électricité renouvelable.
Mais, le rapport de Christian de Boissieu le montre bien : il nous faut aller encore plus loin. L'inertie du système climatique est telle que des changements auront lieu. On peut en limiter l'ampleur, mais il faut aussi développer une stratégie d'adaptation au changement climatique. L'été de la canicule de 2003 sera considéré comme un été moyen dans la seconde moitié du siècle, nous devons nous y préparer. C'est, là encore, un chantier sur lequel les entreprises et notamment celles du secteur du bâtiment peuvent et doivent s'engager.
C'est non seulement au Gouvernement de prendre des mesures, mais aussi aux entreprises et aux artisans de proposer de nouveaux produits et de pousser les changements, aux organisations professionnelles de stimuler la diffusion de l'innovation et les changements de pratiques et aux organismes de formation de développer les nouvelles qualifications.
C'est le sens de ma présence ici pour encourager vos efforts. Je vous remercie de votre mobilisation, que je sais quotidienne, et de votre engagement en faveur du développement durable.
Je vous remercie de votre attention.Source http://www.ecologie.gouv.fr, le 16 octobre 2006