Déclaration de M. Eric Woerth, ministre du budget, des comptes publics et de la fonction publique, sur le bilan des recettes et dépenses fiscales de l'Etat et les objectifs pour 2009 et les trois années à venir de maîtrise des déficits publics, Paris le 9 juillet 2008.

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Circonstance : Audition devant la Commission des Finances et la Commission des Affaires sociales de l'Assemblée nationale à l'occasion du débat d'orientation des finances publiques, le 9 juillet 2008

Texte intégral

Monsieur le président,
Monsieur le rapporteur général,
Mesdames et Messieurs les députés,
L'année dernière, ma toute première intervention devant vous avait précisément eu lieu à l'occasion du débat d'orientation appelé alors "budgétaire", et que nous rebaptisons cette année, "des finances publiques". Cela me semble beaucoup plus juste. Je n'ai cessé de le rappeler tout au long de l'année, le redressement de nos finances publiques est l'affaire de tous, pas seulement celle du budget de l'État. Et je vous remercie d'avoir organisé ce soir une audition commune de la commission des Finances et de la commission des Affaires sociales.
Beaucoup a été accompli au cours de cette année, et notamment la RGPP. Et je voudrais axer mon intervention sur les orientations à en tirer pour l'avenir. Nous sommes à un moment crucial pour nos finances publiques :
- nous ne pouvons plus nous réfugier derrière les solutions de facilité du passé, et notamment celle de l'endettement à bas coût ;
- nous devons faire face à l'arrivée à l'âge de la retraite des générations du baby-boom.
L'ensemble des travaux que le gouvernement a mené et que nous avons mené ensemble depuis un an seront les fondements du premier budget triennal et de la loi de programmation pluriannuelle des finances publiques. La contrainte financière est extrêmement forte, vous le savez mieux que quiconque, et en particulier le rapporteur général de la commission des finances Gilles Carrez. Mais avec les travaux engagés, nous nous sommes donné les moyens de conjuguer cette contrainte financière au maintien d'un service public de qualité et d'un système social protecteur.
Je voudrais tout d'abord, comme il est d'usage, faire un point sur l'année 2008. Où en sommes-nous ?
L'objectif de 2,5 points de PIB de déficit public pour 2008 demeure. Il nécessite cependant pour être atteint d'être extrêmement vigilant sur la dépense.
Les recettes fiscales de l'État seraient en moins value par rapport à la loi de finances initiale. Quand nous avons révisé notre prévision de croissance du PIB en avril avec une fourchette de 1,7 % à 2 %, nous supposions implicitement une moins value de recettes fiscales de 3 à 5 Md euros par rapport à la LFI. Cette prévision tenait également comptes des résultats de 2007. Les données supplémentaires disponibles à ce jour sur 2008 ne remettent pas en cause ce diagnostic.
Si vous me permettez de détailler un peu plus précisément par impôt :
- l'impôt sur les sociétés pourraient se situer en baisse de 1 Md euros à 3 Md euros par rapport au montant inscrit en LFI. Cette révision intègre une hypothèse prudente de baisse du bénéfice fiscal, dans le secteur financier notamment pour des raisons évidentes. Toutefois, il faut souligner qu'avec le mécanisme de "5e acompte" en décembre, un fort aléa existera dans les deux sens jusqu'à la fin de l'année ;
- l'impôt sur le revenu net pourrait se situer en deçà des prévisions de LFI, dans une fourchette allant de - 1,5 Md euros à -2 Md euros par rapport à la LFI. Cette révision à la baisse s'explique pour l'essentiel par les moins-values constatées en exécution 2007. Ces moins values étaient liées au dynamisme de certains crédits d'impôts (notamment la prime pour l'emploi et le crédit d'impôt développement durable), sujet sur lequel je vais revenir.
Sur les dépenses de l'État, il y a un dérapage de la charge de la dette. Qui provient :
- de l'augmentation des taux d'intérêt depuis la LFI ;
- mais surtout de l'augmentation de l'inflation qui pèse sur le provisionnement de la charge des obligations indexées.
