Texte intégral
Mesdames les Présidentes,
Messieurs les Présidents,
Mesdames, Messieurs
Ces assises de la vie associative constituent d'abord un acte politique de tout premier plan qui peut se résumer en un seul mot : la reconnaissance.
Je suis d'abord venue ce matin reconnaître haut et fort, votre engagement libre pour que dans notre démocratie, l'espace entre l'état et l'individu soit vivant et pour reconnaître votre rôle irremplaçable pour répondre à des besoins remplit ni par le secteur public ni par le secteur privé, pour tisser du lien social pour faire de nos concitoyens des femmes et des hommes engagés dans la société.
C'est ce rôle irremplaçable que je suis venue saluer ce matin en sachant que sa place, son action et son développement amènent à se poser beaucoup de questions sur les rapports entre l'Etat et les associations et sur le fonctionnement même de ceux-ci : la transparence et l'évaluation, le respect des engagements pris doivent jouer dans les deux sens.
Je suis bien placée au poste que j'occupe pour savoir que sans les associations notre tissu social serait encore plus déchiré, que beaucoup de femmes et d'hommes seraient sans recours et sans mains qui se tendent pour les aider.
Ce n'est d'ailleurs pas par hasard si c'est la Délégation à l'innovation et à l'économie sociale, placée sous ma responsabilité, qui a eu la charge de préparer ces Assises. Je sais [par Hugues Sibilles, mon délégué], votre attente forte et légitime pour que ces assises soient suivis de lendemains. Sachez que je m'y emploierai et veillerai à ce que la délégation en charge de la vie associative poursuive le travail engagé avec vous et inscrive son action dans la durée.
En partant de l'état des lieux actuel de nos relations, je voudrais vous proposer les conditions d'un véritable partenariat entre l'Etat et le mouvement associatif et, me tournant résolument vers l'avenir, réfléchir avec vous sur la place que peuvent, que doivent, occuper les associations dans un modèle de développement plus démocratique, plus solidaire, plus durable.
I - L'état des lieux
Responsable du ministère qui a le plus de relations avec le mouvement associatif, j'ai pleinement conscience du rôle grandissant des associations dans notre société et de votre contribution croissante à la richesse nationale.
Secteur marchand et secteur non marchand ne doivent plus être opposés. Structures à but lucratif ou non lucratif, toutes contribuent à créer des richesses dans notre pays.
Avec une valeur ajoutée de 200 milliards de francs et plus d'un million 200 000 salariés, les quelques 700 000 associations actives dans notre pays jouent un rôle majeur en termes de créations d'emplois et de richesses. De surcroît, notre comptabilité nationale ne valorise pas le bénévolat. Je le regrette car il représente une valeur ajoutée estimée à près de 100 milliards de francs supplémentaires par an.
Mieux, dans le cadre des quelques 40 000 emplois que vous créez chaque année, vous donnez souvent la priorité à ceux qui ont le plus de mal à trouver du travail. J'en veux pour preuve les 400 000 personnes en difficulté que vous employez avec le soutien des Pouvoirs publics. Alors que la loi d'orientation relative à la lutte contre les exclusions est maintenant pleinement mise en oeuvre, la ministre de l'emploi et de la solidarité ne peut qu'être sensible à cette priorité donnée à la solidarité.
Il faut aujourd'hui que votre action soit pleinement reconnue, que vos contributions à la mise en oeuvre des politiques publiques soient mieux mises en valeur.
II - Vers un véritable partenariat entre l'Etat et les associations.
Nous devons, nous engager dans une nouvelle voie et développer un partenariat encore plus fort. L'élaboration, la construction et la mise en oeuvre de la loi " exclusions " nous ouvrent en quelque sorte la voie.
J'ai demandé à l'ensemble de mes services de se mobiliser tant au niveau central qu'au niveau déconcentré. Nous disposons, grâce à la préparation de ces Assises, d'un état des lieux comme il n'en a jamais été établi auparavant.
Tous ceux qui y ont travaillé ont beaucoup appris. De très nombreuses propositions ont été faites. Beaucoup nécessitent d'être approfondies ; nous avons deux ans pour y parvenir puisque ces Assises sont un peu le coup d'envoi d'une réflexion à plus long terme avant la commémoration du centenaire de la loi fondatrice de 1901.
Parce que je connais vos attentes, je n'ai pas l'intention de laisser le soufflé retomber ". Je serais donc très attentive aux propositions que vous pourrez faire dans le cadre des ateliers qui vont se dérouler cet après-midi dont beaucoup concernent directement mon ministère.
D'ores et déjà, je voudrais vous faire quelques propositions.
Votre attente est particulièrement forte pour ce qui concerne les relations financières avec les Pouvoirs publics, c'est ce qui ressort le plus souvent des forums départementaux. Nous ne pouvons accepter que l'équilibre, pour ne pas dire la vie, de certaines associations et tout particulièrement des plus petites d'entre elles, celles qui travaillent dans les quartiers les plus difficiles, soit fragilisé par la longueur des procédures.
L'année dernière, un effort important a été fait, à ma demande, afin que les associations qui s'investissent dans le secteur de l'insertion par l'économique voient leurs subventions versées dans de meilleurs délais et que les crédits du programme " nouveaux services,
emplois-jeunes " soient versés au plus tôt. Cette année, cet effort sera poursuivi et étendu aux programmes de lutte contre la grande pauvreté.
