Texte intégral
Monsieur le Président,
Monsieur le Président de la Commission des Finances,
Monsieur le Président de la Commission des Affaires sociales,
Monsieur le Rapporteur Général du Budget,
Mesdames et Messieurs les Sénateurs,
Je suis heureux qu'un tel débat puisse de nouveau se tenir aujourd'hui au Sénat : je suis très attaché à ce moment de réflexion et d'orientation, en marge de la délibération du projet de loi de finances et du projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2007, et je tiens à vous remercier, Monsieur le Président, de l'avoir proposé une nouvelle fois cette année au Gouvernement.
Il est essentiel, en effet, que la représentation nationale puisse discuter globalement de l'évolution de nos prélèvements obligatoires, comme nous le faisons aussi dans le cadre de la Conférence nationale des finances publiques mise en place par le Premier ministre. Cette vision d'ensemble, nécessaire et même indispensable, ne doit pas nous faire oublier les exigences propres à chaque sphère. En matière de Sécurité sociale, le principe d'annualité ne saurait avoir la même portée ni la même signification qu'en matière budgétaire. Car l'objet de la Sécurité sociale est de financer des droits permanents par des recettes affectées, stables et dynamiques.
Ces contributions constituent, pour les Français, une police d'assurance financée par la solidarité de tous. Nos compatriotes ne peuvent transiger sur les principes de leur Sécurité sociale. Elle leur appartient. La Sécurité sociale ne peut être un instrument de politique économique conjoncturelle aux mains de l'État, avec des droits qui varieraient d'une année sur l'autre en fonction du niveau d'activité économique. Elle doit apporter à nos compatriotes des garanties constantes. Elle joue aussi en cas de crise un rôle stabilisateur.
Elle maintient dans notre pays le haut niveau de protection sociale grâce auquel chacun peut travailler, créer, innover, consommer sans être inhibé par la crainte des risques de la vie.
Et la Sécurité sociale assure aujourd'hui une grande qualité de service rendu à nos concitoyens grâce à son action de proximité dans les caisses du réseau déconcentré et grâce au travail quotidien de plusieurs milliers d'agents. Nos compatriotes le savent bien. 85% des usagers se déclarent très satisfaits de l'action des caisses de sécurité sociale. Quel autre service public peut se prévaloir d'une telle popularité ?
Depuis plus de 60 ans, les garanties apportées par la Sécurité sociale sont au coeur de notre modèle de développement économique. Nos compatriotes veulent à juste titre que nous leur rendions des comptes sur le bon emploi des prélèvements qui financent leur Sécurité sociale. C'est la raison pour laquelle le Président de la République et le Gouvernement d'Alain JUPPE, avec Jacques BARROT et Jacques TOUBON, vous ont proposé en 1996 de réviser la Constitution pour créer les lois de financement de la Sécurité sociale.
Les relations financières entre l'État et la Sécurité sociale peuvent ainsi devenir chaque année plus transparentes. Ces débats d'orientation y contribuent également. Cela a pour première conséquence de faire apparaître l'importance des concours de la Sécurité sociale à la politique de l'emploi, à la politique de l'aide sociale, à la politique de la santé, à la politique du logement. Cela montre aussi l'effort accepté par la Sécurité sociale et les Fonds qui lui sont rattachés pour faciliter la trésorerie de l'État et réduire fortement son déficit.
Mais à partir de cet état des lieux, il importe pour le présent et pour l'avenir que la Sécurité sociale soit respectée, protégée et même sanctuarisée. Elle doit plus que jamais continuer à être gérée en veillant à ce que chaque euro dépensé soit réellement utile à la protection sociale des Français. Mais elle ne saurait être l'appendice d'autres comptes publics. L'avenir n'est pas à la fongibilité des dépense sociales et budgétaires. Il est à la transparence et l'étanchéité des comptes.
La gestion de la Sécurité sociale n'est pas et ne peut pas devenir un sous-produit de la gestion budgétaire de l'État. Elle est par nature une gestion à long terme. Une réforme des retraites, par exemple, produit pleinement ses effets au bout de plusieurs années. Il a fallu dix ans avant que la réforme de 1993 achève, pour l'essentiel, sa montée en régime. Il faut cinq ans pour que les principaux éléments de celle de 2003 soient entièrement appliqués, vingt ans pour que tous les résultats attendus se matérialisent.
C'est vrai aussi pour l'assurance maladie. La réforme repose sur un changement profond des comportements. C'est dans la durée qu'elle doit montrer son efficacité. Des gains de court terme seraient faciles à obtenir : il suffirait de diminuer les droits ou d'augmenter les prélèvements. Mais nous savons que de tels gains seraient sans lendemain si le rythme d'augmentation des dépenses n'était pas infléchi par la mise en oeuvre d'un principe de responsabilité généralisée. Et nous gardons les yeux rivés sur un indicateur essentiel : le taux de couverture des dépenses de santé par l'assurance maladie, l'un des plus élevés au monde. Il est supérieur à 77% et dépasse aujourd'hui ce qu'il était il y a dix ans. Il faut le maintenir. Les pays qui y ont renoncé sont ceux où les dépenses de santé augmentent le plus vite.