Pour autant, nous avons pour objectif de respecter les montants de dépenses que vous avez votés.
La mise en réserve de crédits réalisée en début d'année 2008 est typiquement destinée à faire face aux besoins apparaissant en cours d'exécution. À ce stade de l'année, la visibilité sur l'utilisation de cette réserve n'est que partielle. Toutefois, on peut estimer qu'environ la moitié des crédits mis en réserve (soit de l'ordre de 3 Md euros) pourrait faire l'objet d'une annulation.
En ce qui concerne la sécurité sociale, la récente commission des comptes m'a donné l'occasion de fournir le détail des prévisions pour le régime général. Je vous en rappelle les principales conclusions :
Nous respectons le cadrage financier de la LFSS. Pour 2008, les objectifs de solde du régime général devraient être respectés et les déficits continuer à diminuer. Le déficit du régime général serait de 8,9 Md euros contre 9,5 Md euros en 2007, ce qui est exactement en phase avec la LFSS 2008 (-8,8 Md euros). Cette prévision intègre un risque de dépassement de l'ONDAM à hauteur de 700 M euros et la revalorisation anticipée des retraites de 0,8 % en septembre.
Ces résultats s'expliquent principalement par les mesures prises dans le PLFSS, la situation de l'emploi et la bonne tenue des recettes.
Le comité d'alerte a prévu un dépassement de l'ONDAM entre 500 et 900 M euros. Le comité n'a pas déclenché d'alerte, ce qui témoigne aussi de l'effet des mesures pour maîtriser les dépenses. Mais, avec Roselyne Bachelot, je reste particulièrement vigilant, car nous ne nous satisfaisons pas de ce dépassement, même s'il est inférieur au seuil d'alerte. Et même s'il est bien inférieur au dérapage de 3 Md euros à la même époque l'année dernière ...
Avec Roselyne, nous venons d'entamer un cycle de rencontres avec les mutuelles et les partenaires sociaux. Après ces réunions, nous disposerons d'un éventail de propositions à partir duquel nous prendrons nos responsabilités. Des annonces sont envisageables avant la fin du mois de juillet. Certaines des mesures pourraient commencer à s'appliquer dès 2008 pour que nous nous approchions au plus près de l'ONDAM que vous avez voté. A mon sens, le premier pas vers le retour à l'équilibre, c'est de tenir nos engagements.
Après ce bref point sur les perspectives 2008, je voudrais revenir sur notre stratégie de moyen terme, et comment elle se concrétise dans la préparation du budget triennal, du PLF et du PLFSS.
Nous ne modifions ni nos objectifs ni notre stratégie pour le rétablissement de nos finances publiques. J'entends parfois dire que nous repousserions le rétablissement de nos finances publiques au-delà de la fin du quinquennat. Je tiens donc à vous rassurer, et à renouveler nos engagements. Tout le travail que nous avons accompli depuis un an sur les finances publiques, avec votre aide, a bien pour objectif de rétablir l'équilibre global d'ici 2012, et dès 2011 pour la sécurité sociale.
Pour y parvenir, la stratégie que nous mettons en oeuvre avec constance depuis un an conjugue :
- D'une part, le développement de la croissance potentielle de l'économie grâce aux réformes de structure. La LME, ou la loi sur la démocratie sociale et la réforme du temps de travail en sont les exemples les plus récents ;
- D'autre part, la maitrise de la dépense publique. Il faut, je l'ai dit et répété, diviser par deux le taux de croissance de la dépense en volume, soit avoir une croissance de la dépense de l'ordre de 1 % en euros constants par an.
Je voudrais très concrètement vous présenter la préparation du premier budget triennal, et la situation à laquelle nous avons à faire face en 2009.
Il ne faut pas se voiler la face, le contexte est très difficile. En 2009 nous avons un objectif ambitieux, conforme à un retour à l'équilibre de nos finances publiques d'ici à 2012 : réduire le déficit public de 0,5 point de PIB.