Par ailleurs, j'ai demandé à ce que des conventions pluriannuelles soient conclues le plus souvent possible avec les associations qui sont les partenaires habituels du ministère. Cela existe déjà dans de nombreux domaines, notamment pour la formation professionnelle et l'action sociale. Cette pratique, bien établie maintenant au niveau de l'administration centrale, doit être généralisée au niveau des services déconcentrés.
Mais qui dit pluriannualité signifie aussi une appréciation plus qualitative et moins comptable qui donne plus de place au projet associatif. La réflexion [entreprise sous la présidence de Madame Edith Amoult-Brill] qui se poursuivra en atelier cet après-midi nous amènera sans aucun doute des éléments importants en ce domaine.
Autre remontée des forums : la demande de simplification administrative. Nombre d'associations semblent ne pas savoir que les mesures de simplification mises en oeuvre par le gouvernement les concernent tout autant que les entreprises. Je souhaite donc qu'une campagne d'information spécifique soit lancée pour mieux faire connaître ces mesures.
Vous attendez également beaucoup des groupements d'employeurs : les associations peuvent bien évidemment y adhérer ou en constituer tout comme les entreprises, voire avec elles. Des obstacles existent néanmoins au développement des groupements d'employeurs, c'est pourquoi j'ai demandé un rapport à Michel Praderie sur ce sujet : il devrait nous permettre de dégager des propositions pour faciliter l'accès à ces structures. Je suis sûre qu'ensemble, nous trouverons des moyens de vous donner satisfaction tout en respectant les droits des salariés.
D'autres formes de mutualisation sont possibles : je pense notamment à la formation professionnelle. Le groupe de travail qui se réunira cet après-midi sur la valorisation des ressources humaines, après le travail accompli sous la présidence de Madame Jacqueline Mengin, devrait nous aider à reconnaître la part que les associations prennent en matière d'emploi et à mieux faire émerger de nouvelles activités et de nouveaux emplois.
La coexistence des bénévoles et des salariés est une de vos richesses, une de vos principales différenciations par rapport au secteur concurrentiel. Il ne faut donc pas les opposer et mettre en oeuvre des politiques qui permettent leur développement simultané, facilitent leur complémentarité et leur mise en synergie.
Attention tout de même à ne pas développer des formes de sous-emploi. Il est si facile de passer de l'un à l'autre, y compris quelquefois avec les meilleures intentions du monde. Je sais que sur cette question, vous êtes vous-mêmes assez divisés et je le comprends.
Le Premier ministre a d'ores et déjà annoncé une réforme du FNDVA (fonds national de développement de la vie associative). La question de la reconnaissance de la place des bénévoles et des salariés et donc de leur formation, devra être au coeur de la réflexion de ce fonds rénové. Elle sera nourrie par le récent rapport du CNVA consacré à la formation professionnelle des salariés où j'ai bien noté la part essentielle que vous faites à la valorisation des acquis tout comme à toutes formules de temps de travail facilitant l'engagement militant, par l'aménagement du congé de représentation notamment.
Je ne sais si, comme le CNVA le soulignait récemment dans un de ses rapports, ces fonctions " préfigurent l'organisation des activités de nos sociétés d'ici quelques années " mais je suis convaincue en revanche qu'il faut, pour reprendre l'expression de Roger Sue, faire émerger des compétences et des savoirs, sinon méconnus, du moins mal reconnus.
La deuxième loi sur la réduction du temps de travail et la réforme de la formation professionnelle sont deux grands chantiers au sein desquels ces préoccupations doivent avoir toute leur place.
Parallèlement, un effort doit être fait en faveur de la promotion des femmes car le mouvement associatif n'est guère plus en avance que le monde politique en matière de responsabilités données aux femmes, à quelques notables exceptions. Nicole Pery, qui participera cet après-midi à l'atelier consacré à la place des hommes et des femmes dans la vie associative sera bien évidemment très attentive aux propositions que vous pourrez faire en ce domaine.
Enfin, je comprends votre démarche d'une meilleure participation au dialogue social. Vous faites des efforts de structuration, d'organisation en ce sens. Vous avez d'ores et déjà constitué un certain nombre de syndicats d'employeurs. Dès lors que vous aurez des propositions construites, vous me trouverez à vos côtés pour en parler.
J'ai voulu évoquer ici quelques pistes de travail, certaines sont plus finalisées que d'autres, mais toutes vous montrent dans quelles conditions j'entends mettre en oeuvre un partenariat renforcé avec vous.
III - De nouvelles perspectives pour le mouvement associatif
Après ces éléments de bilan et ces quelques propositions, je voudrais revenir sur la place des associations dans notre société et tenter de tracer quelques perspectives pour l'avenir.
Comme je vous l'indiquais tout à l'heure, la participation des associations à la richesse nationale n'est pas assez prise en compte. Or les associations doivent avoir une place originale entre économie marchande et secteur public. Ce que d'aucuns appellent l'économie sociale, d'autres l'économie solidaire, d'autres encore le 3ème ou le tiers secteur à utilité sociale, voire écologique, ou bien encore l'économie quaternaire.