Il y a donc de multiples justifications à l'existence d'une loi de financement de la Sécurité sociale distincte de la loi de finances. Les deux textes sont par nature profondément différents.
Je tenais à rappeler ces distinctions indispensables avant d'en venir à ce qui fait le
principal intérêt d'un exercice comme celui d'aujourd'hui : regarder l'ensemble de nos
finances publiques, en examinant ce que sont et seront nos priorités, ce que sont et seront les
principaux besoins des Françaises et des Français dans les prochaines années ainsi que les
principales ressources dont nous disposerons pour y faire face.
Il faut se demander ce que seront, d'ici cinq à dix ans, les secteurs dans lesquels les
besoins de financement publics seront les plus importants. Et plus précisément, quels seront
les secteurs dans lesquels ces besoins progresseront le plus vite ?
De la réponse à ces questions dépendent les choix politiques de l'avenir, qui seront au
coeur du grand débat démocratique de l'an prochain.
Regardons les principaux postes de la dépense publique aujourd'hui. Les intérêts de la dette, tout d'abord : nous devons la réduire pour diminuer les sommes qui y sont consacrées. C'est ce que fait le Gouvernement. Les moyens consacrés à la défense nationale ensuite. Après un effort de rattrapage indispensable, ils devraient se stabiliser tout en conservant le haut niveau qu'exigent notre indépendance, notre diplomatie et notre politique européenne. Les dépenses d'éducation, déjà très importantes, qui ne sont pas destinées à croître encore à l'avenir, mais pourront être redéployées en faveur des lycées, des universités, de la recherche. Enfin, grâce à la bataille de l'emploi conduite par le Gouvernement, le taux de chômage a été réduit à 8,8%. Comme l'a indiqué le Président de la République, nous pouvons espérer descendre au-dessous de 8 % en 2007. Les dépenses d'indemnisation du chômage et celles liées aux politiques de l'emploi vont donc diminuer, sous le double effet de la baisse du nombre des demandeurs d'emploi et des évolutions démographiques.
Il en va tout autrement des dépenses de santé et de prise en charge des personnes très âgées. Les plus de 85 ans sont actuellement près de 1,1 million. Leur nombre aura doublé dans les dix prochaines années. C'est l'un des plus grands défis qui se posent à notre pays, comme à l'ensemble des pays européens : faire face dans de bonnes conditions à ce vieillissement sans précédent dans l'histoire de l'humanité, tout en préparant les conditions du renouveau par des politiques familiales ambitieuses et adaptées à une société où les deux parents travaillent.
Je veux rappeler des chiffres que vous connaissez : d'ici à 2050, le vieillissement de la population pourrait conduire à une augmentation des dépenses publiques comprise entre 3 % et 7 % du Produit Intérieur Brut. C'est considérable. Dans la plupart des États européens, cet impact se fera sentir dès 2010, les répercussions les plus importantes étant attendues entre 2010 et 2030. Par ailleurs, la croissance des dépenses de santé devrait se traduire par des augmentations des dépenses publiques comprises entre 1,5 % et 4 % du PIB.
Cela rend plus que jamais nécessaire une action vigoureuse et permanente de maîtrise des dépenses. Mais même en étant aussi efficaces que nous le sommes actuellement, nous ne pourrons faire longtemps l'économie d'un débat et d'une action portant sur les financements car il n'est pas question pour nous d'accepter un recul de notre protection sociale : ce serait politiquement contraire à nos convictions républicaines, socialement pénalisant pour les plus vulnérables, économiquement déstabilisant pour la croissance et financièrement absurde, car ce n'est pas le champ de nos couvertures sociales qui est à l'origine de nos difficultés financières mais bien le rythme d'accroissement des dépenses.
Certes, pour faire face à ce défi immense, nous devons améliorer encore la gestion de notre système sanitaire et médico-social.
Cet effort avait été trop longtemps éludé. Je pense, pour être précis, à cette période récente où les dépenses de santé galopaient de 5 à 7 % par an alors qu'elles ont depuis lors été ramenées à 2,5%.
La réforme de l'assurance maladie instaurée par la loi du 13 août 2004 a montré toute son efficacité.
Sans elle, le déficit aurait été de 16 milliards d'euros en 2005. Aujourd'hui, nous avons ramené le déficit à 6 milliards. Nous ferons mieux encore l'année prochaine puisque le déficit sera encore réduit à 3,9 milliards.
L'effort est très important, car si l'assurance maladie a bénéficié d'un apport de recettes complémentaires de 4 milliards d'euros dans le cadre du plan de redressement, on voit bien que, par rapport à un déficit tendanciel de 16 milliards, l'essentiel du chemin a été fait grâce à de moindres dépenses.
La loi portant réforme des retraites a quant à elle permis de sécuriser nos retraites à l'horizon 2020. Grâce à elle, le besoin de financement du régime général de l'assurance vieillesse à l'horizon 2020 devrait être réduit d'environ un tiers et celui des fonctions publiques de moitié. Et le grand rendez-vous de 2008 se présente dans des conditions d'autant meilleures que le chômage baisse fortement et que la natalité française progresse au point que notre pays fait figure d'exception en Europe.