Pour y parvenir, il nous faut réussir principalement 3 choses :
- stabiliser sur 3 ans la dépense de l'État en euro constants sur le périmètre élargi que nous avons défini pour le PLF 2008 ;
- faire 4 à 5 Md euros d'effort de redressement sur l'assurance maladie dès 2009, pour assurer le retour à l'équilibre du régime général en 2011 ;
- poursuivre les réformes pour trouver nos propres ressorts de croissance dans un environnement mondial difficile.
Pour l'État, la construction du budget pluriannuel se fait dans un environnement contraint comme jamais auparavant :
Stabiliser les dépenses en euros constant sur le périmètre de la norme élargie, c'est un effort supérieur à tout ce qui a été fait par le passé. En moyenne, de 1999 à 2007, la croissance de la dépense de l'État sur ce périmètre élargi aurait été de 1,1 %.
Ce n'est pas à vous que je rappellerai que par le passé, il arrivait que certains postes de dépense soient sous-dotés : c'est quelque chose que je tiens à faire disparaitre, en particulier en ce qui concerne les relations entre l'État et la Sécurité sociale. Il est complètement vain pour moi, ministre des comptes, de repasser une dépense d'une poche à une autre.
Parallèlement, les dépenses héritées du passé sont bien plus dynamiques qu'auparavant :
L'arrivée à l'âge de la retraite des générations du baby-boom accroit le montant des pensions. Le nombre de personnes atteignant 60 ans passe de l'ordre de 550 000 par an pour les générations nées pendant la 2e guerre mondiale à près de 800 000 pour les générations du baby-boom. Ces dépenses progresseront de 2 à 2,75 Md euros en moyenne par an de 2009 à 2011.
La charge de la dette s'accroit. On a longtemps été « anesthésié » face au problème de la dette. Nous avons en effet bénéficié pendant des années de la baisse des taux au gré du refinancement de la dette. On savait qu'on était arrivé à l'étiage et que le risque d'une remontée des taux d'intérêt était plus que probable. Il survient, de manière plus brutale que prévu du fait de la poussée inflationniste. De 2003 à 2007, la charge de la dette était quasiment stable. Dans les années à venir, elle augmentera de 1,5 à 2,5 Md euros de plus chaque année. À titre de comparaison, 2 Md euros c'est quasiment le budget de la culture, c'est la moitié du budget de l'agriculture, ou de celui du Quai d'Orsay.
Au total, de 2003 à 2007, la charge de la dette et les pensions représentaient moins de 30 % de l'augmentation de la dépense de l'État. À l'avenir, c'est exactement l'inverse, elles en absorberont environ 70 %. Il faut bien se rendre compte de ce que cela signifie, c'est un renversement majeur : de 70 % de marge de manoeuvre, on passe à 70 % contraints.
L'augmentation de l'inflation en 2008 ne joue pas non plus dans le bon sens. En 2008, je l'ai dit, l'effet de l'inflation sur les dépenses porte principalement sur la charge des obligations indexées. En 2009 en revanche, plusieurs prestations sont indexées sur l'inflation, notamment les retraites et les prestations familiales.
Il faut aussi tenir compte de l'évolution des prélèvements sur recette au profit de l'union européenne et des collectivités territoriales. Si l'on ajoute la progression de ces prélèvements sur recettes, ce n'est plus 70 % de la progression des dépenses qui est contrainte, mais quasiment 100 % !
Au total, réaliser le « 0 volume » sur la norme élargie, c'est en fait quasiment équivalent à stabiliser en euros courants les dépenses des ministères.
Il faut se rendre compte de ce que cela signifie :
C'est d'abord « 0 valeur » sur les dépenses de personnel. Nous y parvenons grâce à la RGPP qui nous permet d'effectuer entre 30 000 et 32 000 non remplacements. Dès 2009, nous atteignons donc quasiment notre objectif de non remplacement d'un fonctionnaire partant à la retraite sur deux. Cela s'accompagne bien évidemment, comme cela avait été annoncé par le président de la République, d'un retour aux agents à 50 %.