Vos travaux, cet après-midi, nous aideront à y réfléchir. Un effort de clarification est nécessaire en ce domaine. Je partage ce souci avec ma collègue Dominique Voynet et nous allons nous employer à avancer y compris en consultant l'ensemble des partenaires si divers de ce secteur
Depuis l'origine, les associations se développent avant tout dans les créneaux où l'économie traditionnelle est moins performante, là où les demandes sont plus faiblement solvables et où les populations rencontrent les plus grandes difficultés. Elles favorisent les échanges et les rencontres et défendent les intérêts collectifs sans souci du marché.
Aujourd'hui, on constate un double mouvement, d'un côté, le " marché " récupère des activités que le mouvement associatif a fait " émerger " dès lors que ces activités sont devenues rentables. Je prendrai deux exemples pour illustrer mon propos. Tout d'abord le secteur de l'aide aux personnes âgées : ce secteur est devenu rentable du fait de l'amélioration croissante du pouvoir d'achat des retraités : on pourrait même dire que le mouvement associatif a donné forme à la demande et que l'Etat l'a progressivement solvabilisée, la rendant attractive pour les entreprises commerciales.
Autre exemple, le secteur sanitaire : là aussi, des besoins nouveaux ont été créés d'autant que certains croient que l'on se fait mieux soigner en dépensant plus. Le secteur associatif a trouvé sa place aux côtés des secteurs libéral et hospitalier, souvent à l'initiative des Pouvoirs publics, notamment quand il fallait faire très vite pour se doter de structures nouvelles, je pense au SIDA ou à la toxicomanie notamment. Et aujourd'hui, les assurances font pression à la porte de ce marché protégé.
A l'inverse, des associations développent des activités de plus en plus diversifiées, en direction de publics de plus en plus hétérogènes, et je m'en félicite car cette hétérogénéité est au coeur de la nécessaire mixité sociale. Elles cherchent ainsi également à éviter des déficits et à réduire leur dépendance vis à vis des financements publics.
Dans ce mouvement, il est inévitable que certains forcent le trait et se retrouvent en concurrence directe avec des entreprises commerciales. Perdent-ils pour autant leur âme. Il est, en tout cas, logique que dès lors que des activités ne se différencient en aucune façon du secteur concurrentiel, elles soient soumises aux mêmes règles.
Il est sain de clarifier les choses à condition de ne pas détruire une richesse que certaines législations, fiscales et économiques notamment, ont quelquefois du mal à appréhender. A trop vouloir gommer les spécificités associatives, nous risquerions de produire de l'exclusion pour reprendre une formule de l'UNIOPSS.
Dans certains secteurs, compte tenu des évolutions, une protection adaptée au fait associatif est nécessaire. Il ne faudra donc notamment pas hésiter à la faire évoluer la législation pour mieux prendre en compte ces spécificités si cela s'avère nécessaire.
Certaines structures devront sans doute néanmoins abandonner le statut associatif pour filialiser certaines de leurs activités. Pourquoi alors ne pas les encourager à s'orienter vers le statut coopératif plutôt que vers un statut purement commercial ? Ce serait un moyen direct de renforcer l'économie sociale.
Une mission confiée à Alain Lipietz est en cours sur ces sujets. Au-delà de l'état des lieux, il faudra voir si des statuts juridiques nouveaux sont nécessaires ou si les statuts existants doivent simplement être mieux utilisés. Cette mission, plus près dans ses postulats de départ de l'insertion par l'économique, touche aux contours et aux besoins d'un " tiers secteur " forcément plus large.
Les premières conclusions qui viennent de m'être soumises montrent que le souhait majoritaire des acteurs ne va pas vers la création d'un nouveau statut à part entière
d'" entreprise à but social " mais plutôt vers une labellisation de certaines structures qui bénéficieraient d'un certain nombre d'avantages notamment fiscaux en raison de leur " utilité sociale ".
Cette " utilité sociale " contribuerait à une meilleure reconnaissance de ces structures en tant qu'acteurs économiques à part entière, ne serait-ce que par leur contribution à la création d'emplois tout en soulignant leur particularité.
Je voudrais d'ailleurs terminer mon propos sur cette politique de l'emploi pour laquelle je vous sais pleinement mobilisés. Elle est au coeur des priorités gouvernementales et vous savez combien le succès des grandes lois que je porte en ce domaine - réduction du temps de travail et nouveaux services nouveaux emplois - est essentiel
Je voudrais revenir là sur le programme " Nouveaux services, emplois-jeunes ".
Nous ne pouvons, en effet, espérer aller vers une société plus solidaire, redonner confiance à notre pays que si nous sommes capables de faire reculer durablement le chômage en imaginant ensemble un nouveau modèle de développement plus riche en emplois. Créer de nouveaux services, c'est notre manière à nous de conforter la croissance mais aussi de la rendre plus riche en emplois.
Notre pays est riche et pourtant des besoins essentiels ne sont pas ou mal satisfaits. Il fallait réagir à ce paradoxe. Répondre à ces besoins pour améliorer notre vie collective, développer des services pour mieux vivre ensemble, créer de vrais emplois, telle est l'ambition de ce programme et je me félicite du fort engagement des associations.
