Texte intégral
C. Barbier B. Hortefeux bonjour.
R.- Bonjour C. Barbier.
Q.- Les squatters d'Aubervilliers ont donc levé leur camp cette nuit et seront relogés tout de suite ou dès qu'ils auront réglé leurs impayés. Le pouvoir a-t-il cédé devant la rue ?
R.- Non, absolument pas. A ma connaissance, les quatre familles d'expulsés ne sont pas en situation irrégulière, donc la préfecture a signé un protocole et dans ce protocole, les efforts de relogement seront effectués en direction de ceux qui sont en situation régulière.
Q.- Le sous-préfet l'a bien précisé : "Il faut être en situation régulière". Est-ce qu'il y en a d'autres parmi les 26 et quelques autres familles qui réclamaient un logement qui sont en situation irrégulière, et les expulserez-vous ?
R.- On le saura très rapidement, mais aujourd'hui, pour répondre factuellement à votre question, les quatre familles expulsées ne sont pas en situation irrégulière, donc elles doivent bénéficier de ce protocole. C'est une ligne qui est simple, c'est une ligne qui est claire, et c'est une ligne qui est lisible.
Q.- R. Yade s'est rendue, la semaine dernière, dans ce campement de squatters. Est-ce qu'elle n'a pas eu raison, finalement, la secrétaire d'Etat aux droits de l'homme ? Cela a permis aussi de débloquer la situation, de mettre de l'huile dans les rouages, de montrer la préoccupation du Gouvernement ?
R.- Je crois que R. Yade, la secrétaire d'Etat, a eu un geste en fait spontané. Quelles sont les caractéristiques de la spontanéité ? Cela a des avantages et des inconvénients. L'avantage, c'est celui de la générosité et du côté direct. Et puis...
Q.- Le droit au logement est un droit de l'homme...
R.- Et puis, cela a un inconvénient cette spontanéité, c'est aussi la rapidité. R. Yade est une nouvelle secrétaire d'Etat, elle a exprimé, avec son tempérament, avec ses mots, avec sa méthode, une préoccupation, et je crois qu'il ne faut en aucun cas lui en tenir rigueur.
Q.- 230 sur 239 Sans-papiers de Cachan l'an passé ont été régularisés. Finalement, n'êtes-vous pas condamné à être toujours ferme dans le discours et puis, finalement, à régulariser au cas par cas ?
R.- Absolument pas. Il y a une situation qui est très simple, et la ligne politique que j'ai définie, sous l'autorité du président de la République et de F. Fillon, là aussi, est claire. Je crois qu'on ne peut pas avancer dans l'opacité, il faut avancer dans la clarté. Et la clarté, qu'est-ce que cela veut dire ? Cela veut dire que tout étranger en situation irrégulière sur notre territoire a vocation à être reconduit dans son pays d'origine, de manière volontaire si possible, ou de manière contrainte. Le choix n'est pas entre le retour volontaire et essayer de rester dans la clandestinité en espérant une régularisation. Et puis, il y a une deuxième réalité, c'est que tout étranger en situation légale, doit, lui, pouvoir bénéficier d'un effort d'intégration. Ce ne doit pas être la même chose dans notre pays, qui est un Etat de droit, entre celui qui vient, de manière clandestine, c'est-à-dire, sans respecter nos lois, et celui qui, au contraire, entend les respecter.
Q.- Pour ce qui est des premiers, on vous demande, le Président, 25.000 expulsions en cette année 2007. Pouvez-vous les atteindre ?
R.- Oui, naturellement. Vous savez, 25.000, c'est un objectif qui est fixé à ceux qui sont des responsables politiques. Mais quel est le problème ? Il est très simple, c'est que nous avons sur notre territoire entre 200 et 400.000 clandestins. Cela n'est pas acceptable, il faut donc engager une action vigoureuse, une action humaine naturellement, mais vigoureuse, pour adresser un signal aux pays terres d'émigration, en disant que nous n'accepterons sur notre territoire que ceux que nous souhaitons. Nous sommes...
Q.- Il va vous falloir dix ans, à 25.000 par an, s'il y en a autant ?
