Texte intégral
L'ordre du jour appelle aujourd'hui l'examen de cette proposition de loi déposée par Mme le Sénateur BRICQ. Cela nous permet d'aborder un sujet sur lequel le Gouvernement et le Parlement ont entamé une réflexion depuis plusieurs mois : la question de la rémunération des dirigeants.
Aujourd'hui, le groupe socialiste nous présente un texte sur cette question et il se joint ainsi aux efforts que mènent le Président de la République et le Gouvernement depuis un an et demi.
Est-ce qu'il s'agit d'un texte d'affichage, chacun sera juge.
Je remercie le Président Jean-Jacques HYEST d'avoir voulu mener un travail d'expertise exemplaire dans des délais très courts.
La rémunération des dirigeants d'entreprises est un sujet auquel nos concitoyens attachent une légitime attention, et ils sont à juste titre choqués de voir que ces rémunérations sont parfois dépourvues de tout lien avec la performance de l'entreprise. Pour ma part, je l'ai dit, je ne veux plus qu'il soit possible que des dirigeants d'entreprise puissent partir avec un parachute de 6 millions d'euros après avoir détruit de l'emploi et fait chuter la valeur des actions de leur entreprise de 57%.
Le gouvernement travaille depuis plusieurs mois sur ce sujet. Vous le savez, nous avons fait de la valeur travail l'élément central de la politique que nous menons depuis mai 2007. Et pour revaloriser le travail, il est évident que les rémunérations des dirigeants doivent être en rapport avec leur performance.
Les excès de quelques uns sapent la confiance que nous devons placer dans nos entreprises et nos entrepreneurs. Ne nous y trompons pas, il ne s'agit pas aujourd'hui de désigner à la vindicte les entrepreneurs qui créent des richesses et des emplois. Les excès de quelques-uns ne peuvent nous faire oublier que la plupart des chefs d'entreprises, dans les petites, les moyennes, mais aussi dans les plus grandes entreprises, ont le souci de créer des richesses, de développer la solidarité dans l'entreprise et de soutenir la cohésion sociale. Car dans une société comme la nôtre, si vous voulez partager les richesses, il faudra aussi les créer.
Depuis plus d'un an, nous travaillons à moraliser les rémunérations des dirigeants d'entreprises. En août 2007, dans la loi TEPA, nous avons imposé aux entreprises que les conventions réglementées pour indemnités de départ, ce qu'on appelle les fameux parachutes dorés, soient soumises pour la première fois à des critères de performance votés en assemblée générale et vérifiés par les conseils d'administration. C'était l'an dernier et cela a été voté par cette majorité.
Aujourd'hui, nous sommes tous d'accord sur un point : nous devons passer à une nouvelle étape qui prenne en compte l'ensemble des éléments de rémunération. Reste à savoir quelle doit être la nature de cette nouvelle étape. Une étape législative immédiate et précipitée comme le groupe socialiste nous le propose aujourd'hui ? Une auto-régulation du « laisser faire » ? On a vu très clairement par le passé quelles en étaient les limites.
Or, le Président de la République a proposé une autre voie. Il a souligné à Toulon que les excès du capitalisme sont un obstacle au développement d'un capitalisme d'entrepreneurs créateur de richesses.
A cette occasion, il avait appelé à de nouvelles règles en matière de rémunération des dirigeants. La règle du jeu était claire : soit les entreprises prenaient des engagements forts et les mettaient en oeuvre, soit le gouvernement prenait des dispositions législatives. Quand ? Au tout début de l'année 2009.
En réponse, le MEDEF et l'AFEP ont proposé un code de gouvernement d'entreprise, qui aborde l'ensemble des éléments de rémunération et les encadre de façon stricte. Avec ce nouveau code et le dispositif prévu par la loi TEPA, la France dispose désormais de l'ensemble de règles le plus exigeant au sein des pays de l'OCDE, et de loin.
