Texte intégral
Monsieur le Président,
Monsieur le Rapporteur Général,
Mesdames et Messieurs les Députés,
C'est pour moi un grand plaisir d'inaugurer mes interventions devant vous en traitant de deux sujets aussi majeurs que la loi de règlement du budget 2006 et les grandes orientations de nos finances publiques pour le quinquennat.
Ces deux sujets peuvent paraître déconnectés : si le débat d'orientation budgétaire permet de dessiner la stratégie pour l'avenir, la loi de règlement tire, par définition, le bilan du passé.
En réalité, ils sont intimement liés puisque la loi de règlement est désormais présentée selon une logique de résultats et non plus de moyens, des résultats qui vont nourrir les perspectives d'avenir.
Cette nouvelle présentation en mode LOLF marque le point d'orgue des réformes inscrites dans la nouvelle loi organique relative aux lois de finances du 1 er août 2001. Je tiens, à ce propos, à rendre hommage au rôle d'impulsion essentiel que votre Commission a joué, et particulièrement vous, M. le Président, dans l'élaboration de cette nouvelle « constitution budgétaire ».
Je vous présenterai d'abord les enseignements de l'exercice de 2006 et je ferai le point sur l'exécution 2007. Je détaillerai ensuite les axes de la stratégie de finances publiques pour le quinquennat et je reviendrai sur les principaux leviers qui nous permettront de réussir.
Un mot plus général, tout d'abord, puisque mon Ministère est nouveau. En tant que Ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique, je suis responsable de l'ensemble des finances des administrations publiques. Pourquoi donner au même ministère la responsabilité de l'ensemble des finances publiques ? J'y vois au moins deux raisons :
1) La première, et nul ne le sait mieux que votre Rapporteur général, c'est que les contraintes qui pèsent aujourd'hui sur les finances publiques sont globales : elles doivent donc être pilotées de façon coordonnée.C'est particulièrement le cas en matière de désendettement :
- il faut articuler étroitement les stratégies poursuivies concernant les recettes et leur affectation entre l'Etat, la sécurité sociale et les collectivités locales ;
- il faut aussi coordonner nos mesures de maîtrise des dépenses. Répondre aux besoins de nos concitoyens en matière de santé et de retraite, dans le contexte actuel de vieillissement de la population, nécessitera des efforts de tous, aussi bien dans la sphère sociale que dans les autres domaines d'intervention publique.
2) La deuxième raison de ce grand ministère, c'est qu'il doit permettre de clarifier les relations entre l'Etat et la sécurité sociale. Ces relations, vous le savez, ne se sont pas toujours caractérisées par la transparence.
Une première étape a été atteinte par la reconnaissance des créances des régimes de sécurité sociale dans le bilan de l'Etat en 2006. Cette clarification ne doit pas s'arrêter là et j'ai bien l'intention d'engager l'apurement de la dette de l'Etat dès cette année.
Mais ne nous trompons pas de débat : la dette de l'Etat a une incidence sur les actif et passif au bilan, elle a un impact sur la trésorerie, mais elle ne pèse pas dans les comptes des régimes de sécurité sociale qui sont, je le rappelle, en droits constatés. Il faut recentrer nos efforts sur la maîtrise des dépenses ; des relations « apaisées » entre l'Etat et la sécurité sociale nous y aiderons. Nous mettrons en place des règles de gouvernance et des procédures pour que cette dette ne se renouvelle pas : nous veillerons notamment à ce que les gestionnaires de programme ne puissent pas utiliser les crédits destinés à la compensation des exonérations de cotisations à d'autres fins.
I - L'exécution 2006 et le PLR
L'exécution 2006
Je vous propose de revenir tout d'abord sur l'exécution du budget 2006 .
Le déficit budgétaire de l'État s'élève à 39 Mdseuros en 2006 - 35,7 Mdseuros hors régularisation comptable des pensions - alors que la loi de finances rectifiée en fin d'année prévoyait 45,7 Mdseuros.