Depuis novembre 1997, plus de 30 000 associations ont construit des projets dans les domaines les plus divers. Plus de 50 accords ont été conclus avec les grands réseaux associatifs. Le nombre de projets déposés témoigne de l'importance des besoins à satisfaire mais aussi de la capacité de notre pays à se mettre en mouvement : la démonstration est faite
" grandeur nature ".
Nombreux sont par exemple les projets qui contribuent à prévenir des situations d'exclusion ou de rupture familiale et professionnelle, qui favorisent l'accès au droit et l'accompagnement socio-éducatif pour les personnes les plus démunies ou encore ceux qui répondent aux besoins qui ne peuvent être assurés par les seules familles, qu'il s'agisse de santé, de vie quotidienne, de loisirs...
C'est encore le maintien nécessaire des liens sociaux, dans la ville, à 1 école, entre les générations qui est renforcé par le développement d'activités nouvelles de médiation, d'animation, de prévention. Ainsi, un formidable essor a été donné pour que la pratique sportive soit accessible à tous et que soit pris en compte son rôle comme facteur d'intégration sociale dans les quartiers.
L'épanouissement de la personne, la maîtrise d'un monde de plus en plus complexe et l'exercice de la démocratie impliquent de développer fortement l'accès à l'information, à l'éducation à la culture tout au long de la vie. Les initiatives prises par les associations en matière d'activités périscolaires organisées en lien avec l'école ou les actions menées pour faciliter l'accès de tous aux nouvelles technologies d'information et de communication, à la lecture, à la pratique artistique montrent combien cet enjeu a été pris en compte.
La rencontre entre le monde associatif et les nouveaux besoins sociaux est un enjeu fondamental. Le programme " nouveaux services, emplois-jeunes " donne l'occasion aux associations d'aller plus loin dans l'innovation sociale : de permettre aux jeunes de jouer un rôle actif dans l'émergence des projets, dans l'évolution des métiers de la construction de nouvelles ressources et de nouveaux outils financiers.
Le défi de ces Assises c'est aussi de voir comment des marges de financement peuvent être dégagées pour financer ces nouvelles activités à long terme. Là est tout l'enjeu de votre atelier consacré à la vie associative et au développement d'activités et de services générateurs d'emplois. Là encore, nous avons un grand chantier devant nous.
Enfin, je voudrais dire deux mots sur le pari de la réduction du temps de travail. Certes, il s'agit de créer des emplois -car nous en créons effectivement (plus de 1 000 emplois supplémentaires par semaine aujourd'hui)- mais c'est aussi de permettre l'émergence d'un véritable " temps citoyen " entre temps de travail et temps personnel et familial.
Dans ce " temps citoyen ", les associations doivent avoir toute leur place pour contribuer à l'épanouissement de chaque individu sur le plan sportif, culturel, économique ou social. Dans le cadre des négociations en cours, les initiatives, les expérimentations se multiplient, je pense notamment aux formules de temps choisi, au développement du compte épargne-temps, au mécénat sous forme de mise à disposition de salariés volontaires ou encore à l'octroi de congé-formation en lien avec l'engagement associatif. Ce vaste débat est encore largement devant nous, il interroge la société toute entière puisqu'il met en cause à terme la place que l'on accorde à chaque individu dans notre société, qu'il soit homme ou femme, riche ou pauvre, jeune ou vieux, Français ou étranger, malade ou bien portant. Est-il besoin de rappeler ici par exemple la place grandissante dans la vie des associations des personnes qui ont terminé leur vie professionnelle ou le rôle irremplaçable dès associations dans le processus d'intégration.
Comme le souligne le rapport du groupe de travail sur citoyenneté active et vie associative [qu'a présidé Jean-Marc Roirant], nous sommes peut-être effectivement encore trop, en France, héritiers de la Révolution française, trop enclin à tout attendre de l'Etat, seul garant de l'intérêt général. Il faut donc dépasser ce débat, donner une meilleure place aux intérêts collectifs et aux espaces de solidarité y compris en dehors du monde du travail.
Il est donc essentiel de reconnaître une place nouvelle aux associations mais aussi plus largement de prôner un nouveau modèle de développement au sein duquel les activités sociales (sociétales) seraient pleinement reconnues Il est temps de " dépasser l'opposition artificielle entre l'économique et le social ", de " réconcilier pleinement et définitivement l'économie au sens strict avec l'économie générale de la société ". C'est bien évidemment un des enjeux du modèle social européen.
Avec ces Assises, vos travaux nous ouvrent la voie, une voie pleine d'espoirs et de promesses. Et chacun sait si nous avons besoin d'espoirs et de projets à l'aube de ce troisième millénaire, après des années qui ont été dures pour beaucoup de nos concitoyens. D'espoirs et de projets, les associations en débordent pour le plus grand bien de notre société et ce, grâce à tous ceux qui, comme vous, font vivre les associations et n'hésitent pas à en créer chaque jour de nouvelles (près de 200 créations quotidiennes) comme autant de paris sur l'avenir.
Si l'avenir d'une société se mesure aussi comme je le crois, au dynamisme de ses associations, alors je vous le dis, je ne suis pas inquiète pour celui de notre pays. C'est aussi pour cela que, comme ministre et avec le coeur d'une militante associative, je vous remercie.