Il faut maintenant que les entreprises appliquent ces engagements : avoir des recommandations c'est bien, avoir des délibérations de conseils d'administration, c'est mieux.
Le gouvernement a donc demandé aux 688 conseils d'administration concernés d'adhérer à ce code avant la fin de l'année, puis de veiller à son application rigoureuse. Cela engagera les administrateurs et les actionnaires. L'Autorité des Marchés Financiers (AMF) établira un rapport à partir des délibérations des conseils d'administration et suivra chaque année leur mise en oeuvre. Si ce rapport montre que le code n'est pas appliqué de façon satisfaisante, le Gouvernement présentera un projet de loi au Parlement début 2009.
Le Gouvernement a en outre décidé d'agir immédiatement : vous avez ainsi adopté lors de l'examen du projet de loi « Revenus du travail » l'amendement « stock-options pour tous ». Ainsi, lorsque dans une entreprise des stock-options ou des actions gratuites seront attribuées aux dirigeants, il faudra désormais que l'ensemble des salariés du groupe bénéficient d'actions gratuites, de stock-options, d'intéressement ou de participation. C'est une mesure à laquelle nous pouvons être tous particulièrement attachés parce qu'elle bénéficie à tous les salariés. Il y a les grands discours et il y a les actions très concrètes.
La proposition de loi du groupe socialiste s'inspire en grande partie des propositions patronales. Mais je m'étonne que la proposition n'aille pas aussi loin que les propositions patronales.
Ainsi, sur la possibilité de cumuler contrat de travail et mandat social, vous voulez interdire à un administrateur de conclure un contrat de travail avec la société concernée. Mais c'est en réalité l'inverse qui se produit : dans la majorité des cas de cumul, c'est un salarié qui devient administrateur. Pourquoi n'avez-vous pas visé ce cas d'espèce précis ?
Concernant les stock-options, vous nous proposez d'augmenter la contribution que nous avons créée l'année dernière. Quelle ironie : c'est un gouvernement socialiste qui aura permis le développement des stock-options, et c'est notre gouvernement qui les aura moralisées !
De plus, vous faites des propositions pour réguler l'attribution, l'exercice et la cession des stock-options, mais il existe d'autres façons de les réguler. Laissons aussi aux assemblées générales et aux conseils d'administration le soin de déterminer celle qui est la plus appropriée à leur entreprise. Car nous avons aussi pris nos responsabilités. Et pourquoi n'avez-vous pas visé les entreprises à conseils de surveillance et directoires.
Comme l'a rappelé le Sénateur Zocchetto, votre proposition interfère avec les débats en cours du PLF et du PLFSS. Un amendement au PLF a d'ores et déjà été adopté à l'Assemblée nationale, qui permet d'exclure de la déductibilité du résultat imposable les indemnités de départ dépassant 200000 euros. De plus, un amendement au PLFSS voté à l'Assemblée nationale prévoit que les indemnités supérieures à 1 million d'euros seront soumises aux cotisations sociales dès le premier euro. Ces deux propositions seront prochainement soumises au vote de la haute assemblée.
Pourquoi légiférer ? Votre manque de sérénité prouve que c'est un texte d'affichage.
Cette proposition a évidemment des objectifs louables, le Gouvernement les partage largement mais le choix de légiférer dès aujourd'hui, au risque de la précipitation, menace l'efficacité de l'action que nous avons décidé de mener.
Dans ces conditions, nous recommandons à la haute Assemblée de suivre les conclusions de la commission des lois et d'adopter la motion de renvoi en commission. Comptez sur le Gouvernement pour être particulièrement attentif à ce que les engagements pris par les entreprises soient pleinement respectés. À défaut, je le redis, nous présenterons un projet de loi.
Mesdames et Messieurs les Sénateurs, le Gouvernement est déterminé à mener à bien la moralisation des rémunérations des dirigeants d'entreprise. C'est bien un capitalisme d'entrepreneurs que le gouvernement entend promouvoir, pour remettre la responsabilité au coeur de notre économie.