Je voudrais souligner ce qui me paraît la grande leçon de toutes les politiques de Sécurité sociale menées depuis vingt ans : la seule manière de lutter efficacement contre le déficit, la seule façon de maîtriser structurellement les dépenses est d'agir sur les comportements, en veillant à faire jouer la responsabilité de tous. Responsabilité des patients, à travers la mise en place du parcours de soins et le choix d'un médecin traitant. Responsabilité des médecins, à travers la convention médicale. Responsabilité des pharmaciens. Responsabilité dans l'usage des médicaments, pour que la Sécurité sociale finance les traitements les plus efficaces au meilleur prix. Responsabilité des industriels dans la maîtrise de la promotion des médicaments.
Pour continuer à assurer la maîtrise des dépenses, il nous faut persévérer dans ce choix de modifier les comportements, en nous appuyant sur les instruments de gouvernance que nous avons mis en place et en cherchant sans cesse à renforcer les logiques de responsabilité. Nous n'avons pas encore été au bout des six milliards de dépenses inutiles que la Cour des comptes a identifiés. Nous obtenons des résultats sur les indemnités journalières et sur le médicament. Mais nous devons continuer à agir sur les gisements d'économies qui demeurent. Je pense, par exemple, aux affections de longue durée ou aux actes inutiles ou redondants que la mise en oeuvre du dossier médical personnel permettra de limiter.
La priorité, c'est de poursuivre le redressement des comptes de la Sécurité sociale. Et les chiffres prouvent que nous sommes sur la bonne voie : nous avons réduit de près de 20% le déficit du régime général entre 2005 et 2006. Nous le réduirons à nouveau de près de 20% entre 2006 et 2007.
Ce redressement structurel des finances sociales mérite d'autant plus d'être souligné qu'il n'empêche pas la Sécurité sociale, je le rappelai il y a un instant, de continuer à financer une part importante de la politique de l'emploi et d'autres grandes priorité du gouvernement : politique salariale (avec l'intéressement et la participation), santé publique, logement.
La Sécurité sociale participe ainsi pleinement à la réalisation de l'ensemble de nos objectifs de finances publiques : en contribuant directement au financement de grandes politiques, elle aide l'Etat à tenir l'objectif de réduction de 1% en volume de ses propres dépenses ; en réduisant sensiblement son déficit, elle contribue plus que proportionnellement à sa part dans les dépenses publiques à ramener l'ensemble des déficits au-dessous de 2,5% de la richesse nationale
La vraie question, c'est donc d'agir sur les comportements, dans une logique de responsabilité. Ce n'est pas de distinguer entre ce qui relève de la solidarité et ce qui relève de l'assurance. Car ces deux logiques sont présentes depuis l'origine au sein de notre système, et c'est leur combinaison qui fait la Sécurité sociale française. L'article 1er du Code la Sécurité sociale le rappelle : si la Sécurité sociale répond pleinement à une logique assurantielle contre les grands risques ou événements de la vie - la maladie, la vieillesse, les accidents professionnels, les charges familiales -, son organisation « est fondée sur le principe de solidarité nationale ».
L'originalité et je dirais même la grandeur de la Sécurité sociale viennent de ce qu'elle lie de manière indissociable assurance et solidarité. Chacun contribue ainsi en fonction de ses ressources et reçoit en fonction de ses besoins : c'est un élément essentiel de notre pacte républicain en même temps qu'un facteur d'équilibre social indispensable au développement économique de notre pays.
La Sécurité sociale n'est donc réductible ni à l'Etat, ni au système assurantiel. C'est un système de solidarité collective qui accompagne chacun de sa naissance à la fin de sa vie. Elle aide les parents à réaliser leur désir d'enfant ; elle les aide à concilier vie familiale et vie professionnelle ; elle nous offre un revenu de remplacement lorsqu'on ne peut pas travailler pour cause de maternité, de maladie, d'invalidité ou de retraite ; elle nous permet de faire face aux accidents de la vie notamment en matière de santé ; c'est ce qui vous permet de préserver votre capital santé le plus longtemps possible ; elle nous soutient lorsque nous avons besoin d'aide, à domicile ou en établissement.
La Sécurité sociale, ce ne sont pas seulement des prestations ; c'est un formidable élément de lien social ; c'est le choix démocratique et collectif de redistribuer une partie de la richesse nationale vers ceux qui en ont besoin, avec l'idée fondamentale que chacun, quels que soient ses revenus, sa situation, pourra, lui aussi, bénéficier du système.
Je voudrais souligner d'ailleurs un point essentiel : c'est que notre système de responsabilité collective n'est pas le plus mal armé pour contenir l'évolution des dépenses. Dans aucun pays au monde, les mutuelles et les assurances privées ne sont parvenues à enrayer la dérive des coûts de santé. L'exemple des Etats-Unis le montre bien. Alors même que seulement 45% des dépenses de santé américaines sont couvertes par la protection sociale, ces dépenses atteignent 14,6% du produit intérieur brut contre 9,5% en France. C'est une loi non écrite, mais que confirme l'expérience de tous les pays industrialisés : la Sécurité sociale reste un instrument essentiel de maîtrise des dépenses de santé et libère du pouvoir d'achat vers d'autres consommations.
