Interview de M. Yves Jégo, secrétaire d'Etat chargé de l'outre-mer, dans "Challenges" du 14 mai 2008, sur la correction des effets des mécanismes de la défiscalisation en outre-mer.

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Challenges : Quel sera l'impact sur la santé économique de l'Outre-mer de la réduction, supérieure à une centaine de millions (si j'ai bien lu) des transferts économiques générés par la réduction, telle qu'elle est envisagée, des avantages fiscaux ?
Yves Jégo : La défiscalisation est ancrée dans l'histoire du développement des départements et collectivités d'Outre-mer puisque les premières mesures remontent à 1952. Aujourd'hui, les investissements liés à ces dispositifs dépassent largement le milliard d'euros chaque année. C'est donc un impact fort sur l'économie des Outre-mers. Ces dispositifs ont fait leur preuve et doivent être maintenus. Le Gouvernement envisage seulement d'en gommer les excès en plafonnant l'avantage fiscal afin d'éviter que quelques gros contribuables n'échappent totalement par ce moyen à l'impôt. Il faut savoir que ce sont environ 10 000 contribuables qui participent à ce mécanisme via les investissements dits productifs qui concernent le développement de l'activité économique et l'on estime à 30 000 ceux qui bénéficient des avantages fiscaux liés à la construction de logement.
Challenges : Plus généralement, au cours des années précédentes, plusieurs rapports parlementaires ont conclu à l'utilité des mesures de défiscalisation. Existe-t-il de nouveaux éléments, ou un nouveau rapport sur les coûts/bénéfices de ces mesures, qui justifieraient leur suppression ?
Yves Jégo : Il ne s'agit en aucun cas de supprimer les mécanismes de défiscalisation en Outre-mer mais d'en corriger les excès au profit exclusif de certains contribuables. La loi Girardin qui est le dernier texte législatif de référence a d'ailleurs limité dans le temps ces mesures avec une échéance en 2017 tout en prévoyant une évaluation régulière de l'impact économique.
Challenges : N'y a-t-il pas un problème à vouloir modifier la loi cadre (sur le Girardin), puis, dans le même temps et en parallèle, à vouloir modifier tout l'édifice des dispositifs de défiscalisation ?
Yves Jégo : Le Gouvernement souhaite faire deux choses faciles à comprendre : d'abord plafonner pour un foyer fiscal les avantages qu'il peut retirer de ces dispositifs de défiscalisation. Ensuite, dans le cadre de la future loi de développement des Outre-mers, qui sera présentée prochainement au conseil des ministres, nous souhaitons réorienter l'épargne fiscale vers le logement social afin de rattraper le retard considérable pris dans ce secteur vital pour l'avenir des territoires. C'est d'ailleurs la meilleure preuve de notre attachement à ces mécanismes de défiscalisation que nous voulons rendre plus justes et plus efficaces en les recentrant au profit des secteurs véritablement prioritaires pour la vie des ultra-marins.
Challenges : Que répondez-vous à des parlementaires et à des politiques qui, comme Victorin Lurel, dénoncent la menace d'une "suppression du ministère de l'outre-mer" et le non-respect de la parole donnée par le candidat Sarkozy sur le maintient des avantages fiscaux de l'Outre-mer ?
Yves Jégo : A défaut de propositions pour l'avenir des Outre-mers, le parti socialiste semble désormais se complaire dans l'outrance et colporte des contre vérités. L'avenir des Outre-mers mérite mieux ! Le parti socialiste est devenu un parti conservateur qui refuse toute idée de changement. C'est bien attristant quand on mesure, comme je le fais depuis deux mois, les attentes des habitants de nos territoires ultra-marins. Avec Michèle Alliot-Marie, nous avons souhaité réformer en profondeur l'administration du Secrétariat d'Etat à l'Outre-mer dont l'organisation actuelle date d'il y a 30 ans. Il s'agit tout simplement de rendre l'action de l'Etat plus efficace. Quant aux avantages fiscaux ils seront bien maintenus. Je le redis même si nous voulons les plafonner afin de les rendre plus justes. Il n'y aura donc ni suppression ni renoncement aux promesses.
Source http://www.outre-mer.gouv.fr, le 18 août 2008