(Source http://www.travail.gouv.fr)
Messieurs les Présidents,
Mesdames, Messieurs
Ces assises de la vie associative constituent d'abord un acte politique de tout premier plan qui peut se résumer en un seul mot : la reconnaissance.
Je suis d'abord venue ce matin reconnaître haut et fort, votre engagement libre pour que dans notre démocratie, l'espace entre l'état et l'individu soit vivant et pour reconnaître votre rôle irremplaçable pour répondre à des besoins remplit ni par le secteur public ni par le secteur privé, pour tisser du lien social pour faire de nos concitoyens des femmes et des hommes engagés dans la société.
C'est ce rôle irremplaçable que je suis venue saluer ce matin en sachant que sa place, son action et son développement amènent à se poser beaucoup de questions sur les rapports entre l'Etat et les associations et sur le fonctionnement même de ceux-ci : la transparence et l'évaluation, le respect des engagements pris doivent jouer dans les deux sens.
Je suis bien placée au poste que j'occupe pour savoir que sans les associations notre tissu social serait encore plus déchiré, que beaucoup de femmes et d'hommes seraient sans recours et sans mains qui se tendent pour les aider.
Ce n'est d'ailleurs pas par hasard si c'est la Délégation à l'innovation et à l'économie sociale, placée sous ma responsabilité, qui a eu la charge de préparer ces Assises. Je sais [par Hugues Sibilles, mon délégué], votre attente forte et légitime pour que ces assises soient suivis de lendemains. Sachez que je m'y emploierai et veillerai à ce que la délégation en charge de la vie associative poursuive le travail engagé avec vous et inscrive son action dans la durée.
En partant de l'état des lieux actuel de nos relations, je voudrais vous proposer les conditions d'un véritable partenariat entre l'Etat et le mouvement associatif et, me tournant résolument vers l'avenir, réfléchir avec vous sur la place que peuvent, que doivent, occuper les associations dans un modèle de développement plus démocratique, plus solidaire, plus durable.
I - L'état des lieux
Responsable du ministère qui a le plus de relations avec le mouvement associatif, j'ai pleinement conscience du rôle grandissant des associations dans notre société et de votre contribution croissante à la richesse nationale.
Secteur marchand et secteur non marchand ne doivent plus être opposés. Structures à but lucratif ou non lucratif, toutes contribuent à créer des richesses dans notre pays.
Avec une valeur ajoutée de 200 milliards de francs et plus d'un million 200 000 salariés, les quelques 700 000 associations actives dans notre pays jouent un rôle majeur en termes de créations d'emplois et de richesses. De surcroît, notre comptabilité nationale ne valorise pas le bénévolat. Je le regrette car il représente une valeur ajoutée estimée à près de 100 milliards de francs supplémentaires par an.
Mieux, dans le cadre des quelques 40 000 emplois que vous créez chaque année, vous donnez souvent la priorité à ceux qui ont le plus de mal à trouver du travail. J'en veux pour preuve les 400 000 personnes en difficulté que vous employez avec le soutien des Pouvoirs publics. Alors que la loi d'orientation relative à la lutte contre les exclusions est maintenant pleinement mise en oeuvre, la ministre de l'emploi et de la solidarité ne peut qu'être sensible à cette priorité donnée à la solidarité.
Il faut aujourd'hui que votre action soit pleinement reconnue, que vos contributions à la mise en oeuvre des politiques publiques soient mieux mises en valeur.
II - Vers un véritable partenariat entre l'Etat et les associations.
Nous devons, nous engager dans une nouvelle voie et développer un partenariat encore plus fort. L'élaboration, la construction et la mise en oeuvre de la loi " exclusions " nous ouvrent en quelque sorte la voie.
J'ai demandé à l'ensemble de mes services de se mobiliser tant au niveau central qu'au niveau déconcentré. Nous disposons, grâce à la préparation de ces Assises, d'un état des lieux comme il n'en a jamais été établi auparavant.
Tous ceux qui y ont travaillé ont beaucoup appris. De très nombreuses propositions ont été faites. Beaucoup nécessitent d'être approfondies ; nous avons deux ans pour y parvenir puisque ces Assises sont un peu le coup d'envoi d'une réflexion à plus long terme avant la commémoration du centenaire de la loi fondatrice de 1901.
Parce que je connais vos attentes, je n'ai pas l'intention de laisser le soufflé retomber ". Je serais donc très attentive aux propositions que vous pourrez faire dans le cadre des ateliers qui vont se dérouler cet après-midi dont beaucoup concernent directement mon ministère.
D'ores et déjà, je voudrais vous faire quelques propositions.
Votre attente est particulièrement forte pour ce qui concerne les relations financières avec les Pouvoirs publics, c'est ce qui ressort le plus souvent des forums départementaux. Nous ne pouvons accepter que l'équilibre, pour ne pas dire la vie, de certaines associations et tout particulièrement des plus petites d'entre elles, celles qui travaillent dans les quartiers les plus difficiles, soit fragilisé par la longueur des procédures.
L'année dernière, un effort important a été fait, à ma demande, afin que les associations qui s'investissent dans le secteur de l'insertion par l'économique voient leurs subventions versées dans de meilleurs délais et que les crédits du programme " nouveaux services,
emplois-jeunes " soient versés au plus tôt. Cette année, cet effort sera poursuivi et étendu aux programmes de lutte contre la grande pauvreté.
