Déclaration de Mme Christine Boutin, ministre du logement et de la ville, sur l'accession à la propriété pour les locataires HLM et la mobilité au sein du parc HLM, Paris le 18 décembre 2007.

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Circonstance : Signature d'un accord Etat-Mouvement HLM, à Paris le 18 décembre 2007

Texte intégral

Mesdames, Messieurs,

Je suis très heureuse de vous retrouver cette semaine pour signer l'accord entre le Mouvement HLM et l'Etat. Les hasards de la vie font que cette signature intervient au lendemain d'un week-end particulièrement mouvementé sur la question des mal-logés.
Je ne cesse de le répéter depuis ma prise de fonction : le logement est au coeur des préoccupations des Français.

  • parce qu'il est un gouffre pour le pouvoir d'achat et qu'il représente un poste de dépense que tous les Français regardent augmenter avec inquiétude,
  • parce qu'en effet le logement de tous n'est plus assuré alors même qu'il représente une réponse fondamentale aux besoins de sécurité, d'intimité et de protection familiale que chacun est en droit d'attendre pour lui-même et les siens. Et je n'en suis pas moins que quiconque profondément choquée, profondément meurtrie...

Ce n'est pas l'impéritie de tel ou tel ministre qui en est la cause - sans quoi les Français pourraient se réjouir car il suffirait d'en changer - ; ce n'est pas l'impéritie de tel ou tel ministre mais bien de longues années de négligence collective qui nous ont conduit là où nous en sommes aujourd'hui, de longues années marquées par :

  • la concentration de la pauvreté dans quelques quartiers fragiles,
  • une paupérisation alarmante d'une frange croissante de la société.
  • Mais surtout, surtout un déficit de la construction de logements. En 1954, année de l'appel radiophonique de l'Abbé Pierre, la France construisait près de 200 000 logements. La production allait par la suite être amplifiée pour atteindre 600 000 logements par an à la veille des années 80. Puis, pour de multiples raisons, notamment une décentralisation sans contractualisation, les statistiques ont durablement chuté. Ce sont 100 000 logements au bas mot qui ont manqué tous les ans pendant vingt ans, soit plus de deux millions au total. C'est dire l'ampleur du défi qui attend les responsables publics, toutes couleurs confondues, dans les années qui viennent.

Le programme du Président SARKOZY, qui - rappelons le quand même - a pris les rênes de notre pays il y a 7 mois seulement, repose tout d'abord sur la revalorisation du travail car c'est en sortant d'une approche malthusienne du travail que nous accélérerons la croissance et le pouvoir d'achat des Français. Mais ce programme - on l'oublie trop souvent - fait aussi une place sans précédent à la question du logement. Jamais en effet, un pouvoir exécutif en France, n'aura à ce point décidé de prendre le taureau par les cornes pour résoudre la terrible pénurie de logements dont souffre la France.
Ce qu'il faut retenir, ce qu'il ne faut jamais oublier, c'est que c'est toute la chaîne du logement qui est aujourd'hui bloquée. Et que c'est toute cette chaîne qu'il faut à présent remettre en route : de l'hébergement au logement social, du logement social au logement classique, du logement des plus pauvres à celui des plus riches,... Le logement est un tout : on ne peut se limiter à une catégorie précise, si digne d'intérêt soit-elle, car ce qui est fait pour l'une a des conséquences directes sur l'autre.
Les orientations du Président de la République répondent à cet enjeu en se proposant de libérer du foncier, de construire de favoriser les parcours résidentiels dans le marché locatif et par l'accession à la propriété.

L'accord entre l'Etat et l'Union sociale pour l'habitat (USH) porte sur 2 points :

  • l'accession à la propriété pour les locataires HLM (incluant la vente des logements sociaux aux locataires) ;
  • l'amélioration de la mobilité et de la fluidité dans le parc HLM (incluant la remise en cause du droit au maintien dans les lieux) ;
  • Par ailleurs, cet accord est l'occasion de souligner la nécessité de développer la production de logements locatifs sociaux, en lien avec la mise en oeuvre du droit au logement opposable (DALO). En effet, les organismes HLM se sont engagés fin 2004 à réaliser 390 000 logements locatifs sociaux sur les 500 000 prévus sur 2005-2009 par le plan de cohésion sociale. La loi DALO ayant relevé cet objectif global à 591 000, il convient donc d'actualiser l'effort du mouvement HLM pour les années 2007-2008-2009.