R.- Oui... En tout cas, il y en au 24.000 l'année dernière, j'espère atteindre cet objectif de 25.000 cette année, ce sont des signaux forts qui sont adressés aux pays terres d'émigration, mais j'insiste aussi, ce n'est pas le seul signal qui leur est adressé, c'est qu'en même temps, nous voulons les aider à leur développement, notamment, j'ai la responsabilité du co-développement. Cela signifie qu'il faut aussi offrir aux pays terres d'émigration, un avenir pour sa jeunesse. Il y a 900 millions d'Africains aujourd'hui, la moitié a moins de 17 ans, un tiers vit avec moins d'1 euro par jour, il faut donc naturellement que l'on se batte pour aider à ce développement. C'est le meilleur moyen aussi de limiter la pression des flux migratoires.
Q.- Pour les expulsions, on sait que c'est compliqué quand même, souvent par les vols réguliers. Allez-vous développer ce que l'on appelle "les charters", c'est-à-dire des avions dédiés aux rapatriements d'expulsés ?
R.- Nous avons des actions communes avec les autres pays d'Europe : l'Espagne, l'Italie, l'Allemagne. Ceci dit, il ne faut pas grossir non plus démesurément les difficultés. Vous savez, sur les cinq premiers mois de l'année 2007, il y a eu 6.041 expulsions par voie aérienne. Sur ces 6.041, d'abord, il n'y en a eu que 2.223 qui ont été effectuées sous escorte, c'est-à-dire, simplement 37 %. Quant au problème que vous soulevez, il y en a eu, mais il y en a eu que 276, c'est-à-dire 4,3 %. Bien que ce soit une heure matinale, vous et moi nous sommes certainement capables de faire le calcul, cela signifie que dans plus de 95 % des cas, il n'y a pas eu de difficulté.
Q.- Ce serait plus facile avec des charters, avec des avions supplémentaires ?
R.- Cela doit se faire, ça se fait. D'abord, dans chaque pays d'Europe, les compagnies sont sollicitées. Et puis, il faut qu'il y ait des actions en commun, et c'est ce qui se passe.
Q.- Vous cherchez à construire "un pacte européen" sur ces problèmes avec d'autres pays. Quels sont ceux qui ont répondu à l'appel pour l'instant ? On ne se bouscule pas quand même ?
R.- Pourquoi faut-il qu'il y ait un pacte européen ? Tout simplement pour une réalité très simple. Je vous prends un exemple : vous avez un clandestin qui arrive aux îles Canaries ; s'il arrive à passer au travers des contrôles, qui sont effectués aux îles Canaries, il peut se rendre à Madrid. Et en réalité, avec 100 euros en 24 heures, il est à Paris. Et là, le problème est lancé. Donc, il faut que nous ayons un pacte européen, c'est-à-dire un socle qui rappelle que nous ne souhaitons pas de régularisations générales, que nous souhaitons un droit d'asile qui soit commun. Les choses évoluent. Ce pacte européen, il était inenvisageable en réalité il y a quelques années.
Q.- Qui bouge aujourd'hui ?
R.- Aujourd'hui, ce pacte européen est souhaitable, et je suis convaincu qu'avec toute l'énergie, la volonté, l'imagination de N. Sarkozy, cela pourra se concrétiser sous la présidence française. Quels sont les pays qui bougent ? Ce sont les pays qui sont directement concernés. L'Espagne, par exemple, qui avait beaucoup régularisé, a annoncé qu'elle ne procéderait plus à des régularisations générales. L'Italie, dont le ministre de l'Intérieur est un sénateur socialiste de Toscane, M. Amato - j'étais avec lui à plusieurs reprises - a annoncé que l'Italie ne procéderait plus à des régularisations générales. Il y a donc une évolution très forte pour qu'il y ait une politique commune de l'immigration, et c'est indispensable si l'on veut être efficaces.
Q.- Votre loi sur l'immigration va ouvrir la session parlementaire, la semaine prochaine. Vous cherchez à décourager le regroupement familial en mettant des critères très difficiles ?
R.- C'est une loi responsable. Qu'est-ce que cela veut dire un projet de loi responsable ? Cela veut dire qu'il concilie à la fois la fermeté et la générosité. Fermeté, parce que c'est vrai qu'aujourd'hui il y a 92.000 titres de séjour qui sont accordés au titre du regroupement familial et seulement 11.000 au titre économique. Et vous savez qu'on a des besoins ; on a des besoins dans le secteur de l'hôtellerie, de la restauration, dans le secteur du bâtiment, les travaux publics...
Q.- Mais (...)
R.-...Donc, il faut rééquilibrer, il faut que nous atteignions - c'est la mission que m'a confiée le président de la République, c'est ce que souhaite le Premier ministre - eh bien il faut que nous arrivions à un équilibre entre les deux. Vous voyez, il n'y a pas d'agressivité, il n'y a pas de violence derrière tout cela. Il y a la volonté de préserver un équilibre, et finalement, une société qui est une société en bonne santé, c'est une société d'équilibre.