C'est aussi « 0 valeur » pour les budgets d'intervention et de fonctionnement des différents ministères. Il faut naturellement faire des choix, par nature très compliqué. J'ai rencontré tous les ministres, d'abord de manière bilatérale, puis avec le Premier ministre. Nous avons aussi disposé depuis un an de l'enceinte de discussion inédite qu'offrait les nombreuses réunions RGPP : c'est ce qui nous a permis d'aller au fond des sujets, et pour 3 ans. On me demande souvent où est la RGPP dans le budget. Et bien précisément là, c''est-à-dire partout. Cette démarche est le creuset du budget triennal.
Enfin, parmi les dépenses, il y a naturellement des priorités :
- La première d'entre elle, l'enseignement supérieur et la recherche dont nous nous sommes engagés à augmenter de 1,8 Md euros par an les crédits ;
- La Justice et plus particulièrement l'administration pénitentiaire.
Par ailleurs, compte tenu des besoins en équipement de la Défense, on peut dire, comme l'a d'ailleurs dit Hervé Morin, que le budget d'équipement de la Défense est devenu une 'quasi-priorité'. La loi de finances pour 2009 sera aussi la première traduction du Grenelle de l'environnement.
Comme il faut financer ces priorités avec une enveloppe constante, il est évident que certains budgets doivent baisser. Il n'y a eu aucun tabou dans nos discussions. Même dans les ministères prioritaires, la RGPP permet de rationnaliser les dépenses. Nous avons aussi exploré les pistes de ressources extrabudgétaires, comme les partenariats public-privé, ou la création de foncières immobilières.
Même si je n'ai pas ce soir les montants "plafonds" par missions arrêtés à l'euro près, je vous confirme que nous touchons au but [et j'ai la ferme intention de vous les présenter en séance plénière dès mardi prochain]. Préparer un budget triennal prend un peu plus de temps quand c'est la première fois. C'est une avancée, je pense que nous partageons tous cette opinion : cela donne plus de visibilité aux gestionnaires, cela oblige à articuler les réformes et leurs conséquences financière sur trois ans. Mais c'est par conséquent plus compliqué que de faire un budget annuel. Cela interdit aussi, par construction, les "astuces" parfois utilisées par le passé pour boucler le budget, comme de repousser une dépense en partie sur l'année suivante. Je suis résolu à lutter contre les sous-budgétisations chroniques. [Je vous donne rendez-vous dès mardi prochain pour rediscuter des résultats en détail.]
Je voudrais en venir maintenant à la sécurité sociale.
Pour parvenir à l'équilibre du régime général en 2011, il faut impérativement que l'assurance maladie soit également à l'équilibre d'ici là. Les caisses d'assurance maladie viennent de nous faire des propositions d'économies pour 2009. Il y a beaucoup de choses intéressantes et nous allons évidemment étudier en détail chacune de ces propositions.
Au-delà du détail des mesures, je retiens un message fort des propositions de l'UNCAM : il existe des marges d'efficience importantes dans notre système qui rendent possible le retour à l'équilibre. [Le Haut Conseil pour l'avenir de l'assurance maladie, auquel vous appartenez Monsieur le prédisent de la commission des Affaires sociales, le rappelle également régulièrement]. C'est le sens de la politique que nous voulons mener : traquer les abus, les gaspillages, les dépenses inutiles ou redondantes. Comme je l'ai dit, les rencontres que Roselyne Bachelot et moi-même avons commencées à avoir avec les mutuelles et les partenaires sociaux nous permettrons de disposer d'un éventail de propositions à partir duquel nous prendrons nos responsabilités
Ce qui est en jeu, ce n'est pas simplement l'amélioration du solde des finances publiques. C'est bien l'avenir de notre système d'assurance maladie, un système généreux qui permet la prise en charge à 100 % des plus malades et un très bon niveau de couverture sociale pour tous les autres. C'est ce système que nous voulons conserver sans en rejeter le coût sur nos enfants et nos petits-enfants, ce qui serait injuste et immoral. Voilà ce qui va se jouer dans les semaines qui viennent.