Par ailleurs, j'ai demandé à ce que des conventions pluriannuelles soient conclues le plus souvent possible avec les associations qui sont les partenaires habituels du ministère. Cela existe déjà dans de nombreux domaines, notamment pour la formation professionnelle et l'action sociale. Cette pratique, bien établie maintenant au niveau de l'administration centrale, doit être généralisée au niveau des services déconcentrés.
Mais qui dit pluriannualité signifie aussi une appréciation plus qualitative et moins comptable qui donne plus de place au projet associatif. La réflexion [entreprise sous la présidence de Madame Edith Amoult-Brill] qui se poursuivra en atelier cet après-midi nous amènera sans aucun doute des éléments importants en ce domaine.
Autre remontée des forums : la demande de simplification administrative. Nombre d'associations semblent ne pas savoir que les mesures de simplification mises en oeuvre par le gouvernement les concernent tout autant que les entreprises. Je souhaite donc qu'une campagne d'information spécifique soit lancée pour mieux faire connaître ces mesures.
Vous attendez également beaucoup des groupements d'employeurs : les associations peuvent bien évidemment y adhérer ou en constituer tout comme les entreprises, voire avec elles. Des obstacles existent néanmoins au développement des groupements d'employeurs, c'est pourquoi j'ai demandé un rapport à Michel Praderie sur ce sujet : il devrait nous permettre de dégager des propositions pour faciliter l'accès à ces structures. Je suis sûre qu'ensemble, nous trouverons des moyens de vous donner satisfaction tout en respectant les droits des salariés.
D'autres formes de mutualisation sont possibles : je pense notamment à la formation professionnelle. Le groupe de travail qui se réunira cet après-midi sur la valorisation des ressources humaines, après le travail accompli sous la présidence de Madame Jacqueline Mengin, devrait nous aider à reconnaître la part que les associations prennent en matière d'emploi et à mieux faire émerger de nouvelles activités et de nouveaux emplois.
La coexistence des bénévoles et des salariés est une de vos richesses, une de vos principales différenciations par rapport au secteur concurrentiel. Il ne faut donc pas les opposer et mettre en oeuvre des politiques qui permettent leur développement simultané, facilitent leur complémentarité et leur mise en synergie.
Attention tout de même à ne pas développer des formes de sous-emploi. Il est si facile de passer de l'un à l'autre, y compris quelquefois avec les meilleures intentions du monde. Je sais que sur cette question, vous êtes vous-mêmes assez divisés et je le comprends.
Le Premier ministre a d'ores et déjà annoncé une réforme du FNDVA (fonds national de développement de la vie associative). La question de la reconnaissance de la place des bénévoles et des salariés et donc de leur formation, devra être au coeur de la réflexion de ce fonds rénové. Elle sera nourrie par le récent rapport du CNVA consacré à la formation professionnelle des salariés où j'ai bien noté la part essentielle que vous faites à la valorisation des acquis tout comme à toutes formules de temps de travail facilitant l'engagement militant, par l'aménagement du congé de représentation notamment.
Je ne sais si, comme le CNVA le soulignait récemment dans un de ses rapports, ces fonctions " préfigurent l'organisation des activités de nos sociétés d'ici quelques années " mais je suis convaincue en revanche qu'il faut, pour reprendre l'expression de Roger Sue, faire émerger des compétences et des savoirs, sinon méconnus, du moins mal reconnus.
La deuxième loi sur la réduction du temps de travail et la réforme de la formation professionnelle sont deux grands chantiers au sein desquels ces préoccupations doivent avoir toute leur place.
Parallèlement, un effort doit être fait en faveur de la promotion des femmes car le mouvement associatif n'est guère plus en avance que le monde politique en matière de responsabilités données aux femmes, à quelques notables exceptions. Nicole Pery, qui participera cet après-midi à l'atelier consacré à la place des hommes et des femmes dans la vie associative sera bien évidemment très attentive aux propositions que vous pourrez faire en ce domaine.
Enfin, je comprends votre démarche d'une meilleure participation au dialogue social. Vous faites des efforts de structuration, d'organisation en ce sens. Vous avez d'ores et déjà constitué un certain nombre de syndicats d'employeurs. Dès lors que vous aurez des propositions construites, vous me trouverez à vos côtés pour en parler.
J'ai voulu évoquer ici quelques pistes de travail, certaines sont plus finalisées que d'autres, mais toutes vous montrent dans quelles conditions j'entends mettre en oeuvre un partenariat renforcé avec vous.
III - De nouvelles perspectives pour le mouvement associatif
Après ces éléments de bilan et ces quelques propositions, je voudrais revenir sur la place des associations dans notre société et tenter de tracer quelques perspectives pour l'avenir.
Comme je vous l'indiquais tout à l'heure, la participation des associations à la richesse nationale n'est pas assez prise en compte. Or les associations doivent avoir une place originale entre économie marchande et secteur public. Ce que d'aucuns appellent l'économie sociale, d'autres l'économie solidaire, d'autres encore le 3ème ou le tiers secteur à utilité sociale, voire écologique, ou bien encore l'économie quaternaire.