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Mais les mesures d'économie et de bonne gestion ne suffiront pas. Pour faire face au tsunami démographique du vieillissement et financer les nouvelles technologies médicales, il faudra veiller à la préservation et au dynamisme des recettes sociales et fiscales affectées à la Sécurité sociale.
Préserver les recettes de la Sécurité sociale est une impérieuse nécessité.
Nous devons absolument éviter les écueils du passé, et particulièrement ceux de la précédente législature qui ont abouti entre 1998 et 2002 à priver la Sécurité sociale de près de 6 milliards d'euros de recettes pour financer les 35 heures à travers le FOREC, prendre en charge les cotisations retraite complémentaire des chômeurs, payer la dette de l'Etat auprès de l'Agirc-Arrco ou contribuer à l'allocation personnalisée autonomie. Chacun peut calculer ce que seraient aujourd'hui les comptes de la Sécurité sociale ou du Fonds solidarité vieillesse sans ce pillage de recettes opéré à l'époque.
Nous devons également utiliser avec discernement les dispositifs d'exonération. Le dernier Conseil d'orientation des finances publiques a d'ailleurs évoqué la nécessité d'un moratoire sur ces dispositifs.
Il faudra procéder aussi, à l'avenir, à un examen critique des différentes « niches sociales » existantes. Lorsque la Sécurité sociale contribue au financement d'autres politiques publiques à travers ces exonérations, et que les montants en jeu atteignent plusieurs milliards d'euros, il est logique que cette contribution soit soigneusement et périodiquement réévaluée afin de s'assurer que les exonérations mises en place à un moment donné pour des raisons précises sont toujours justifiées aujourd'hui. Je partage donc les préoccupations exprimées sur ce thème par le Rapporteur général de votre Commission des Finances.
Mais il faudra aller plus loin et affecter les ressources les plus dynamiques aux besoins les plus dynamiques.
A ce titre, je voudrais rappeler le choix du Gouvernement de financer, à partir de 2006, les allégements généraux de cotisations sociales par l'affectation à la Sécurité sociale de recettes fiscales. Ce changement provoque des effets de périmètre liés à la compensation des allègements de charges. Cela conduit à une présentation des compte différente en 2006 par rapport aux années précédentes : ainsi, la progression de la part des prélèvements obligatoires affectés à la sécurité sociale n'est qu'apparente, même si le financement de la protection sociale représente désormais la moitié des prélèvements obligatoires, soit 22,2% du PIB.
Ces recettes comprennent l'essentiel de la taxe sur les salaires pour 10 milliards d'euros, les droits sur les alcools et, à hauteur de plus de 5 milliards d'euros, la fraction de la taxe sur la valeur ajoutée assise sur les tabacs et les produits pharmaceutiques.
Je me réjouis qu'une part de TVA ait ainsi été affectée au financement de la Sécurité sociale - car il s'agit là d'un impôt dynamique, pleinement représentatif de l'ensemble de la richesse nationale, qui ne pèse pas sur nos exportations, et fait contribuer les importations au financement de notre protection sociale.
Faut-il aller plus loin et envisager une TVA sociale ? J'observe que cette idée, dont vous avez été l'un des premiers défenseurs, Monsieur le Président, fait son chemin. Les réflexions que nous avons menées cette année ont de nouveau montré son intérêt. Et nos voisins allemands viennent de décider une réforme dont nous devrons tirer les enseignements. Elle aura pour effet de stimuler leurs exportations et de pénaliser les nôtres. La France doit se préparer à réagir à cette évolution qui touche notre compétitivité.
Je pense toutefois qu'il faudra, dans la mise en oeuvre de cette idée, tenir compte des particularités françaises. Le taux de la TVA en France est plus élevé que la moyenne européenne. Par ailleurs, contrairement à l'Allemagne, notre économie est plus tirée par la demande interne que par les exportations. Mais au fur et à mesure que la politique de réforme de l'État portera ses fruits, on peut imaginer qu'une part croissante des recettes de TVA soit orientée vers la Sécurité sociale, à prélèvements constants. Nous pourrions commencer par là.
Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs les Sénateurs,
La Sécurité sociale fait partie de notre identité républicaine. Elle est le patrimoine des Français. Pour garantir l'avenir de notre modèle qui assure à tous l'égal accès à la santé et au progrès médical, pour faire face au défi historique de la croissance des dépenses sociales, nous devrons continuer de maîtriser efficacement les dépenses d'assurance maladie comme nous le faisons depuis 2004.
Nous devrons aussi réorienter nos ressources, tout en poursuivant la réduction des déficits pour restaurer le dynamisme de notre économie. Je souhaite ainsi qu'en 2007, les Français valident un véritable pacte de finances publiques et sociales pour les cinq années à venir. Par ce pacte, ils devront décider d'affecter les recettes les plus dynamiques de la Nation aux besoins qui évoluent le plus vite.
C'est à ces conditions que nous pourrons affronter les grands défis du vieillissement, de l'exclusion et du handicap. C'est à ces conditions que nous financerons le maintien d'un haut niveau de protection sociale, dans la fidélité à nos principes et à nos valeurs.