Par ailleurs, la protection sociale a réalisé un important effort de couverture du risque chômage quand ce risque était élevé. La baisse du chômage doit en retour pouvoir être mise à profit pour baisser les cotisations et permettre ainsi, à taux de prélèvements constant, une hausse des cotisations retraite. Dès 2009, ce mouvement doit être engagé.
Mais l'amélioration de la branche vieillesse dépendra principalement de l'évolution de l'emploi des seniors, des âges de cessation d'activité et de liquidation. Pour l'emploi des seniors, des concertations ont été engagées en mai et juin et le gouvernement a pris ses responsabilités, en annonçant la majoration de la surcote dès la première année et la libéralisation du cumul emploi-retraite pour ceux qui ont atteint le taux plein, en fermant progressivement la solution de facilité des préretraites financées sur fonds publics, en taxant les préretraites d'entreprise, et en interdisant le recours aux mises à la retraite d'office. Il faut aussi que les comportements changent effectivement, que les entreprises s'impliquent davantage encore dans une gestion active des âges : ce n'est que par une mobilisation collective que nous réussirons.
Je veux aussi continuer à clarifier les relations entre l'État et la sécurité sociale.
L'année dernière, j'ai apuré la dette de l'État envers la sécurité sociale qui se montait à 5,1 Md euros fin 2006. Je suis en train d'étudier toutes les options pour régler la dette qui s'est recréée en 2007. Mais il faut aussi traiter le mal à la racine : dans le cadre du budget pluriannuel, je tiens à une juste budgétisation des dépenses de l'État compensant les dispositifs gérés par la sécurité sociale.
Par ailleurs, la dette sociale actuellement à l'ACOSS sera transférée à la CADES. Nous utiliserons pour ce faire les ressources liées aux excédents du Fonds de solidarité vieillesse. Nous traiterons également la question du FFIPSA, à la fois du point de vue de son déficit, mais aussi de sa dette.
Je voudrais ajouter un mot sur les collectivités locales. J'y reviendrai plus longuement lors de la séance plénière : comme vous le savez, il y a demain à Matignon une réunion de la conférence nationale des exécutifs. Je rappellerai simplement ce soir que l'effort de maitrise de la dépense publique doit être partagé. Il est illusoire de vouloir réussir sans la participation de tous. L'ensemble des transferts de l'État aux collectivités locales, quand on prend en compte tous les types de transferts différents, représente un montant de plus de 90 Md euros. C'est énorme. On comprend aisément qu'on ne peut pas exiger un effort sans précédent sur les autres dépenses de l'État, sans réfléchir aux moyens de rendre l'évolution de cette masse compatible avec la progression des dépenses de l'État. Encore une fois, nous y reviendrons plus longuement très bientôt.
Après cette présentation des enjeux et des orientations pour l'État, la Sécurité sociale et les collectivités locales, je voudrais pour finir revenir sur deux importants sujets de gouvernance : la loi de programmation des finances publiques, et la maitrise des niches fiscales et sociales.
La révision de la Constitution a été l'occasion d'ouvrir un large débat sur l'opportunité d'inscrire dans la loi fondamentale une règle de finances publique, et si oui, laquelle. Je ne reviendrais pas ici sur les débats nourris qui ont eu lieu. Nous avons d'ailleurs dans un très fructueux groupe de travail oeuvré de conserve, notamment avec vos rapporteurs généraux, pour parvenir à des conclusions dont s'inspire largement l'amendement actuellement adopté.
Le résultat auquel nous sommes pour l'instant parvenu me parait optimal : une loi de programmation des finances publiques, qui s'inscrit dans un objectif d'équilibre. Car il ne suffit pas de dire "il faut être à l'équilibre", il faut également dire comment on y arrive. C'est, de mon point de vue, la partie la plus difficile...