- Cette amélioration par rapport aux prévisions est le fruit d'une stricte maîtrise des dépenses sur le budget général.
Pour la 4 ème année consécutive, l'autorisation parlementaire a été respectée et la progression des dépenses, en comptabilité budgétaire, contenue au niveau de l'inflation (c'est le « 0 volume »).
Le respect du plafond de dépenses s'accompagne du respect du plafond d'emplois, qui témoigne d'un effort important de maîtrise des effectifs et de la masse salariale des ministères : la baisse du nombre d'emplois en équivalents temps plein est de 9 500, contre 5 300 prévus en loi de finances initiale.
Maîtrise de la dépense et maîtrise des effectifs sont les deux éléments clés de la crédibilité de notre politique budgétaire. Elles seront assidûment poursuivies .
- L'amélioration du montant du déficit est aussi le fruit d'une dynamique marquée des recettes fiscales, de plus de 10 Mdseuros par rapport à la loi de finances initiale, essentiellement concentrée sur l'impôt sur les sociétés. Conformément à la règle fixée en loi de finances initiale, l'intégralité du surplus de recettes fiscales a été consacrée à la réduction du déficit budgétaire.
Mais, comme je l'ai indiqué, l'intérêt de ce projet de loi de règlement dépasse de beaucoup l'enregistrement de ces résultats : 1) parce qu'il entérine une véritable révolution comptable et 2) parce qu'il devient l'étape clé de l'amélioration des performances de l'action publique.
2) Un big bang comptable
Ce projet de loi marque une première rupture par son volet comptable. C'est en effet un véritable big bang comptable pour l'Etat, comme l'a dit très justement le Premier président de la Cour des comptes.
Je tiens à rendre hommage à tous les artisans de cette réforme. Toutes les administrations, gestionnaires et comptables, ont fait un travail considérable, dont témoigne la qualité de ces premiers comptes.
Pour la première fois, les comptes de l'Etat sont présentés non plus selon une simple comptabilité de caisse mais selon une comptabilité générale, avec, à l'égal des entreprises ou des associations, un bilan, un compte de résultat et un tableau des flux de trésorerie.
Ces comptes présentent un double intérêt :
d'abord, ils donnent une vision beaucoup plus précise et détaillée du résultat de l'exercice budgétaire ;
ensuite, ils rendent compte de façon beaucoup plus juste du patrimoine de l'Etat.
Cette réforme comptable, c'est plus de fiabilité et plus de transparence dans les comptes, donc plus de démocratie et plus de contrôle. Vous aurez ainsi une meilleure prise sur les comptes publics.
Pour autant, le chantier comptable n'est pas terminé. Les efforts devront être poursuivis pour améliorer la qualité de l'information et parvenir, à terme, à lever les réserves faites par la Cour des Comptes. C'est tout le sens des engagements que nous avons pris vis-à-vis du certificateur. C'est une tâche de longue haleine, qui doit nous inciter, collectivement, à ne pas relâcher l'effort.
3) L'enjeu d'un nouveau rendez-vous dans la procédure budgétaire : la mesure des performances.
Mais la nouveauté de la loi de règlement pour 2006 ne s'arrête pas à la présentation des comptes, elle tient aussi aux rapports annuels de performance qui lui sont annexés et qui en font désormais le moment clé où l'on va juger, pour chaque politique publique, des résultats atteints et des moyens mis en oeuvre.
Avec ces innovations, cette loi de règlement a vocation à sortir de l'ombre pour devenir lemoment privilégié du contrôle de l'exécution budgétaire et par conséquent un point de passage majeur dans le cycle de la procédure budgétaire. C'est une différence très nette par rapport aux lois de règlement antérieures, des lois qui suscitaient assez peu d'intérêt, sauf pour les commissions des finances des Assemblées.
J'aimerais vous donner une première analyse de l'exercice auquel se sont livrées l'ensemble des administrations.