Vos travaux, cet après-midi, nous aideront à y réfléchir. Un effort de clarification est nécessaire en ce domaine. Je partage ce souci avec ma collègue Dominique Voynet et nous allons nous employer à avancer y compris en consultant l'ensemble des partenaires si divers de ce secteur
Depuis l'origine, les associations se développent avant tout dans les créneaux où l'économie traditionnelle est moins performante, là où les demandes sont plus faiblement solvables et où les populations rencontrent les plus grandes difficultés. Elles favorisent les échanges et les rencontres et défendent les intérêts collectifs sans souci du marché.
Aujourd'hui, on constate un double mouvement, d'un côté, le " marché " récupère des activités que le mouvement associatif a fait " émerger " dès lors que ces activités sont devenues rentables. Je prendrai deux exemples pour illustrer mon propos. Tout d'abord le secteur de l'aide aux personnes âgées : ce secteur est devenu rentable du fait de l'amélioration croissante du pouvoir d'achat des retraités : on pourrait même dire que le mouvement associatif a donné forme à la demande et que l'Etat l'a progressivement solvabilisée, la rendant attractive pour les entreprises commerciales.
Autre exemple, le secteur sanitaire : là aussi, des besoins nouveaux ont été créés d'autant que certains croient que l'on se fait mieux soigner en dépensant plus. Le secteur associatif a trouvé sa place aux côtés des secteurs libéral et hospitalier, souvent à l'initiative des Pouvoirs publics, notamment quand il fallait faire très vite pour se doter de structures nouvelles, je pense au SIDA ou à la toxicomanie notamment. Et aujourd'hui, les assurances font pression à la porte de ce marché protégé.
A l'inverse, des associations développent des activités de plus en plus diversifiées, en direction de publics de plus en plus hétérogènes, et je m'en félicite car cette hétérogénéité est au coeur de la nécessaire mixité sociale. Elles cherchent ainsi également à éviter des déficits et à réduire leur dépendance vis à vis des financements publics.
Dans ce mouvement, il est inévitable que certains forcent le trait et se retrouvent en concurrence directe avec des entreprises commerciales. Perdent-ils pour autant leur âme. Il est, en tout cas, logique que dès lors que des activités ne se différencient en aucune façon du secteur concurrentiel, elles soient soumises aux mêmes règles.
Il est sain de clarifier les choses à condition de ne pas détruire une richesse que certaines législations, fiscales et économiques notamment, ont quelquefois du mal à appréhender. A trop vouloir gommer les spécificités associatives, nous risquerions de produire de l'exclusion pour reprendre une formule de l'UNIOPSS.
Dans certains secteurs, compte tenu des évolutions, une protection adaptée au fait associatif est nécessaire. Il ne faudra donc notamment pas hésiter à la faire évoluer la législation pour mieux prendre en compte ces spécificités si cela s'avère nécessaire.
Certaines structures devront sans doute néanmoins abandonner le statut associatif pour filialiser certaines de leurs activités. Pourquoi alors ne pas les encourager à s'orienter vers le statut coopératif plutôt que vers un statut purement commercial ? Ce serait un moyen direct de renforcer l'économie sociale.
Une mission confiée à Alain Lipietz est en cours sur ces sujets. Au-delà de l'état des lieux, il faudra voir si des statuts juridiques nouveaux sont nécessaires ou si les statuts existants doivent simplement être mieux utilisés. Cette mission, plus près dans ses postulats de départ de l'insertion par l'économique, touche aux contours et aux besoins d'un " tiers secteur " forcément plus large.
Les premières conclusions qui viennent de m'être soumises montrent que le souhait majoritaire des acteurs ne va pas vers la création d'un nouveau statut à part entière
d'" entreprise à but social " mais plutôt vers une labellisation de certaines structures qui bénéficieraient d'un certain nombre d'avantages notamment fiscaux en raison de leur " utilité sociale ".
Cette " utilité sociale " contribuerait à une meilleure reconnaissance de ces structures en tant qu'acteurs économiques à part entière, ne serait-ce que par leur contribution à la création d'emplois tout en soulignant leur particularité.
Je voudrais d'ailleurs terminer mon propos sur cette politique de l'emploi pour laquelle je vous sais pleinement mobilisés. Elle est au coeur des priorités gouvernementales et vous savez combien le succès des grandes lois que je porte en ce domaine - réduction du temps de travail et nouveaux services nouveaux emplois - est essentiel
Je voudrais revenir là sur le programme " Nouveaux services, emplois-jeunes ".
Nous ne pouvons, en effet, espérer aller vers une société plus solidaire, redonner confiance à notre pays que si nous sommes capables de faire reculer durablement le chômage en imaginant ensemble un nouveau modèle de développement plus riche en emplois. Créer de nouveaux services, c'est notre manière à nous de conforter la croissance mais aussi de la rendre plus riche en emplois.
Notre pays est riche et pourtant des besoins essentiels ne sont pas ou mal satisfaits. Il fallait réagir à ce paradoxe. Répondre à ces besoins pour améliorer notre vie collective, développer des services pour mieux vivre ensemble, créer de vrais emplois, telle est l'ambition de ce programme et je me félicite du fort engagement des associations.