Je vous remercie.Source http://www.sante.gouv.fr, le 7 novembre 2006
Monsieur le Président de la Commission des Finances,
Monsieur le Président de la Commission des Affaires sociales,
Monsieur le Rapporteur Général du Budget,
Mesdames et Messieurs les Sénateurs,
Je suis heureux qu'un tel débat puisse de nouveau se tenir aujourd'hui au Sénat : je suis très attaché à ce moment de réflexion et d'orientation, en marge de la délibération du projet de loi de finances et du projet de loi de financement de la Sécurité sociale pour 2007, et je tiens à vous remercier, Monsieur le Président, de l'avoir proposé une nouvelle fois cette année au Gouvernement.
Il est essentiel, en effet, que la représentation nationale puisse discuter globalement de l'évolution de nos prélèvements obligatoires, comme nous le faisons aussi dans le cadre de la Conférence nationale des finances publiques mise en place par le Premier ministre. Cette vision d'ensemble, nécessaire et même indispensable, ne doit pas nous faire oublier les exigences propres à chaque sphère. En matière de Sécurité sociale, le principe d'annualité ne saurait avoir la même portée ni la même signification qu'en matière budgétaire. Car l'objet de la Sécurité sociale est de financer des droits permanents par des recettes affectées, stables et dynamiques.
Ces contributions constituent, pour les Français, une police d'assurance financée par la solidarité de tous. Nos compatriotes ne peuvent transiger sur les principes de leur Sécurité sociale. Elle leur appartient. La Sécurité sociale ne peut être un instrument de politique économique conjoncturelle aux mains de l'État, avec des droits qui varieraient d'une année sur l'autre en fonction du niveau d'activité économique. Elle doit apporter à nos compatriotes des garanties constantes. Elle joue aussi en cas de crise un rôle stabilisateur.
Elle maintient dans notre pays le haut niveau de protection sociale grâce auquel chacun peut travailler, créer, innover, consommer sans être inhibé par la crainte des risques de la vie.
Et la Sécurité sociale assure aujourd'hui une grande qualité de service rendu à nos concitoyens grâce à son action de proximité dans les caisses du réseau déconcentré et grâce au travail quotidien de plusieurs milliers d'agents. Nos compatriotes le savent bien. 85% des usagers se déclarent très satisfaits de l'action des caisses de sécurité sociale. Quel autre service public peut se prévaloir d'une telle popularité ?
Depuis plus de 60 ans, les garanties apportées par la Sécurité sociale sont au coeur de notre modèle de développement économique. Nos compatriotes veulent à juste titre que nous leur rendions des comptes sur le bon emploi des prélèvements qui financent leur Sécurité sociale. C'est la raison pour laquelle le Président de la République et le Gouvernement d'Alain JUPPE, avec Jacques BARROT et Jacques TOUBON, vous ont proposé en 1996 de réviser la Constitution pour créer les lois de financement de la Sécurité sociale.
Les relations financières entre l'État et la Sécurité sociale peuvent ainsi devenir chaque année plus transparentes. Ces débats d'orientation y contribuent également. Cela a pour première conséquence de faire apparaître l'importance des concours de la Sécurité sociale à la politique de l'emploi, à la politique de l'aide sociale, à la politique de la santé, à la politique du logement. Cela montre aussi l'effort accepté par la Sécurité sociale et les Fonds qui lui sont rattachés pour faciliter la trésorerie de l'État et réduire fortement son déficit.
Mais à partir de cet état des lieux, il importe pour le présent et pour l'avenir que la Sécurité sociale soit respectée, protégée et même sanctuarisée. Elle doit plus que jamais continuer à être gérée en veillant à ce que chaque euro dépensé soit réellement utile à la protection sociale des Français. Mais elle ne saurait être l'appendice d'autres comptes publics. L'avenir n'est pas à la fongibilité des dépense sociales et budgétaires. Il est à la transparence et l'étanchéité des comptes.
La gestion de la Sécurité sociale n'est pas et ne peut pas devenir un sous-produit de la gestion budgétaire de l'État. Elle est par nature une gestion à long terme. Une réforme des retraites, par exemple, produit pleinement ses effets au bout de plusieurs années. Il a fallu dix ans avant que la réforme de 1993 achève, pour l'essentiel, sa montée en régime. Il faut cinq ans pour que les principaux éléments de celle de 2003 soient entièrement appliqués, vingt ans pour que tous les résultats attendus se matérialisent.
C'est vrai aussi pour l'assurance maladie. La réforme repose sur un changement profond des comportements. C'est dans la durée qu'elle doit montrer son efficacité. Des gains de court terme seraient faciles à obtenir : il suffirait de diminuer les droits ou d'augmenter les prélèvements. Mais nous savons que de tels gains seraient sans lendemain si le rythme d'augmentation des dépenses n'était pas infléchi par la mise en oeuvre d'un principe de responsabilité généralisée. Et nous gardons les yeux rivés sur un indicateur essentiel : le taux de couverture des dépenses de santé par l'assurance maladie, l'un des plus élevés au monde. Il est supérieur à 77% et dépasse aujourd'hui ce qu'il était il y a dix ans. Il faut le maintenir. Les pays qui y ont renoncé sont ceux où les dépenses de santé augmentent le plus vite.
