Interview de Mme Rachida Dati, ministre de la justice, à France Inter le 13 mars 2008, sur la législation concernant la fin de vie, sur les perspectives pour le 2ème tour des élections municipales, notamment à Paris, et sur les leçons qu'il faudra en tirer.

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N. Demorand.- Invitée de France Inter, ce matin, R. Dati, ministre de la Justice, Garde des Sceaux. Soyez la bienvenue. Un mot de commentaire sur cette photo terrible qui fait la Une, ce matin, notamment du Parisien, d'une dame de 52 ans, "qui est atteinte d'une maladie incurable qui la défigure, la fait souffrir atrocement", nous dit le Parisien. Elle demande à la justice le droit de mourir dans la dignité. Qu'en pensez-vous ?
R.- D'abord, j'exprime un point de vue très personnel, c'est une situation douloureuse, de quelqu'un qui souffre, et avec, sans doute, un environnement qui souffre tout autant qu'elle de voir cette femme dans ses difficultés. Alors, c'est vrai que la justice a été saisie. Elle a été saisie sur quel fondement ? Cette dame demande à la justice de pouvoir exonérer de la responsabilité pénale le médecin, pour lui administrer une substance létale, donc, qui l'aidera à mourir. Ce n'est pas notre droit, et nous sommes fondés, aussi bien notre droit, mais aussi, la Convention européenne des droits de l'homme, sur le droit à la vie. Et donc, la justice statuera ; je crois que le délibéré va être rendu le 17 mars prochain. Mais ces sujets sont des sujets de société douloureux, justement avec les progrès aussi de la médecine, qui permettent le maintien en vie, parce que la médecine, par essence, est de pouvoir sauver la vie, et de maintenir en vie.
Q.- Faudrait-il faire bouger le droit, d'après vous, pour des cas pareils ?
R.- Alors, c'est toujours la difficulté, c'est-à-dire, que si on fait une loi en mettant un certain nombre de cas, que fait-on si le cas n'est pas encore dans le cadre que la loi a déterminé ? La loi dite "Leonetti" de 2005 est une loi assez équilibrée, c'est de dire qu'on "évite un peu - entre guillemets, je résume - l'acharnement thérapeutique", c'est-à-dire, de dire que, peut-être, il ne s'agit pas de pouvoir administrer vraiment un traitement médicamenteux pour maintenir en vie. Mais c'est une décision collégiale, prise avec des médecins et la famille, ou l'environnement, mais aussi, une décision qui peut être anticipée. C'est ce que permet cette loi, de dire : si je suis dans des douleurs atroces, estce qu'on ne devrait pas soulager justement le malade en ne donnant plus de traitement, ou en administrant un traitement qui calme la douleur mais qui aurait peut-être pour effet d'accélérer cette fin de vie ? Mais nous sommes dans un cadre très strict dans la loi Leonetti, nous sommes en fin de vie.
Q.- Mais il faudrait, je vous repose la question, évoluer quand même, faire évoluer le droit sur ces sujets-là ?
R.- Alors, c'est plus que faire évoluer le droit. C'est une discussion que les familles et les médecins doivent avoir. La loi Leonetti le permet. C'est un cadre qui est donné pour la fin de vie. Alors, ce sont des décisions qui doivent être prises entre les médecins et les malades et leur famille. Mais à titre personnel, je ne suis pas forcément...Je considère que la médecine n'ests pas là pour administrer des substances létales.
Q.- Changeons de sujet et de registre, on est à "J - 3" du second tour de l'élection municipale. Vous êtes candidate dans le VIIème arrondissement, à Paris, vous avez failli être élue, s'est passé d'un cheveu, là, au premier tour. Formalité le second ?
R.- Une élection, ce n'est jamais une formalité, sinon ce serait être irrespectueux vis-à-vis des Français qui votent, et on leur demande de se mobiliser et de voter. Et si on leur demande de se mobiliser et d'être citoyens le jour de l'élection, donc, je ne vais pas dire que c'est une formalité. Il est vrai que, s'agissant du VIIème arrondissement, c'est un score qui n'avait jamais été fait par la droite depuis très longtemps, et puis aucun maire n'était passé au premier tour s'agissant du VIIème arrondissement. Donc, le score est un score honorable. Nous avions d'abord récupéré tous les sièges au sein du Conseil de Paris et au sein du Conseil d'arrondissement. Mais ce n'était que le premier tour, il faut se remobiliser pour le deuxième tour. Donc, le score est un score honorable. Nous avion d'abord récupérer tous les sièges au sein du conseil de Paris et au sein du conseil d'arrondissement. Mais ce n'était que le premier tour. Il faut se remobiliser pour le deuxième tour.