Ainsi, les objectifs que je vous ai décrits seront déclinés à la rentrée dans une loi de programmation pluriannuelle des finances publiques. Celle-ci permettra de définir une stratégie d'ensemble cohérente, dépassant la vision limitée qu'offrent aujourd'hui les débats annuels sur le PLF et le PLFSS.
J'ajoute que l'élaboration, puis le vote, des lois de programmation des finances publiques permettra de pallier la situation actuelle, où les programmes de stabilité adressés chaque année à la Commission européenne ne sont pas soumis au Parlement et n'ont pas, dès lors, la portée politique suffisante pour encadrer l'action publique.
Cette solution - objectif d'équilibre, loi de programmation pluriannuelle - est à la fois très structurante, très opérationnelle, très « engageante » politiquement, et tout à fait complémentaire avec les réformes menées. Car le chemin que ces lois décriront découlera de l'ensemble des réformes que nous mettons en oeuvre.
Un autre sujet me tient à coeur, tout autant que vos deux commissions : c'est le sujet des niches fiscales et sociales. Je tiens à saluer tout particulièrement les deux excellents rapports auxquels nombre de députés présents dans cette salle ont participé, et dont Didier Migaud et Yves Bur ont été les rapporteurs. Nos discussions se poursuivent bien sûr, mais disons d'emblée que je suis très favorable à nombres de vos propositions.
Comme vous le constatez dans vos rapports, et nous le faisons également dans le rapport que je viens de vous remettre, le nombre de niches et leur montant est devenu un véritable enjeu de finances publiques. C'est pourquoi le Premier ministre a décidé lors de la dernière conférence nationale des finances publiques qu'elles seraient limitées dans le temps, et soumises à une évaluation systématique. C'est pourquoi aussi j'ai discuté lors de mes rencontres bilatérales avec les ministres non seulement des dépenses budgétaires, mais aussi des dépenses fiscales ou des exonérations de charges sociales. Tout cela pèse de la même façon sur le déficit, il faut donc en discuter de la même façon.
En tant que ministre des comptes, j'avais considéré avec sympathie l'initiative de vos collègues du Sénat sur l'amendement à la révision de la Constitution qui nécessitait une validation des dispositifs de nature fiscale ou sociale prises par des lois ordinaires par le PLF et PLFSS. Je crois savoir qu'il en était de même pour vous. Mais je comprends que la commission des lois y voit des obstacles juridiques.
Il nous faut alors poursuivre l'idée peut-être un peu différemment. Sur les dépenses fiscales, et les exonérations diverses et variées de charges sociales, j'envisage donc plusieurs actions, et ce dès le PLF et le PLFSS 2009 :
- nous améliorerons la qualité de l'information du Parlement, en récapitulant de façon claire toutes les décisions prises à ce sujet dans l'année dans le PLF et le PLFSS ;
- nous instaurerons un objectif de dépenses fiscales dans le PLF, probablement de manière indicative à ce stade. Ses modalités restent toutefois à définir et je fais étudier un objectif analogue pour les exonérations sociales dans le PLFSS.
Je reste bien entendu ouvert à la discussion sur ces sujets.
Pour conclure, nous sommes face à une situation inédite pour nos dépenses publiques : la dynamique de charge d'intérêt et celle des pensions accentuent les contraintes qui pèsent sur les autres dépenses, qu'il s'agisse de la masse salariale ou des dépenses d'intervention. Il est donc plus que jamais indispensable de réaffirmer la maîtrise de la dépense publique et d'améliorer son efficience. Nous nous en donnons pleinement les moyens, avec la RGPP et les discussions qui s'engagent dans la sphère sociale, avec le budget triennal, avec la maitrise des niches et avec la loi de programmation des finances publiques. C'est cette alliance de réformes de structures profondes et de règles de gouvernance efficaces qui nous permettront de réussir.
Je vous remercie.
Source http://www.budget.gouv.fr, le 10 juillet 2008