Il y a donc de multiples justifications à l'existence d'une loi de financement de la Sécurité sociale distincte de la loi de finances. Les deux textes sont par nature profondément différents.
Je tenais à rappeler ces distinctions indispensables avant d'en venir à ce qui fait le
principal intérêt d'un exercice comme celui d'aujourd'hui : regarder l'ensemble de nos
finances publiques, en examinant ce que sont et seront nos priorités, ce que sont et seront les
principaux besoins des Françaises et des Français dans les prochaines années ainsi que les
principales ressources dont nous disposerons pour y faire face.
Il faut se demander ce que seront, d'ici cinq à dix ans, les secteurs dans lesquels les
besoins de financement publics seront les plus importants. Et plus précisément, quels seront
les secteurs dans lesquels ces besoins progresseront le plus vite ?
De la réponse à ces questions dépendent les choix politiques de l'avenir, qui seront au
coeur du grand débat démocratique de l'an prochain.
Regardons les principaux postes de la dépense publique aujourd'hui. Les intérêts de la dette, tout d'abord : nous devons la réduire pour diminuer les sommes qui y sont consacrées. C'est ce que fait le Gouvernement. Les moyens consacrés à la défense nationale ensuite. Après un effort de rattrapage indispensable, ils devraient se stabiliser tout en conservant le haut niveau qu'exigent notre indépendance, notre diplomatie et notre politique européenne. Les dépenses d'éducation, déjà très importantes, qui ne sont pas destinées à croître encore à l'avenir, mais pourront être redéployées en faveur des lycées, des universités, de la recherche. Enfin, grâce à la bataille de l'emploi conduite par le Gouvernement, le taux de chômage a été réduit à 8,8%. Comme l'a indiqué le Président de la République, nous pouvons espérer descendre au-dessous de 8 % en 2007. Les dépenses d'indemnisation du chômage et celles liées aux politiques de l'emploi vont donc diminuer, sous le double effet de la baisse du nombre des demandeurs d'emploi et des évolutions démographiques.
Il en va tout autrement des dépenses de santé et de prise en charge des personnes très âgées. Les plus de 85 ans sont actuellement près de 1,1 million. Leur nombre aura doublé dans les dix prochaines années. C'est l'un des plus grands défis qui se posent à notre pays, comme à l'ensemble des pays européens : faire face dans de bonnes conditions à ce vieillissement sans précédent dans l'histoire de l'humanité, tout en préparant les conditions du renouveau par des politiques familiales ambitieuses et adaptées à une société où les deux parents travaillent.
Je veux rappeler des chiffres que vous connaissez : d'ici à 2050, le vieillissement de la population pourrait conduire à une augmentation des dépenses publiques comprise entre 3 % et 7 % du Produit Intérieur Brut. C'est considérable. Dans la plupart des États européens, cet impact se fera sentir dès 2010, les répercussions les plus importantes étant attendues entre 2010 et 2030. Par ailleurs, la croissance des dépenses de santé devrait se traduire par des augmentations des dépenses publiques comprises entre 1,5 % et 4 % du PIB.
Cela rend plus que jamais nécessaire une action vigoureuse et permanente de maîtrise des dépenses. Mais même en étant aussi efficaces que nous le sommes actuellement, nous ne pourrons faire longtemps l'économie d'un débat et d'une action portant sur les financements car il n'est pas question pour nous d'accepter un recul de notre protection sociale : ce serait politiquement contraire à nos convictions républicaines, socialement pénalisant pour les plus vulnérables, économiquement déstabilisant pour la croissance et financièrement absurde, car ce n'est pas le champ de nos couvertures sociales qui est à l'origine de nos difficultés financières mais bien le rythme d'accroissement des dépenses.
Certes, pour faire face à ce défi immense, nous devons améliorer encore la gestion de notre système sanitaire et médico-social.
Cet effort avait été trop longtemps éludé. Je pense, pour être précis, à cette période récente où les dépenses de santé galopaient de 5 à 7 % par an alors qu'elles ont depuis lors été ramenées à 2,5%.
La réforme de l'assurance maladie instaurée par la loi du 13 août 2004 a montré toute son efficacité.
Sans elle, le déficit aurait été de 16 milliards d'euros en 2005. Aujourd'hui, nous avons ramené le déficit à 6 milliards. Nous ferons mieux encore l'année prochaine puisque le déficit sera encore réduit à 3,9 milliards.
L'effort est très important, car si l'assurance maladie a bénéficié d'un apport de recettes complémentaires de 4 milliards d'euros dans le cadre du plan de redressement, on voit bien que, par rapport à un déficit tendanciel de 16 milliards, l'essentiel du chemin a été fait grâce à de moindres dépenses.
La loi portant réforme des retraites a quant à elle permis de sécuriser nos retraites à l'horizon 2020. Grâce à elle, le besoin de financement du régime général de l'assurance vieillesse à l'horizon 2020 devrait être réduit d'environ un tiers et celui des fonctions publiques de moitié. Et le grand rendez-vous de 2008 se présente dans des conditions d'autant meilleures que le chômage baisse fortement et que la natalité française progresse au point que notre pays fait figure d'exception en Europe.