Source http://www.travail-solidarite.gouv.fr, le 5 novembre 2008
Aujourd'hui, le groupe socialiste nous présente un texte sur cette question et il se joint ainsi aux efforts que mènent le Président de la République et le Gouvernement depuis un an et demi.
Est-ce qu'il s'agit d'un texte d'affichage, chacun sera juge.
Je remercie le Président Jean-Jacques HYEST d'avoir voulu mener un travail d'expertise exemplaire dans des délais très courts.
La rémunération des dirigeants d'entreprises est un sujet auquel nos concitoyens attachent une légitime attention, et ils sont à juste titre choqués de voir que ces rémunérations sont parfois dépourvues de tout lien avec la performance de l'entreprise. Pour ma part, je l'ai dit, je ne veux plus qu'il soit possible que des dirigeants d'entreprise puissent partir avec un parachute de 6 millions d'euros après avoir détruit de l'emploi et fait chuter la valeur des actions de leur entreprise de 57%.
Le gouvernement travaille depuis plusieurs mois sur ce sujet. Vous le savez, nous avons fait de la valeur travail l'élément central de la politique que nous menons depuis mai 2007. Et pour revaloriser le travail, il est évident que les rémunérations des dirigeants doivent être en rapport avec leur performance.
Les excès de quelques uns sapent la confiance que nous devons placer dans nos entreprises et nos entrepreneurs. Ne nous y trompons pas, il ne s'agit pas aujourd'hui de désigner à la vindicte les entrepreneurs qui créent des richesses et des emplois. Les excès de quelques-uns ne peuvent nous faire oublier que la plupart des chefs d'entreprises, dans les petites, les moyennes, mais aussi dans les plus grandes entreprises, ont le souci de créer des richesses, de développer la solidarité dans l'entreprise et de soutenir la cohésion sociale. Car dans une société comme la nôtre, si vous voulez partager les richesses, il faudra aussi les créer.
Depuis plus d'un an, nous travaillons à moraliser les rémunérations des dirigeants d'entreprises. En août 2007, dans la loi TEPA, nous avons imposé aux entreprises que les conventions réglementées pour indemnités de départ, ce qu'on appelle les fameux parachutes dorés, soient soumises pour la première fois à des critères de performance votés en assemblée générale et vérifiés par les conseils d'administration. C'était l'an dernier et cela a été voté par cette majorité.
Aujourd'hui, nous sommes tous d'accord sur un point : nous devons passer à une nouvelle étape qui prenne en compte l'ensemble des éléments de rémunération. Reste à savoir quelle doit être la nature de cette nouvelle étape. Une étape législative immédiate et précipitée comme le groupe socialiste nous le propose aujourd'hui ? Une auto-régulation du « laisser faire » ? On a vu très clairement par le passé quelles en étaient les limites.
Or, le Président de la République a proposé une autre voie. Il a souligné à Toulon que les excès du capitalisme sont un obstacle au développement d'un capitalisme d'entrepreneurs créateur de richesses.
A cette occasion, il avait appelé à de nouvelles règles en matière de rémunération des dirigeants. La règle du jeu était claire : soit les entreprises prenaient des engagements forts et les mettaient en oeuvre, soit le gouvernement prenait des dispositions législatives. Quand ? Au tout début de l'année 2009.
En réponse, le MEDEF et l'AFEP ont proposé un code de gouvernement d'entreprise, qui aborde l'ensemble des éléments de rémunération et les encadre de façon stricte. Avec ce nouveau code et le dispositif prévu par la loi TEPA, la France dispose désormais de l'ensemble de règles le plus exigeant au sein des pays de l'OCDE, et de loin.
Il faut maintenant que les entreprises appliquent ces engagements : avoir des recommandations c'est bien, avoir des délibérations de conseils d'administration, c'est mieux.