A. Les imperfections
Naturellement, comme pour tout premier exercice, tout n'est pas parfait. Plusieurs raisons à cela :
- les systèmes d'information des ministères, qui ne sont pas encore totalement en place ;
- des difficultés en gestion dans l'imputation des dépenses ;
- la nouveauté de l'exercice aussi, qui implique un changement culturel important de la part des administrations. Il ne s'agit plus de montrer que tout va bien dès lors qu'on a consommé 99 % des crédits. Il faut désormais présenter la stratégie qui a été poursuivie, à l'appui des moyens alloués.
B. Les enseignements
Pour autant, le bilan que l'on peut tirer de ce premier exercice est très satisfaisant. Il est, là encore, le fruit d'une implication collective de l'ensemble des ministères. Qu'apprend-on de ces RAP ?
1) En 1 er lieu, l'utilisation que les responsables de programme ont faite des crédits dans le nouveau cadre de gestion offert par la LOLF.
Ce que je retiens avant tout, c'est le succès de l'appropriation des nouvelles souplesses de gestion :
- les nouvelles modalités de mise en réserve de crédits ont parfaitement répondu aux attentes, en donnant aux ministères la visibilité nécessaire sur les crédits disponibles, en toute transparence vis-à-vis du Parlement ;
- les ministères ont pleinement exploité les leviers offerts par la LOLF dans la gestion de leurs crédits, au service de leurs priorités. Ils ont pu ainsi financer la plupart des besoins apparus en cours de gestion par redéploiement au sein des programmes, en dégageant, notamment, des marges sur la masse salariale.
2) On apprend ensuite le coût réel des politiques publiques. C'est une grande nouveauté ! Avant la LOLF, on pouvait seulement connaître le montant des dépenses exécutées sur le budget de chaque ministère. Avec la LOLF, on raisonne désormais en politiques publiques, qu'elles soient mises en oeuvre par un ou plusieurs ministères, et on en connaît le coût effectif et non plus prévisionnel.
C'est, par exemple, un effort budgétaire de 36,3 Mdseuros qui a été consacré en 2006 à la défense, de 22 Mdseuros à la recherche et à l'enseignement supérieur, et de 15,8 Mdseuros à la sécurité pour ne citer que les masses les plus importantes.
Les RAP fournissent même une esquisse du coût complet des politiques publiques, grâce à l'apport de la comptabilité générale. Les dépenses budgétaires sont en effet complétées par les charges se rattachant à chaque programme, en particulier les dotations aux amortissements ou aux provisions.
Pour vous donner un exemple, le montant des dépenses budgétaires sur les transports (9,4 Mdeuros) est corrigé à 7,3 Mdeuros sur la base des coûts complets, pour tenir compte de l'amortissement des investissements sur la durée.
C'est donc une image beaucoup plus juste du coût des politiques publiques que l'on met à disposition du Parlement et du citoyen, même si des progrès restent encore à faire.
3) Enfin, les RAP permettent d'aller plus loin encore puisque, avec les indicateurs de performance, on connaît aussi désormais les résultats des politiques publiques. C'est une avancée majeure, qui intéresse tout à la fois le citoyen, le contribuable et l'usager :
- le citoyen, lorsque, par exemple, il constate le renforcement de la sécurité des établissements pénitentiaires. Il était prévu un taux d'évasion de 3,6 pour 10.000 détenus dans le PAP. Ce taux est deux fois moindre à 1,9 dans le RAP ;
- le contribuable lorsqu'il voit que le taux de remplacement des enseignements absents pour congés maladie ou maternité est de 96,3% en 2006 contre 90% prévus à l'origine dans le PAP ;
- l'usager, enfin, lorsqu'il observe, par exemple, que le délai moyen d'immobilisation des marchandises dédouanées dans la journée est de moins de 10 minutes en 2006, contre 12 minutes prévues dans le PAP.
Tous les objectifs fixés n'ont pas été atteints mais, pour un premier exercice, c'est plutôt satisfaisant : sur l'ensemble des indicateurs de performance qui peuvent être analysés, on relève un taux de réalisation de 60%, 20 autres % traduisent de réels progrès, mais pas à la hauteur des cibles fixées. Les 20% restants ne traduisent pas de réelle amélioration de la performance.