Je voudrais souligner ce qui me paraît la grande leçon de toutes les politiques de Sécurité sociale menées depuis vingt ans : la seule manière de lutter efficacement contre le déficit, la seule façon de maîtriser structurellement les dépenses est d'agir sur les comportements, en veillant à faire jouer la responsabilité de tous. Responsabilité des patients, à travers la mise en place du parcours de soins et le choix d'un médecin traitant. Responsabilité des médecins, à travers la convention médicale. Responsabilité des pharmaciens. Responsabilité dans l'usage des médicaments, pour que la Sécurité sociale finance les traitements les plus efficaces au meilleur prix. Responsabilité des industriels dans la maîtrise de la promotion des médicaments.
Pour continuer à assurer la maîtrise des dépenses, il nous faut persévérer dans ce choix de modifier les comportements, en nous appuyant sur les instruments de gouvernance que nous avons mis en place et en cherchant sans cesse à renforcer les logiques de responsabilité. Nous n'avons pas encore été au bout des six milliards de dépenses inutiles que la Cour des comptes a identifiés. Nous obtenons des résultats sur les indemnités journalières et sur le médicament. Mais nous devons continuer à agir sur les gisements d'économies qui demeurent. Je pense, par exemple, aux affections de longue durée ou aux actes inutiles ou redondants que la mise en oeuvre du dossier médical personnel permettra de limiter.
La priorité, c'est de poursuivre le redressement des comptes de la Sécurité sociale. Et les chiffres prouvent que nous sommes sur la bonne voie : nous avons réduit de près de 20% le déficit du régime général entre 2005 et 2006. Nous le réduirons à nouveau de près de 20% entre 2006 et 2007.
Ce redressement structurel des finances sociales mérite d'autant plus d'être souligné qu'il n'empêche pas la Sécurité sociale, je le rappelai il y a un instant, de continuer à financer une part importante de la politique de l'emploi et d'autres grandes priorité du gouvernement : politique salariale (avec l'intéressement et la participation), santé publique, logement.
La Sécurité sociale participe ainsi pleinement à la réalisation de l'ensemble de nos objectifs de finances publiques : en contribuant directement au financement de grandes politiques, elle aide l'Etat à tenir l'objectif de réduction de 1% en volume de ses propres dépenses ; en réduisant sensiblement son déficit, elle contribue plus que proportionnellement à sa part dans les dépenses publiques à ramener l'ensemble des déficits au-dessous de 2,5% de la richesse nationale
La vraie question, c'est donc d'agir sur les comportements, dans une logique de responsabilité. Ce n'est pas de distinguer entre ce qui relève de la solidarité et ce qui relève de l'assurance. Car ces deux logiques sont présentes depuis l'origine au sein de notre système, et c'est leur combinaison qui fait la Sécurité sociale française. L'article 1er du Code la Sécurité sociale le rappelle : si la Sécurité sociale répond pleinement à une logique assurantielle contre les grands risques ou événements de la vie - la maladie, la vieillesse, les accidents professionnels, les charges familiales -, son organisation « est fondée sur le principe de solidarité nationale ».
L'originalité et je dirais même la grandeur de la Sécurité sociale viennent de ce qu'elle lie de manière indissociable assurance et solidarité. Chacun contribue ainsi en fonction de ses ressources et reçoit en fonction de ses besoins : c'est un élément essentiel de notre pacte républicain en même temps qu'un facteur d'équilibre social indispensable au développement économique de notre pays.
La Sécurité sociale n'est donc réductible ni à l'Etat, ni au système assurantiel. C'est un système de solidarité collective qui accompagne chacun de sa naissance à la fin de sa vie. Elle aide les parents à réaliser leur désir d'enfant ; elle les aide à concilier vie familiale et vie professionnelle ; elle nous offre un revenu de remplacement lorsqu'on ne peut pas travailler pour cause de maternité, de maladie, d'invalidité ou de retraite ; elle nous permet de faire face aux accidents de la vie notamment en matière de santé ; c'est ce qui vous permet de préserver votre capital santé le plus longtemps possible ; elle nous soutient lorsque nous avons besoin d'aide, à domicile ou en établissement.
La Sécurité sociale, ce ne sont pas seulement des prestations ; c'est un formidable élément de lien social ; c'est le choix démocratique et collectif de redistribuer une partie de la richesse nationale vers ceux qui en ont besoin, avec l'idée fondamentale que chacun, quels que soient ses revenus, sa situation, pourra, lui aussi, bénéficier du système.
Je voudrais souligner d'ailleurs un point essentiel : c'est que notre système de responsabilité collective n'est pas le plus mal armé pour contenir l'évolution des dépenses. Dans aucun pays au monde, les mutuelles et les assurances privées ne sont parvenues à enrayer la dérive des coûts de santé. L'exemple des Etats-Unis le montre bien. Alors même que seulement 45% des dépenses de santé américaines sont couvertes par la protection sociale, ces dépenses atteignent 14,6% du produit intérieur brut contre 9,5% en France. C'est une loi non écrite, mais que confirme l'expérience de tous les pays industrialisés : la Sécurité sociale reste un instrument essentiel de maîtrise des dépenses de santé et libère du pouvoir d'achat vers d'autres consommations.