Q.- La plupart des étrangers vont demander le droit d'asile dès qu'ils le pourront, dès qu'ils se sentiront menacés ?
R.- Il n'est pas question de revenir sur le droit d'asile. Le droit d'asile ce n'est pas quantifiable. Il y a des pays dans lesquels il y a de graves difficultés - je pense à tous ces pays des Balkans, autrefois, tout ce qui est la Bosnie. Et puis des situations peuvent évoluer. Donc, il faut s'adapter, la réalité est très simple : la France est aujourd'hui, toujours, le premier pays d'accueil en terme d'asile.
Q.- Faut-il supprimer le droit du sol en Outre-mer - on pense à la Guyane, on pense à Mayotte - pour éviter les endroits passoires ?
R.- C'est une question très difficile. Je reviens de Guyane. La population de la Guyane - c'est un département, c'est le plus grand département français, aussi grand que le Portugal, vous avez une frontière d'un côté avec le Surinam, de l'autre avec le Brésil ; il y a 210.000 habitants, et il y a 35.000 clandestins. D'ailleurs, on va engager, là aussi, une action très forte telle que 10.000 seront expulsés cette année. Et nous allons même dépasser cet objectif.
Q.- Et le droit du sol, pour qu'on ne vienne pas accoucher du bon côté de la frontière ?
R.- En tout cas, moi ce que je souhaite, je l'ai fait et c'est ce à quoi je crois de toutes mes forces, je crois qu'il faut du dialogue, il faut de la patience, il faut de la vérité. Et dans mon esprit, aucun sujet ne doit être tabou.
Q.- Quand vous avez besoin de recourir à la police pour des expulsions, c'est vous qui commandez ou c'est M. Alliot-Marie qui donne les ordres ?
R.- Les textes sont très simples. Et d'abord, dans notre République, il y a un patron, c'est le président de la République. Il y a une équipe autour de lui, à commencer naturellement par le Premier ministre. Nous avons chacun nos responsabilités. J'ai autorité sur la police en ce qui concerne la mission qui m'a été confiée et cela ne pose aucune difficulté.
Q.- M. Valls appelle la gauche à renoncer aux régularisations massives, à faire preuve de réalisme. Vous le félicitez ?
R.- Oui. J'ai vu d'ailleurs qu'il indiquait qu'il ne fallait pas être à la remorque des associations, et qu'il ne fallait pas faire preuve d'angélisme. J'aborde cette discussion parlementaire de la semaine prochaine avec la volonté, là aussi, d'écouter. Je ne prétends absolument pas avoir le monopole de la connaissance sur tous ces sujets, qui sont des sujets si difficiles, qui sont véritablement des sujets de défi pour notre société. S'il y a des idées qui sont bonnes, je les prendrai, je les prendrai d'où qu'elles viennent, et je serai donc attentif aux propositions de M. Valls.
Q.- Vous avez été ministre de l'Intérieur. Nous sommes le 11 septembre. Est-ce que la France est sur la liste des pays cibles ? On a vu que Ben Laden citait Sarkozy dans sa dernière vidéo la semaine dernière.
R.- D'abord, vous êtes très gentil, parce que vous venez de rappeler que j'avais été ministre de l'Intérieur, ce qui est une bonne nouvelle pour moi, parce que je ne l'ai pas été. Mais j'ai été ministre délégué à l'Intérieur...
Q.- Délégué au sein du ministère de l'Intérieur...
R.-...Et en charge des Collectivités territoriales. Je n'ai pas d'informations particulières sur ce sujet. Simplement, j'observe qu'il y a en quelque sorte une franchise qui est accordée par Al Qaïda à un certain nombre de groupuscules, notamment des groupuscules qui ne sont pas loin de nous puisque le groupe salafiste est aujourd'hui franchisé Al Qaïda. Cela signifie qu'il faut être vigilant et attentif tous les jours que Dieu fait.
Q.- Est-ce que vous serez candidat à Clermont-Ferrand pour les municipales en 2008 ?
R.- J'ai indiqué, je crois d'ailleurs chez vous, que je ne serai pas un spectateur mais que j'entendais bien être un acteur. Il va de soi que par respect pour les Clermontois et les Auvergnats, lorsque je prendrai ma décision, je la présenterai de Clermont-Ferrand.