1. L'accession à la propriété pour les locataires HLM

2 voies sont explorées pour conduire les parcours résidentiels des locataires HLM vers l'accession à la propriété :
* La première voie, c'est l'acquisition de logements construits par les organismes HLM : il s'agit de développer les activités de promoteur des organismes (immeubles collectifs, maisons en lotissements) comme de constructeur de maisons individuelles.
Quelques milliers de locataires HLM accèdent ainsi chaque année à la propriété. Aujourd'hui, le mouvement HLM réalise annuellement 15 000 opérations neuves d'accession sociale à la propriété (principalement en PTZ) dont 1 500 logements en location-accession (en PSLA), les acquéreurs peuvent être des locataires du parc HLM ou non. L'activité de promotion en accession des organismes HLM a pour atout majeur de libérer des logements locatifs sociaux au bénéfice de nouveaux ménages modestes. L'engagement du mouvement HLM est de doubler cette activité d'accession en quelques années, c'est-à-dire de réaliser 30 000 opérations neuves d'accession par an, en faisant porter principalement la progression sur le PSLA.
* La seconde voie, c'est la vente de leur logement social aux locataires HLM : le mouvement HLM prend en compte l'objectif de 40 000 ventes effectives par an fixé par les pouvoirs publics, qui pourrait être atteint en 2009 ou, plus probablement, en 2010 (6 000 ventes annuelles aujourd'hui).
Le mouvement HLM, et c'est normal, ne peut s'engager que sur le nombre des logements sociaux mis en vente : la proposition est d'accroître chaque année de 40 000 le stock de logements HLM disponibles à la vente, à partir de 2008.
Une limite haute est introduite : le stock de logements mis en vente ne peut pas dépasser le nombre de nouveaux logements sociaux financés dans l'année. C'est l'assurance que le parc HLM continuera à croître. Cela signifie aussi que si l'Etat relâchait son effort pour la construction de nouveaux logements sociaux, alors le nombre de logements HLM mis en vente baisserait mécaniquement.
A partir de 2010, le stock des logements mis en vente, grosso modo, se stabilisera au niveau de
140 000 (si l'on continue de financer annuellement 142 000 logements sociaux comme le prévoit la loi DALO jusqu'à 2009 inclus). Ce seront donc 40 000 nouveaux logements qui seront mis en vente sur l'année pour compenser les 40 000 ventes effectives de l'exercice.

Le régime des décisions de vente est soumis à plusieurs conditions :

  • l'initiative des ventes sous la responsabilité des organismes HLM (pas de « right to buy » du locataire en place) ;
  • l'interdiction de vente dans les communes gravement défaillantes au regard de l'article 55 de la loi SRU (communes sous constat de carence du préfet) ;
  • autre condition : 2 nouveaux logements sociaux financés pour 1 logement vendu dans les autres communes SRU n'atteignant pas le seuil de 20 % de logements sociaux ;
  • et enfin, l'accord explicite du maire pour vendre si la commune détient un droit de réservation sur le logement HLM proposé à la vente.


2. La mobilité au sein du parc HLM :
Là encore, 2 voies sont privilégiées :
* le renforcement des surloyers : l'objectif est que les locataires dont les ressources dépassent le niveau « intermédiaire » (plafonds PLI) se voient appliquer un loyer de marché. Il s'agit d'inciter les locataires les plus aisés à quitter d'eux-mêmes le parc HLM.
* l'aménagement du strict droit au maintien dans les lieux, qui ??voluerait vers un droit au maintien dans le parc social :

  • cela signifie, la possibilité de mettre fin au bail en cas de sous-occupation (exemple des ménages âgés dont les enfants sont partis, et qui refusent un logement de taille mieux adaptée) ;
  • même chose si le logement social est insuffisamment occupé (« HLM résidence secondaire ») ;
  • enfin, il sera instauré une clause de « revoyure » tous les 3 ans entre l'organisme HLM et certains de ses locataires, pour mieux ajuster le loyer aux ressources (la hausse de loyer dans un logement donné serait systématiquement compensée par la baisse du loyer d'un autre logement occupé par un locataire très modeste).

La plupart de ces propositions sont de nature législative.
Derrière des aspects techniques et juridiques, il s'agit - je vous le rappelle - de faire en sorte que la propriété ne soit pas un luxe réservé aux riches. Mais il s'agit aussi, en remettant en route les parcours résidentiel, de venir en aide à des milliers d'hommes, de femmes et d'enfants qui ne disposent toujours pas aujourd'hui d'un toit digne de ce nom. Il s'agit donc d'honorer la promesse du Président de la République de mettre fin au scandale qui veut que « le mal logement [ne] soit [toujours pas] éradiqué dans un pays pourtant si fier de son modèle social ».
Dans ces conditions, je tiens à remercier très solennellement le monde HLM d'apporter aujourd'hui une si importante contribution à la grande cause nationale du logement et de confirmer ainsi que plus que jamais le monde HLM souhaite être une force de progrès, une force de proposition, une force de résolution et d'action
Je veux que chacun soit assuré que nous faisons tout, que nous nous mobilisons comme jamais pour que nos concitoyens puissent dans les meilleurs délais constater une vraie rupture dans la question du logement en France, notamment pour les personnes les plus modestes de notre pays. Jusqu'au plus haut du sommet de l'Etat, nous sommes convaincus qu'il existe un intérêt, non seulement social et économique mais qui touche aussi au lien social à ce que la crise du logement, soit d'urgence, sinon résolue, du moins en voie de résorption rapide et visible de tous.

Source http://www.logement.gouv.fr, le 19 décembre 2007