III- L'exécution 2007
Après l'exécution 2006, je voudrais décrire brièvement la situation pour 2007. Compte tenu des données dont nous disposons à l'heure actuelle, elle devrait être globalement en phase avec les prévisions, et aboutir à un déficit de 2,4 point de PIB pour l'ensemble des administrations publiques, conforme à la prévision de début d'année.
Les recettes fiscales devraient être de 2 à 5 Mdeuros supérieures au niveau prévu en loi de finances, en particulier grâce au dynamisme de l'impôt sur les sociétés. Quant aux dépenses, nous garderons une discipline sans faille sur les dépenses de l'Etat, et nous respecterons le niveau de dépense voté. Le déficit budgétaire devrait donc être inférieur à celui voté en LFI.
En revanche, la principale mauvaise nouvelle est bien connue, c'est la dégradation de la situation financière du régime général. Elle est inacceptable :
le déficit attendu, proche de 12 milliards d'euros, 4 milliards au-dessus de ce qui a été voté en PLFSS, est au niveau de celui de 2004, quand les comptes de la branche maladie atteignait des déficits records. Les résultats de la réforme de 2004 sont ainsi quasiment effacés : tel Sisyphe, on a poussé une réforme de maîtrise des dépenses et on retombe dans des déficits exorbitants.
Face à cette situation, nous n'avons pas le choix, le retour à l'équilibre est un impératif , un impératif financier, un impératif de responsabilité, car nous n'avons pas le droit de reporter sur nos enfants le soin de financer nos propres dépenses.
IV - La stratégie d'assainissement des finances publiques
Après 2006 et 2007, j'en viens à la stratégie économique et budgétaire du Gouvernement pour le quinquennat.
Conformément aux engagements pris pendant la campagne présidentielle, et réitérés hier par le Président de la République à Bruxelles, l'objectif du Gouvernement est de revenir, dès que possible, à une dette inférieure à 60 points de PIB et à un solde public équilibré. Nous voulons restaurer des marges de manoeuvre suffisantes pour favoriser la croissance et préparer dès aujourd'hui les enjeux du vieillissement de la population.
Cette stratégie s'appuie sur deux piliers :
des mesures fiscales ambitieuses permettant de revaloriser le travail, de créer un choc de confiance et de relancer durablement la croissance ;
une maîtrise sans précédent de la dépense publique , qui jouera une part toute aussi importante au rétablissement de la confiance, en permettant de réduire la dette publique, de préserver l'équité intergénérationnelle et d'améliorer l'efficacité de l'Etat et des services publics.
Je ne reviendrai pas sur le premier point, que vous avez eu l'occasion de discuter avec ma collègue Christine LAGARDE. Laissez-moi simplement souligner la cohérence qu'il y a entre ces deux axes. On voit bien que pour faire face à l'ensemble des défis présents et à venir - mondialisation, vieillissement de la population, cohésion sociale pour ne citer qu'eux - il faut trouver de nouvelles ressources. Pour cela les moyens sont clairs :
rationaliser nos dépenses actuelles, pour dégager des marges de manoeuvres ;
et augmenter les recettes, non pas par de nouveaux prélèvements qui étoufferaient l'économie, mais précisément par plus de croissance.
La clé de l'assainissement des finances publiques est bien la maîtrise de la dépense.Les baisses d'impôts ne seront vraiment efficaces, et la confiance ne sera durablement au rendez-vous, que si elles s'accompagnent d'une ambition similaire dans la maîtrise de la dépense.
Si elles étaient financées « à crédit », le poids des charges d'intérêt réduirait considérablement les efforts faits sur les autres postes de dépenses. Les exemples d'autres pays de l'OCDE montrent d'ailleurs que les consolidations réalisées par la maitrise de la dépense sont plus durables que celles qui passent par un relèvement des prélèvements obligatoires. Vous trouverez dans le document deux exemples très éclairants à ce sujet, le Canada et l'Allemagne.