Source : Premier ministre, Service d'information du Gouvernement, le 11 septembre 2007
R.- Bonjour C. Barbier.
Q.- Les squatters d'Aubervilliers ont donc levé leur camp cette nuit et seront relogés tout de suite ou dès qu'ils auront réglé leurs impayés. Le pouvoir a-t-il cédé devant la rue ?
R.- Non, absolument pas. A ma connaissance, les quatre familles d'expulsés ne sont pas en situation irrégulière, donc la préfecture a signé un protocole et dans ce protocole, les efforts de relogement seront effectués en direction de ceux qui sont en situation régulière.
Q.- Le sous-préfet l'a bien précisé : "Il faut être en situation régulière". Est-ce qu'il y en a d'autres parmi les 26 et quelques autres familles qui réclamaient un logement qui sont en situation irrégulière, et les expulserez-vous ?
R.- On le saura très rapidement, mais aujourd'hui, pour répondre factuellement à votre question, les quatre familles expulsées ne sont pas en situation irrégulière, donc elles doivent bénéficier de ce protocole. C'est une ligne qui est simple, c'est une ligne qui est claire, et c'est une ligne qui est lisible.
Q.- R. Yade s'est rendue, la semaine dernière, dans ce campement de squatters. Est-ce qu'elle n'a pas eu raison, finalement, la secrétaire d'Etat aux droits de l'homme ? Cela a permis aussi de débloquer la situation, de mettre de l'huile dans les rouages, de montrer la préoccupation du Gouvernement ?
R.- Je crois que R. Yade, la secrétaire d'Etat, a eu un geste en fait spontané. Quelles sont les caractéristiques de la spontanéité ? Cela a des avantages et des inconvénients. L'avantage, c'est celui de la générosité et du côté direct. Et puis...
Q.- Le droit au logement est un droit de l'homme...
R.- Et puis, cela a un inconvénient cette spontanéité, c'est aussi la rapidité. R. Yade est une nouvelle secrétaire d'Etat, elle a exprimé, avec son tempérament, avec ses mots, avec sa méthode, une préoccupation, et je crois qu'il ne faut en aucun cas lui en tenir rigueur.
Q.- 230 sur 239 Sans-papiers de Cachan l'an passé ont été régularisés. Finalement, n'êtes-vous pas condamné à être toujours ferme dans le discours et puis, finalement, à régulariser au cas par cas ?
R.- Absolument pas. Il y a une situation qui est très simple, et la ligne politique que j'ai définie, sous l'autorité du président de la République et de F. Fillon, là aussi, est claire. Je crois qu'on ne peut pas avancer dans l'opacité, il faut avancer dans la clarté. Et la clarté, qu'est-ce que cela veut dire ? Cela veut dire que tout étranger en situation irrégulière sur notre territoire a vocation à être reconduit dans son pays d'origine, de manière volontaire si possible, ou de manière contrainte. Le choix n'est pas entre le retour volontaire et essayer de rester dans la clandestinité en espérant une régularisation. Et puis, il y a une deuxième réalité, c'est que tout étranger en situation légale, doit, lui, pouvoir bénéficier d'un effort d'intégration. Ce ne doit pas être la même chose dans notre pays, qui est un Etat de droit, entre celui qui vient, de manière clandestine, c'est-à-dire, sans respecter nos lois, et celui qui, au contraire, entend les respecter.
Q.- Pour ce qui est des premiers, on vous demande, le Président, 25.000 expulsions en cette année 2007. Pouvez-vous les atteindre ?
R.- Oui, naturellement. Vous savez, 25.000, c'est un objectif qui est fixé à ceux qui sont des responsables politiques. Mais quel est le problème ? Il est très simple, c'est que nous avons sur notre territoire entre 200 et 400.000 clandestins. Cela n'est pas acceptable, il faut donc engager une action vigoureuse, une action humaine naturellement, mais vigoureuse, pour adresser un signal aux pays terres d'émigration, en disant que nous n'accepterons sur notre territoire que ceux que nous souhaitons. Nous sommes...
Q.- Il va vous falloir dix ans, à 25.000 par an, s'il y en a autant ?
R.- Oui... En tout cas, il y en au 24.000 l'année dernière, j'espère atteindre cet objectif de 25.000 cette année, ce sont des signaux forts qui sont adressés aux pays terres d'émigration, mais j'insiste aussi, ce n'est pas le seul signal qui leur est adressé, c'est qu'en même temps, nous voulons les aider à leur développement, notamment, j'ai la responsabilité du co-développement. Cela signifie qu'il faut aussi offrir aux pays terres d'émigration, un avenir pour sa jeunesse. Il y a 900 millions d'Africains aujourd'hui, la moitié a moins de 17 ans, un tiers vit avec moins d'1 euro par jour, il faut donc naturellement que l'on se batte pour aider à ce développement. C'est le meilleur moyen aussi de limiter la pression des flux migratoires.
