Texte intégral
T. Steiner.- N. Sarkozy dans Le Parisien ce matin affirme qu'il aurait mieux fait de ne pas répondre samedi matin, au Salon de l'agriculture. C'est une façon de reconnaître qu'il a pété un plomb ?
R.- Non pas du tout, c'est une façon de dire comme il le dit juste avant d'ailleurs, dans Le Parisien, qu'il a eu une réaction j'allais dire "normale", d'homme à homme, quand vous êtes insulté, quand quelqu'un dit au président de la République, ou à qui que ce soit d'ailleurs, "ne me touche pas, ça me salit", sincèrement, on a forcément une réaction un peu "virile", comme diraient certains.
Q.- Il dit, "il est difficile, même quand on est Président, de ne pas répondre à une insulte".
R.- Voilà...
Q.- Il est facile, même quand on n'est pas président, de ne pas répondre à une insulte.
R.- Parce que vous, quand quelqu'un vient vous dire, "ne me touche pas, tu me salis", vous lui dites "merci", vous tendez l'autre joue ? Vous êtes très christique !
Q.- Je ne dis pas forcément "pauvre con".
R.- Mais oui, mais c'était...
Q.- Vous avez dit hier, qu'à la place de N. Sarkozy, vous, vous lui en auriez collé une à ce monsieur. Cela ne vous est jamais arrivé de rencontrer quelqu'un qui ne veut pas vous serrer la main ?
R.- Cela m'est rarement arrivé, non pas de me serrer la main, ça c'est courant dans la vie publique, mais quelqu'un qui vous dit "ne me touche pas, ça me salit", je trouve que c'est beaucoup plus grave, plus lourd, que quelqu'un qui refuse de vous serrer la main. Quelqu'un qui refuse de vous serrer la main dans la vie publique, c'est courant. Moi, je vais vous dire quelque chose : j'ai été pendant des années enseignant dans des établissements très difficiles de la banlieue parisienne ; j'avais avec mes élèves des relations de courtoisie. Parfois c'était dur. Jamais un élève, aussi déscolarisé soit-il, jamais un élève ne m'a dit, "ça me salit que tu me touches la main", jamais ! Alors je trouve que sincèrement, plus ça va, plus on accepte de choses. Franchement, dire au président de la République "ne me touche pas, ça me salit", il y a quand même de quoi se dire que ce n'est pas acceptable. Il fut un temps, pas si lointain, du temps du général de Gaulle ou de G. Pompidou, où ce genre de choses aurait probablement conduit à ce qu'on demande à la personne en question des excuses. Mais ce temps-là est terminé.
Q.- N. Sarkozy, lui, regrette mais ne s'excuse pas.
R.- Non c'était à l'autre de s'excuser parce que l'insulte vient d'abord de l'autre, si ça ne vous ennuie pas.
Q.- C'est quand même lui qui disait, lors du débat avant le second tour de la présidentielle à S. Royal, que pour être Président, il fallait savoir garder ses nerfs.
R.- Oui, j'ai entendu ça et il a raison. Mais est-ce que je peux me permettre, puisque vous parlez de S. Royal : madame Royal nous donne des leçons. Elle en a données "mais comment, le président de la République, mais qu'est-ce qu'il fait ? Mais regardez ce comportement !..." Qu'est-ce qui est le plus choquant, sincèrement ? Vous faites le Salon de l'agriculture avec des dizaines de caméras autour de vous, quelqu'un vous insulte, vous réagissez comme ça. D'un côté ça, c'est N. Sarkozy ; de l'autre madame Royal, beaucoup plus calmement, sous le soleil, très fière, très heureuse, va à côté de G. Frêche le féliciter, le soutenir. Le même G. Frêche, ça ne la gêne pas, celui qui a traité les harkis de "sous-hommes". Qu'est-ce qui est le plus grave dans cette affaire ? Moi, je vous le dis, c'est plus grave d'avoir sainement, calmement, tranquillement, d'aller dire à monsieur Frêche, "on est avec vous, soutenez-nous", que de dire, comme ça, dans la foule, dans la chaleur du Salon de l'agriculture à quelqu'un qui vous insulte, "mets-toi de côté".