Q.- Lundi matin, R. Dati, vous êtes la nouvelle figure, le nouveau leader de la droite parisienne ?
R.- Mais nous ne sommes pas au deuxième tour ! Attendons le deuxième tour. Il est vrai que dimanche dernier, il nous a manqué 90 voix. Mais attendons le deuxième tour. Je continue à faire campagne. Donc, attendons le deuxième tour.
Q.- Ce qu'on entend, c'est l'idée que vous remplaceriez F. de Panafieu à la tête de la droite parisienne.
R.- F. de Panafieu a fait une campagne très difficile, très difficile. Moi, je souhaite vraiment lui rendre hommage, parce que, d'abord, une campagne électorale, ce n'est jamais facile et quelle que soit l'échéance. Je l'ai faite en tant que porte-parole de N. Sarkozy. C'est toujours très difficile, parce qu'il faut convaincre, il faut aller sur le terrain, il faut aller à la rencontre des Français. Elle est allée à la rencontre de tous les Parisiens sur tout Paris avec les difficultés de la droite parisienne. Mais plus largement aussi avec les difficultés liées au refus par exemple de B. Delanoë de débattre aussi sur son bilan. Hier, on l'a vu.
Q.- Le débat a eu lieu hier au soir à la télévision !
R.- ...Mais le bilan de B. Delanoë s'agissant de Paris, n'est pas non plus très bon. C'est quand même une ville où aucune place de parking n'a été créée, des places de crèches en terme de nombre, cela n'a pas beaucoup évolué, en terme de logement social... Parce que si je reprends le programme de B. Delanoë, il s'agissait de son projet de 2001. Donc, on reprend le projet de 2001 pour le remettre en programme en 2008.
Q.- En tout cas à trois jours de ce second tour N. Sarkozy a dit qu'il "tiendrait compte du résultat du scrutin" sans dire exactement en quoi. F. Fillon, lui, a dit qu'il fallait de la stabilité gouvernementale. Un autre proche de N. Sarkozy, P. Balkany, a dit que "l'UMP n'avait pas bien fait son travail dans cette élection". Quel est le message là ? C'est un peu cacophonique tout ça, non ?
R.- Que le président de la République dise : "je tiendrai compte du résultat des élections"...
Q.- Alors quoi...
R.- ... il est normal qu'il entende le message des Français. Cette élection municipale, c'est une élection locale, puisqu' il s'agit d'enjeux locaux. Le maire gère la vie quotidienne de ses administrés.
Q.- Comment en tiendra-t-il compte, R. Dati ?
R.- C'est une élection au sens national, parce que tout le monde est appelé à voter le même jour. Donc, il y aura aussi un sens, une interprétation à avoir des résultats. Qu'il en tienne compte... oui il y a sans doute une impatience des Français s'agissant des résultats des réformes qui ont été engagées. Il y a peut être aussi une expression sur peut être le pouvoir d'achat ou sur la sécurité. Je rappelle quand même que sur les collectivités, notamment sur la fiscalité, sur les vingt deux régions françaises vingt sont dirigées par la gauche. Et sur ces vingt, nous avons une augmentation de la fiscalité locale de plus de 38 %. Et dans deux tiers des départements dirigés par la gauche, la taxe d'habitation a fortement augmenté. Alors peut être il y aura une expression des Français sur la fiscalité locale et la fiscalité locale qui entrave et altère le pouvoir d'achat.
Q.- Deux questions très rapides : Y aura-t-il ou non remaniement ministériel ?
R.- D'abord c'est une décision du président de la République et ce sera une volonté du président de la République si cela se produit. Il me semble que l'action politique s'inscrit dans la durée. N. Sarkozy a été élu pour cinq ans. Et c'est vrai que le quinquennat, c'est la première fois que nous avons un Président qui fait un vrai quinquennat, avec nouveau Président dans un vrai quinquennat. Donc, le temps politique est très différent pas rapport au mandat précédent.
Q.- Et donc, vous, vous ne bougez pas du ministère de la Justice ?
R.- C'est le président de la République qui décide. L'action politique s'inscrit dans la durée. Source : Premier ministre, Service d'Information du Gouvernement, le 13 mars 2008