Q.- Pour les expulsions, on sait que c'est compliqué quand même, souvent par les vols réguliers. Allez-vous développer ce que l'on appelle "les charters", c'est-à-dire des avions dédiés aux rapatriements d'expulsés ?
R.- Nous avons des actions communes avec les autres pays d'Europe : l'Espagne, l'Italie, l'Allemagne. Ceci dit, il ne faut pas grossir non plus démesurément les difficultés. Vous savez, sur les cinq premiers mois de l'année 2007, il y a eu 6.041 expulsions par voie aérienne. Sur ces 6.041, d'abord, il n'y en a eu que 2.223 qui ont été effectuées sous escorte, c'est-à-dire, simplement 37 %. Quant au problème que vous soulevez, il y en a eu, mais il y en a eu que 276, c'est-à-dire 4,3 %. Bien que ce soit une heure matinale, vous et moi nous sommes certainement capables de faire le calcul, cela signifie que dans plus de 95 % des cas, il n'y a pas eu de difficulté.
Q.- Ce serait plus facile avec des charters, avec des avions supplémentaires ?
R.- Cela doit se faire, ça se fait. D'abord, dans chaque pays d'Europe, les compagnies sont sollicitées. Et puis, il faut qu'il y ait des actions en commun, et c'est ce qui se passe.
Q.- Vous cherchez à construire "un pacte européen" sur ces problèmes avec d'autres pays. Quels sont ceux qui ont répondu à l'appel pour l'instant ? On ne se bouscule pas quand même ?
R.- Pourquoi faut-il qu'il y ait un pacte européen ? Tout simplement pour une réalité très simple. Je vous prends un exemple : vous avez un clandestin qui arrive aux îles Canaries ; s'il arrive à passer au travers des contrôles, qui sont effectués aux îles Canaries, il peut se rendre à Madrid. Et en réalité, avec 100 euros en 24 heures, il est à Paris. Et là, le problème est lancé. Donc, il faut que nous ayons un pacte européen, c'est-à-dire un socle qui rappelle que nous ne souhaitons pas de régularisations générales, que nous souhaitons un droit d'asile qui soit commun. Les choses évoluent. Ce pacte européen, il était inenvisageable en réalité il y a quelques années.
Q.- Qui bouge aujourd'hui ?
R.- Aujourd'hui, ce pacte européen est souhaitable, et je suis convaincu qu'avec toute l'énergie, la volonté, l'imagination de N. Sarkozy, cela pourra se concrétiser sous la présidence française. Quels sont les pays qui bougent ? Ce sont les pays qui sont directement concernés. L'Espagne, par exemple, qui avait beaucoup régularisé, a annoncé qu'elle ne procéderait plus à des régularisations générales. L'Italie, dont le ministre de l'Intérieur est un sénateur socialiste de Toscane, M. Amato - j'étais avec lui à plusieurs reprises - a annoncé que l'Italie ne procéderait plus à des régularisations générales. Il y a donc une évolution très forte pour qu'il y ait une politique commune de l'immigration, et c'est indispensable si l'on veut être efficaces.
Q.- Votre loi sur l'immigration va ouvrir la session parlementaire, la semaine prochaine. Vous cherchez à décourager le regroupement familial en mettant des critères très difficiles ?
R.- C'est une loi responsable. Qu'est-ce que cela veut dire un projet de loi responsable ? Cela veut dire qu'il concilie à la fois la fermeté et la générosité. Fermeté, parce que c'est vrai qu'aujourd'hui il y a 92.000 titres de séjour qui sont accordés au titre du regroupement familial et seulement 11.000 au titre économique. Et vous savez qu'on a des besoins ; on a des besoins dans le secteur de l'hôtellerie, de la restauration, dans le secteur du bâtiment, les travaux publics...
Q.- Mais (...)
R.-...Donc, il faut rééquilibrer, il faut que nous atteignions - c'est la mission que m'a confiée le président de la République, c'est ce que souhaite le Premier ministre - eh bien il faut que nous arrivions à un équilibre entre les deux. Vous voyez, il n'y a pas d'agressivité, il n'y a pas de violence derrière tout cela. Il y a la volonté de préserver un équilibre, et finalement, une société qui est une société en bonne santé, c'est une société d'équilibre.