Q.- Allez un dernier mot sur cette affaire avant de passer à autre chose. Le secrétaire général de l'UNSA Police disait son incompréhension hier : comment N. Sarkozy peut-il, d'un côté, recommander aux gendarmes et aux policiers d'avoir une éthique, d'être exemplaires, de respecter les autres en leur rappelant qu'ils sont les représentants de l'Etat, et ne pas appliquer cela à lui-même ? Vous comprenez le trouble de ce monsieur, le secrétaire général du syndicat de policiers ?
R.- Je veux bien croire qu'il ait été troublé. Mais je le rassure, N. Sarkozy a dit lui-même dans le Parisien ce matin qu'il aurait mieux fait de ne pas le faire. Très bien. Mais tous les policiers de France savent qu'ils ont en N. Sarkozy quelqu'un qui a toujours été du côté des victimes, du côté de la sécurité, du côté de la justice et du côté, finalement, de l'ensemble des policiers dans leurs pratiques républicaines.
Q.- R. Dati a voulu désamorcer hier la polémique sur la rétention de sûreté. Mais N. Sarkozy en remet une couche ce matin en réaffirmant son intention de pouvoir appliquer cette loi aux criminels les plus dangereux. Concrètement, il veut toujours trouver le moyen de la faire appliquer aux détenus condamnés avant le vote de la loi ?
R.- Si je puis dire deux mots là-dessus. Un, le Conseil constitutionnel a validé l'essentiel de la loi et notamment, il a dit, la rétention de sûreté n'étant pas une peine, c'est applicable après la prison, etc.
Q.- Ça, c'est pour ceux qui ont été condamnés avant le vote de la loi...
R.- Ceux qui ont été condamnés avant, il y a le port, soit d'un bracelet électronique, soit un contrôle de surveillance. Mais s'ils ne le respectent pas, on pourra les placer en rétention de sûreté. Mais le problème se pose en réalité, on le sait bien, pour quelques dizaines de personnes qui n'ont pas accepté pendant leur peine de prison, qui n'ont pas accepté d'être traitées de manière médicale. Et qu'est-ce qu'on fait ? Est-ce qu'on doit les libérer avec l'élément simple : s'ils récidivent, qu'est-ce qu'on dit aux familles ? Qu'est-ce qu'on dit aux victimes ? Donc c'est vrai que ça pose un problème. Alors j'ai vu un grand débat, "il remet en cause la Constitution, il va violer les institutions". Quand vous dites, quand vous êtes le président de la République, vous dites "je prends acte de la décision du Conseil constitutionnel, mais comme j'ai une responsabilité par rapport aux citoyens et par rapport aux éventuelles futures victimes, je demande à titre personnel au premier magistrat de France - pas n'importe qui, le premier président de la cour de cassation -, je demande au premier président de la Cour de cassation de me dire, lui, quels sont les conseils, les suggestions qu'il pourrait faire pour qu'on puisse avancer et trouver des solutions. Voilà. Alors on va voir.
Q.- Pourquoi ne pas demander plutôt aux parlementaires ?
R.- Non, parce que les parlementaires ont déjà débattu - j'y étais -, ils ont beaucoup débattu là-dessus. Le débat d'ailleurs a tourné essentiellement du côté de la gauche pour dire que la rétention de sûreté est une peine, elle sera donc inconstitutionnelle. Et finalement, le Conseil a dit l'inverse. Mais le débat parlementaire a déjà eu lieu. Il est donc normal qu'on s'adresse au premier magistrat de France pour lui dire, "si vous avez, vous premier magistrat de France qui avez l'expérience, qui avez la connaissance en la matière, si vous avez des suggestions ou des propositions, faites-les nous, pour qu'on fasse progresser les choses". Mais il est hors de question de ne pas respecter la décision du Conseil constitutionnel. De toute façon, elle s'applique, qu'on ne le souhaite ou pas, qu'elle nous plaise ou pas. Toutes les décisions du Conseil s'appliquent. Mais on peut quand même demander au premier magistrat de France s'il a des idées.