Le gouvernement a donc demandé aux 688 conseils d'administration concernés d'adhérer à ce code avant la fin de l'année, puis de veiller à son application rigoureuse. Cela engagera les administrateurs et les actionnaires. L'Autorité des Marchés Financiers (AMF) établira un rapport à partir des délibérations des conseils d'administration et suivra chaque année leur mise en oeuvre. Si ce rapport montre que le code n'est pas appliqué de façon satisfaisante, le Gouvernement présentera un projet de loi au Parlement début 2009.
Le Gouvernement a en outre décidé d'agir immédiatement : vous avez ainsi adopté lors de l'examen du projet de loi « Revenus du travail » l'amendement « stock-options pour tous ». Ainsi, lorsque dans une entreprise des stock-options ou des actions gratuites seront attribuées aux dirigeants, il faudra désormais que l'ensemble des salariés du groupe bénéficient d'actions gratuites, de stock-options, d'intéressement ou de participation. C'est une mesure à laquelle nous pouvons être tous particulièrement attachés parce qu'elle bénéficie à tous les salariés. Il y a les grands discours et il y a les actions très concrètes.
La proposition de loi du groupe socialiste s'inspire en grande partie des propositions patronales. Mais je m'étonne que la proposition n'aille pas aussi loin que les propositions patronales.
Ainsi, sur la possibilité de cumuler contrat de travail et mandat social, vous voulez interdire à un administrateur de conclure un contrat de travail avec la société concernée. Mais c'est en réalité l'inverse qui se produit : dans la majorité des cas de cumul, c'est un salarié qui devient administrateur. Pourquoi n'avez-vous pas visé ce cas d'espèce précis ?
Concernant les stock-options, vous nous proposez d'augmenter la contribution que nous avons créée l'année dernière. Quelle ironie : c'est un gouvernement socialiste qui aura permis le développement des stock-options, et c'est notre gouvernement qui les aura moralisées !
De plus, vous faites des propositions pour réguler l'attribution, l'exercice et la cession des stock-options, mais il existe d'autres façons de les réguler. Laissons aussi aux assemblées générales et aux conseils d'administration le soin de déterminer celle qui est la plus appropriée à leur entreprise. Car nous avons aussi pris nos responsabilités. Et pourquoi n'avez-vous pas visé les entreprises à conseils de surveillance et directoires.
Comme l'a rappelé le Sénateur Zocchetto, votre proposition interfère avec les débats en cours du PLF et du PLFSS. Un amendement au PLF a d'ores et déjà été adopté à l'Assemblée nationale, qui permet d'exclure de la déductibilité du résultat imposable les indemnités de départ dépassant 200000 euros. De plus, un amendement au PLFSS voté à l'Assemblée nationale prévoit que les indemnités supérieures à 1 million d'euros seront soumises aux cotisations sociales dès le premier euro. Ces deux propositions seront prochainement soumises au vote de la haute assemblée.
Pourquoi légiférer ? Votre manque de sérénité prouve que c'est un texte d'affichage.
Cette proposition a évidemment des objectifs louables, le Gouvernement les partage largement mais le choix de légiférer dès aujourd'hui, au risque de la précipitation, menace l'efficacité de l'action que nous avons décidé de mener.
Dans ces conditions, nous recommandons à la haute Assemblée de suivre les conclusions de la commission des lois et d'adopter la motion de renvoi en commission. Comptez sur le Gouvernement pour être particulièrement attentif à ce que les engagements pris par les entreprises soient pleinement respectés. À défaut, je le redis, nous présenterons un projet de loi.
Mesdames et Messieurs les Sénateurs, le Gouvernement est déterminé à mener à bien la moralisation des rémunérations des dirigeants d'entreprise. C'est bien un capitalisme d'entrepreneurs que le gouvernement entend promouvoir, pour remettre la responsabilité au coeur de notre économie.
Source http://www.travail-solidarite.gouv.fr, le 5 novembre 2008