Interview de M. Yves Jégo, secrétaire d'Etat chargé de l'outre-mer dans "Courrier sud" du 31 mai 2008, sur son premier voyage en Nouvelle-Calédonie et sur le respect des engagements des accords de Nouméa et des contrats de développement.

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Média : Courrier Sud

Texte intégral

Courrier Sud : Dans quel état d'esprit abordez-vous votre premier voyage officiel en Nouvelle-Calédonie ?
Yves Jégo : C'est mon 8ème déplacement en deux mois et j'étais impatient de découvrir la Nouvelle-Calédonie. J'aborde ce voyage avec beaucoup curiosité. Ce territoire a connu des drames qui ont failli l'entraîner dans la guerre civile. A cette occasion je veux essayer de mieux comprendre tout cela en étant attentif a chacun. Je suis heureux que cette visite coïncide avec la période anniversaire des fameux accords qui ont ouvert un nouveau chemin pour l'avenir des calédoniens.
Courrier Sud : « Je crois à une démarche politique fondée sur le consensus, le respect des engagements et la recherche constante de la volonté de vivre ensemble », avez-vous déclaré fin avril au Sénat lors du colloque consacré aux Accords de Matignon-Oudinot et de Nouméa. Pensez-vous que les partis politiques calédoniens s'inscrivent tous dans cette dynamique ?
Yves Jégo : La recherche du « vivre ensemble » est l'essence même de la politique. Cette réalité du « destin commun » prend évidemment en Nouvelle Calédonie une dimension toute particulière. Je vais donc rencontrer les partis politiques pour leur redire combien l'Etat est attaché au respect des engagements et à la recherche permanente du consensus. Le respect des engagements est essentiel car il ne peut y avoir de processus durable sans continuité. Or, au gré des alternances politiques, il est primordial que la parole qui a été donnée soit respectée, c'est pour cela que l'Etat est non seulement l'arbitre des Accords passés mais aussi un partenaire dont le rôle consiste à préserver les équilibres pour garantir la stabilité d'un avenir qui reste évidement a écrire.
Courrier Sud : A ce colloque, vous vous êtes également positionné comme le garant de l'esprit et de la lettre de l'Accord de Nouméa. Quelle sera votre attitude face à ceux qui souhaitent remettre en cause certaines dispositions du processus ?
Yves Jégo : Je vous rappelle que cet Accord a été approuvé par plus de 70% de calédoniens, et il est un principe « constitutionnel » acquis et accepté de tous qui dispose que « ce qui a été fait par le peuple, ne peut être défait que par le peuple ». L'Etat sera donc le garant que la parole du peuple sera toujours respectée.
Courrier Sud : Jusqu'où l'Etat se portera-t-il garant de l'Accord de Nouméa dans le vaste chantier entamé sur les transferts de compétences ?
Yves Jégo : L'Accord de Nouméa a été signé par trois partenaires : l'Etat, les partisans du maintien du lien avec à la France et ceux favorables à l'indépendance.
Dès lors, chacune des trois parties est garante de l'Accord, même s'il est clair que l'Etat a, dans ce cadre, un rôle particulier car il est tout à la fois partenaire de cet Accord, mais il en est aussi arbitre. Ceci étant, je suis partisan d'un dialogue ouvert, approfondi et permanent entre chacune des parties afin de parfaire cette voie juridique si original au sein de notre République. Soyons sans tabou, le champ de possibles reste ouvert pour peu et c'est la une condition essentielle qu'il repose sur une démarche consensuelle
Courrier Sud : Dans sa « Lettre aux Calédoniens », le président de la République Nicolas Sarkozy s'est engagé à « préserver la dynamique des contrats de développement ». Or, le retard de l'Etat sur les deux dernières générations de contrats (2000-2005 et 2006-2010) s'élève à plus de 4 milliards de francs. Allez-vous tout mettre en oeuvre pour combler ce retard ?
Yves Jégo : La vocation des contrats de développement est de participer au rééquilibrage territorial et au développement harmonieux de la Nouvelle-Calédonie. Je vous annonce que l'ensemble des dettes constatées au 31 décembre 2007 au titre des contrats 2000-2005, soit 40,7 Meuros, a été réglé au 31 mars 2008. Une nouvelle génération de contrats de développement a été signée pour la période 2006 - 2010 pour un montant total de 777,7 millions euros, dont une part Etat de 393,4 millions euros soit 50,6% du montant total.
Sur cette nouvelle génération de contrats, l'Etat a souhaité porter son effort sur des opérations structurantes privilégiant une logique de projets, portant sur l'habitat, la continuité territoriale et la lutte contre le chômage et l'exclusion. Ces différents contrats sont aujourd'hui engagés à 17,14%, soit 67 Meuros et mandatés à hauteur de 32% des engagements pris, soit près 22 Meuros. Je m'engage à ce que l'exécution du financement des contrats de développement soit très nettement améliorée à l'avenir.
Courrier Sud : La loi programme pour l'Outre-Mer, qui sera présentée devant le parlement dans les prochains mois, prévoit un soutien accru à la construction de logements sociaux dans les Dom-Tom. La Nouvelle-Calédonie sera-t-elle bénéficiaire de ce soutien et sous quelle forme ?
Yves Jégo : Le projet du Gouvernement est de recentrer les dépenses de l'Etat sur un plan de relance du logement social outre-mer, compte tenu des besoins très importants exprimés par nos concitoyens.
Pour autant, ce nouveau mécanisme de défiscalisation du logement social doit bien sûr être adapté aux collectivités du pacifique.
J'ai rencontré à Paris comme au cours de mes déplacements de nombreux élus et socio-professionnels afin de travailler sur ces dispositifs. Le projet de loi adressé pour avis à la Nouvelle-Calédonie au début de ce mois comporte déjà des avancées importantes mais si j'ai entrepris un marathon de concertation depuis ma nomination le 19 mars dernier c'est bien pour faire de cette future +loi un outil utile a tous les territoires. Nous inclurons donc dans cette démarche les attentes de la Nouvelle-Calédonie.
Source http://www.outre-mer.gouv.fr, le 18 août 2008