Q.- Il y a aujourd'hui 19 points d'écart entre la cote de popularité de N. Sarkozy en rase-mottes et celle de F. Fillon qui monte. C'est un record sous la Vème République. Comment l'un et l'autre vivent cette situation et comment cela peut redéfinir le partage des rôles ?
R.- Il n'y a pas de redéfinition. Sous la Vème République, et c'est comme ça depuis 50 ans, le président de la République a l'initiative, est celui qui donne l'impulsion, est celui les grandes lignes parce que c'est sur son projet, son programme, que l'élection s'est faite et que donc le quinquennat, maintenant, se déroule.
Q.- Il n'y a aucune tension entre les deux hommes ?
R.- Non. Le Premier ministre est le coordonnateur de la majorité, le coordonnateur de la politique gouvernementale mais il le fait en liaison étroite avec le Président. Et sincèrement, et d'ailleurs chacun le sait, puisque la force et l'avantage du duo actuel, c'est qu'ils ont fait ensemble, si je puis dire, le projet présidentiel. F. Fillon était associé à l'élaboration de ce projet pendant la campagne présidentielle. Et pendant une longue durée, avant l'élection, il y a eu complicité, travail commun des deux. Et sincèrement, ce n'est pas la peine d'essayer, il n'y a pas l'ombre d'un papier à cigarette entre le président de la République et le Premier ministre.
Q.- Quand même, à 57 % d'opinions favorables, il doit savourer le Premier ministre ?
R.- Oui, mais chacun le sait, le président de la République s'est présenté aux élections présidentielles en disant, "je serai acteur, pas spectateur, je serai au devant de tous les textes, de toutes les réformes, de tous les enjeux pour les Français".
Q.- Est-ce qu'il ne devrait pas lever le pied, un petit peu, pour le coup ?
R.- Donc, forcément, médiatiquement, il est plus exposé, si je puis dire. Et donc, quand les choses vont très, très bien, il est très haut et quand les gens se disent, "est-ce que les réformes vont donner des résultats concrets très vite", il y a une baisse. Mais...
Q.- Mais est-ce qu'il ne faut pas qu'il se fasse plus discret, comme certains lui conseillent, comme E. Balladur ?
R.- Non, non ! Pardon, non. Pourquoi non ? Parce que si ça veut dire - alors ça dépend de ce que ça veut dire -mais si ça veut dire plus discret, c'est-à-dire "mets un coussin sur les réformes, comme ça on en parlera moins, on parlera moins de toi, tu seras protégé, etc.", c'est non, parce que le pays...
Q.- Mais laisser le Gouvernement gouverner !
R.- Mais le Gouvernement gouverne, mais il a besoin de l'impulsion présidentielle. On a besoin que ce train de réformes réussisse pour faire réussir le pays. Et on a besoin que le président de la République dise, "la ligne, c'est la poursuite des réformes", et ces réformes seront mises en oeuvre naturellement par le gouvernement. Et vous verrez, le programme parlementaire au printemps, il est ce qui faut pour faire la réforme.
Q.- Juste d'un mot : le remaniement ministériel après les municipales, les changements dépendront des résultats ou bien c'est déjà arrêté dans les grandes lignes ?
R.- Je pense que les changements dépendront du président de la République.
Q.- Et pas des résultats ?
R.- Des résultats des municipales vous voulez dire ?
Q.- Oui...
R.- Les résultats des municipales sont...
Q.- Les ministres qui prennent une veste le 16 mars, ils pourront rester au Gouvernement ?
R.- Ecoutez, le président de la République, lorsqu'il a dit à l'ensemble des membres du Gouvernement, "allez-y", pour ceux qui y vont, a très clairement dit qu'en fonction naturellement des villes, de la difficulté, de leur expérience, ce n'est pas lié au remaniement, échec ou succès. Donc, a priori, ce n'est pas comme ça que ça se jouera. Non, j'imagine, mais c'est le seul président de la République qui décide, qu'en fonction des résultats, ça peut lui donner un indicateur politique général mais pas sur les personnes.
