Lettre de Mme Ségolène Royal, députée PS, candidate à l'élection présidentielle de 2007, attirant l'attention de l'Association des avocats chinois sur les entraves professionnelles de deux juristes chinois, Pékin le 8 janvier 2007.

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Circonstance : Voyage en Chine du 6 au 9 janvier 2007

Texte intégral

Monsieur le Président de l'Association Nationale des Avocats,
Au nom de la longue tradition de culture qui unit la France et la Chine, j'ai l'honneur de saluer votre association et à travers elle l'ensemble des avocats et juristes chinois.
La profession d'avocat est essentielle dans nos sociétés. C'est pourquoi j'attache une attention particulière aux conditions de son exercice. Toute atteinte à celui-ci a des conséquences sur le droit et la liberté des personnes.
Nous avons conscience des efforts entrepris par la République Populaire de Chine pour renforcer son système de légalité. Un important travail de codification a notamment été entrepris depuis plusieurs années : il s'agit de la base indispensable de tout Etat de droit.
La Chine et la France disposent dorénavant d'un ordre juridique largement commun, du fait de la signature par nos deux pays de nombreuses conventions internationales. Rappelons pour les plus notoires la Déclaration Universelle des Droits de l'Homme de 1948, la Convention internationale contre la Torture et autres traitements cruels, inhumains ou dégradants, la Convention relative aux Droits de l'Enfant, le Pacte international relatif aux Droits civils et politiques, signé même si non encore ratifié par la Chine à l'occasion de son adhésion à l'Organisation Mondiale du Commerce.
C'est pourquoi à l'occasion de ma visite en Chine, du 6 au 9 janvier 2007, je vous fais part de ma préoccupation sur la situation de deux personnes dont l'exercice professionnel et la liberté ont été entravés.
De nombreuses organisations internationales et le Parlement européen à l'unanimité se sont fait l'écho de ces préoccupations.
- Maître Gao Zisheng, a été condamné, et sa licence d'avocat retirée
- Monsieur Chen Guangchong, juriste, aveugle de naissance, a été condamné à une peine d'emprisonnement et il serait encore détenu.
Ma démarche ne consiste pas ici à porter une appréciation sur les causes dont ils se sont fait les défenseurs. Les avocats n'ont ni à plaire ni à déplaire. Ils doivent pouvoir exercer leur profession dans le respect de leur déontologie.
Je souhaite obtenir des informations précises sur ce qui leur a été reproché, leur lieu et conditions de détention, la durée de leur peine et les sanctions professionnelles dont ils ont pu faire l'objet.
En Chine, en France ou partout ailleurs dans le monde, les progrès de l'Etat de droit sont toujours liés à la reconnaissance pleine et entière de l'exercice de la profession d'avocat, support indispensable à l'exercice de leurs droits par les citoyens.
En outre, je suis magistrate et j'ai été inscrite à l'Ordre des Avocats à la Cour d'Appel de Paris. Vous voudrez bien comprendre ma sensibilité et mon insistance à solliciter et recevoir des informations sur la situation de ces deux juristes.
J'ai ainsi chargé deux membres éminents de ma délégation, Monsieur Bruno Le Roux, député à l'Assemblée Nationale, et Maître Jean-Pierre Mignard, Avocat au Barreau de Paris, de vous transmettre ce courrier.
Je vous serais reconnaissante de bien vouloir répondre aux questions qu'il contient.
Je vous prie de croire, Monsieur le Président, à l'assurance de ma sincère considération.
Source http://www.desirsdavenir.org, le 10 janvier 2007