Cette maitrise de la dépense doit réunir plusieurs conditions :
1) Elle doit être partagée par l'ensemble des acteurs : Etat, administrations de sécurité sociale et collectivités locales. C'est un point crucial. L'Etat ne peut pas être le seul à faire des efforts. Comme l'a annoncé le Premier ministre, les collectivités locales vont être plus équitablement associées, avec la mise en place d'une conférence des exécutifs dès la semaine prochaine. Nous nous inscrirons dans les pistes évoquées par la Conférence nationale des Finances Publiques, notamment celles du rapport présenté par Gilles Carrez.
Le calendrier resserré de la session extraordinaire de l'été 2007 n'a pas permis de réunir cette Conférence avant le dépôt de ce rapport. Mais je souhaite qu'elle se réunisse en septembre et qu'elle se concentre particulièrement sur le redressement des comptes de la France.
2) Deuxième impératif , cette maîtrise des dépenses, étendue à l'ensemble de la sphère publique, ne peut connaître aucun report : différer l'ajustement ne le rendrait que plus dur avec l'effet « boule de neige » des intérêts de la dette, particulièrement fort dans le contexte actuel de relèvement des taux.
3) Enfin, cette maîtrise doit s'inscrire dans la durée.
La progression de la dépense publique devra être divisée par deux par rapport aux tendances passées . Cela correspond à une évolution moyenne légèrement supérieure à 1 % par an en volume sur l'ensemble de la sphère publique, contre 2,25 % en moyenne sur les dix dernières années.
Le double objectif de retour à l'équilibre des finances publiques et de dette inférieure à 60 points de PIB d'ici 2012 est présenté sous l'hypothèse d'une croissance de l'activité durablement portée à 2,5 %. Il est clair que les ambitions du gouvernement en termes de croissance ne s'arrêteront pas à ce chiffre. Toutes les politiques mises en place visent à gagner au moins un point de croissance à terme par rapport au 2 % de croissance qu'on a pu connaître dans le passé.
Atteindre l'équilibre des finances publiques sera naturellement facilité par une croissance plus forte. Le surplus de recettes engendré par une croissance plus forte sera affecté à la poursuite du désendettement aussi longtemps que le retour de la dette à 60 points de PIB ne sera pas acquis. [Comme l'a dit hier le Président de la République, nous devons faire nos efforts pour être près de l'équilibre dès 2010 si la croissance est élevée.]
En revanche, l'objectif d'assainissement des finances publiques ne doit pas pâtir d'un revers passager sur la croissance. Certaines conditions nous échappent, comme un retournement soudain de la conjoncture internationale, par exemple.
Notre ambition dans la maîtrise des dépenses permet cependant de préserver une marge de sécurité puisque même avec une croissance du PIB qui ne dépasserait pas 2,25 %, l'objectif d'une dette à 60 % de PIB serait atteint en 2012.
Comme je l'ai souligné, tous les acteurs doivent s'impliquer pour que nous puissions réussir :
1) S'agissant de l'État, une norme « 0 volume au plus » s'appliquera sur un périmètre élargi. C'est une nouvelle étape dans la maîtrise du déficit budgétaire. En effet, cette norme élargie inclura les prélèvements sur recettes pour les collectivités locales.
Cette norme élargie est un objectif ambitieux, qui n'a jusqu'ici jamais été demandé à l'Etat : sur ce champ, en effet, la croissance de la dépense de l'Etat entre 2002 et 2007 était en volume de 0,7% par an en moyenne, et sera encore de 0,2 % en 2007.
Il faut bien voir aussi que l'évolution des dépenses « inéluctables » - charge de la dette et pensions - est désormais défavorable. La remontée des taux d'intérêt fait croître la charge de la dette, alors qu'elle était quasi-stable depuis 4 ans.