Source : Premier ministre, Service d'information du Gouvernement, le 26 février 2008
R.- Non pas du tout, c'est une façon de dire comme il le dit juste avant d'ailleurs, dans Le Parisien, qu'il a eu une réaction j'allais dire "normale", d'homme à homme, quand vous êtes insulté, quand quelqu'un dit au président de la République, ou à qui que ce soit d'ailleurs, "ne me touche pas, ça me salit", sincèrement, on a forcément une réaction un peu "virile", comme diraient certains.
Q.- Il dit, "il est difficile, même quand on est Président, de ne pas répondre à une insulte".
R.- Voilà...
Q.- Il est facile, même quand on n'est pas président, de ne pas répondre à une insulte.
R.- Parce que vous, quand quelqu'un vient vous dire, "ne me touche pas, tu me salis", vous lui dites "merci", vous tendez l'autre joue ? Vous êtes très christique !
Q.- Je ne dis pas forcément "pauvre con".
R.- Mais oui, mais c'était...
Q.- Vous avez dit hier, qu'à la place de N. Sarkozy, vous, vous lui en auriez collé une à ce monsieur. Cela ne vous est jamais arrivé de rencontrer quelqu'un qui ne veut pas vous serrer la main ?
R.- Cela m'est rarement arrivé, non pas de me serrer la main, ça c'est courant dans la vie publique, mais quelqu'un qui vous dit "ne me touche pas, ça me salit", je trouve que c'est beaucoup plus grave, plus lourd, que quelqu'un qui refuse de vous serrer la main. Quelqu'un qui refuse de vous serrer la main dans la vie publique, c'est courant. Moi, je vais vous dire quelque chose : j'ai été pendant des années enseignant dans des établissements très difficiles de la banlieue parisienne ; j'avais avec mes élèves des relations de courtoisie. Parfois c'était dur. Jamais un élève, aussi déscolarisé soit-il, jamais un élève ne m'a dit, "ça me salit que tu me touches la main", jamais ! Alors je trouve que sincèrement, plus ça va, plus on accepte de choses. Franchement, dire au président de la République "ne me touche pas, ça me salit", il y a quand même de quoi se dire que ce n'est pas acceptable. Il fut un temps, pas si lointain, du temps du général de Gaulle ou de G. Pompidou, où ce genre de choses aurait probablement conduit à ce qu'on demande à la personne en question des excuses. Mais ce temps-là est terminé.
Q.- N. Sarkozy, lui, regrette mais ne s'excuse pas.
R.- Non c'était à l'autre de s'excuser parce que l'insulte vient d'abord de l'autre, si ça ne vous ennuie pas.
Q.- C'est quand même lui qui disait, lors du débat avant le second tour de la présidentielle à S. Royal, que pour être Président, il fallait savoir garder ses nerfs.
R.- Oui, j'ai entendu ça et il a raison. Mais est-ce que je peux me permettre, puisque vous parlez de S. Royal : madame Royal nous donne des leçons. Elle en a données "mais comment, le président de la République, mais qu'est-ce qu'il fait ? Mais regardez ce comportement !..." Qu'est-ce qui est le plus choquant, sincèrement ? Vous faites le Salon de l'agriculture avec des dizaines de caméras autour de vous, quelqu'un vous insulte, vous réagissez comme ça. D'un côté ça, c'est N. Sarkozy ; de l'autre madame Royal, beaucoup plus calmement, sous le soleil, très fière, très heureuse, va à côté de G. Frêche le féliciter, le soutenir. Le même G. Frêche, ça ne la gêne pas, celui qui a traité les harkis de "sous-hommes". Qu'est-ce qui est le plus grave dans cette affaire ? Moi, je vous le dis, c'est plus grave d'avoir sainement, calmement, tranquillement, d'aller dire à monsieur Frêche, "on est avec vous, soutenez-nous", que de dire, comme ça, dans la foule, dans la chaleur du Salon de l'agriculture à quelqu'un qui vous insulte, "mets-toi de côté".