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Mais les mesures d'économie et de bonne gestion ne suffiront pas. Pour faire face au tsunami démographique du vieillissement et financer les nouvelles technologies médicales, il faudra veiller à la préservation et au dynamisme des recettes sociales et fiscales affectées à la Sécurité sociale.
Préserver les recettes de la Sécurité sociale est une impérieuse nécessité.
Nous devons absolument éviter les écueils du passé, et particulièrement ceux de la précédente législature qui ont abouti entre 1998 et 2002 à priver la Sécurité sociale de près de 6 milliards d'euros de recettes pour financer les 35 heures à travers le FOREC, prendre en charge les cotisations retraite complémentaire des chômeurs, payer la dette de l'Etat auprès de l'Agirc-Arrco ou contribuer à l'allocation personnalisée autonomie. Chacun peut calculer ce que seraient aujourd'hui les comptes de la Sécurité sociale ou du Fonds solidarité vieillesse sans ce pillage de recettes opéré à l'époque.
Nous devons également utiliser avec discernement les dispositifs d'exonération. Le dernier Conseil d'orientation des finances publiques a d'ailleurs évoqué la nécessité d'un moratoire sur ces dispositifs.
Il faudra procéder aussi, à l'avenir, à un examen critique des différentes « niches sociales » existantes. Lorsque la Sécurité sociale contribue au financement d'autres politiques publiques à travers ces exonérations, et que les montants en jeu atteignent plusieurs milliards d'euros, il est logique que cette contribution soit soigneusement et périodiquement réévaluée afin de s'assurer que les exonérations mises en place à un moment donné pour des raisons précises sont toujours justifiées aujourd'hui. Je partage donc les préoccupations exprimées sur ce thème par le Rapporteur général de votre Commission des Finances.
Mais il faudra aller plus loin et affecter les ressources les plus dynamiques aux besoins les plus dynamiques.
A ce titre, je voudrais rappeler le choix du Gouvernement de financer, à partir de 2006, les allégements généraux de cotisations sociales par l'affectation à la Sécurité sociale de recettes fiscales. Ce changement provoque des effets de périmètre liés à la compensation des allègements de charges. Cela conduit à une présentation des compte différente en 2006 par rapport aux années précédentes : ainsi, la progression de la part des prélèvements obligatoires affectés à la sécurité sociale n'est qu'apparente, même si le financement de la protection sociale représente désormais la moitié des prélèvements obligatoires, soit 22,2% du PIB.
Ces recettes comprennent l'essentiel de la taxe sur les salaires pour 10 milliards d'euros, les droits sur les alcools et, à hauteur de plus de 5 milliards d'euros, la fraction de la taxe sur la valeur ajoutée assise sur les tabacs et les produits pharmaceutiques.
Je me réjouis qu'une part de TVA ait ainsi été affectée au financement de la Sécurité sociale - car il s'agit là d'un impôt dynamique, pleinement représentatif de l'ensemble de la richesse nationale, qui ne pèse pas sur nos exportations, et fait contribuer les importations au financement de notre protection sociale.
Faut-il aller plus loin et envisager une TVA sociale ? J'observe que cette idée, dont vous avez été l'un des premiers défenseurs, Monsieur le Président, fait son chemin. Les réflexions que nous avons menées cette année ont de nouveau montré son intérêt. Et nos voisins allemands viennent de décider une réforme dont nous devrons tirer les enseignements. Elle aura pour effet de stimuler leurs exportations et de pénaliser les nôtres. La France doit se préparer à réagir à cette évolution qui touche notre compétitivité.
Je pense toutefois qu'il faudra, dans la mise en oeuvre de cette idée, tenir compte des particularités françaises. Le taux de la TVA en France est plus élevé que la moyenne européenne. Par ailleurs, contrairement à l'Allemagne, notre économie est plus tirée par la demande interne que par les exportations. Mais au fur et à mesure que la politique de réforme de l'État portera ses fruits, on peut imaginer qu'une part croissante des recettes de TVA soit orientée vers la Sécurité sociale, à prélèvements constants. Nous pourrions commencer par là.
Monsieur le Président,
Mesdames et Messieurs les Sénateurs,
La Sécurité sociale fait partie de notre identité républicaine. Elle est le patrimoine des Français. Pour garantir l'avenir de notre modèle qui assure à tous l'égal accès à la santé et au progrès médical, pour faire face au défi historique de la croissance des dépenses sociales, nous devrons continuer de maîtriser efficacement les dépenses d'assurance maladie comme nous le faisons depuis 2004.
Nous devrons aussi réorienter nos ressources, tout en poursuivant la réduction des déficits pour restaurer le dynamisme de notre économie. Je souhaite ainsi qu'en 2007, les Français valident un véritable pacte de finances publiques et sociales pour les cinq années à venir. Par ce pacte, ils devront décider d'affecter les recettes les plus dynamiques de la Nation aux besoins qui évoluent le plus vite.
C'est à ces conditions que nous pourrons affronter les grands défis du vieillissement, de l'exclusion et du handicap. C'est à ces conditions que nous financerons le maintien d'un haut niveau de protection sociale, dans la fidélité à nos principes et à nos valeurs.
Je vous remercie.Source http://www.sante.gouv.fr, le 7 novembre 2006