Les pensions, elles, progressent fortement avec le choc démographique majeur que connaît la fonction publique. L'effort sur les autres dépenses devra donc être encore plus exigeant. 0 % en volume en 2008, c'est plus exigeant que 0 % en volume par le passé ; c'est même plus exigeant que - 1 % en volume en 2007, car la LFI 2007 permettait une augmentation de 3 Mdseuros de dépenses hors charge d'intérêt, pensions et rémunérations ; compte tenu de la remontée des taux d'intérêt, il faut que, sur ce périmètre, la dépense soit stabilisée en euros courants dans les années à venir pour respecter la stabilité de l'ensemble en volume.
2)Les administrations de sécurité sociale bénéficieront de la maîtrise des dépenses de santé et de la poursuite de l'amélioration de la situation de l'emploi. Nous ne pouvons continuer à faire financer nos dépenses de santé courantes par nos enfants ou petits-enfants ; nous devons prendre nos responsabilités. Il est normal que les dépenses de santé augmentent en part de PIB à cause du vieillissement de la population et l'amélioration des technologies.
Mais nous devons en assurer le financement, et la franchise, que le gouvernement étudie actuellement, permettra de déconnecter la croissance de l'ONDAM de ces nouveaux besoins. En moyenne, la croissance de l'ONDAM devra être au plus de 2 % en volume sur la période. C'est un objectif réaliste. C'est un objectif ambitieux qui implique que le Gouvernement, dès maintenant, examine et renforce les leviers de la maîtrise médicalisée avec l'ensemble des acteurs. Nous y reviendrons. Les dépenses de la branche famille devront également participer à l'effort global de maîtrise de la dépense.
3) Enfin, ce scénario repose aussi sur l'hypothèse que les collectivités locales stabilisent leur endettement, en modérant leurs dépenses. C'est tout le sens du nouveau pacte que nous voulons passer avec les collectivités territoriales, afin d'améliorer leurs relations financières avec l'Etat. La Conférence nationale des exécutifs permettra d'associer les collectivités locales à l'élaboration des normes qui les concernent, en liaison avec le comité des finances locales, qu'il s'agisse de normes techniques ou environnementales ou de revalorisation de point fonction publique.
En contrepartie, les règles gouvernant l'évolution des dotations aux collectivités locales seront réformées : dès 2008, les concours qui relèvent du contrat de croissance et de solidarité se verront appliquer la même norme que les autres dépenses de l'Etat.
C'est avec ces exigences sans précédent sur la dépense que nous arriverons à atteindre les objectifs d'assainissement des finances publiques au cours de cette législature .
V - Les moyens de notre stratégie budgétaire.
Comment faire ? Je voudrais maintenant détailler les leviers et les moyens structurels qui me paraissent les plus importants pour mener à bien la réalisation de ces objectifs.
Le premier, c'est la Révision Générale des Politiques Publiques
Depuis 2005, sous l'impulsion de Jean-François COPÉ, plusieurs vagues d'audit de modernisation ont été lancées. Elles ont accompagné le processus de mise en place de la LOLF, et ont permis de commencer à rationnaliser la dépense publique et à améliorer le service public.
Il est temps pour le Gouvernement de passer à la vitesse supérieure et de mettre en place une démarche très novatrice pour notre pays, inspirée des meilleures pratiques étrangères : la révision générale des politiques publiques.
Il s'agit de passer au crible l'ensemble de la dépense publique et de ses opérateurs , selon les trois dimensions de la performance : efficacité, économie et qualité de service. La révision générale permettra en particulier d'atteindre l'objectif de non-remplacement d'un départ à la retraite sur deux dans la fonction publique d'État. Mais elle permettra bien plus que cela. Elle permettra d'identifier et de programmer des réformes « intelligentes » et structurantes, assurant une réduction durable et bien ciblée de la dépense de l'État.
La révision générale servira ensuite à établir une programmation pluriannuelle détaillée des dépenses donnant aux gestionnaires davantage de visibilité sur leurs crédits et davantage de responsabilité dans leur gestion.
Le champ de la révision ne sera pas limité aux dépenses de l'Etat : elle portera aussi sur les politiques sociales qui sont partagées avec les partenaires sociaux ou d'autres acteurs comme l'assurance maladie, la famille ou la formation professionnelle.