Depuis novembre 1997, plus de 30 000 associations ont construit des projets dans les domaines les plus divers. Plus de 50 accords ont été conclus avec les grands réseaux associatifs. Le nombre de projets déposés témoigne de l'importance des besoins à satisfaire mais aussi de la capacité de notre pays à se mettre en mouvement : la démonstration est faite
" grandeur nature ".
Nombreux sont par exemple les projets qui contribuent à prévenir des situations d'exclusion ou de rupture familiale et professionnelle, qui favorisent l'accès au droit et l'accompagnement socio-éducatif pour les personnes les plus démunies ou encore ceux qui répondent aux besoins qui ne peuvent être assurés par les seules familles, qu'il s'agisse de santé, de vie quotidienne, de loisirs...
C'est encore le maintien nécessaire des liens sociaux, dans la ville, à 1 école, entre les générations qui est renforcé par le développement d'activités nouvelles de médiation, d'animation, de prévention. Ainsi, un formidable essor a été donné pour que la pratique sportive soit accessible à tous et que soit pris en compte son rôle comme facteur d'intégration sociale dans les quartiers.
L'épanouissement de la personne, la maîtrise d'un monde de plus en plus complexe et l'exercice de la démocratie impliquent de développer fortement l'accès à l'information, à l'éducation à la culture tout au long de la vie. Les initiatives prises par les associations en matière d'activités périscolaires organisées en lien avec l'école ou les actions menées pour faciliter l'accès de tous aux nouvelles technologies d'information et de communication, à la lecture, à la pratique artistique montrent combien cet enjeu a été pris en compte.
La rencontre entre le monde associatif et les nouveaux besoins sociaux est un enjeu fondamental. Le programme " nouveaux services, emplois-jeunes " donne l'occasion aux associations d'aller plus loin dans l'innovation sociale : de permettre aux jeunes de jouer un rôle actif dans l'émergence des projets, dans l'évolution des métiers de la construction de nouvelles ressources et de nouveaux outils financiers.
Le défi de ces Assises c'est aussi de voir comment des marges de financement peuvent être dégagées pour financer ces nouvelles activités à long terme. Là est tout l'enjeu de votre atelier consacré à la vie associative et au développement d'activités et de services générateurs d'emplois. Là encore, nous avons un grand chantier devant nous.
Enfin, je voudrais dire deux mots sur le pari de la réduction du temps de travail. Certes, il s'agit de créer des emplois -car nous en créons effectivement (plus de 1 000 emplois supplémentaires par semaine aujourd'hui)- mais c'est aussi de permettre l'émergence d'un véritable " temps citoyen " entre temps de travail et temps personnel et familial.
Dans ce " temps citoyen ", les associations doivent avoir toute leur place pour contribuer à l'épanouissement de chaque individu sur le plan sportif, culturel, économique ou social. Dans le cadre des négociations en cours, les initiatives, les expérimentations se multiplient, je pense notamment aux formules de temps choisi, au développement du compte épargne-temps, au mécénat sous forme de mise à disposition de salariés volontaires ou encore à l'octroi de congé-formation en lien avec l'engagement associatif. Ce vaste débat est encore largement devant nous, il interroge la société toute entière puisqu'il met en cause à terme la place que l'on accorde à chaque individu dans notre société, qu'il soit homme ou femme, riche ou pauvre, jeune ou vieux, Français ou étranger, malade ou bien portant. Est-il besoin de rappeler ici par exemple la place grandissante dans la vie des associations des personnes qui ont terminé leur vie professionnelle ou le rôle irremplaçable dès associations dans le processus d'intégration.
Comme le souligne le rapport du groupe de travail sur citoyenneté active et vie associative [qu'a présidé Jean-Marc Roirant], nous sommes peut-être effectivement encore trop, en France, héritiers de la Révolution française, trop enclin à tout attendre de l'Etat, seul garant de l'intérêt général. Il faut donc dépasser ce débat, donner une meilleure place aux intérêts collectifs et aux espaces de solidarité y compris en dehors du monde du travail.
Il est donc essentiel de reconnaître une place nouvelle aux associations mais aussi plus largement de prôner un nouveau modèle de développement au sein duquel les activités sociales (sociétales) seraient pleinement reconnues Il est temps de " dépasser l'opposition artificielle entre l'économique et le social ", de " réconcilier pleinement et définitivement l'économie au sens strict avec l'économie générale de la société ". C'est bien évidemment un des enjeux du modèle social européen.
Avec ces Assises, vos travaux nous ouvrent la voie, une voie pleine d'espoirs et de promesses. Et chacun sait si nous avons besoin d'espoirs et de projets à l'aube de ce troisième millénaire, après des années qui ont été dures pour beaucoup de nos concitoyens. D'espoirs et de projets, les associations en débordent pour le plus grand bien de notre société et ce, grâce à tous ceux qui, comme vous, font vivre les associations et n'hésitent pas à en créer chaque jour de nouvelles (près de 200 créations quotidiennes) comme autant de paris sur l'avenir.
Si l'avenir d'une société se mesure aussi comme je le crois, au dynamisme de ses associations, alors je vous le dis, je ne suis pas inquiète pour celui de notre pays. C'est aussi pour cela que, comme ministre et avec le coeur d'une militante associative, je vous remercie.
(Source http://www.travail.gouv.fr)