Q.- La plupart des étrangers vont demander le droit d'asile dès qu'ils le pourront, dès qu'ils se sentiront menacés ?
R.- Il n'est pas question de revenir sur le droit d'asile. Le droit d'asile ce n'est pas quantifiable. Il y a des pays dans lesquels il y a de graves difficultés - je pense à tous ces pays des Balkans, autrefois, tout ce qui est la Bosnie. Et puis des situations peuvent évoluer. Donc, il faut s'adapter, la réalité est très simple : la France est aujourd'hui, toujours, le premier pays d'accueil en terme d'asile.
Q.- Faut-il supprimer le droit du sol en Outre-mer - on pense à la Guyane, on pense à Mayotte - pour éviter les endroits passoires ?
R.- C'est une question très difficile. Je reviens de Guyane. La population de la Guyane - c'est un département, c'est le plus grand département français, aussi grand que le Portugal, vous avez une frontière d'un côté avec le Surinam, de l'autre avec le Brésil ; il y a 210.000 habitants, et il y a 35.000 clandestins. D'ailleurs, on va engager, là aussi, une action très forte telle que 10.000 seront expulsés cette année. Et nous allons même dépasser cet objectif.
Q.- Et le droit du sol, pour qu'on ne vienne pas accoucher du bon côté de la frontière ?
R.- En tout cas, moi ce que je souhaite, je l'ai fait et c'est ce à quoi je crois de toutes mes forces, je crois qu'il faut du dialogue, il faut de la patience, il faut de la vérité. Et dans mon esprit, aucun sujet ne doit être tabou.
Q.- Quand vous avez besoin de recourir à la police pour des expulsions, c'est vous qui commandez ou c'est M. Alliot-Marie qui donne les ordres ?
R.- Les textes sont très simples. Et d'abord, dans notre République, il y a un patron, c'est le président de la République. Il y a une équipe autour de lui, à commencer naturellement par le Premier ministre. Nous avons chacun nos responsabilités. J'ai autorité sur la police en ce qui concerne la mission qui m'a été confiée et cela ne pose aucune difficulté.
Q.- M. Valls appelle la gauche à renoncer aux régularisations massives, à faire preuve de réalisme. Vous le félicitez ?
R.- Oui. J'ai vu d'ailleurs qu'il indiquait qu'il ne fallait pas être à la remorque des associations, et qu'il ne fallait pas faire preuve d'angélisme. J'aborde cette discussion parlementaire de la semaine prochaine avec la volonté, là aussi, d'écouter. Je ne prétends absolument pas avoir le monopole de la connaissance sur tous ces sujets, qui sont des sujets si difficiles, qui sont véritablement des sujets de défi pour notre société. S'il y a des idées qui sont bonnes, je les prendrai, je les prendrai d'où qu'elles viennent, et je serai donc attentif aux propositions de M. Valls.
Q.- Vous avez été ministre de l'Intérieur. Nous sommes le 11 septembre. Est-ce que la France est sur la liste des pays cibles ? On a vu que Ben Laden citait Sarkozy dans sa dernière vidéo la semaine dernière.
R.- D'abord, vous êtes très gentil, parce que vous venez de rappeler que j'avais été ministre de l'Intérieur, ce qui est une bonne nouvelle pour moi, parce que je ne l'ai pas été. Mais j'ai été ministre délégué à l'Intérieur...
Q.- Délégué au sein du ministère de l'Intérieur...
R.-...Et en charge des Collectivités territoriales. Je n'ai pas d'informations particulières sur ce sujet. Simplement, j'observe qu'il y a en quelque sorte une franchise qui est accordée par Al Qaïda à un certain nombre de groupuscules, notamment des groupuscules qui ne sont pas loin de nous puisque le groupe salafiste est aujourd'hui franchisé Al Qaïda. Cela signifie qu'il faut être vigilant et attentif tous les jours que Dieu fait.
Q.- Est-ce que vous serez candidat à Clermont-Ferrand pour les municipales en 2008 ?
R.- J'ai indiqué, je crois d'ailleurs chez vous, que je ne serai pas un spectateur mais que j'entendais bien être un acteur. Il va de soi que par respect pour les Clermontois et les Auvergnats, lorsque je prendrai ma décision, je la présenterai de Clermont-Ferrand.
Source : Premier ministre, Service d'information du Gouvernement, le 11 septembre 2007