Les propositions de réformes structurantes issues de cette révision, à laquelle participera Gilles CARREZ, seront approuvées par le Conseil de la modernisation des politiques publiques, qui réunira autour du Président de la République l'ensemble des ministres.
La revue des politiques publiques devrait être achevée avant le prochain débat d'orientation budgétaire. Nous mettrons alors en place un dispositif de contrôle régulier de la mise en oeuvre des réformes décidées, en lien avec les commissions compétentes des assemblées et avec la Cour des comptes.
L'évolution de la procédure budgétaire
Avec la LOLF, le Parlement a voulu revaloriser la loi de règlement pour en faire le moment de « vérité budgétaire », celui où il est rendu compte de l'action menée.
En donnant une dimension nouvelle à cette loi, la LOLF permet au Parlement et, au-delà, au citoyen de contrôler l'action du Gouvernement.
Le Parlement, j'en ai la conviction, s'appropriera cette réforme. Il en a déjà apporté la preuve, l'an dernier, en organisant l'audition de ministres et de responsables de programmes sur l'exécution de leur budget en 2005, en préfiguration de l'exercice qui s'annonce.
Au vu de ces nouveaux enjeux, la procédure budgétaireévoluerapour concentrer l'attention sur l'examen du projet de loi de règlement et, en particulier, sur les rapports annuels de performance, davantage que sur le projet de loi de finances lui-même.
Ce déplacement aurait pour avantage d'instaurerles conditions d'exercice d'une vraie responsabilité des ministres : ils ne seront plus jugés en fonction de la taille du budget qu'ils obtiennent mais en fonction de la mise en oeuvre des politiques publiques dont ils sont responsables, des performances qu'ils ont atteintes, dans la limite des moyens qui leur sont alloués. Comme dans toute entreprise, le moment de la présentation des résultats doit l'emporter sur celui de la présentation du budget initial.
En 2009, pour le PLF, le budget sera donc présenté au nom de l'ensemble du gouvernement par le ministre du Budget, le débat budgétaire étant alors recentré. Cette évolution pourrait même commencer, si le Parlement en est d'accord, dès le PLF 2008.
Je serais favorable à ce que cette réflexion soit engagée dans les semaines à venir, en concertation étroite avec le Parlement et, en particulier, les Commissions des finances de l'Assemblée nationale et du Sénat .
La lutte contre la fraude
Enfin, j'y suis très attaché, pour contribuer également à renforcer la légitimité de l'intervention publique, la lutte contre la fraude fiscale et sociale constituera une priorité : la baisse des prélèvements et la lutte contre les dépenses inutiles doivent en effet être accompagné de la plus grande transparence et de la plus grande équité dans la perception des prélèvements et le versement des prestations. C'est une question de morale publique.
Je veillerai à poursuivre et à accélérer la mobilisation de tous les services, administration fiscale comme organisme de sécurité sociale, au service de cette priorité. Lutter contre la fraude, c'est aussi expliquer à quoi sert l'argent public, renforcer le consentement à l'impôt, faciliter les démarches des contribuables et des cotisants de bonne foi.
L'administration fiscale et les organismes de sécurité sociale poursuivront leurs efforts pour que leurs stratégies de contrôle ne soient pas fondées sur la défiance. Ce n'est pas la défiance « généralisée » qui nous permettra de lutter contre la fraude, mais bien une relation de confiance avec l'ensemble des acteurs et un ciblage sur la fraude véritable.
Ce sont là les principaux axes de travail structurants que le Gouvernement entend poursuivre pour mener à bien notre chantier commun : l'assainissement durable de nos finances publiques. Un assainissement durable qui suppose une mutation de notre rapport à la dépense publique : il ne s'agit plus de la considérer uniquement en réponse à un besoin mais de la conditionner à un objectif précis et à une obligation d'efficacité. Un assainissement durable qui sera propice au rétablissement de la confiance tant le dérapage de nos finances publiques entretient une inquiétude latente chez nos concitoyens, qui sont de plus en plus sensibles à ces enjeux.
Je vous remercie.