Q.- Allez un dernier mot sur cette affaire avant de passer à autre chose. Le secrétaire général de l'UNSA Police disait son incompréhension hier : comment N. Sarkozy peut-il, d'un côté, recommander aux gendarmes et aux policiers d'avoir une éthique, d'être exemplaires, de respecter les autres en leur rappelant qu'ils sont les représentants de l'Etat, et ne pas appliquer cela à lui-même ? Vous comprenez le trouble de ce monsieur, le secrétaire général du syndicat de policiers ?
R.- Je veux bien croire qu'il ait été troublé. Mais je le rassure, N. Sarkozy a dit lui-même dans le Parisien ce matin qu'il aurait mieux fait de ne pas le faire. Très bien. Mais tous les policiers de France savent qu'ils ont en N. Sarkozy quelqu'un qui a toujours été du côté des victimes, du côté de la sécurité, du côté de la justice et du côté, finalement, de l'ensemble des policiers dans leurs pratiques républicaines.
Q.- R. Dati a voulu désamorcer hier la polémique sur la rétention de sûreté. Mais N. Sarkozy en remet une couche ce matin en réaffirmant son intention de pouvoir appliquer cette loi aux criminels les plus dangereux. Concrètement, il veut toujours trouver le moyen de la faire appliquer aux détenus condamnés avant le vote de la loi ?
R.- Si je puis dire deux mots là-dessus. Un, le Conseil constitutionnel a validé l'essentiel de la loi et notamment, il a dit, la rétention de sûreté n'étant pas une peine, c'est applicable après la prison, etc.
Q.- Ça, c'est pour ceux qui ont été condamnés avant le vote de la loi...
R.- Ceux qui ont été condamnés avant, il y a le port, soit d'un bracelet électronique, soit un contrôle de surveillance. Mais s'ils ne le respectent pas, on pourra les placer en rétention de sûreté. Mais le problème se pose en réalité, on le sait bien, pour quelques dizaines de personnes qui n'ont pas accepté pendant leur peine de prison, qui n'ont pas accepté d'être traitées de manière médicale. Et qu'est-ce qu'on fait ? Est-ce qu'on doit les libérer avec l'élément simple : s'ils récidivent, qu'est-ce qu'on dit aux familles ? Qu'est-ce qu'on dit aux victimes ? Donc c'est vrai que ça pose un problème. Alors j'ai vu un grand débat, "il remet en cause la Constitution, il va violer les institutions". Quand vous dites, quand vous êtes le président de la République, vous dites "je prends acte de la décision du Conseil constitutionnel, mais comme j'ai une responsabilité par rapport aux citoyens et par rapport aux éventuelles futures victimes, je demande à titre personnel au premier magistrat de France - pas n'importe qui, le premier président de la cour de cassation -, je demande au premier président de la Cour de cassation de me dire, lui, quels sont les conseils, les suggestions qu'il pourrait faire pour qu'on puisse avancer et trouver des solutions. Voilà. Alors on va voir.
Q.- Pourquoi ne pas demander plutôt aux parlementaires ?
R.- Non, parce que les parlementaires ont déjà débattu - j'y étais -, ils ont beaucoup débattu là-dessus. Le débat d'ailleurs a tourné essentiellement du côté de la gauche pour dire que la rétention de sûreté est une peine, elle sera donc inconstitutionnelle. Et finalement, le Conseil a dit l'inverse. Mais le débat parlementaire a déjà eu lieu. Il est donc normal qu'on s'adresse au premier magistrat de France pour lui dire, "si vous avez, vous premier magistrat de France qui avez l'expérience, qui avez la connaissance en la matière, si vous avez des suggestions ou des propositions, faites-les nous, pour qu'on fasse progresser les choses". Mais il est hors de question de ne pas respecter la décision du Conseil constitutionnel. De toute façon, elle s'applique, qu'on ne le souhaite ou pas, qu'elle nous plaise ou pas. Toutes les décisions du Conseil s'appliquent. Mais on peut quand même demander au premier magistrat de France s'il a des idées.
Q.- Il y a aujourd'hui 19 points d'écart entre la cote de popularité de N. Sarkozy en rase-mottes et celle de F. Fillon qui monte. C'est un record sous la Vème République. Comment l'un et l'autre vivent cette situation et comment cela peut redéfinir le partage des rôles ?
R.- Il n'y a pas de redéfinition. Sous la Vème République, et c'est comme ça depuis 50 ans, le président de la République a l'initiative, est celui qui donne l'impulsion, est celui les grandes lignes parce que c'est sur son projet, son programme, que l'élection s'est faite et que donc le quinquennat, maintenant, se déroule.
Q.- Il n'y a aucune tension entre les deux hommes ?
R.- Non. Le Premier ministre est le coordonnateur de la majorité, le coordonnateur de la politique gouvernementale mais il le fait en liaison étroite avec le Président. Et sincèrement, et d'ailleurs chacun le sait, puisque la force et l'avantage du duo actuel, c'est qu'ils ont fait ensemble, si je puis dire, le projet présidentiel. F. Fillon était associé à l'élaboration de ce projet pendant la campagne présidentielle. Et pendant une longue durée, avant l'élection, il y a eu complicité, travail commun des deux. Et sincèrement, ce n'est pas la peine d'essayer, il n'y a pas l'ombre d'un papier à cigarette entre le président de la République et le Premier ministre.
Q.- Quand même, à 57 % d'opinions favorables, il doit savourer le Premier ministre ?
R.- Oui, mais chacun le sait, le président de la République s'est présenté aux élections présidentielles en disant, "je serai acteur, pas spectateur, je serai au devant de tous les textes, de toutes les réformes, de tous les enjeux pour les Français".
Q.- Est-ce qu'il ne devrait pas lever le pied, un petit peu, pour le coup ?
R.- Donc, forcément, médiatiquement, il est plus exposé, si je puis dire. Et donc, quand les choses vont très, très bien, il est très haut et quand les gens se disent, "est-ce que les réformes vont donner des résultats concrets très vite", il y a une baisse. Mais...
Q.- Mais est-ce qu'il ne faut pas qu'il se fasse plus discret, comme certains lui conseillent, comme E. Balladur ?
R.- Non, non ! Pardon, non. Pourquoi non ? Parce que si ça veut dire - alors ça dépend de ce que ça veut dire -mais si ça veut dire plus discret, c'est-à-dire "mets un coussin sur les réformes, comme ça on en parlera moins, on parlera moins de toi, tu seras protégé, etc.", c'est non, parce que le pays...
Q.- Mais laisser le Gouvernement gouverner !
R.- Mais le Gouvernement gouverne, mais il a besoin de l'impulsion présidentielle. On a besoin que ce train de réformes réussisse pour faire réussir le pays. Et on a besoin que le président de la République dise, "la ligne, c'est la poursuite des réformes", et ces réformes seront mises en oeuvre naturellement par le gouvernement. Et vous verrez, le programme parlementaire au printemps, il est ce qui faut pour faire la réforme.
Q.- Juste d'un mot : le remaniement ministériel après les municipales, les changements dépendront des résultats ou bien c'est déjà arrêté dans les grandes lignes ?
R.- Je pense que les changements dépendront du président de la République.
Q.- Et pas des résultats ?
R.- Des résultats des municipales vous voulez dire ?
Q.- Oui...
R.- Les résultats des municipales sont...
Q.- Les ministres qui prennent une veste le 16 mars, ils pourront rester au Gouvernement ?
R.- Ecoutez, le président de la République, lorsqu'il a dit à l'ensemble des membres du Gouvernement, "allez-y", pour ceux qui y vont, a très clairement dit qu'en fonction naturellement des villes, de la difficulté, de leur expérience, ce n'est pas lié au remaniement, échec ou succès. Donc, a priori, ce n'est pas comme ça que ça se jouera. Non, j'imagine, mais c'est le seul président de la République qui décide, qu'en fonction des résultats, ça peut lui donner un indicateur politique général mais pas sur les personnes.
Source : Premier ministre, Service d'information du Gouvernement, le 26 février 2008